- il y a 15 heures
Jeudi 16 octobre 2025, retrouvez Thomas Baudesson (Avocat fondateur, Association "Le Choc éthique"), Jérôme Déroulez (Associé, Aumans Avocats) et Olivier de Maison Rouge (Avocat, Lex-Squared) dans LEX INSIDE, une émission présentée par Arnaud Dumourier.
Catégorie
🗞
NewsTranscription
00:00Générique
00:30Bonjour, bienvenue dans Lex Inside, l'émission qui donne du sens à l'actualité juridique.
00:36Du droit, du droit et rien que du droit.
00:39Au programme de ce numéro, on va parler de l'association Le Choc Éthique avec son fondateur, l'avocat Thomas Baudesson.
00:47On parlera également du Data Act avec Jérôme Déroulé, avocat associé chez Aumance.
00:54Et enfin, on parlera du secret des affaires avec Olivier de Maison Rouge, avocat au sein du cabinet Lex Squared.
01:01Voilà pour les titres Lex Inside, c'est parti !
01:13On commence tout de suite ce Lex Inside, on va parler de l'association Le Choc Éthique avec son fondateur, Thomas Baudesson, qui est également avocat.
01:22Thomas Baudesson, bonjour.
01:24Bonjour Arnaud.
01:25Alors, pouvez-vous nous présenter Le Choc Éthique ?
01:28Le Choc Éthique est une association, loi de 1901, une association dont la dénomination complète est Le Choc Éthique,
01:37Observatoire de l'éthique des avocats et des juristes d'entreprise en France.
01:42C'est une association qui est indépendante, c'est important, elle est indépendante de toutes les organisations professionnelles.
01:47L'idée étant de réfléchir un petit peu en dehors de la boîte, comme disent les anglo-saxons.
01:52Constituée d'avocats, de juristes d'entreprise, de magistrats et d'anciens magistrats et de professeurs d'université.
02:01Son objet social au terme des statuts est de promouvoir l'éthique au sein des professions d'avocats et de juristes d'entreprise en France,
02:07dans le but d'œuvrer à la crédibilité de ses professions, d'établir une véritable relation de confiance entre ses professions et les magistrats,
02:17les usagers du droit et les pouvoirs publics, et de promouvoir enfin l'état de droit et la bonne administration de la justice.
02:24Concrètement, ça veut dire quoi derrière tout ça ?
02:26Alors, derrière tout ça, on a l'idée, une volonté commune de la part des membres, de mettre en commun leurs compétences, leurs expériences,
02:35afin de favoriser l'émergence d'une culture de l'éthique au sein de ces professions.
02:39Alors, favoriser une culture de l'éthique, mais qu'est-ce qui a motivé la création de cette association ?
02:43Alors, ce qui a motivé la création de cette association, c'est à la fois un constat et une nécessité, mais également un combat personnel.
02:52Alors, le constat, c'est quoi ? Ce constat, c'est le déficit de crédibilité dont souffrent cruellement les avocats auprès des magistrats.
02:59C'est un constat qui a été identifié de manière formelle au terme d'un rapport conjoint entre l'Institut des autres études sur la justice et le CNB en 2017,
03:11dans le cadre d'une réflexion qui portait sur les grands défis de la profession d'avocats du XXIe siècle.
03:17Figurez-vous qu'au nombre des quatre défis identifiés, le premier d'entre eux est la crédibilité des avocats.
03:24C'est un véritable sujet, il y a une prise de conscience autour de ce problème, donc ça, c'est le constat.
03:28Les juristes d'entreprise ne sont pas en reste et on sait qu'ils militent depuis plusieurs décennies maintenant
03:35pour se voir reconnaître une confidentialité de leurs avis juridiques comparable à ce qui existe déjà
03:41et qui est en œuvre depuis plus de 20 ans en Belgique.
03:45Le fameux legal privilege ?
03:46Le fameux legal privilege.
03:48Ça, c'est le constat.
03:50La nécessité, c'est que le statu quo n'est plus une option.
03:54Il faut rehausser les standards éthiques.
03:56Ce problème de confiance repose sur le fait que les magistrats, les pouvoirs publics pensent en réalité
04:03qu'en France, en tout cas, les avocats ne sont pas impeccables.
04:08C'est cet état de choses qu'il faut changer.
04:09Et c'est aussi un combat personnel, comme vous le savez, j'ai été candidat au BATONA l'an passé.
