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Jeudi 11 décembre 2025, retrouvez Louise Duvernois (Associée, Veil Jourde), Philippe Glaser (Associé, Taylor Wessing) et Prune Junguenet (Avocate, cabinet ASK) dans LEX INSIDE, une émission présentée par Arnaud Dumourier.
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00:00Générique
00:30Bonjour, bienvenue dans Lex Inside, l'émission qui donne du sens à l'actualité juridique du droit, du droit et rien que du droit.
00:39Au programme de ce numéro, on parlera du droit de se taire dans les procédures de sanction de l'AMF avec mon invité Philippe Glazer, associé chez Taylor Vessing.
00:49On parlera ensuite de l'encadrement des loyers avec Louise Duvernoy, associé chez Feijord.
00:56Et enfin, on parlera du litige au prud'homme entre Kylian Mbappé et le Paris Saint-Germain avec Prune Jinguenet, avocate chez ASC.
01:06Voilà pour les titres Lex Inside, c'est parti !
01:09Le droit de se taire est un droit fondamental en droit pénal, mais qu'en est-il dans les procédures de sanction de l'AMF ?
01:26On en parle tout de suite avec mon invité Philippe Glazer, associé chez Taylor Vessing.
01:31Philippe Glazer, bonjour.
01:33Bonjour Arnaud.
01:33Alors la première question que j'ai envie de vous poser pour démarrer, c'est qu'est-ce que le droit de se taire ?
01:39Le droit de se taire, c'est un droit fondamental reconnu par la Déclaration des droits de l'homme, qui est le droit de ne pas s'auto-incriminer, tout simplement.
01:46On le connaît bien devant le juge pénal, puisque dès la garde à vue, l'instruction ou devant la juridiction répressive, on a le droit de se taire.
01:54Et ces droits sont toujours notifiés par les officiers de police judiciaire ou par les magistrats.
01:58Et bien depuis peu de temps, finalement, devant les autorités administratives, la CNIL, à présent l'AMF, on reconnaît aussi ce droit, qui est un droit fondamental,
02:06parce qu'il peut aboutir, lorsqu'il n'est pas respecté, à des sanctions.
02:12Et il est normal, sur le plan processuel, que celui qui est poursuivi, sur le plan de manquement à la réglementation financière, qu'il ne s'auto-incrimine pas.
02:22Donc c'est un droit fondamental.
02:23Un droit fondamental, dites-vous. Qu'est-ce que les décisions récentes apportent à ce droit fondamental ?
02:32Alors, on a été assez gâtés en 2025, cette année, puisque, après avoir statué dans des conditions assez similaires pour une autre autorité administrative, la CNIL,
02:42le Conseil constitutionnel, dans le cadre de QPC, de questions prioritaires de constitutionnalité, a considéré que le droit et la protection, et donc le droit de se taire,
02:53devaient être aussi accordés à ceux qui faisaient l'objet de poursuites devant la commission des sanctions.
02:59C'était quoi le raisonnement, pour bien comprendre ?
03:01Le raisonnement, il y a eu deux décisions importantes. Une de mars dernier, qui est venue préciser les choses dans le cadre d'une enquête,
03:07où là, on ne sait pas encore, en théorie, si on va être poursuivi dans la commission des sanctions,
03:12et donc si on va être sanctionné sur le plan financier, ou faire l'objet d'interdiction de l'exercice d'une activité.
03:18Et là, le Conseil constitutionnel a considéré que, dès lors qu'il n'y avait pas de risque de poursuites acquis,
03:25ce droit de se taire n'existait pas, et ne devait donc pas être notifié à la personne concernée par l'enquête.
03:30Et ça a été le cas pour des visites domiciliaires.
03:33En revanche, quand les choses avancent, et que le Collège décide de saisir la commission des sanctions,
03:38et que donc la personne va devoir s'expliquer devant celle-ci,
03:42et bien là, le Conseil constitutionnel, il y a de cela trois mois, le 26 septembre dernier,
03:47est venu figer les choses et dire qu'il y a cette obligation, ce que ne prévoyait pas le code malétaire financier,
03:52de notifier à la personne qui est entendue, aussi bien devant le rapporteur que devant la commission des sanctions,
03:58qui a le droit de se taire, donc de ne pas s'auto-incriminer.
