- il y a 3 heures
Jeudi 9 octobre 2025, retrouvez NATHALIE GOULET (sénatrice de l'Orne (Normandie)), Michel PONSARD (Associé, UGGC Avocats) et Arnaud Teissier (Associé, Capstan) dans LEX INSIDE, une émission présentée par Arnaud Dumourier.
Catégorie
🗞
NewsTranscription
00:00Générique
00:30Bonjour, bienvenue dans Lex Inside, l'émission qui donne du sens à l'actualité juridique.
00:36Du droit, du droit et rien que du droit.
00:38Au programme de ce numéro, on va parler de la proposition de loi pour lutter contre la gangstérisation de la France
00:45avec son autrice Nathalie Goulet, sénatrice de Lorne.
00:49On part ensuite des arrêts sur le congé payé et arrêt maladie avec Arnaud Tessier, avocat associé de Capstan.
00:58Et enfin, dans la dernière partie, on parlera des accords de distribution exclusives à l'aune de la dernière jurisprudence
01:06avec Michel Ponsard, avocat associé chez UGGC, avocat également président de l'Association française d'études de la concurrence.
01:15Voilà pour les titres Lex Inside, c'est parti !
01:28Une proposition de loi entend lutter contre la gangstérisation de la France.
01:33On en parle tout de suite avec l'auteur de cette proposition, Nathalie Goulet, sénatrice de Lorne.
01:40Nathalie Goulet, bonjour.
01:41Bonjour, merci de votre invitation.
01:43Alors on va parler de votre proposition de loi, mais avant toute chose, pouvez-vous rappeler le contexte dans lequel se situe ce texte ?
01:51Alors après un travail très important depuis de nombreuses années sur la fraude et l'évasion fiscale, et aussi sur le terrorisme,
01:58aux confins des deux, le Covid étant venu, j'ai travaillé sur le financement du terrorisme,
02:05et donc finalement sur des outils de criminalité organisée, puisque c'est la même matrice de fabrication d'argent sale.
02:13Et puis l'année dernière, il ne vous a pas échappé qu'on a eu une belle success story avec le narcotrafic au Sénat,
02:17mais la criminalité organisée, c'est autre chose que le narcotrafic.
02:22Alors qu'est-ce que ça recouvre, pour bien comprendre ?
02:24Alors ça recouvre tout un tas de délinquances qui vont du trafic de migrants, 5 à 7 milliards,
02:32la contrefaçon, plus de 5 milliards, le trafic de cigarettes, la fraude aux finances publiques,
02:38le trafic des marchés publics, la corruption, le trafic d'or,
02:45c'est-à-dire toute une production d'argent sale,
02:50qui ensuite doit être blanchie pour intégrer les circuits de criminalité organisée.
02:55Évidemment la drogue en fait partie, mais les délinquants sont pluridisciplinaires.
03:03Ils font un peu de trafic de drogue, un peu de trafic de migrants, un peu de trafic d'or,
03:07un peu d'exploitation sexuelle, etc.
03:10Donc si vous voulez, regardez la criminalité par le prisme unique du narcotrafic est une erreur,
03:18c'est une erreur stratégique, c'est une erreur aussi pour le champ des poursuites,
03:24et aussi pour, j'irais même, l'esprit qui anime les services de poursuites,
03:32il faut une vision financière des infractions.
03:36Et donc l'idée, ça a été de dire, bon, il n'y a pas que le narco, il y a tout le reste,
03:42et puis vous n'avez pas échappé que le texte sur le narco crée un parquet criminalité organisée,
03:47et non pas un parquet narco, et ça, ça a été une demande express.
03:51Donc désormais, on a demandé au groupe centrisse une commission d'enquête sur la criminalité organisée,
03:59pour compléter le dispositif du texte sur les narcos,
04:02qui était évidemment très important, mais qui était partiel,
04:04et puis avec mon collègue Raphaël Dobé, qui a présidé cette commission,
04:10nous avons auditionné énormément, nous nous sommes déplacés dans les institutions internationales,
04:17chez Interpol, chez Europol notamment, où on ne va pas assez,
04:21ils font un travail remarquable.
04:22À ce point précis, je voudrais dire que nos services, police, justice, renseignement,
04:27font un travail remarquable.
04:28Là, il faut dire que le travail est exceptionnel, qu'on a des services formidables,
04:34ils sont un peu à l'os, mais ils sont…
04:37Il faut donner des moyens.