04:16Je n'ai pas été élu, mais l'un des thèmes principaux que je portais était celui-ci précisément.
04:22Alors, un certain nombre de mes soutiens, après l'élection, m'ont dit
04:26« Mais Thomas, si d'aventure tu ne te représentais pas, qui porterait dorénavant ces thèmes ? »
04:33Et je me suis dit que la meilleure façon, finalement, de poursuivre le combat est de le pérenniser,
04:38parce que ce n'est pas juste un mandat ou une campagne.
04:41Il s'agit d'inscrire un véritable mouvement dans la durée.
04:45Eh bien, c'était de fonder cette association pour initier le mouvement
04:48et faire en sorte que le combat se poursuive au travers d'une association.
04:53Alors, on va parler, aller un peu plus loin dans les objectifs et les actions de l'association.
05:00Concrètement, quels vont être les premiers chantiers pour restaurer cette confiance aux professionnels du droit ?
05:06Alors, figurez-vous que c'est la première fois que je fonde une association.
05:09Alors, très prosaïquement, les premiers chantiers, ça va être ouvrir un compte bancaire
05:14et essayer de percevoir et collecter les premières cotisations.
05:18Parce qu'il va falloir faire connaître l'association.
05:20Faire connaître l'association, ça veut dire créer un site internet,
05:24organiser un colloque, un premier colloque inaugural
05:28qui va permettre au plus grand nombre de savoir quelles sont les activités de l'association.
05:35Et puis enfin, se mettre au travail.
05:36Alors, se mettre au travail, on y a réfléchi,
05:39on va créer des groupes de travail autour de cinq thèmes principaux.
05:43Puisqu'il s'agit de rehausser les standards éthiques,
05:46eh bien, on va proposer de la norme.
05:49Donc, les cinq groupes de travail, ça va être les deux premiers
05:51autour de l'activité des avocats et des juristes d'entreprise.
05:55Première activité, le judiciaire, l'activité plaidante.
06:00Et donc, un premier groupe de travail autour de la relation avocat-magistrat.
06:04Deuxième groupe de travail qui va traiter de l'activité de ceux des avocats
06:10qui ne font pas de judiciaire et qui ont une activité plutôt transactionnelle
06:15ou de conseil, ainsi que les juristes d'entreprise.
06:17Et là, ça va être le conseil et la rédaction d'actes.
06:19Ça, c'est le deuxième groupe de travail.
06:21Et puis, les règles, il faut les apprendre.
06:23Donc, le troisième groupe de travail sera un groupe de travail autour de la formation.
06:27Le quatrième, autour de la discipline, parce que les règles, même apprises,
06:31si elles ne sont pas respectées, elles sont inefficaces.
06:34Et puis enfin, le dernier groupe de travail, on va s'intéresser à la prévention
06:38des conflits d'intérêts au sein des institutions, notamment de l'ordre.
06:41J'étais à l'ordre pendant un certain nombre d'années.
06:44J'ai observé qu'il y avait sans doute un certain nombre de choses à modifier.
06:47Ce n'est pas forcément le plus urgent, mais cosmétiquement, c'est important
06:51pour le public de constater que l'ordre lui-même est impeccable sur ces sujets.
06:57Donc, on voit que vous abordez des questions variées, de manière transversale.
07:01Le but, après, c'est de remonter ces propositions au pouvoir public ?
07:07Alors, l'idée... Alors, déjà, c'est sur la méthode, avant de voir.
07:11La méthode, on va...
07:14Et vous savez, l'idée, elle vient d'un certain nombre de fondateurs.
07:16Il y a un peu plus de 50 membres fondateurs, parmi lesquels des professeurs,
07:21des grands penseurs de la profession, comme Antoine Garapon.
07:25Et c'est intéressant de voir que c'est lui qui suggérait...
07:28Vous savez, c'est quelqu'un qui fait l'unanimité parmi les avocats et les magistrats.
07:32Il suggérait de faire un Yalta, un véritable Yalta, maître, avocat et magistrat, autour d'une table.
07:39C'est un mot fort.
07:40C'est un mot fort pour définir des règles du jeu, tout simplement.
07:43Il ne s'agit pas d'aller emprunter à tel ou tel pays telle règle qui déplaise, par définition, à des avocats.
07:51Non, il s'agit de se mettre d'accord, de manière consensuelle.
07:55Un peu une méthode, finalement, de notre nouveau Premier ministre.
