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  • il y a 4 jours
Ce jeudi 4 décembre, la perte de vitesse de l'Allemagne, que les Français voient de moins en moins comme un modèle économique et social à suivre pour la France, a été abordée par Jean-Marc Daniel et Emmanuel Lechypre dans leur chronique, dans l'émission Good Morning Business, présentée par Erwan Morice, sur BFM Business. Retrouvez l'émission du lundi au vendredi et réécoutez la en podcast.

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Transcription
00:00Bonjour Emmanuel. Bonjour à tous. Face à vous ce jeudi, c'est Jean-Marc Daniel qui s'installe. Bonjour Jean-Marc.
00:06Bonjour. Merci à tous les deux d'être là. Notre sujet aujourd'hui, les Français qui voient de moins en moins l'Allemagne comme un modèle industriel.
00:13En tout cas, c'est ce que nous dit un baromètre réalisé par Odoxa JP. 56%, alors ça reste quand même important, des Français pensent que l'Allemagne pourrait constituer un modèle économique et social pour la France.
00:25Seulement voilà, ils étaient 62% en 2012. Emmanuel, pour vous les Allemands, ils ont perdu la vista ?
00:33Oui, les Allemands, effectivement. Si on regarde quels sont les piliers de la réussite allemande depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, il y en avait quatre.
00:43Il y avait le parapluie militaire américain qui leur a évité quand même des dépenses considérables de défense.
00:48Il y avait l'énergie bon marché, notamment après s'être jetée dans les bras des Russes il y a une vingtaine d'années pour avoir du gaz pas cher.
00:57Il y avait l'euro sous-évalué, mais très nettement sous-évalué par rapport aux marques.
01:02C'est-à-dire que l'Allemagne est rentrée dans l'euro avec un niveau de compétitivité absolument délirant,
01:08qui explique en partie les excédents commerciaux dont Jean-Marc Daniel va nous vanter les mérites dans quelques secondes.
01:14Et puis c'était aussi la spécialisation sur les secteurs qui ont fait la prospérité des Trente Glorieuses, la machine, l'autil, l'automobile.
01:22Qu'est-ce qui reste de ça aujourd'hui ? Rien. Le parapluie américain, il est en train de disparaître.
01:27Le gaz et l'énergie russe bon marché, c'est fini.
01:31L'euro est en train de monter fortement par rapport au dollar.
01:36Et en plus, les secteurs qui ont fait les Trente Glorieuses, ils sont complètement bouleversés.
01:40Prenez l'automobile avec ce qui vient de Chine.
01:42Donc ce n'est pas le petit plan, non, ce n'est pas l'ambitieux sur le papier plan de relance de M. Merz
01:48qui réussira à relancer l'Allemagne.
01:50Ça la maintiendra peut-être à flot.
01:52Mais l'Allemagne, c'est un modèle qui aujourd'hui doit être revu de fond en comble.
01:56À vous entendre, Emmanuel Lechypre, l'Allemagne n'a fait que des mauvais choix.
01:59Elle n'a fait que des mauvais choix.
02:01Allez, je vous cite quand même cette petite phrase que j'adore,
02:03qui était la phrase d'un grand journaliste économique,
02:05puisque vous parliez de la relation entre les Français et les Allemands.
02:09C'était Jean Boissonna qui avait une phrase merveilleuse.
02:11Il disait, les Allemands aiment les Français,
02:15alors que les Français voudraient qu'on les admire.
02:17Et les Français admirent les Allemands, alors que les Allemands voudraient qu'on les aime.
02:20Voilà.
02:21C'est le problème d'un coup.
02:23C'est toute l'ambiguïté de nos relations, mais pour une fois, les Français sont lucides.
02:26Jean-Marc Daniel, l'Allemagne n'a jamais été aussi forte pour vous.
02:30Ah oui, je pense que l'Allemagne est un véritable modèle.
02:33D'abord, concernant l'évolution de l'euro,
02:34je pense qu'Emmanuel est à côté totalement de la plaque pour une raison simple.
02:37L'Allemagne, effectivement, c'est un excédent de la balance des paiements courants
02:41qui est le plus important excédent au monde, 270 milliards de dollars.
02:45Et donc, quand vous avez un tel excédent, vous avez intérêt à avoir une monnaie forte
02:48pour utiliser cet excédent pour acheter des usines, des entreprises,
02:54de la croissance économique dans les pays qui vont avoir de la croissance économique.
02:57Le Japon a fait ça, il s'est tablé sur un taux de change à 1 dollar égale à 75 yens
03:02pour conquérir tout un patrimoine à l'extérieur.
03:06Et maintenant, il bénéficie de la valorisation de ce patrimoine
03:09en faisant baisser son taux de change à 1 dollar égale à 145 yens.
03:13Donc, la seule chose sur laquelle, effectivement, l'Allemagne pourrait nous reprocher quelque chose,
03:17c'est effectivement de ne pas permettre l'appréciation de l'euro
03:21qui donnerait un pouvoir d'achat colossal à l'épargne allemande.