04:01Mais, ça n'existe pas pour les enquêtes.
04:03Alors, pourquoi justement, ça n'existe pas pour les enquêtes, ce droit de se taire ?
04:07Pour ce qui me concerne, ça me surprend un peu.
04:09Mais, il faut être patient.
04:11Il faut être patient, je pense que les choses vont évoluer.
04:14On considère, et c'est ce que dit le Conseil constitutionnel dans sa décision du 21 mars le dernier,
04:18qui concernait une enquête où une visite domiciliaire avait été réalisée,
04:24considère que cette procédure d'enquête a un seul objectif,
04:29de collecter pour les agents de l'AMF des éléments, des informations, des documents.
04:33Il n'y a donc pas, à ce stade-là, prétendument, de volonté de poursuivre l'un ou l'autre,
04:39et donc il n'y a pas de raison de notifier les droits particuliers.
04:42C'est juste prendre des documents ?
04:43C'est prendre des documents, mais c'est intéressant cette décision, si on la lit avec attention,
04:48parce qu'elle vient exiger tout de même des agents de l'AMF
04:51que s'ils viennent à interroger à l'occasion de la visite une personne,
04:56il faut respecter le principe de loyauté,
04:58c'est-à-dire ne pas profiter de cette visite,
05:00qui est autorisée par le juge des libertés et des détentions,
05:04pour obtenir des aveux ou des déclarations qui pourraient auto-incriminer la personne interrogée.
05:10Donc, même si le Conseil constitutionnel ne le dit pas expressément,
05:13on peut penser qu'il y aura une évolution dans l'avenir,
05:16même au niveau de l'enquête,
05:17où peut-être qu'un jour, le droit de se taire sera acquis.
05:20Il faut attendre une prochaine QPC ou une décision ?
05:23Il faut faire confiance aux avocats,
05:26qui sont pleins d'imagination pour retrouver les vices des procédures,
05:29et on peut penser, en effet, qu'en fonction des conditions de l'enquête,
05:35certains tenteront, devant la commission des sanctions,
05:38d'obtenir une nullité.
05:39Il faut vivre une enquête de l'AMF ?
05:41Ce n'est pas simple.
05:42Les enquêteurs font leur travail,
05:43veillent au respect de la réglementation,
05:46à ce que ceux qui ont manipulé les cours, par exemple, soient sanctionnés.
05:51Mais c'est très intrusif.
05:52Mais c'est très intrusif.
05:53Et c'est, pardon de le dire, pour l'avoir vécu, assez violent.
05:56Il y a de la pression.
05:57Il y a de la pression.
05:57Et on prépare nos clients aux enquêtes, aux auditions.
06:00Alors, on va s'intéresser aux recours en cas de non-respect du droit de se taire.
06:04Quels sont ces recours ?
06:06Ces recours, je l'ai indiqué en début d'entretien, c'est quand même un droit fondamental.
06:11On le reconnaît à tout justiciable lorsqu'il est en garde à vue, devant un juge d'instruction ou un magistrat du siège.
06:17C'est le droit de se taire.
06:18Et c'est donc fondamental pour ne pas s'auto-incriminer.
06:21Donc, bien évidemment, lorsque l'on considère que ce droit n'est pas acquis, on peut en demander la nullité.
06:28Ne nous faisons pas d'illusions, alors même que le code monétaire et financier n'a pas encore été modifié à la suite de la QPC.
06:34L'AMF, depuis début de 2024, a pris les devants.
06:37Et maintenant, lorsque les poursuites sont engagées, c'est-à-dire une notification de grief est adressée à une entité ou à une personne physique,
06:44eh bien, il lui est rappelé automatiquement qu'elle a le droit de se taire.
06:46Là où ce droit est effectif ?
06:48Il est effectif.
06:49Pas pour les enquêtes.
06:50Et c'est peut-être là, en fonction des conditions du déroulé de l'enquête,
06:53qu'on pourra espérer que les avocats fassent preuve d'imagination et soulèvent éventuellement une nullité de l'ensemble de la procédure.
07:00D'accord.