07:59Alors, il y a déjà des assises, avocat et magistrat, mais ça ne va pas assez loin ?
08:03Ce n'est pas que ça ne va pas assez loin, c'est que l'objet de ces assises n'est pas de définir des règles du jeu au plan éthique.
08:09On a des tas de groupes de discussion avec les pénalistes, les travaillistes.
08:15Tout ça existe, évidemment, et c'est une autre chose, il faut que ça continue, mais c'est du travail de terrain.
08:22Le travail qu'on a en tête, c'est un travail plus fondamental.
08:25Définir des règles du jeu simples, consensuelles, les enseigner et les faire respecter.
08:29Ça, c'est la première méthode.
08:30Et puis, le choc éthique, c'est aussi un laboratoire.
08:33C'est un think tank, d'une certaine manière.
08:35Donc, l'objectif de ce laboratoire, c'est d'évaluer l'existant, d'identifier les carences et les actes d'amélioration,
08:45et de proposer des règles qui sont moins équivoques et plus exigeantes.
08:51Alors, vous avez parlé d'enseigner des règles.
08:53Ça veut dire qu'il faut revoir peut-être la formation, aussi bien des avocats que des juristes d'entreprise ?
08:57Alors, la formation, je dirais, elle commence à l'université.
09:01Il y a des carences à l'université, et l'université est un peu, il faut la dépoussiérer.
09:07Il n'y a pas d'enseignement des règles d'éthique de base à l'université en France.
09:10C'est quelque chose, c'est intéressant quand on s'aperçoit ce qui se passe à l'étranger.
09:13Aux États-Unis, notamment, il faut savoir que dans un cursus de 3 à 4 ans maximum,
09:19on vous enseigne, dès l'université, les règles d'éthique de base des professions juridiques.
09:23Ce n'est pas le cas en France.
09:24Donc, il faut s'en inspirer.
09:25Il faut s'en inspirer, il faut savoir qu'en France, on n'enseigne pas non plus le secret professionnel,
09:29contrairement à ce qui se passe dans de nombreux périls.
09:31Donc, il faut modifier cet état de choses.
09:34Ça, c'est pour l'université.
09:35L'école du barreau.
09:36L'école du barreau, normalement, on n'apprend plus le droit.
09:40Normalement, l'école du barreau devrait permettre d'apprendre essentiellement les règles d'éthique.
09:45Or, on met dans une sorte de peau pourrie de l'enseignement de déontologie un mix entre des règles professionnelles,
09:55des pratiques professionnelles, qui sont auto-centrées sur les problèmes que rencontrent les avocats entre eux.
10:03Et donc, il faut faire évoluer tout ça.
10:06On n'a rien sur la relation avocat-magestrat.
10:09Puis enfin, le stage, parce que c'est important.
10:10Le stage a disparu.
10:12Vous savez que le métier d'avocat est un métier d'apprentissage.
10:16Il y avait un stage obligatoire de 3 à 5 ans.
10:18Il a disparu.
10:19Il faut le remettre en place.
10:20Il faut le remettre en place.
10:20On va conclure là-dessus.
10:21Merci, Thomas Baudesson.
10:23Je rappelle que vous êtes avocat fondateur du Choc Éthique.
10:26Merci, Arnaud.
10:27Tout de suite, on va parler d'un texte important au niveau européen, le Data Act.
10:42Le Data Act est entré en application le 12 septembre dernier.
10:47Il encadre l'accès et le partage des données.
10:50Mais que change-t-il concrètement pour les entreprises ?
10:53On en parle tout de suite avec mon invité, Jérôme Déroulé.
10:56et avocat associé au sein du cabinet au Mans.
11:00Jérôme, bonjour.
11:01Bonjour, Arnaud.
11:02Alors, qu'est-ce que le Data Act et quel est derrière ses principaux objectifs ?
11:09Alors, le Data Act, c'est un règlement dont l'objectif politique est de créer un marché unique de la donnée en Europe.
11:15Avec, je dirais, deux mots-clés, partage et équité.
11:20Alors, ses grands objectifs, c'est vraiment d'organiser les modalités de ce partage,
11:24les modalités de transfert de ces données, d'utilisation.
11:27C'est d'accompagner aussi, je dirais, la numérisation.
11:30On le voit bien, il y a une explosion de la production de données à travers les objets connectés, etc.
11:34Donc, c'est d'accompagner ce mouvement.