03:24Parce que l'Allemagne a adopté une stratégie qui est en conformité.
03:29Il y a eu l'enquête autodoxe, mais il y a aussi l'article 4 du FMI,
03:32le rapport article 4 du FMI sur l'Allemagne qui est sorti le 28 novembre.
03:35Et que dit cet article 4 ?
03:37Ce rapport du FMI, ils disent effectivement, bon, l'Allemagne va faire un plan de relance,
03:41mais ça ne correspond pas aux enjeux structurels de l'Allemagne
03:44qui sont, d'une part, le vieillissement de sa population
03:47et d'autre part, une focalisation sur l'industrie
03:50alors que l'enjeu, c'est maintenant de passer à la société,
03:52du capitalisme cognitif, de la société post-industrielle.
03:56Et donc l'Allemagne a un handicap, effectivement,
03:58qui est de ce double enjeu.
04:01A ce double enjeu, elle a su répondre d'une part par,
04:04effectivement, un excédent d'épargne
04:06qui lui permet d'aller chercher
04:08l'appareil productif là où il est, en Inde.
04:12Et elle répond non seulement en créant un lien
04:14avec ces pays qui sont émergents,
04:17mais elle crée un lien intellectuel et culturel.
04:20Il y a un autre indicateur
04:21que mettent en avant un certain nombre de spécialistes,
04:23c'est le nombre d'étudiants étrangers dans un pays.
04:26Donc les trois pays où il y a le plus d'étudiants étrangers,
04:28ce sont les Etats-Unis, le Royaume-Uni et l'Australie,
04:31donc les pays anglophones.
04:32Et puis pendant très longtemps, ça a été la France.
04:34La France était le lieu d'accueil, de la transmission,
04:37d'un savoir-faire et d'une certaine forme de culture,
04:40notamment de culture technique et industrielle.
04:41Et l'Allemagne, maintenant, est devenue le quatrième.
04:48À l'heure actuelle, en Allemagne,
04:49il y a 500 490 000 étudiants étrangers en Allemagne.
04:52En France, il n'y en a plus que 4.
04:53Donc attractif, quand même.
04:54Donc l'Allemagne est attractive,
04:55c'est-à-dire que l'Allemagne est en train de créer un lien
04:58entre les endroits où elle va trouver de la croissance,
05:00c'est-à-dire les pays jeunes, des pays émergents,
05:03et son épargne.
05:05C'est toujours ce raisonnement de Jean-Marc.
05:08En gros, on va transformer l'Europe en un gigantesque EHPAD,
05:11qui va finalement gagner de l'argent en plaçant son épargne
05:15là où il y a des gens qui travaillent encore.
05:17Mais la réalité, c'est que ça pose toujours deux problèmes.
05:20C'est que sur le plan des grands équilibres macroéconomiques,
05:22le raisonnement de Jean-Marc, il est imparable.
05:24Sauf qu'il faut rappeler que tout ça ne fonctionne
05:26que pour les gens qui ont de l'épargne.
05:27Or, en France, comme en Allemagne,
05:29il y a beaucoup de gens qui n'ont pas d'épargne,
05:30qui n'auront rien à placer,
05:32et il faudra bien qu'ils aient quand même un boulot
05:33pour gagner leur vie.
05:34Et puis la réalité, c'est que Jean-Marc fait fi,
05:37dans son raisonnement, de tout l'impact
05:38sur le plan social, sociétal, économique,
05:42aménagement du territoire,
05:43d'avoir des usines chez nous,
05:45et d'avoir des entreprises.
05:46Donc moi, je déteste son modèle défaitiste de...
05:51Non, mais je réponds à ça.
05:52De l'épargne, allez-y.
05:54Deux choses sur l'épargne.
05:55Encore une fois, un pays qui dégage 268 milliards d'euros,
05:59enfin de dollars d'épargne,
06:00est un pays qui dégage d'excédent,
06:02est un pays qui épargne.
06:03C'est le premier épargneur au monde, l'Allemagne.
06:05Et donc, elle a les moyens de son ambition en termes de conquête
06:08de la planète par son épargne.
06:10Et la deuxième chose, on peut dire, effectivement,
06:12c'est triste qu'on vieillisse,
06:14mais c'est un fait.
06:16Alors on peut dire, ah non, pas d'EHPAD, pas d'EHPAD.
06:18Il faudra des EHPAD.
06:20Il faudra des EHPAD à Munich,
06:22il faudra des EHPAD à Francfort,
06:23et on les prépare.
06:25Mais il faudra des EHPAD à Paris,
06:26il faudra des EHPAD à Lyon,
06:27et on ne les prépare pas.
06:28C'est peut-être ça l'avenir de l'Europe,
06:29le business de l'EHPAD aussi.
06:30Exactement, il faut l'accepter,
06:32il faut être lucide.
06:33Emmanuel Lechypre, Jean-Marc Daniel,
06:35tous les matins, le débat des éditorialistes.
06:37Merci beaucoup, messieurs.
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