04:38Ah oui.
04:38L'objet de votre proposition, c'est un peu, au-delà du constat que vous avez fait dans le rapport,
04:44c'est de mettre en œuvre maintenant les recommandations que vous avez formulées,
04:47C'est exactement ça, avec une vision financière des infractions.
04:51Alors, pour tout vous dire, on a donc fait une cinquantaine de recommandations,
04:57dans le contexte législatif, il ne vous a pas échappé qu'avoir le temps de voter un texte de 50 articles,
05:04ce n'est pas tout de suite.
05:05Tout à fait.
05:05Si on pouvait déjà voter un texte tout court, ce serait déjà pas mal.
05:08Voilà, donc en fait, il y a plusieurs niveaux dans la proposition de loi,
05:14qui commencent, si vous voulez, par des choses assez simples,
05:19de rustiner des éléments manquants à nos dispositifs.
05:24Comme quoi, par exemple ?
05:27Les entreprises n'ont pas à déclarer les comptes qu'elles ont à l'étranger.
05:32Pour vous, c'est une aberration ?
05:33N'importe quel citoyen doit déclarer le compte qu'il a à l'étranger, et pas les entreprises.
05:37C'est rien du tout, c'est une petite faille.
05:39Bon, le manque de pouvoir des grèves des tribunaux de commerce.
05:42Il ne vous a pas échappé qu'il y a eu un livre blanc des tribunaux de commerce
05:44sur la lutte contre le blanchiment,
05:48que les dispositifs n'ont pas été mis en place,
05:50et qu'un des gros vecteurs du blanchiment sont les entreprises éphémères,
05:56c'est-à-dire ces entreprises qui sont constituées uniquement pour faire du carousel de TVA, etc.
06:00Enfin, vos auditeurs connaissent ça aussi bien que moi, et vous encore mieux.
06:03Donc, ces entreprises éphémères, c'est vraiment une plaie,
06:07c'est un cheval de troie de la criminalité.
06:10Le but, c'est de faire une entreprise criminelle, pour être clair.
06:13Voilà. Et puis surtout, une entreprise qui va carotter de la TVA,
06:17qui va faire du dumping sur les territoires,
06:20qui va faire de la fraude à l'URSSAF,
06:22qui va utiliser du cash pour payer ses salariés,
06:24qui va donc blanchir deux fois.
06:25L'entreprise éphémère, c'est vraiment un cheval de troie vraiment des dispositifs.
06:33Et donc, pour éviter un certain nombre de malentendus, si j'ose dire,
06:37il faut donner plus de pouvoir au greffe.
06:39C'est-à-dire qu'il faut qu'ils puissent contrôler l'origine des fonds,
06:42l'identité des porteurs de parts, vérifier...
06:45Or, ce type de contrôle se heurte à la simplification.
06:50Voilà. Et donc, nous pensons, avec mon collègue
06:54et les collègues de la commission qui ont adopté le rapport à l'unanimité,
06:58qu'il vaut mieux différer un tout petit peu la délivrance du CABIS,
07:02qui est par ailleurs le permis de conduire de l'entreprise,
07:05pour avoir les vérifications qui s'imposent.
07:07D'autant que vous savez très bien
07:09que si les entreprises en formation ont des activités,
07:13elles pourront reprendre, le jour où elles seront immatriculées,
07:16les actions qu'elles ont faites pour le compte de l'entreprise en formation.
07:20Donc, si vous voulez, il vaut mieux attendre un peu et vérifier.
07:22Et donc, on propose un certain nombre de dispositifs
07:25pour avoir plus de pouvoir des greffes,
07:27pour pouvoir éviter cette criminalité très, très importante
07:32avec les entreprises éphémères, qui sont vraiment un très gros problème.
07:34Alors, au-delà des entreprises éphémères,
07:36il y a aussi des dispositions pour améliorer le dispositif anticorruption,
07:40même s'il y a eu des efforts faits depuis la loi Sapin 2 ?
07:44Oui, mais on a considéré que les seuils étaient trop élevés.
07:47D'accord.
07:48Donc, nous souhaitons, on a diminué par deux les seuils.
07:51Le texte, le président Larcher doit, a dû, doit, devra,
07:58s'est engagé à, envoyer la proposition de loi au Conseil d'État.
08:02D'accord.