11:36C'est de renforcer les modalités de partage.
11:39Et surtout, c'est de favoriser l'émergence d'un véritable, comme je le disais, marché unique, un marché qui soit liquide, équitable et efficace, pour reprendre les termes du Data Act.
11:51Mais vraiment, justement, de mettre en œuvre des règles dédiées en matière de concurrence et de faciliter, justement, la circulation des données dont on voit aujourd'hui que les acteurs privés ou publics ont de plus en plus besoin.
12:03Bon, on vient de voir l'objectif, donc, de définir un marché unique de la donnée.
12:08Mais quel est le champ d'application de ce règlement européen ?
12:12Alors, ce champ d'application est particulièrement large, puisqu'il va s'appliquer aussi bien à des personnes physiques qu'à des entreprises, aux relations entre ces personnes des entreprises ou entre entreprises.
12:23Donc, qui sont concernés ?
12:24Des fabricants de produits connectés et avec, je dirais, tous les producteurs de services connexes.
12:31Ce sont aussi les utilisateurs de produits connectés qui sont concernés, puisqu'à un moment, ils vont pouvoir décider, justement, de partager ou non leurs données.
12:38Ce sont les détenteurs de données, entreprises ou non, et leurs destinataires, c'est-à-dire, donc, destinataires, ceux à qui on va décider de partager des données ou de leurs transférer.
12:47Ce sont tous les fournisseurs de services de traitement de données, tous ceux qui vont aussi aider à assurer l'interopérabilité de ces transferts.
12:55Et également, et ça, c'est un point intéressant du Data Act, ce sont aussi les acteurs publics.
12:59C'est-à-dire que, dans certains cas, c'est prévu par l'article 15 du Data Act, pour des besoins exceptionnels, certains acteurs, opérateurs publics, peuvent décider, justement, de, en tout cas, demander, à voir mettre certaines données à disposition.
13:14On peut penser à un contexte un peu récent, notamment dans le cas de l'épidémie de Covid, justement, la nécessité pour certains acteurs publics de pouvoir avoir accès à certaines données.
13:22Et donc, le Data Act met en œuvre un cadre pour permettre, justement, l'accès à ces données en cas de besoin exceptionnel.
13:30On vient de voir les acteurs concernés par ce règlement.
13:33Maintenant, on va s'intéresser aux obligations qui pèsent sur ces acteurs.
13:38Quelles sont-elles ?
13:39Alors, les obligations, aujourd'hui, sont assez larges, puisqu'on l'a vu, beaucoup d'acteurs sont concernés.
13:44Déjà, en tout cas, d'arriver à définir les données qui sont concernées, les qualifier,
13:49et voir dans quel, je dirais, quel positionnement on peut se placer, en tout cas, quel est son rôle ou ses obligations spécifiques.
13:58Il y a des obligations pour les détenteurs de données.
14:00Alors, typiquement, par exemple, des producteurs d'objets connectés ou de services connexes,
14:04qui doivent, justement, organiser la mise à disposition des données,
14:08que ce soit vis-à-vis d'autres entreprises ou vis-à-vis de leurs utilisateurs.
14:12Elles vont devoir aussi les informer.
14:14Il y a très gros enjeux en matière contractuelle.
14:17Et là encore, ce qui est intéressant, c'est de voir que le règlement d'attaque prévoit, je dirais, la prohibition de certaines clauses abusives.
14:24Là, on n'est pas, je dirais, dans un modèle droit de la consommation, mais on est bien dans le cadre de relations entre entreprises.
14:29De quel type ces clauses abusives ?
14:31Justement, des clauses qui empêcheraient ou entraveraient les modalités d'accès ou de partage de données.
14:38Et l'objectif du règlement, justement, vise au contraire à faciliter, puisqu'encore une fois, il s'agit de créer un marché unique de la donnée.
14:46Et donc, dans certains cas, justement, le règlement prévoit la possibilité de qualifier certaines clauses de clauses abusives.
14:53Et donc, un aspect contractuel qui est très important, donc avec des enjeux en termes d'informations,
14:58notamment pour les utilisateurs, consommateurs de produits connectés,
15:03et la nécessité aussi d'introduire un certain nombre de garde-fous.
15:06Qui dit partage de données, veut dire aussi comment est-ce qu'on peut définir, dans certains cas, des exceptions
15:11pour des motifs qui sont liés à la confidentialité ou au secret des affaires, par exemple.
