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  • il y a 16 heures
Ce mercredi 19 novembre, Benoit Peloille, CIO chez Natixis Wealth Management, s'est penché sur les incertitudes sur le rallye de fin d'année, et le financement de la tech mise sur l'obligataire, dans l'émission BFM Bourse présentée par Guillaume Sommerer. BFM Bourse est à voir ou écouter du lundi au vendredi sur BFM Business.

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Transcription
00:00Benoît Peloual nous rejoint à 15h44. Bonjour Benoît.
00:03Bonjour Guillaume.
00:04Directeur de l'investissement pour Natixis Wealth Management.
00:06Vous allez, Benoît, rendre votre verdict et le prononcer dans un instant.
00:10Cet instant, ce moment qu'on va vivre, ce verdict, est-ce que vous l'assumez ?
00:14Tout à fait Guillaume.
00:15On vous écoute.
00:16Eh bien écoutez, ce verdict, c'est que j'estime que les marchés ont de bonnes raisons de s'inquiéter
00:21pour le traditionnel rallye de fin d'année.
00:23Oh ! Oh non !
00:26Vous n'êtes pas de ceux qui pensent que le repli actuel des marchés, au contraire, ouvre la voie à un rallye de fin d'année ?
00:31C'est un peu tôt. Il faudrait un repli probablement un peu plus important pour ce type de configuration.
00:36Mais c'est vrai qu'il y a des vrais signes de nervosité parce qu'on est quand même, l'année est déjà très largement avancée.
00:43On est un peu dans la dernière ligne droite avant la fin de l'année, même s'il reste encore un peu de temps.
00:47Mais on est dans une année où on a déjà des gains assez significatifs réalisés sur les marchés actions.
00:51Et surtout, c'est déjà la troisième année consécutive de gains à deux chiffres sur les marchés actions.
00:56Donc, de ce fait-là, la tentation des prises de bénéfices est déjà relativement importante.
01:01Mais surtout, on voit qu'il y a des vrais signes tangibles de nervosité.
01:05Déjà, si on regarde cette année 2025, que ce soit la volatilité implicite ou la volatilité réalisée,
01:12dans les deux cas, elle est assez significativement remontée.
01:14Le VIX moyen, donc cette volatilité implicite, il est autour de 17 en 2025.
01:18On était plutôt à 14 les années précédentes.
01:21Et la volatilité historique, on le constate, on a eu plus de volatilité depuis le début de l'année,
01:25ce qui fait que cette très bonne performance, elle est de moins bonne qualité.
01:30C'est-à-dire qu'il a fallu prendre plus de risques pour générer cette très bonne performance.
01:35Et puis, dans les mouvements de marché, 2025 se caractérise par une année avec plus de nervosité
01:40puisqu'on a le record du nombre de mouvements en variation quotidienne sur des titres qu'on qualifie d'inhabituels.
01:48Deux ou trois écarts-types sur une seule et même séance.
01:50Et même en taille de capitalisation, on n'a jamais eu autant de mouvements journaliers
01:54qui dépassaient les 100 milliards de dollars sur certains titres.
01:56Donc, il y a vraiment des signes tangibles de nervosité à l'approche de la fin de l'année.
01:59De la nervosité, mais est-ce que le marché ne recule pas sur des peurs plus que sur des réalités ?
02:03Il craint une bulle IA et une déception de la Fed.
02:06Pour l'heure, aucun des deux n'est avéré ni un accident dans l'IA, ni la fin des baisses de taux de la Fed.
02:11On craint tout ça, mais ça n'a pas encore été avéré, ça ne s'est pas matérialisé.
02:15Est-ce que du coup, cette baisse des marchés, cette correction, ne se fait pas un peu dans le vide malgré tout ?
02:19Plus sur des effets psychologiques que sur de la réalité ?
02:21C'est vrai que la question se pose, notamment sur...
02:24Il n'y a pas une raison exclusive, bien évidemment, au contexte qu'on traverse aujourd'hui,
02:29mais un empilement de raisons.