08:02Parce qu'on a trop, trop, trop de textes mal ficelés.
08:06Moi, je n'ai aucun amour propre d'auteur à faire vérifier mon texte par le Conseil d'État.
08:09Je pense que c'est même une très bonne mesure.
08:11Il est d'ailleurs là pour ça, pour voir si les seuils ne sont pas ridicules.
08:15Je pense que c'est très, très important d'insuffler les règles anticorruption
08:24à des entreprises qui n'ont pas les seuils de la loi Sapin.
08:27D'accord.
08:27Il faut que cette culture soit plus imprégnée, plus bas.
08:34D'accord.
08:34Et au-delà des dispositions de lutte contre la corruption,
08:38il y a aussi tout ce qui concerne la lutte contre la contrefaçon également dans votre texte ?
08:41Alors ça, c'est extraordinaire.
08:43Alors, il y a un comité.
08:46Alors, on ne va pas dire du mal des gens tout de suite.
08:49Mais quand même, la contrefaçon, c'est vraiment la criminalité à bas bruit.
08:57Vous achetez une fausse chemise de marque, vous allez acheter un faux sac de marque.
09:02Certains peuvent penser que c'est de la péréquation sociale parce que vous n'avez pas les moyens de vous en acheter un vrai.
09:09Et que finalement, les marques de luxe sont les moyens.
09:11C'est 26 milliards par an.
09:13Ce n'est pas rien.
09:14C'est 38 000 emplois.
09:15Mais surtout, la contrefaçon, ce n'est pas que ça.
09:17Cette année, c'est plus de 20 millions d'objets qui ont été saisis par les douanes.
09:22C'est des faux médicaments.
09:25C'est des fausses pièces détachées d'avion.
09:27C'est des fausses pièces détachées de voiture.
09:28Donc, les conséquences peuvent être graves derrière.
09:31C'est des fausses rébannes qui brûlent les rétines.
09:34C'est des crèmes solaires cancérigènes, des dentifrices toxiques, etc.
09:38Alors, évidemment, les contrefaisants facteurs se sont améliorés.
09:44On va donc avoir des étiquettes produits d'un côté et puis les produits de l'autre.
09:48Et puis, vous avez la vente en ligne avec des plateformes qui, à longueur de journée,
09:54vous proposent des produits de luxe contrefaits, des vêtements, des chaussures, etc.
09:57Je vous rappelle quand même que les frères Kouachi ont financé l'attentat de Charlie
10:02par la vente de fausses chaussures niaïques.
10:05Ce n'est pas quand même un truc anodin.
10:07Et donc, l'Unifab, qui est le syndicat qui s'occupe de ça,
10:10est extrêmement diligent et extrêmement dynamique sur ces sujets.
10:15Il y a une loi qui a été votée il y a quelque temps par le président du fameux comité Théodule.
10:21Ce texte n'a jamais traversé le boulevard Saint-Germain pour arriver jusqu'au Sénat.
10:25Moi, je demande que non seulement il soit repris, mais qu'il soit alourdi.
10:28D'accord.
10:29Donc, on va conclure là-dessus sur ces dispositions qui concernent la contrefaçon.
10:35Je vous remercie, Nathalie Goubet.
10:36C'était trop court.
10:38Ce sera l'occasion de vous réinviter une fois le texte adopté.
10:41Voilà, je vais vous offrir mon livre en attendant sur le financement du terrorisme.
10:45Voilà, faites-en bon usage.
10:45Merci encore.
10:47Tout de suite, l'émission continue.
10:49On va parler congés payés et arrêts maladies à l'aune de la jurisprudence.
10:55Dans son arrêt du 10 septembre dernier, la Cour de cassation a confirmé que le salarié
11:11malade durant ses congés payés peut les récupérer ultérieurement.
11:15Pour décrypter cette décision, j'ai le plaisir de recevoir Arnaud Tessier, avocat associé
11:21chez Capstan.
11:22Arnaud, bonjour.
11:22Bonjour Arnaud.
11:24Alors, on va parler en détail de cette décision.
11:28Mais avant toute chose, pourquoi il y a une convergence entre le droit européen et cette
11:35décision, cet arrêt de la Cour de cassation ? Expliquez-nous.