07:00Alors, certains plaident pour un alignement complet sur le droit pénal.
07:05Est-ce qu'il faut aligner les procédures de l'AMF sur les procédures de droit pénal ?
07:10Ça va dépendre.
07:11Si vous interrogez un avocat, ce que je suis, je vais vous dire oui.
07:15Je pense que c'est d'autant plus important, puisque même au niveau de l'enquête,
07:19alors même que ce droit n'est pas encore reconnu, et je l'ai indiqué,
07:22il y a quand même une certaine violence, une confrontation avec les enquêteurs de l'AMF.
07:27Quand je parle de violence, elle n'est bien sûr pas...
07:30C'est une violence morale.
07:31Mais c'est une violence morale, c'est assez impressionnant, c'est comme le garde à vue, il faut le vivre.
07:33Il faut le vivre.
07:34Et donc, je pense que là où déjà on a accordé quand même, et heureusement,
07:39le droit à la personne, entendue lors d'une enquête, d'être assistée d'un avocat, il faut aussi cela.
07:44Et d'autant plus qu'il y a une proposition de loi un peu malmenée,
07:48en ce sens que le calendrier parlementaire n'est pas concentré sur celle-ci.
07:52de loi contre la fraude financière.
07:56Qu'est-ce qu'elle prévoit ?
07:57Elle prévoit vraiment un élargissement des moyens de l'AMF,
08:01qui pourra, comme en matière pénale par exemple,
08:04utiliser de fausses identités pour obtenir des éléments,
08:10pour pouvoir, si j'ose dire, un peu s'infiltrer dans les dossiers, notamment.
08:14Donc il y a quand même des pouvoirs accrus qui sont envisagés pour l'AMF,
08:17ça ne me heurte pas puisque l'AMF est là pour garantir la stabilité du marché et les droits des investisseurs.
08:23Par contre, il faut des garanties ?
08:24Il faut des garanties, ça me semble évident.
08:25Quelle garantie au-delà de ce que vous avez dit ?
08:28Je crois que l'assistant de l'avocat, le droit de se taire sont, en mon sens, suffisantes,
08:33parce que l'avocat, c'est son rôle.
08:35Il est là pour préparer, assister son client et pouvoir lui dire, vous pouvez répondre ou pas.
08:39Et je terminerai sur ce point qui me semble extrêmement important,
08:42c'est que l'entrave qui est sanctionnée pénalement,
08:46mais aussi financièrement dans le cadre d'amendes qui sont prononcées par la Commission des sanctions,
08:50c'est un droit qui fait que lorsque vous refusez de répondre à certaines questions des enquêteurs,
08:53on peut considérer que c'est une entrave à l'enquête.
08:56Et ça, moi, en tant qu'avocat, ça me heurte parce que donner des informations, oui,
09:00mais on sait la limite, elle est ténue entre donner des informations
09:03et prendre le risque de s'auto-incriminer.
09:06Donc les droits fondamentaux, c'est la présence de l'avocat,
09:07elle est acquise et le droit de se taire.
09:09Donc vous attendez quand même des évolutions pour ces garanties en suivant ?
09:14Oui, je pense qu'elles viendront à un moment ou à un autre.
09:16Ça fait quand même moins de deux ans même que les autorités administratives
09:21sont contraintes au respect, lorsque des sanctions sont envisagées,
09:25de la notification de ce droit de se taire.
09:28Je pense qu'en matière d'enquête, pour cette phase-là,
09:31ce droit va être aussi reconnu à terme, j'en suis convaincu.
09:33On va conclure là-dessus. Merci Philippe Glazer.
09:35Je rappelle que vous êtes associé au sein du cabinet Taylor Vessing.
09:38Merci Arnaud.
09:39Tout de suite, on continue avec un sujet qui fait débat,
09:42l'encadrement des loyers.
09:54L'encadrement des loyers dans de nombreuses villes suscite des débats.
09:59On va en parler tout de suite avec mon invité, Louise Duvernois, associée au sein de Veillejourde.
10:06Louise Duvernois, bonjour.
10:07Bonjour Arnaud.
10:08Pour commencer, c'est bien de revenir sur les bases.
10:10Qu'est-ce que l'encadrement des loyers ?