15:17Alors, vous évoquez des motifs d'exception, mais par exemple, des données sensibles, du type de données de santé.
15:23Que prévoit, quels sont les enjeux et que prévoit le règlement pour ce type de données ?
15:27Alors, le règlement s'applique de manière large, c'est-à-dire données et données personnelles.
15:32Pour autant, il rappelle en tout cas l'application du RGPD, il le rappelle explicitement,
15:37c'est-à-dire qu'à partir du moment où on va traiter de données personnelles,
15:40ou que dans certains cas, on va partager des données personnelles,
15:43il faut vérifier qu'on a bien une base légale, en aucun cas le data acte pourrait être une sorte de passe droit
15:47par rapport aux règles qui sont prévues pour le RGPD.
15:51Pour autant, il y a un certain nombre de questions qui peuvent se poser.
15:53J'évoquais tout à l'heure les cas dans lesquels on peut justement, pour des acteurs publics,
15:58avoir accès à des données pour des besoins exceptionnels.
16:01Il est prévu dans ce cas précis des modalités particulières de protection de ces données.
16:06On renvoie aux dispositions du RGPD sur la pseudonymisation, sur l'anonymisation.
16:11On voit aujourd'hui, à la lumière de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne,
16:15que ces notions évoluent.
16:16Donc, on peut imaginer qu'il y a un certain nombre de règles, en tout cas,
16:19qui vont se construire et s'établir, devoir être définies dans le temps,
16:24mais avec beaucoup de sujets pour les professionnels aujourd'hui.
16:26Alors, il va y avoir, de ce que je comprends,
16:27il va y avoir une articulation entre ce règlement européen des données et le RGPD
16:32quand il sera question de données personnelles, c'est ça ?
16:35Tout à fait, tout à fait.
16:36Et c'est justement un texte qui, en tout cas le data acte aujourd'hui,
16:39s'inscrit dans un paysage législatif, réglementaire relativement complexe
16:43et qui a tendance à se structurer davantage.
16:46Donc, comme vous l'avez rappelé, une articulation avec le RGPD,
16:49quand on parle de données personnelles, veillez à une application cohérente,
16:53des règles spécifiques pour ce qui concerne les données,
16:55sachant qu'aujourd'hui, la frontière entre une donnée personnelle et une donnée
16:58est de plus en plus difficile à définir ou à mettre en œuvre.
17:02Elle n'est pas seulement juridique, elle est aussi technique.
17:05On le voit autour des notions d'anonymisation et de pseudonymisation.
17:08Et il y a aussi un sujet, en tout cas, à ce titre,
17:13et notamment, encore une fois, quand il s'agit de peser ses obligations
17:17et de vérifier quelles dispositions doivent être mises en œuvre.
17:20Alors, on a vu en détail ce règlement européen sur la donnée.
17:24Au final, est-ce que c'est plutôt une opportunité
17:27ou une contrainte pour les entreprises, selon vous ?
17:31Alors, pour beaucoup d'entreprises, aujourd'hui,
17:33c'est un texte qui est vécu comme une contrainte supplémentaire,
17:36notamment par rapport à, je dirais, des enjeux lourds en termes de compliance,
17:40par rapport au RGPD ou au règlement sur l'intelligence artificielle.
17:45Je l'évoquais tout à l'heure, des enjeux, notamment en termes de contractualisation,
17:50d'informations contractuelles, etc.
17:51Donc, nécessité, justement, de développer toutes les informations
17:54qui sont déjà mises en place.
17:56Donc, un niveau de contraintes supplémentaires.
17:58L'importance de ce texte, aussi, c'est de faire réfléchir, justement,
18:01l'ensemble des acteurs concernés, privés, publics,
18:05sur les données qu'elles traitent, sur les jeux de données auxquels elles ont accès, etc.
18:09pour avoir une vision beaucoup plus dynamique
18:12et pour exploiter, aussi, valoriser ce patrimoine de données
18:16qu'elles mettent en œuvre, qu'elles construisent
18:18ou auxquelles, potentiellement, elles pourraient aussi avoir accès.
18:20Alors, vous, vous conseillez un certain nombre d'entreprises sur ces sujets.
18:25Est-ce qu'aujourd'hui, les entreprises ont déjà appréhendé ce règlement européen ?
18:29Je dirais qu'on est au début de cette appréhension.