11:38Cet arrêt de la Cour de cassation, c'est finalement un acte 2, ou une saison 2 pour
11:43parler façon série, puisque en 2023, la Cour de cassation avait adopté une décision
11:51qui a fait l'effet d'un tsunami, disant que lorsque l'on était en arrêt maladie
11:56longue durée, on conservait ses droits à congés payés, en tout cas on continuait
12:01à acquérir des droits à congés payés.
12:02Et à l'époque, en 2023, ce qui a conduit d'ailleurs ensuite à une intervention législative
12:07pour corriger le Code du travail qui ne le disait pas de cette façon-là, la Cour
12:12de cassation avait justifié sa prise de position en expliquant que le droit de l'Union
12:17européenne, qui fixait dans une directive de 2003 un droit à congés payés de quatre
12:23semaines, ce droit de l'Union européenne prévalait sur les dispositions du Code du
12:29travail qui disait le contraire.
12:30Donc à l'époque, congés payés maladie au regard du droit de l'Union européenne et
12:35de ce droit à quatre semaines de congés payés était devenu une forme de totem.
12:40Donc on attendait cette saison 2 parce qu'effectivement, c'était la queue de comète du sujet de articulation
12:46arrêt maladie et congés payés et donc c'est à nouveau un revirement de jurisprudence qui
12:50était un peu attendu parce que la Cour de cassation, elle se soumet au droit de l'Union européenne.
12:54On pourra en reparler plus hautement dans une autre interview, mais il y a un vrai sujet
12:58sur ce point-là parce qu'il y a des conséquences pratiques très opérationnelles qui me paraissent
13:03utiles de décrypter maintenant.
13:04Mais voilà, on a une soumission de la Cour de cassation au droit de l'Union européenne.
13:09Donc on a bien compris ce revirement de jurisprudence.
13:12Maintenant, on va aller plus en détail sur les obligations qui pèsent sur le salarié
13:16pour bénéficier de ce report issu donc de cette jurisprudence à la fois de la CGE et de la Cour
13:22de cassation. Comment ça se passe concrètement ?
13:24Alors, jusqu'à présent, j'étais en arrêt, en congé payé et je tombais malade pendant
13:29mon arrêt maladie, mon congé payé continuait et mon arrêt maladie n'existait pas.
13:36Désormais, si je suis en congé payé et que je tombe malade, il faut que j'aille voir
13:41un médecin du travail, un médecin traitant pardon, pour pouvoir obtenir un certificat médical,
13:47une attestation et donc un arrêt de travail qui va me permettre de pouvoir présenter
13:51un justificatif à l'employeur, j'opposerai ce justificatif à l'employeur pour lui dire
13:57« je suis à partir de maintenant en arrêt maladie, mes congés payés sont suspendus
14:02et j'ai droit à un report de mes congés payés ultérieurement ».
14:07D'accord. Et ça s'applique à tous les types de congés ?
14:10Alors, dès lors que la Cour de cassation nous dit « cette solution s'impose parce que
14:17je fais application du droit de l'Union européenne », à mon sens, il faut aller jusqu'au bout
14:20de la logique. Le droit de l'Union européenne est installé, installe un droit à congés
14:25payés de quatre semaines. Pour moi, ça ne se limite qu'à quatre semaines de congés
14:31payés en France.
14:33D'accord. Donc c'est un peu plus restrictif que tous les congés ?
14:38C'est-à-dire qu'en France, on a de toute façon cinq semaines de congés payés, donc
14:41la cinquième semaine n'est pas concernée par ce contingent. Et puis il y a pas mal d'entreprises
14:47qui, par application d'accords d'entreprise ou d'accords de branche, peuvent donner des
14:51congés conventionnels complémentaires. Au-delà de cinq semaines, ces jours, à mon sens, ne
14:56ressortent pas de l'interprétation qui est faite par la Cour de cassation au regard du
15:00droit de l'Union européenne qui limite ce droit à congés payés à quatre semaines.
15:04Alors, si jamais le salarié ne respecte pas la notification de son arrêt maladie, comme
15:09vous l'avez indiqué tout à l'heure, dans les temps, qu'est-ce qui se passe concrètement
15:14s'il fait postérieurement, par exemple, à ses congés ?