10:12Alors il s'agit donc d'un dispositif expérimental qui a été institué par la loi Elan du 23 novembre 2018.
10:19Et ce dispositif expérimental a été initialement fixé pour une durée de 5 ans,
10:23qui a été prolongé jusqu'au 25 novembre 2026.
10:26Alors dans le cadre des baux d'habitation, depuis la loi Elan, le principe c'est que la fixation du loyer est libre,
10:33mais dans certaines zones tendues, avec la possibilité d'un encadrement des loyers.
10:37Et l'application de cet encadrement va être soumise à des conditions strictes.
10:40D'abord d'un point de vue du champ d'application territorial.
10:43Ça ne va s'appliquer que dans des zones tendues, telles que définies par les textes,
10:47où il y a, si vous voulez, un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande.
10:50Et puis l'application de ce dispositif va être conditionnée à une candidature de la collectivité compétente.
10:58Et si la candidature est acceptée, il y a un décret qui va venir délimiter le périmètre d'application du dispositif.
11:06Alors ce qu'il faut savoir, c'est qu'aujourd'hui sont notamment concernés Paris,
11:10une partie de la Seine-Saint-Denis, Bordeaux, Montpellier, Grenoble et ses environs,
11:14le Pays-Basque et était également concerné Lyon et Villeurbanne.
11:18Mais récemment, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté préfectoral qui encadrait les loyers dans ces villes.
11:25On a vu les zones qui sont concernées par cet encadrement des loyers.
11:28On va s'intéresser maintenant au fonctionnement.
11:30Concrètement, comment ça se passe, l'encadrement des loyers dans les zones concernées ?
11:35Alors, pour chaque territoire qui va être ainsi délimité,
11:37le préfet va chaque année déterminer trois loyers de référence par catégorie de logement et par secteur géographique.
11:45Donc il va d'abord déterminer ce qu'on appelle un loyer de référence,
11:48ensuite un loyer de référence majoré qui va correspondre au loyer de référence majoré de 20%
11:53et puis un loyer de référence minoré qui va correspondre au loyer de référence, lui, minoré de 30%.
11:59Et ces loyers vont être basés sur des données collectées par ce qu'on appelle les observatoires locaux des loyers
12:04qui sont chargés justement de recueillir les données relatives au loyer sur un certain secteur géographique.
12:09Et lors de la conclusion du bail, le loyer va être librement fixé par les parties
12:14mais dans la limite de ce qu'on appelle le loyer de référence majoré.
12:17Donc le loyer de référence majoré de 20% maximum.
12:20Après, ce qu'il faut savoir, c'est qu'il y a un complément de loyer qui peut être décidé par les parties
12:25mais uniquement si le logement va présenter des caractéristiques exceptionnelles,
12:29que ce soit en termes de confort ou en termes de localisation.
12:31Et ces caractéristiques doivent bien sûr être justifiées au bail pour éviter tout abus.
12:37Et le complément de loyer ne va pas pouvoir être possible dans certains cas de figure,
12:40notamment quand les logements ont un mauvais DPE et qu'ils sont classés F ou G.
12:46Et ce complément de loyer peut faire l'objet d'une contestation par le locataire
12:50qui ne le considère pas justifié dans un délai de 3 mois à compter la signature du bail.
12:54Alors c'est un dispositif qui est sanctionné.
12:56Donc si le bailleur ne respecte pas l'encadrement des loyers, il va s'exposer à une action en diminution de loyer de la part du locataire
13:02et évidemment à une restitution des trop perçus.
13:05Et puis le préfet peut également mettre en demeure le bailleur de se conformer aux exigences de l'encadrement des loyers.
13:13Et si le bailleur ne répond pas à cette mise en demeure, il est passible d'une amende administrative
13:18de 5 000 euros s'il est une personne physique et 15 000 euros s'il est une personne morale.
13:24Donc les sanctions ne sont pas neutres ?
13:26Non, les sanctions ne sont pas neutres et ce dispositif aujourd'hui, comme je vous le disais, est expérimental.
13:30Se pose aujourd'hui la question de sa pérennisation.
13:34Et donc à cet égard, la commission des affaires économiques a confié aux députés Lemaire et Echanise
13:39une mission dite flash d'évaluation de ce dispositif et le rapport a été rendu le 24 septembre dernier.