02:30Et effectivement, les deux qui ressortent principalement, c'est cette inquiétude sur cette baisse de taux
02:35attendue pour le meeting de décembre pour la Fed et les questions autour de cette problématique de bulle
02:41et de valorisation de la tech.
02:42Si on regarde ces deux raisons, pourquoi c'est si important et pourquoi il y a autant de nervosité ?
02:46Parce que c'est tout simplement les deux piliers sur lesquels les marchés ont monté ces deux dernières années.
02:49C'est les anticipations de baisse de taux et donc de politique monétaire plus accommodante
02:52et l'enthousiasme autour de la tech et de l'intelligence artificielle.
02:56C'est vrai qu'il y a du psychologique du côté, surtout, de la réserve fédérale américaine
03:00parce qu'en réalité, en un mois, on a eu un effondrement des probabilités de baisse de taux
03:06d'après les marchés, alors qu'il n'y a pas eu de statistiques macroéconomiques publiées entre-temps
03:11puisqu'on était en plein shutdown.
03:12En fait, ce qui a généré ça...
03:13Il y a un mois, le marché probabilisé à 98% de baisse de taux en décembre.
03:17Et aujourd'hui, on est à 40%.
03:19Et surtout, ça s'est fait sans statistiques majeures.
03:23Qu'est-ce qui s'est passé ?
03:23C'est que tout simplement, on a les déclarations des membres de la Fed
03:27qui prennent régulièrement la parole lors des conférences.
03:29Et en fait, on s'aperçoit qu'en dehors de ceux qui sont un peu, je dirais,
03:32acquis à la cause des baisses de taux, dont on le sait,
03:35qui sont peut-être même entachés d'un peu de collusion politique avec l'administration Trump,
03:40les autres membres de la Fed n'ont pas été nombreux à se mouiller,
03:43à se battre pour militer pour une baisse des taux.
03:45Et donc, c'est surtout cet effet, et c'est là où il y a une dimension psychologique
03:48qui a été importante dans les dernières semaines,
03:50qui a fait fortement baisser ses probabilités de baisse de taux.
03:53Parce que du côté des statistiques,
03:55alors il y a quand même du tangible avec l'inflation,
03:57parce qu'on n'a pas eu beaucoup de statistiques,
03:58mais le dernier chiffre de l'inflation,
04:00l'inflation est toujours au-dessus de l'objectif,
04:02mais surtout la trajectoire n'est pas très bonne.
04:04On s'aperçoit qu'on a effectivement un impact des droits de douane,
04:07les produits sensibles aux droits de douane,
04:09comme les vêtements, l'ameublement, les jouets pour enfants,
04:12il y a quand même une pression inflationniste.
04:14Et ça suffit peut-être pour maintenir cette inflation un peu plus persistante,
04:18mais surtout, ça fait qu'elle s'éloigne en termes de trajectoire de l'objectif.
04:22Alors que du côté de l'emploi,
04:24il n'y a pas eu de statistiques qui montrent une amélioration,
04:25mais il n'y a pas eu de dégradation non plus
04:27qui exigerait que la FED soit obligée d'intervenir.
04:29Alors, on parlait de bulles de l'IA éventuelles.
04:33Bon, elle a aussi légitimement le droit
04:36de se dégonfler tranquillement, progressivement,
04:39pas forcément d'exploser totalement.
04:42Il n'y a pas eu, pour l'instant, d'événements de nature
04:44à créer une telle rupture que tout ça vole en éclats ?
04:47Non, absolument pas.
04:48Et pour l'instant, on est dans une phase
04:50où on diminue le risque des portefeuilles
04:52à l'approche de la fin de l'année
04:54et d'une année qui est plutôt bonne.
04:56Et c'est là où il faut être vigilant
04:57et c'est là où il y a potentiellement un risque
05:00sur ce traditionnel rallye de fin d'année.
05:02C'est qu'il y a quand même matière à revisiter
05:04un petit peu l'investment case autour
05:05de la technologie aux Etats-Unis.
05:08Il y a matière à discuter cette situation de bulle.