15:17Alors, c'était une très bonne question et on va essayer de le décortiquer parce que
15:23c'est pas très simple, c'est en tout cas un peu technique. Le salarié, pour pouvoir
15:27prétendre effectivement à un droit à report de ses congés payés, doit apporter un
15:32justificatif. Ce justificatif, c'est un arrêt de travail qui est délivré par le médecin
15:38traitant. À partir du moment où il le délivre tardivement, l'employeur n'aura certainement
15:45pas la possibilité de pouvoir lui reprocher de le produire tardivement et de pouvoir justifier,
15:49par exemple, un licenciement. La Cour de cassation l'a déjà décidé dans le passé.
15:52Le fait de produire tardivement ne justifie pas la rupture du contrat de travail. Ce n'est
15:55pas une faute qui a un impact sur le contrat de travail. Maintenant, est-ce que ça a un
15:59impact sur la rémunération ? Ça pourra avoir un impact sur le droit à l'indemnisation
16:05complémentaire qui est servi par l'employeur, puisque l'employeur, s'il reçoit l'information
16:10trop tardivement, il n'a pas été placé en situation, par exemple, de faire une contre-visite
16:14et donc de respecter l'ensemble des contingences de droits de la sécurité sociale. Donc, on
16:18a une articulation entre droit du travail et droit de la sécurité sociale qui nécessite
16:21à chaque fois qu'on parle d'un sujet de se poser la question pour une jambe et pour
16:24l'autre jambe.
16:25D'accord. On va se concerner, s'adapter sur les processus RH, les conséquences de cette
16:35décision sur les processus RH et notamment sur la paye. Quelles sont les conséquences
16:40de cette décision sur ces process ?
16:44Alors, ça va, encore une fois, conduire les responsables de la paye et ceux qui sont en
16:50charge des logiciels à s'arracher les cheveux. Alors, les logiciels, ils ont déjà un peu
16:54été paramétrés depuis 2023, la loi de 2024 sur l'intervention d'une maladie versus
17:00congé payé. Pour autant, là, il va falloir remettre un cran complémentaire. Le sujet,
17:06il est qu'à partir du moment où il y a un arrêt maladie, il y a une suspension immédiate
17:09des congés payés. Donc, il y a un changement de rythme de paye. Je ne bénéficie plus d'une
17:15indemnité compensatrice de congés payés. Je vais devoir être reversé, finalement,
17:19dans le régime de l'assurance maladie. Avec les sujets de carence, d'ailleurs, puisqu'on
17:24sait bien qu'en France, on a trois jours de carence pour les indemnités journalières de sécurité
17:27sociale, on a des jours de carence pour les indemnisations complémentaires qui sont
17:30nécessaires par les employeurs. Donc, le salarié qui va vouloir bénéficier de ce
17:35droit à arrêt maladie pendant ses congés payés, il faut qu'il y en ait qu'il soit conscient
17:39que, possiblement, il ne sera pas payé dès le premier jour. Donc, il ne bénéficie plus
17:45de son indemnité compensatrice de congés payés, mais il ne bénéficiera pas forcément
17:50d'une rémunération. Donc, il y a une articulation en paye qui doit être faite pour faire ce suivi.
17:53Et puis ensuite, il y a une formalisation de tout ce qui est droit au report, de l'information
17:59du droit au report. Donc, il y a des processus RH qui doivent être reparamétrés, reformulés
18:05pour être certains de respecter l'ensemble des contingences administratives.
18:08Pour vraiment s'adapter à cette décision et on voit que les conséquences sont nombreuses
18:13sur l'ensemble des services.
18:15Il y a effectivement de l'administratif RH à réévaluer.
18:21Si vous aviez des conseils pratiques, des bonnes pratiques à donner pour bien adapter
18:28justement cette décision, les conséquences de cette décision pour une entreprise.
18:33Alors, pour une entreprise, il faut être excessivement vigilant, effectivement, à solliciter
18:39le salarié lorsqu'il évoque un arrêt maladie pendant ses congés payés, à bénéficier
18:46de l'acte qui est fondateur, qui est l'arrêt maladie qui émane d'un médecin traitant.
18:52À défaut, on ne rentre pas dans le régime.
18:54Bon, premièrement, c'est d'être certain qu'on est bien dans la bonne case.
18:57Dans quelle case est-on ? Si ton congé payé est-on en arrêt maladie ?
18:59Il faut que les choses soient claires.
19:01Et salarié, si tu veux être en arrêt maladie, est-ce que tu es bien conscient, effectivement,
19:04de l'ensemble des conséquences que ça emporte ?