13:45Donc que dit ce rapport parlementaire ? Quelles sont ses préconisations ?
13:49Alors il dresse un bilan plutôt positif de l'encadrement des loyers.
13:53Il souligne que les collectivités qui l'ont mise en place sont plutôt satisfaites.
13:59Et donc ils optent, ils préconisent en fait une pérennisation de ce dispositif
14:03et ils préconisent une vingtaine de propositions qui selon eux seraient de nature en fait à améliorer ce dispositif.
14:10Premièrement, l'idée ce serait d'étendre la possibilité de l'adopter à l'ensemble des communes situées en zone tendue.
14:15Un renforcement des sanctions, mieux encadrer les compléments de loyers pour éviter les abus
14:19et décentraliser le contrôle en délégant davantage sa mise en oeuvre et le pouvoir de sanctions aux municipalités.
14:26On va s'intéresser aux acteurs de l'immobilier.
14:28Comment ils ont réagi par rapport à ces propositions ?
14:32Alors, les réactions du secteur sont assez contrastées.
14:35Il y en a une partie qui salue la clarification proposée
14:37et d'autres en fait vont considérer que c'est un peu une fuite en avant.
14:40Notamment la FNIM, dans son rapport, dans son communiqué du 24 septembre dernier,
14:46considère le dispositif, je cite, comme « inefficace, punitif et contre-productif ».
14:50Inefficace pourquoi ? Parce qu'elle soutient que l'évolution des loyers est la même en fait
14:54qu'on soit en zone encadrée ou non encadrée.
14:55Punitif parce que ça ferait peser en fait aux bailleurs la responsabilité de la crise du logement
15:01alors que pour la FNIM, la principale cause de la crise du logement finalement,
15:06c'est le déficit de construction et un manque de soutien à l'investissement locatif.
15:12Et puis contre-productif parce que l'extension et le durcissement de l'encadrement des loyers
15:17ne ferait qu'alimenter la défiance des bailleurs
15:19et donc tout ça au détriment finalement de l'offre locative privée.
15:23Alors on va s'intéresser aux suites de ce rapport.
15:26Est-ce qu'il y a eu une suite législative ?
15:29Est-ce que le législateur s'est emparé de ce rapport ?
15:31Alors c'est effectivement d'actualité Arnaud parce qu'à la suite du dépôt de ce rapport,
15:36il y a une proposition de loi qui a été déposée à l'Assemblée en octobre dernier
15:40qui s'appelle « Proposition de loi pour retrouver la confiance et l'équilibre dans les rapports locatifs ».
15:45Et cette proposition de loi a été examinée en commission
15:48et elle doit faire l'objet d'un débat prochainement,
15:51au cours du mois de décembre, à l'Assemblée nationale.
15:54Et cette proposition est fortement inspirée du contenu du rapport.
15:58Elle prévoit notamment une pérennisation du dispositif,
16:00la possibilité pour les municipalités de décider de mettre en œuvre ce dispositif
16:06sans passer par la procédure du décret préalable,
16:09l'inclusion du co-living, notamment dans le champ de l'encadrement,
16:12un renforcement de la régulation du complément loyer
16:14qui serait plafonné à un montant de 20% du loyer de référence majoré,
16:18une suppression du délit limite de trois mois qu'avait le locataire pour le contester,
16:22et puis un doublement des amendes.
16:24Et en parallèle de ça, il y a également une autre proposition de loi
16:27qui, elle, a été déposée au Sénat, très récemment, le 27 novembre dernier,
16:31qui reprend peu ou prou de manière similaire les modifications proposées
16:35par la proposition de loi actuellement à l'examen à l'Assemblée nationale,
16:40mais avec quelques petites différences d'importance.
16:45Déjà, elle propose la fixation d'un loyer maximal
16:48qui, lui, serait 10% au-dessus du loyer de référence.
16:51D'accord.
16:53Elle a mis en place un dispositif avec un enregistrement obligatoire
16:57des baux d'habitation sur une plateforme numérique dédiée
17:00pour pouvoir, justement, faciliter, en fait, le contrôle du respect du dispositif
17:05et un allongement des délais de préavis pour les congés des bailleurs en zone tendue
17:09pour éviter, vous voyez, les congés sanctions.