18:32C'est, effectivement, et de manière un peu curieuse,
18:33un texte dont on parle encore assez peu.
18:37Depuis son entrée en application le 12 septembre dernier,
18:39en tout cas, on commence à voir ici et là des questions.
18:41On accompagne déjà des clients, justement, sur le volet contractuel
18:44pour leur permettre d'être à jour de l'ensemble de leurs obligations.
18:47Mais c'est un texte dont la portée, ou en tout cas les conséquences,
18:50commence seulement à être appréhendée.
18:53On va conclure là-dessus.
18:54Merci, Jérôme Déroulé.
18:55Je rappelle que vous êtes avocat associé au sein du cabinet au Mans.
18:58Merci beaucoup.
18:59Tout de suite, l'émission continue
19:01et on va parler d'un sujet connexe, stratégique,
19:03le secret des affaires.
19:14Dans un monde où l'information circule vite,
19:18on a besoin de protéger ses secrets.
19:21Mais que recouvre la notion de secret des affaires ?
19:25On en parle tout de suite avec mon invité, Olivier de Maison Rouge,
19:29avocat chez Lexquerd.
19:31Olivier de Maison Rouge, bonjour.
19:33Bonjour, Ado.
19:34Alors, on va essayer de voir ensemble ce qu'est le secret des affaires.
19:38C'est un enjeu stratégique pour les entreprises.
19:41Alors, tout d'abord, avant de rentrer dans le vif du sujet,
19:44qu'est-ce que le secret des affaires ?
19:47Alors, si j'en donne la définition juridique,
19:49puisque nous sommes sur un plateau qui ne parle que de droit,
19:51il faut donner la définition.
19:53Alors, il y a plusieurs définitions,
19:54puisqu'il y a celle qui est issue de la directive du 8 juin 2016,
19:58qui a été adoptée par le Parlement et la Commission européenne.
20:01Et puis, on va retenir, finalement, la définition
20:03qui aujourd'hui se trouve dans le Code de commerce,
20:05depuis la loi du 30 juillet 2018.
20:07C'est l'article L151.1 du Code de commerce.
20:11C'est trois conditions cumulatives.
20:14Premièrement, une information qui n'est pas connue,
20:18alors, je vais dire déjà du grand public,
20:19mais surtout du secteur économique concerné,
20:21c'est-à-dire du secteur concurrentiel,
20:24de telle sorte que ses rivaux, ses concurrents,
20:27ses adversaires, éventuellement sur le plan économique,
20:29ne connaissent pas ces informations stratégiques.
20:32Deuxièmement, et c'est une condition donc cumulative,
20:33qui ait une valeur commerciale, parce que secrète, précisément.
20:38Donc, finalement, c'est presque une double condition en une.
20:41Et puis, troisièmement,
20:42qui fasse l'objet de mesures de protection raisonnable.
20:45Donc, que l'entreprise soit en capacité
20:46de protéger ses propres informations.
20:49Alors, on vient de voir les conditions
20:51pour bénéficier du secret des affaires.
20:54En quoi ça se distingue de la propriété intellectuelle ?
20:57Alors, c'est un petit peu hybride.
21:00Si l'on fait l'exercice des textes,
21:02comme parfois en droit,
21:03il faut aller trouver la substantifique moelle,
21:06et donc l'origine,
21:07dans le traité ADPIC,
21:09c'est-à-dire l'accord sur les droits de propriété intellectuelle
21:11lié au commerce,
21:12qui est une annexe du traité de Marrakech de l'OMC de 1994.
21:16Et là, on trouve les trade secrets,
21:18qui va être traduit en français
21:19par les renseignements économiques non divulgués.
21:22La directive européenne, elle,
21:24va traiter des informations économiques non divulguées,
21:28de la protection des savoir-faire.
21:29Et en droit français, on va parler du secret des affaires.
21:31Tout ça pour dire que ça ne s'inscrit pas dans la propriété intellectuelle,
21:35mais c'en est issu directement.
21:37Et à l'inverse de la propriété intellectuelle,
21:39il n'y a pas de titre de propriété,
21:41puisqu'une information ne fait pas l'objet d'un droit de propriété.
21:44En revanche, et c'est là où c'est intéressant,
21:46et ça peut être cumulatif ou alternatif avec la propriété intellectuelle,
21:50c'est que le secret des affaires va nous permettre de protéger en amont
21:54tout ce qui relève de la recherche, de l'innovation,
21:58en matière numérique, avant le droit des logiciels,
22:01en matière de brevets,
22:02en matière éventuellement, le cas échéant,
22:04de droits d'auteur, de développement.