19:06Si le choix est fait de transférer, finalement, son droit à congé payé et en organisant
19:12le report, là, ce qui est très important, c'est que l'employeur, à l'issue de la
19:17période de congé payé ou de l'arrêt maladie, selon la durée de l'arrêt maladie
19:21versus le congé payé, il va falloir qu'il informe le salarié des droits à congé payé
19:26qu'il a maintenus du fait du report et la période durant laquelle il aura le droit
19:32de pouvoir les reporter matériellement. Et ça, pour les périodes de report, il faut
19:38qu'on se réfère à ce qui a été mis en place par la loi de 2024 sur les congés
19:43payés acquis durant une période de maladie, puisque peu ou prou, ce seront ces règles-là
19:47qui s'appliqueront.
19:48D'accord. On va conclure là-dessus. Merci Arnaud Tessier. Je rappelle que vous êtes
19:51avocat associé chez Capstan.
19:53Merci.
19:54Tout de suite, l'émission continue. On va parler des accords de distribution sélective
19:58à l'aune de la dernière jurisprudence.
20:02La CGE introduit pour la première fois la notion d'obligation parallèle du fournisseur
20:16dans les accords de distribution exclusives. Pour en comprendre les enjeux, nous recevons
20:22aujourd'hui Michel Ponsard, avocat associé du GGC. Avocat, Michel Ponsard, bonjour.
20:27Bonjour Arnaud.
20:28Alors avant de rentrer dans le détail de cette décision de la CGE, vous pouvez rappeler
20:34le contexte de cette décision ?
20:37Avec plaisir. Donc le contexte, c'est la distribution exclusive, c'est-à-dire un accord par lequel
20:42un fournisseur décide de confier la revente de ses produits sur un territoire à un seul
20:48distributeur ou bien auprès d'une clientèle. Pourquoi ce type de distribution présente
20:53un intérêt ? C'est souvent le cas quand le fournisseur ne connaît pas, par exemple,
20:57le territoire et va utiliser ce prestataire pour augmenter ses ventes. C'est aussi un
21:03type d'accord un peu d'intérêt commun, si je puis dire, dans la mesure où le distributeur
21:09va être incité, évidemment, à être performant, à investir parce qu'il bénéficiera de cette
21:13exclusivité. Le contexte, c'est du fromage hollandais, le Bimster, qui était produit par
21:20une société hollandaise, Kono, qui avait choisi la société Beavers pour distribuer
21:25ce fromage en Belgique. Un revendeur qui s'appelait Albert Heine, qui allait acheter
21:31aussi ce fromage auprès de Kono, le revendait en dehors de la Belgique pendant toute une
21:37période, ce qui ne posait évidemment aucune difficulté. Et puis tout à coup, ce revendeur
21:41a décidé de vendre en Belgique le fameux fromage, ce qui a généré un contentieux qui a donné
21:48lieu à cet arrêt de la Cour de justice. Alors on va aller plus en détail dans cette
21:52décision. Comment concrètement la CJE définit l'obligation parallèle du fournisseur ?
21:57Voilà, parce que comme vous l'avez dit, ce qui est très intéressant, c'est que c'est
22:00la première fois que ça se produit. Alors il faut revenir un tout petit peu au texte
22:03applicable. Les textes, c'est un règlement d'exemption par catégorie qui s'applique
22:08aux accords verticaux et donc notamment aux accords de distribution. Ce texte est un texte
22:13directement applicable en droit français parce que c'est un règlement européen et
22:17il fixe une sorte de cadre qui permet aux entreprises de savoir si l'accord de distribution
22:23qu'elle conclut va poser des problèmes de concurrence ou non. Alors c'était un ancien
22:28règlement qui datait de 2010 en fait, le règlement 330 2010 à l'époque des faits et ce règlement
22:35avait pour particularité, c'est pour ça que c'était intéressant de ne pas parler du
22:39tout de l'obligation parallèle. Il définissait simplement le principe. Le principe, c'est
22:44qu'il ne faut pas restreindre les ventes d'un acheteur soit dans un territoire, soit
22:49auprès d'une clientèle, avec une dérogation à cette interdiction, sauf dans le cas où
22:56il y a un territoire exclusif. Donc là, on peut interdire les ventes actives d'un
23:01acheteur à condition qu'il veuille revendre activement vers un territoire exclusif.