17:11Donc, effectivement, il faut surveiller, c'est à suivre, donc, l'actualité de ces propositions de loi.
17:16Pour terminer, est-ce qu'on peut imaginer une extension de ce dispositif aux baux commerciaux ?
17:22Alors, c'est également un sujet d'actualité parce qu'aujourd'hui, en fait,
17:26en matière de bails commerciaux n'est encadré par la législation que le loyer de renouvellement,
17:31pas le loyer initial.
17:33Mais certaines fédérations de commerçants et certains élus locaux
17:37plaident pour la mise en place d'un encadrement des loyers
17:40afin, notamment, de préserver le commerce de proximité.
17:44Et il y a notamment une proposition de loi qui a été déposée à l'Assemblée nationale,
17:48également, en octobre dernier, qui propose, donc, la mise en place d'un encadrement
17:51pour soutenir le commerce de proximité des loyers commerciaux.
17:56Avec un mécanisme qui serait un peu similaire à ce qu'on a aujourd'hui pour les baux d'habitation,
18:00c'est-à-dire que le préfet définirait un loyer de référence
18:04et il y aurait également un loyer de référence dit minoré,
18:07inférieur de 25% par rapport à ce loyer de référence.
18:10Et le loyer commercial ne pourra pas être supérieur à ce loyer de référence
18:14et, dans certains cas, à ce loyer de référence minoré de 25%
18:18parce qu'on est dans des zones à fortes vacances.
18:20On va conclure là-dessus. Merci, Louise Duvernois.
18:23Je rappelle que vous êtes associé au sein du cabinet Veillejourde.
18:27Tout de suite, on change de domaine.
18:29On va parler droit du travail dans un contexte très spécial,
18:32celui du conflit entre Kylian Mbappé et le Paris Saint-Germain.
18:35Le bras de fer entre Kylian Mbappé et le Paris Saint-Germain change de terrain.
18:52Il quitte le terrain du sportif pour aller sur le terrain du juridique.
18:56Les deux parties se trouvent au prud'homme.
18:58Le Paris Saint-Germain qui réclame 440 millions d'euros
19:02alors que l'ancien joueur du Paris Saint-Germain, Kylian Mbappé,
19:06réclame, lui, 263 millions d'euros.
19:08Pour y voir plus clair, j'ai le plaisir de recevoir Prune Jinguenet,
19:13avocate au sein du cabinet ASC,
19:15qui va nous décrypter les enjeux de ce conflit.
19:18Prune Jinguenet, bonjour.
19:19Bonjour Arnaud.
19:20Alors, on va rentrer tout de suite dans le vif du sujet.
19:23Et un des premiers angles de Kylian Mbappé, de ses avocats,
19:27c'est de faire requalifier le contrat de travail de l'ancien joueur du Paris Saint-Germain
19:33de CDD en CDI.
19:35Pourquoi ?
19:36Alors, déjà, je pense qu'il faut rappeler que c'est vrai qu'en droit français,
19:39le Code du travail prévoit que la forme usuelle, normale du contrat avec un salarié,
19:46c'est le contrat à durée indéterminée.
19:48Et que le CDD, justement, qui est un contrat à durée déterminée,
19:52doit faire figure d'exception et répondre à certaines conditions particulières.
19:56Dans le sport professionnel, c'est un peu la logique inverse,
20:00puisque depuis une réforme de 2015, une loi du 27 novembre 2015,
20:04qui a introduit dans le Code du sport un CDD spécifique,
20:08on part du principe que tout contrat par lequel une association sportive
20:13ou une société sportive professionnelle a recours contre rémunération
20:17au service d'un de ses salariés, doit être un contrat à durée déterminée.
20:20Donc, c'est dans ce cadre que le CDD de Kylian Mbappé, en 2017, avait été conclu.
20:28Aujourd'hui, on a les conseils de Kylian et lui-même qui font une demande,
20:33parmi toutes leurs demandes, qui consiste à demander la requalification du CDD conclu en CDI.