22:06Donc tout ça, c'est le côté cumulatif.
22:10Et puis c'est le côté aussi alternatif,
22:12dans la mesure où on va pouvoir finalement tenir confidentiel
22:16des informations technologiques,
22:18de telle sorte qu'elles ne soient pas divulguées.
22:20Et là, c'est tout l'inverse de la propriété intellectuelle,
22:22c'est qu'il n'y a pas de divulgation.
22:24Alors on vient de voir les liens et les différences
22:26avec la propriété intellectuelle.
22:28Est-ce que ça protège les savoir-faire techniques,
22:30par exemple, le secret des affaires, pour bien comprendre ?
22:33Alors très précisément,
22:33finalement, le savoir-faire a été défini au détour de certains textes
22:39et surtout de certaines jurisprudences en droit français.
22:41Et en réalité, c'était quelque chose d'un peu gazeux.
22:44Ça va du tour de main de l'artisan à des connaissances technologiques précises.
22:50Et donc de fait, le secret des affaires a vocation à protéger précisément
22:54les savoir-faire sous toutes leurs formes.
22:57Ça peut être des méthodologies commerciales,
22:58ça peut être des taux de marge,
22:59ça peut être autant d'informations et de connaissances stratégiques.
23:03Précisément, le législateur a voulu intégrer cette protection.
23:09J'en veux pour preuve, encore une fois,
23:11la directive du 8 juin 2016 s'appelle
23:13« Protection des informations économiques non divulguées et des savoir-faire ».
23:18Est-ce qu'il y a des outils qui permettent de bénéficier de cette protection ?
23:23Alors, in fine, c'est le juge qui va déterminer
23:26s'il s'agit ou non de secret des affaires.
23:29Donc, en réalité, c'est une fois qu'on est face à un juge,
23:31qu'on se fait attaquer par un concurrent,
23:33on dit « tu m'as volé ma recette »,
23:35et on va se défendre en disant « mais non, ça, ça m'appartient,
23:37c'est mon propre secret », voilà comment les choses se déroulent.
23:41Mais ça signifie surtout qu'auparavant, en amont,
23:45il faut être en capacité d'avoir identifié ses propres informations sensibles,
23:48ses propres informations qu'on va tenir confidentielles,
23:51et donc s'assurer qu'elles répondent aux trois critères
23:54énoncés par l'article L151.1 du Code de commerce,
23:59sans quoi le juge va écarter la qualification du secret des affaires,
24:03on a déjà de la jurisprudence là-dessus,
24:05et donc l'entreprise doit, en interne,
24:07s'assurer, quelque part, d'une identification de ses informations stratégiques.
24:12C'est-à-dire qu'il faut faire un audit, c'est ça ?
24:14Un audit en amont, de telle sorte à pouvoir savoir
24:18quels sont ses avantages concurrentiels.
24:20Tout ne peut pas être protégé par le secret des affaires,
24:22il faut savoir, justement, j'allais dire,
24:24séparer le bon grain de livret et protéger ce qui doit être nécessaire.
24:28Alors, une fois qu'on a audité ces informations,
24:30qu'on sait quelles sont les informations confidentielles,
24:33ça veut dire aussi qu'il faut sensibiliser ses salariés
24:36pour ne pas divulguer ces informations.
24:40C'est le mot juste, sensibiliser.
24:42C'est faire oeuvre de pédagogie.
24:44C'est pas seulement dire, ça c'est secret,
24:45vous n'y avez pas le droit,
24:47et de toute manière c'est la diffusion rétreinte
24:49et vous n'avez pas le droit d'en connaître.
24:52C'est un peu facile.
24:53C'est surtout de faire comprendre aux équipes,
24:55aux personnels, aux collaborateurs,
24:57que l'on détient des avantages concurrentiels
25:00qui nous permettent d'avoir, finalement,
25:03des parts de marché, un chiffre d'affaires substantiel,
25:07un taux de marge aussi, également,
25:08et donc, finalement, d'associer les équipes
25:10à cette nécessité de protéger ces informations essentielles.
25:14Finalement, c'est aussi la défense de l'outil de travail.
25:17Et donc, les équipes, les collaborateurs doivent y être associés.