23:06Donc ça, c'est le texte qui ne dit rien sur l'obligation parallèle. Et comment
23:09on en est venu à cette obligation parallèle ? Alors, ce qui est assez étrange, c'est
23:14qu'il y a ce qu'on appelle des lignes directrices qui sont des textes moins forts. C'est un
23:17commentaire que fait la commission sur un règlement. Et dans ce commentaire, elle
23:21expliquait quand même que, au paragraphe 51, que quand il y avait un territoire exclusif,
23:26ça supposait quand même que le fournisseur devait protéger le distributeur des ventes
23:31actives vers son territoire. Donc on avait un texte qui ne disait rien et des lignes
23:34directrices qui en parlaient. La Cour est donc saisie de ce problème, puisque Beavers,
23:39le distributeur exclusif, se plaint des ventes dans le territoire belge du revendeur, Albert
23:47Hain. Et la Cour est amenée donc à analyser. Alors, elle fait une analyse en fonction du
23:52contexte, etc. Et elle affirme, là, pour la première fois avec force, sur la base du
23:57règlement, mais elle prend en compte quand même les lignes directrices également, que
24:01quand un fournisseur octroie une exclusivité territoriale, elle s'accompagne nécessairement
24:07de l'obligation pour le fournisseur de protéger le revendeur des ventes des autres revendeurs
24:12dans son territoire.
24:12Il y a une forme de réciprocité, c'est ça ?
24:15Il y a une forme de réciprocité. On ne peut pas donner une distribution exclusive
24:18si on ne garantit pas le distributeur exclusif qu'il ne sera pas attaqué dans son territoire.
24:25Pourquoi ? C'est un peu la logique de la distribution, c'est-à-dire que le distributeur va pouvoir
24:30investir, mais il le fera parce qu'il sait qu'il ne sera pas attaqué par d'autres revendeurs
24:34qui viendraient sur son territoire.
24:36C'est ça le raisonnement de la Cour ?
24:37C'est le raisonnement de la Cour. Alors, ce raisonnement de la Cour, il est intéressant
24:41parce que le caractère, ça va quand même très loin et on verra sur les conséquences.
24:47Ce caractère est basé sur le fait qu'on est sur une dérogation à la dérogation.
24:51C'est-à-dire que finalement, le principe, c'est celui que j'évoquais, c'est que vous
24:55ne pouvez pas, en tant que fournisseur, empêcher un revendeur de restreindre dans sa capacité
24:59de revendre les produits dans un territoire ou auprès d'une clientèle, sauf s'il y a
25:05une exclusivité qui existe. Donc, l'existence de cette dérogation fait que la Cour dit
25:10qu'il faut donc que cette exclusivité soit réelle, qu'elle produise tous ses effets.
25:18Et pour qu'elle soit réelle, ça induit nécessairement qu'il y ait une protection du distributeur.
25:23Alors, ça va même encore plus loin parce que dans cette dérogation à l'interdiction,
25:28la Cour nous dit que ce serait une pratique anticoncurrentielle que de restreindre la liberté
25:33du distributeur. Ça n'est admissible que s'il y a un territoire exclusif.
25:38Donc, il faut que cette dérogation soit parfaitement acquise et contrôlée.
25:43Pourquoi ?
25:44C'est-à-dire qu'on aurait pu imaginer que le fournisseur dise « c'est une obligation
25:48pour moi, l'obligation parallèle, c'est mon problème, à moi de rapporter la preuve
25:51si je ne la rapporte pas. » Quelque part, c'est un engagement illatéral.
25:55La Cour nous dit non parce que c'est une dérogation à une pratique anticoncurrentielle.
25:59Donc, il faut que vous obteniez l'accord des revendeurs.
26:02Elle nous dit trois choses. Elle nous dit un, il faut que vous, fournisseurs, vous ayez fait
26:06une invitation aux revendeurs de ne pas revendre dans le territoire exclusif.
26:10Deux, il faut que les revendeurs aient accepté. Cette acceptation, elle peut être tacite
26:14ou elle peut être expresse. Évidemment, c'est tout le côté tacite qui est problématique,
26:18mais là, il y a une jurisprudence assez établie.
26:20Et trois, en tant que fournisseur, vous devez aussi surveiller un peu les ventes,
26:26le non-respect éventuel de cette obligation parallèle.