20:40On se place un peu dans la mouvance de l'affaire Rabiot,
20:43qui a eu lieu il n'y a pas longtemps et qui, lui, a obtenu gain de cause,
20:46mais qui est, selon nous, un peu différente, puisque c'était sur la base d'un CDD
20:51qui avait été conclu avant la réforme de 2015.
20:55Là, en l'occurrence, les conseils se basent sur une directive européenne de 1999
20:59qui avait vocation à limiter les dérives dans l'usage des contrats à durée déterminée
21:06par les employeurs.
21:08Aujourd'hui, les conseils nous disent qu'on serait dans un usage abusif
21:12dès lors que le contrat n'avait pas vocation à être temporaire,
21:17mais qu'on serait plutôt sur une relation de travail permanente.
21:20Donc, aujourd'hui, tout l'enjeu va se critériser autour de ça, un peu,
21:24de savoir qu'est-ce qui prévaut, est-ce que c'est cette directive
21:26qui, selon moi, s'applique pour les CDD, mais peut-être de manière globale,
21:32ou bien notre législation interne et le Code du sport
21:36qui, lui, prévoit un CDD spécifique pour les sportifs professionnels
21:40et notamment les joueurs de football professionnels.
21:43Et du coup, ça pourrait créer un précédent, c'est ça ?
21:45Ça créerait un précédent, mais c'est surtout que ça remettrait en cause
21:49toute l'économie et le fonctionnement actuel du football,
21:52puisque si on ne se retrouvait qu'avec des joueurs en CDI,
21:55évidemment, tout le business des transferts serait remis en cause
21:58et on ne voit pas bien aujourd'hui comment ça pourrait survivre à ça.
22:04C'est pour ça qu'à notre sens, les chances que le Conseil de Prud'homme
22:09requalifie le CDD en CDI sont, à mon sens, assez limitées.
22:16Après, je voulais juste préciser, vous parliez d'un montant assez astronomique
22:19de plus de 250 millions d'euros.
22:21On est d'accord que ce n'est pas uniquement sur cette requalification
22:24de CDD en CDI, on a aussi des demandes au titre de salaires impayés,
22:30de primes impayées, de dommages d'intérêt pour divers préjudices
22:34que le joueur estime subir aujourd'hui et dont il a fait part au conseiller.
22:38Alors, justement, on va revenir sur les aspects financiers,
22:41les salaires et les primes impayées, puisque le Paris Saint-Charmin
22:45a retenu un certain nombre de salaires et de primes de son ancien joueur.
22:51Est-ce qu'il pouvait légalement retenir ces sommes ?
22:54Alors, j'ai envie de vous dire que la réponse est très simple
22:57et que c'est non, par principe.
23:00L'obligation de payer le salaire et des primes qui sont contractuellement prévues
23:05et pour lesquelles il n'y a pas de discussion,
23:07c'est une obligation essentielle du contrat de travail
23:09et c'est l'obligation première de l'employeur
23:13à côté de celle de fournir un travail à son employé.
23:16Donc, aujourd'hui, on n'a pas un fondement légal qui nous dirait
23:22que le PSG avait le droit de retenir ces sommes.
23:26Nous, on nous dit que ce serait sur la base d'un accord verbal
23:31entre le salarié et l'employeur, le PSG,
23:36qui aurait lieu à l'été 2023 et selon lequel le joueur aurait renoncé
23:40à un certain nombre de paiements, de rémunérations et de primes.
23:45On a deux problématiques, c'est que déjà,
23:48en droit du sport et en particulier dans le milieu du football,
23:52la charte du football professionnel,
23:54qui fait figure de convention collective dans le milieu,
23:56prévoit que tout avenant au contrat de travail
23:58doit être homologué par la LFP, la Ligue de football professionnelle.
24:02Donc, il faut un écrit, c'est ça ?
24:02Il faut un écrit qu'on soumet à la Ligue et qu'il enregistre,
24:06l'homologue, on dit, pour qu'il vaille quelque chose.
24:10Aujourd'hui, sauf preuve contraire,
24:12il n'y a aucun document de ce type qui a été présenté par le PSG
24:16et on se contente de dire qu'il y avait un accord oral,
24:20ce qui est problématique puisque ça n'a pas de valeur juridique en tant que telle.