25:20Alors, on a vu le cadre juridique du secret des affaires,
25:23mais qu'est-ce qui se passe en cas de violation du secret des affaires ?
25:26Quelles sont les sanctions, les recours possibles ?
25:28Alors, c'est un objet civil.
25:32Il y a eu débat au moment de l'adoption de la loi.
25:34J'en ai été le rapporteur auprès de Bercy,
25:36de la directive lors de la transposition du texte.
25:39Il y avait une voie pénale qui s'offrait,
25:42que l'Europe avait laissée à discrétion des États membres
25:44lors de la transposition, ou bien la loi civile.
25:48Et la protection civile d'abord.
25:50Eh bien, la loi française n'a retenu que la protection civile
25:53du secret des affaires.
25:54Pourquoi ?
25:56Parce que le pénal pouvait effrayer le législateur
26:01et plus généralement les syndicats, les ONG,
26:05les associations de presse ou autres,
26:06qui estimaient que c'était un bâton un peu trop ferme,
26:10un peu trop fort, un peu trop robuste,
26:12et qui permettait, le cas échéant,
26:14de taper un adversaire qui ne serait pas d'adversaire économique.
26:18Donc on a voulu circonscrire finalement le champ des sanctions
26:21vraiment au monde économique.
26:24C'est la raison pour laquelle on est parti sur la voie civile,
26:27mais ça n'est pas une responsabilité de droit commun.
26:28C'est une responsabilité spécifique,
26:31prévue par le Code de commerce,
26:34et simplement trois atteintes sont susceptibles
26:36d'être sanctionnées par le juge.
26:37Lesquelles ?
26:38La divulgation illicite,
26:40l'utilisation illicite,
26:42là on est un peu comme dans le système de la contrefaçon,
26:44c'est là où on rejoint encore un peu
26:45la propriété intellectuelle aux étours,
26:47et puis c'est après la divulgation,
26:52la révélation,
26:54c'est l'obtention illicite,
26:56c'est-à-dire le fait de percer volontairement
26:59le secret d'un concurrent.
27:00D'accord.
27:01Et en termes de délai,
27:03comment ça se passe pour obtenir gain de cause
27:06quand quelqu'un vous a violé des informations
27:09qui relèvent du secret des affaires ?
27:10Est-ce qu'il y a une tendance générale ?
27:12Je sais que ce n'est pas forcément facile
27:14de donner un délai comme ça.
27:15C'est un grand débat parce que d'abord,
27:18il n'y a pas de juridiction spécialisée en la matière
27:20et la loi n'a pas prévu précisément
27:23de l'enquête tribunal à se prononcer.
27:26Autrement dit,
27:26on peut se retrouver aussi bien
27:27devant les juridictions administratives,
27:29je l'ai moi-même expérimenté,
27:31dans le cadre des appels d'offres
27:32où on va livrer des informations techniques,
27:34un candidat évincé va saisir ensuite la CADA,
27:37la commission d'accès aux documents administratifs,
27:39pour s'assurer que finalement,
27:40sa réponse était juste et légitime
27:42au marché public et puis la personne
27:45qui s'est retrouvée adjudicataire
27:48va donc contester et protéger
27:50par le secret des affaires.
27:51Donc là, on va être devant
27:52les juridictions administratives.
27:54Ça peut être en matière de concurrence déloyale,
27:56fichiers clients, etc.
27:58Et là, on va être devant les tribunaux de commerce.
28:00Mais encore récemment,
28:01on a vu avec la cour d'appel de Poitiers,
28:03ça peut être aussi bien en matière sociale
28:05et ça peut être le conseil des prud'hommes.
28:06Donc, c'est après, à discrétion,
28:09j'ai à dire, du timing de chaque juridiction.
28:13On va conclure là-dessus.
28:14Merci Olivier de Maison-Rouge.
28:15Je rappelle que vous êtes avocat
28:16chez Lexquern.
28:17Merci.
28:18C'est la fin de cette émission.
28:20Merci de votre fidélité.
28:22Restez curieux et informés.
28:23À demain sur Bsmart4Change.
28:25Sous-titrage Société Radio-Canada
Recommandations
28:17
|
À suivre
28:26
29:35
27:40
26:29
28:04
29:00
29:09
24:56
9:26
27:48
28:39
28:47
27:42
27:04
29:11
28:37
27:42
28:07
29:16
28:35
28:16
29:00
27:48
28:37
Écris le tout premier commentaire