BSMART était présent le 27 novembre à Bercy, au Ministère de l’Économie et des Finances, à l’occasion de la 5ᵉ édition du Sommet de l’Inclusion Économique organisé par la Fondation Mozaïk.
Laure Kermen, Directrice de l’Engagement Societal & DG de la Fondation du Groupe ADP, a participé à l’événement aux côtés de nombreux leaders et dirigeants d’entreprises et d’institutions. Nous lui avons posé quelques questions sur sa vision de l’inclusion et sur les engagements qu’il porte autour de cet enjeu essentiel pour notre société.
00:00ADP s'engage depuis 10 ans sur le sujet de l'inclusion avec sa fondation.
00:11Quel regard portez-vous sur votre action alors que nous fêtons cette première décennie ?
00:15Je porte un regard plutôt positif, mais avec un goût de... c'est pas encore suffisant.
00:24Donc effectivement, 10 ans de fondation avec un couloir de nage qui est l'éducation,
00:31prévention de l'illettrisme et du décrochage scolaire sur nos territoires, autour de nos plateformes.
00:36C'est vraiment la caractéristique chez nous, c'est que toutes nos actions sont tournées vers nos parties prenantes territoriales.
00:46Je ne vais pas m'occuper du territoire de Toulouse, je ne gère pas les aéroports de Toulouse et je ne connais pas le territoire de Toulouse.
00:51Et donc, je travaille avec le territoire que je connais.
00:55C'est forcément un choix de long terme que nous avons fait.
01:0010 ans, c'est une première étape, c'est une première étape de maturité, on va dire.
01:06Et on s'attaque à partir de cette année à mieux mesurer l'impact des actions que nous menons en partenariat avec nos associations, avec les associations.
01:18Et c'est un travail de co-construction que nous avons fait pendant toute l'année 2024-2025 et qui va, là, à partir de maintenant, nous permettre vraiment de mesurer cet impact
01:30et de savoir où on a des trous dans la raquette, où on a des biais, qu'est-ce qu'on peut améliorer, qu'est-ce qu'on peut augmenter, qu'est-ce qu'on doit arrêter,
01:40parce que des fois, on a des fausses bonnes idées.
01:42Voilà, donc c'est vraiment un travail au quotidien avec les territoires, avec nos parties prenantes,
01:47pour faire en sorte que les jeunes de ce territoire, tous les jeunes de ce territoire, aient les mêmes chances d'orientation, d'accès à la formation, d'accès à l'emploi,
01:58et notamment sur l'écosystème aéroportuaire.
02:01Alors vous connaissez bien cette fondation pour la diriger depuis sa création, on vient de parler du bilan,
02:06parlez-nous des 10 prochaines années et de la chose que vous devez adresser et qui reste à bâtir.
02:11La petite enfance, alors ça va vous paraître étrange vu notre activité, mais on est convaincus que plus on attaque tôt ce sujet de l'éducation,
02:27de l'accès au savoir, de l'accès à l'apprentissage avec les parents, dès la naissance des enfants,
02:35plus on explique aux parents à quel point la dimension cognitive de leur enfant se fait dès la naissance,
02:42qu'ils peuvent leur parler dans n'importe quelle langue, ça n'a absolument aucune importance,
02:47si ce n'est pour leur culture évidemment familiale, mais que ces connexions neuronales sont hyper importantes.
02:56Le gamin, il apprendra le français quand il rentrera à la maternelle,
02:58et c'est des cerveaux, on le sait, de 0 à 5 ans qui sont des éponges absolues où ils peuvent apprendre plusieurs langues, etc.
03:07Par contre, la connexion neuronale, elle se fait jeune.
03:11Et donc expliquer à des mères seules, souvent sur nos territoires, à des pères, aux professionnels de la petite enfance,
03:21que parler, raconter des histoires, lire, chanter, tout ça va être un bagage fabuleux pour leurs enfants
03:30quand ils vont rentrer dans la période plus académique qu'on considère aujourd'hui encore au CP,
03:36plus ces jeunes seront sur deux, seront en capacité de faire des choix, seront à l'aise, si j'ose dire,
03:50aussi avec la société dans laquelle ils vivent, et plus, et je raccorde, c'est comme ça que je raccorde aussi l'inclusion,
03:58c'est que quand ils arrivent en emploi, ils auront cette sécurité, si j'ose dire, à la fois de leurs compétences,
04:10parce qu'ils auront eu des études qu'ils auront choisies, quelles qu'elles soient.
04:14Je ne parle pas forcément d'études Bac plus 12, je parle de tout niveau d'études, de tout niveau socioculturel,
04:22et qu'il n'y ait plus cette espèce d'auto-censure qu'il y a beaucoup encore aujourd'hui chez les jeunes,
04:28qui fait que quand ils arrivent dans une entreprise, quand ils ont réussi le recrutement,
04:34qu'ils arrivent dans une entreprise, ils ne se sentent pas forcément à l'aise avec les codes de la société,
04:39avec les codes de l'entreprise. Alors ça nécessite par ailleurs que l'entreprise fasse une intégration,
04:45qui soit une intégration adaptée, bien évidemment, mais qu'ils se projettent et qu'ils se disent,
04:51« Oui, moi, je peux devenir directeur. »
04:54J'ai le droit.