24:27Et à partir de ce moment-là,
24:28si le PSG ne rapporte pas la preuve de cet accord,
24:31la rétention de paiement s'analyserait comme une sanction pécuniaire
24:36à l'égard du joueur,
24:37sanctions pécuniaires qui sont strictement prohibées par le Code du travail,
24:41là pour le coup,
24:42et susceptibles d'engendrer un certain nombre de sanctions,
24:45outre le rappel des paiements de salaires et de primes,
24:48des intérêts de retard
24:49et des dommages et intérêts spécifiques
24:52qu'il pourrait demander pour le préjudice
24:54qui lui a été causé du fait du non-paiement de toutes ces rémunérations.
24:58Alors, au-delà des aspects financiers,
25:00ce que dénoncent les conseils de Kylian Mbappé,
25:03c'est aussi la pratique qu'on appelle du loft
25:06qui est assez courante dans le football,
25:08c'est-à-dire qu'on met à l'écart
25:09les joueurs qui n'ont plus le droit de s'entraîner avec le groupe professionnel,
25:12qui n'ont plus le droit de faire des matchs,
25:14et ça a été le cas pour Kylian Mbappé
25:16quand il était au Paris Saint-Germain.
25:17Est-ce que c'est une pratique qui est légale ?
25:21Alors, par principe, le loft, comme vous l'avez dit,
25:23c'est quelque chose qui s'est pas mal répandu ces dernières années
25:26et les syndicats essayent un peu d'endiguer ça,
25:29l'UNFP notamment.
25:31C'est donc la pratique qui consiste à mettre un joueur,
25:34notamment de l'équipe première,
25:36un peu à l'écart de l'équipe,
25:37c'est-à-dire qu'il ne va plus aller aux entraînements
25:39avec l'équipe première,
25:40il ne va plus faire les déplacements,
25:41plus faire les matchs,
25:43pendant une période donnée en général.
25:45Cette pratique par nature, elle n'est pas interdite,
25:48elle est encadrée,
25:49notamment par à nouveau la charte
25:50qui prévoit que pour certaines raisons sportives,
25:54notamment, l'employeur a la possibilité
25:57de faire circuler des joueurs
25:59entre ses équipes premières et équipes réserves,
26:02du moment que globalement,
26:04on garde des conditions d'entraînement équivalentes,
26:07des conditions de travail,
26:09ils ne doivent pas être totalement mis sur le banc,
26:12ça ne doit pas être une sanction en fait.
26:13Et la problématique ici principale,
26:17ça va être de savoir,
26:18est-ce que ce choix était guidé
26:20par un impératif sportif ?
26:22Y avait-il une stratégie au niveau de l'organisation de l'équipe
26:24qui nécessitait que Kylian Mbappé
26:27soit mis un peu en retrait ?
26:29Ou bien, est-ce qu'on est dans une stratégie plus globale
26:31qui consistait à mettre un peu la pression sur ce joueur
26:36pour soit qu'il prolonge son contrat de travail
26:38comme cela a été potentiellement prévu,
26:40soit qu'il quitte le club
26:42et que le PSG puisse bénéficier d'un transfert à ce moment-là ?
26:46Cela, ça sera donc l'enjeu
26:48de distinguer pour les conseillers
26:50si on est sur une pratique normale
26:54et si mis aux côtés de plusieurs autres comportements
26:58qu'aujourd'hui le joueur reproche à son club,
27:01on serait sur un harcèlement moral généralisé
27:06qui consistait du coup à mettre la pression sur le joueur
27:09pour obtenir de lui ce que le club voulait,
27:12c'est-à-dire, dans l'idéal, un transfert du joueur
27:15contre une somme d'argent
27:16et pas un départ libre la saison d'après.
27:18Bon, on verra tout ça le 16 décembre prochain.
27:22Verdict donc du Conseil des Prud'hommes.
27:24Merci Prune Jung-Neh.
27:26Je rappelle que vous êtes avocate au sein du cabinet ASC.
27:29Merci Arnaud.
27:30Merci à toutes et à tous pour votre fidélité.
27:33Restez curieux et informés.
27:35et à très bientôt sur Be Smart for Change.
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