05:11Déjà, si on regarde,
05:12il faut bien avoir en tête que
05:13la grande force de la technologie
05:15qui justifie ces niveaux de valorisation,
05:17c'est la dimension très qualité du secteur,
05:19c'est-à-dire la visibilité sur les revenus,
05:21une très grande qualité en termes de génération de cash flow.
05:24Mais si vous regardez le rallye depuis fin avril,
05:26ce n'est pas du tout un rallye en faveur de la qualité.
05:28Il y a eu mieux en termes de performance
05:30que les 7 magnifiques.
05:31Il y a toute la technologie non profitable.
05:33Ces sociétés qui ne génèrent aucun profit
05:34ont fait mieux que les 7 magnifiques.
05:37Ce qu'on appelle le S&P high beta,
05:39c'est-à-dire les valeurs du S&P au beta le plus élevé,
05:41c'est-à-dire plus risquées que la moyenne,
05:43très largement surperformées.
05:44En fait, ce rallye est caractérisé
05:46par un appétit assez féroce pour le risque.
05:49Donc ça, ça montre bien
05:50qu'il y a cette dimension qualité
05:51qui n'a pas été l'élément majeur
05:53dans la construction de ce rallye.
05:55Et surtout, et c'est là où il y aurait matière
05:57à avoir effectivement,
05:59à valider les commentaires
06:00autour d'une correction plus importante,
06:02c'est que cette dimension qualité de la tech
06:04commence à être un peu discutée.
06:07Cette visibilité sur les profits,
06:09on va voir là NVIDIA ce qui va être publié,
06:11mais quand on fait de tels investissements
06:12d'infrastructures et dont on sait
06:15qu'il va falloir générer des montagnes
06:17de chiffres d'affaires à l'avenir
06:18pour pouvoir les rentabiliser,
06:20on commence à avoir quelques doutes justement
06:22sur cette génération de profits à l'avenir.
06:24On commence à avoir un peu moins de visibilité là-dessus.
06:26Et l'autre élément, l'autre grande force de la tech,
06:30c'était que le secteur de la tech
06:31auto-finançait tous ses investissements
06:33et était un secteur avec peu d'intensité capitalistique.
06:37Les investissements qui sont réalisés
06:38dans les data centers
06:38augmentent significativement
06:40l'intensité capitalistique
06:41et commencent à être faits
06:42à coups de dettes et plus auto-financées.
06:44Ça dégrade la perception du secteur.
06:46On l'a vu cette semaine encore,
06:47les émissions d'Amazon,
06:49Alphabet depuis le début de l'automne,
06:51il y a eu Meta également, Oracle.
06:52C'est vrai, mais ça peut aussi être
06:54tout simplement de la gestion du capital.
06:55Ce n'est pas forcément le signe
06:56qu'il manque d'argent.
06:57Ça peut être aussi une saine gestion du capital.
06:59Quand on lève de la dette, par exemple,
07:01les intérêts d'emprunts sont déductibles fiscalement.
07:04Il y a là-dessus une forme d'optimisation du capital
07:05de la part de ces gens de la tech.
07:06Donc, est-ce qu'il faut forcément y voir le signe
07:08qu'ils n'ont peut-être pas les moyens de leurs ambitions ?
07:10Non, c'est peut-être juste de la gestion.
07:12C'est ça.
07:12Et c'est pour ça que nous, on reste assez convaincus
07:14que ce n'est pas forcément le risque d'éclatement d'une bulle
07:18et qui se transforme en une forme de crise
07:20et une répétition de ce qu'on a vu
07:21au début des années 2000,
07:23mais plus une correction qui peut apparaître
07:25assez significative,
07:26qui peut en tout cas être un peu plus significative,
07:28simplement, parce qu'on va revenir
07:29sur un scénario un peu plus normal
07:31en termes de perspective de croissance,
07:34prendre en compte ces investissements
07:35qui peuvent apparaître un peu déraisonnables
07:38et les faire revenir un peu à la réalité.
07:40Et c'est pour ça que, si effectivement,
07:42on voit cette correction se matérialiser,
07:43en tout cas être un peu plus significative,
07:45c'est quelque chose qui constituera vraisemblablement
07:47une opportunité pour remettre un peu de risque
07:49dans les portefeuilles.