26:29Et le dernier point très important de l'arrêt, c'est que la question se posait,
26:33et elle se posait dans l'arrêt, qui était de dire, en fait, il n'y a pas de vente.
26:36Avant que Albert Heine vienne faire ses ventes en Belgique, il n'y avait pas de vente des revendeurs.
26:40Est-ce que ça ne suffit pas à montrer que tout le monde était d'accord
26:43pour ne pas venir vendre dans le territoire exclusif ?
26:45Et la Cour dit quoi, alors ?
26:46Et la Cour dit ça ne suffit pas parce qu'il n'y a pas d'invitation claire de la part du fournisseur.
26:50Et donc, il faut vraiment démontrer, et ça sera au tribunal saisi de le faire,
26:55de l'État membre, il faut démontrer qu'il y a eu une véritable acceptation
27:00au regard du faisceau d'indices qui peut exister.
27:03Alors, on a vu le raisonnement de la Cour, on va s'intéresser aux conséquences pratiques.
27:06Concrètement, quelles sont ces conséquences ?
27:08Alors, les conséquences pratiques, je vais être un peu provocateur,
27:10mais les conséquences pratiques, c'est est-ce que la distribution exclusive
27:13existe toujours en Europe aujourd'hui ?
27:15Pourquoi ?
27:16Premier élément, pardon.
27:18Premier élément, c'est que la conséquence du fait de ne plus être couvert
27:21par le règlement d'exemption, c'est-à-dire que si vous avez un accord
27:24de distribution exclusive et que vous n'êtes pas capable de prouver
27:26que tous les revendeurs ont acquiescé pour ne pas aller vendre
27:30les produits dans le territoire exclusif qui a été alloué,
27:33dans ce cas-là, vous ne bénéficiez plus de l'exemption.
27:36Comme vous ne bénéficiez plus de l'exemption, vous avez dès lors
27:39un risque que votre accord soit nul.
27:41Il va falloir qu'au cas par cas, il y ait une exemption individuelle,
27:44ce qui arrive quand même assez rarement.
27:45Donc, vous avez une fragilité de la clause, mais comme c'est toute
27:48la distribution sélective, voire de tout l'accord.
27:51Première conséquence grave.
27:52Comme je l'indiquais, on s'était interrogé sur le fait de pouvoir se baser
27:58sur l'absence de vente ou bien d'imaginer un système qui aurait été
28:01un peu moins problématique, qui était un système dans lequel, au fait,
28:06au cas par cas, le fournisseur aurait indiqué si c'était possible ou pas.
28:09C'est-à-dire qu'en gros, c'était dire au distributeur,
28:12si vous voulez distribuer ailleurs que dans votre territoire,
28:16un distributeur exclusif, c'est un simple acheteur,
28:18dites-le moi et je vous dirai s'il y a une exclusivité ou quoi.
28:20La Cour nous dit non. La Cour dit, comme il faut un accord,
28:25la validité de l'accord ne jouera évidemment que pour l'avenir et pas pour le passé.
28:29Alors, qu'est-ce que ça veut dire ?
28:30Ça veut dire que si dans votre système, vous avez établi une distribution exclusive,
28:35vous n'avez pas obtenu l'accord de tous les revendeurs susceptibles
28:38de revendre les produits. À partir de là, vous créez une fragilité à l'égard
28:42de votre distributeur exclusif et cette fragilité fait que votre distribution exclusive
28:46n'est malheureusement plus justifiée.
28:48Et donc, ça fragilise complètement tout l'accord, ce qui signifie un certain nombre
28:52de conséquences. La première, c'est que dès que vous entrez en relation
28:57avec un revendeur, il faut, en tant que fournisseur, informer sur l'existence
29:03des territoires exclusifs et interdire les reventes actives dans ces territoires exclusifs,
29:07ce qui est assez complexe.
29:09On va conclure là-dessus. Je vous remercie, Michel Ponsard.
29:12Je rappelle que vous êtes avocat associé chez UGGC Avocats,
29:15également président de l'Association française d'études de la concurrence.
29:18Merci, c'était un plaisir.
29:20C'est la fin de cette émission. Merci de votre fidélité.
29:23Restez curieux et informés. À très bientôt sur Bismarck for Change.
Recommandations
0:52
|
À suivre
14:12
58:02
37:42
3:46
13:44
9:37
9:05
9:26
5:00
12:50
12:13
57:16
13:23
Écris le tout premier commentaire