07:49Donc pour vous, même si les marchés ont commencé déjà
07:51à baisser depuis plusieurs séances,
07:53ça doit continuer ?
07:53De quelle ampleur ça doit continuer
07:55pour arriver, on va dire, au juste prix
07:57ou à quelque chose d'un peu moins bulle-esque ?
07:58Bien évidemment, si on exclut l'hypothèse
08:01un peu catastrophe d'un vrai éclatement de la bulle
08:04et du retour de crainte importante de récession
08:06à cause de ça, vu le caractère macro
08:08de la tech dans l'économie américaine,
08:10on peut encore perdre assez facilement 10%
08:13sur les niveaux actuels.
08:14S&P 500 qui repasserait justement
08:17sous les 6000 points,
08:17c'est tout à fait envisageable,
08:19sans avoir un scénario extrêmement agressif.
08:22Il suffit que la Fed ne soit pas en capacité
08:24de délivrer les baisses de taux attendues
08:25ou en tout cas qu'elle matérialise un scénario
08:27plus progressif de ce point de vue-là
08:29et que l'économie américaine
08:30ralentisse de façon tangible
08:32et vienne simplement s'acheminer
08:33sur ce qui est attendu dans le consensus économiste,
08:35c'est-à-dire en dessous des 2%
08:36pour l'année 2025.
08:38Et puis alors, ça ajoute à tout ça un volcan
08:39qu'on n'avait pas forcément vu.
08:41On le pensait comme une île
08:42au milieu des marchés.
08:42C'est Alain Pitos qui emploie cette image.
08:44Le Japon, considéré comme une île paisible
08:47au milieu des marchés,
08:48on se rend compte que cette île est volcanique
08:50et elle est en train d'envoyer
08:51des signaux d'éruption.
08:52Les taux obligataires japonais
08:53sont aujourd'hui là,
08:53aujourd'hui même sur des taux de 17 ans.
08:55Est-ce que c'est un risque aussi
08:56pour les marchés occidentaux,
08:57ce qui se passe au Japon ?
08:58Alors oui, à notre sens,
09:00ça n'a rien de paisible justement
09:01pour les marchés financiers.
09:02Au contraire, c'est quelque chose
09:03qu'il faut surveiller avec grande attention.
09:05On s'est beaucoup focalisé
09:06sur la dimension politique
09:07autour de la Fed
09:08et le risque d'ingérence politique.
09:10On a au Japon un exemple typique
09:13où on assume quasiment un accord
09:16entre la politique fiscale
09:18et la politique monétaire.
09:19Et c'est là où effectivement
09:20ça peut sembler assez dangereux
09:22parce qu'on peut tout à fait vivre un instant
09:24comme on l'a vécu aux Etats-Unis.
09:26C'est-à-dire que tout simplement,
09:28on met en doute la volonté,
09:30la détermination de la Banque centrale du Japon
09:32à lutter contre l'inflation.
09:33On lui prête l'intention
09:34de plutôt vouloir financer le gouvernement
09:35qui veut beaucoup dépenser.
09:37Et donc on a un risque de perte de confiance
09:39si ça se matérialise
09:40sur les actifs japonais.
09:41Le problème, c'est que comme les Etats-Unis,
09:43peut-être dans une moindre ampleur,
09:44mais le rôle que joue l'économie japonaise
09:47et notamment les actifs financiers japonais
09:49dans l'ensemble des marchés financiers mondiaux
09:51pourrait faire des vagues relativement importantes.
09:53On se souvient de ce qui s'était passé
09:55de façon un peu semblable
09:57avec le mini-budget de l'East Trust
09:59il y a maintenant deux ans.
10:01Donc oui, c'est quelque chose
10:02à surveiller avec beaucoup d'attention.
10:03Le Japon, ce sont des volcans,
10:05il ne faut pas l'oublier,
10:05des volcans aussi au milieu des marchés.
10:07Merci beaucoup de nous avoir accompagnés aujourd'hui.
10:09Benoît Pelloisle pour Natixi,
10:10Sous-titrage Société Radio-Canada

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