04:55J'ai le droit, j'ai parfaitement le droit. Je suis dans cette société, au sens large du terme,
05:00je suis dans cette entreprise et donc j'ai cette capacité à me projeter et j'en ai les moyens
05:05et on va m'aider aussi à les acquérir en interne.
05:09Laure Carmen, quel est le préjugé qui vous met en rogne aujourd'hui et qui doit être vaincu en priorité ?
05:13Ce n'est pas vraiment un préjugé, c'est un mot, le mot impossible, mais insupportable.
05:19Une phrase qui commence par « C'est impossible, c'est difficile, ça va être compliqué »,
05:29c'est insupportable.
05:30Qu'on puisse me dire « Ok, je comprends ce que tu veux dire, je comprends où tu veux aller,
05:37on va se donner les moyens », quitte à se dire à un moment donné « On n'y arrive pas »,
05:42mais au moins se donner les moyens, mais commencer une phrase sur la base d'une idée à développer
05:50et qu'on me dise « C'est impossible », alors là pour moi c'est le pire de ce qu'on peut me dire.
05:55On entend aujourd'hui que l'inclusion c'est une opportunité et c'est vrai,
05:58mais on a ce challenge quand même de la mesure. Comment mesure-t-on ?
06:02Là je parle donc à la directrice de l'engagement sociétal, côté groupe, côté corporate.
06:08Comment est-ce qu'on mesure l'impact économique mais aussi extra-financier d'une politique d'inclusion ?
06:12C'est un sujet méga ardu, on se creuse tous la tête et on essaie de trouver des indicateurs
06:18qui soient les plus pertinents possibles.
06:20Notre diversité dans l'entreprise a un instant T, et donc en 2026 ou en 2025,
06:27c'est ça, c'est factuel, c'est un point de départ.
06:31Je pense que l'enjeu ça va être comment on recrute pour les dix prochaines années,
06:38et ça tombe bien puisque nous avons un renouvellement de nos effectifs de 50% chez ADP dans les dix prochaines années.
06:44Donc c'est le moment ou jamais de se poser les bonnes questions et de poser les bons indicateurs,
06:50et de se dire est-ce que notre performance économique, modulée du contexte économique, etc.,
06:57qui est, vous l'avouerez en ce moment, pas le plus funky du monde,
07:00mais quand même, est-ce que dans dix ans, notre performance est meilleure ?
07:06Je suis convaincue que oui.
07:07Est-ce qu'on aura fait de ce virage générationnel une opportunité ?
07:11Absolument, absolument.
07:12Si les participants devaient repartir aujourd'hui avec une seule conviction après ce sommet,
07:16laquelle souhaiteriez-vous que ce soit ?
07:18C'est possible.
07:19C'est possible, c'est votre baseline ?
07:21Évidemment. Au possible, nous sommes tenus.
07:23Comment est-ce qu'on va chercher les invisibles et les isolés ?
07:26Comment est-ce qu'on va leur dire que c'est possible ?
07:28Je ne parle pas de ceux que vous aurez pu accompagner dès la fondation,
07:31je parle des autres, ceux qui n'ont pas eu cette chance.
07:32Absolument.
07:33Ils sont invisibles, ils ne sont pas là.
07:34Absolument.
07:35Comment on y va ?
07:36On y va avec un dispositif qu'on a mis en place qui s'appelle AeroWork,
07:42qui est une plateforme de recrutement complètement atypique.
07:45On ne vous demande pas votre CV, on ne vous demande pas où vous habitez.
07:50On vous pose 20 questions.
07:53Des questions aussi surprenantes que les copains débarquent à 19h,
07:58vous faites quoi ?
07:58Est-ce que vous allez commander chez Uber ?
08:01Ou est-ce que vous faites un melting pot de ce qu'il y a dans votre frigo ?
08:04Enfin, voilà.
08:0520 questions de ce type-là qui vont faire ressortir des soft skills.
08:09Et en fait, c'est ça qu'on va aller chercher.
08:11C'est ça qu'on va aller matcher avec des compétences dont on a besoin.
08:15Quitte à former ensuite.
08:17Ce n'est pas dur finalement de former.
08:19Le plus dur, c'est les compétences intrinsèques de base que peuvent avoir les gens.
08:23Et comment on a fait ça ?
08:25On a créé ce logiciel, évidemment, cette plateforme.
08:29Mais on a surtout été faire appel à des influenceurs territoriaux.
08:34Ce n'est pas dans notre mindset d'aller chercher, recruter avec des influenceurs territoriaux
08:39qui sont très connus sur notre territoire.
08:41Et qui, eux, arrivent à toucher ces jeunes qui ne sont ni chez Pôle emploi,
08:46ni chez France Travail, pardon, ni dans les missions locales,
08:50qui sont sous les radars.
08:52Et là, on a vu émerger par le biais des réseaux sociaux,
08:56via TikTok, via Insta, via des réseaux qui ne sont pas les réseaux habituels de recrutement,
09:04on a vu émerger tout un tas de candidatures assez étonnantes
09:10et dont un certain nombre ont intégré les entreprises de la communauté aéroportuaire
09:16sur des postes où ils n'auraient jamais imaginé qu'ils puissent être et qu'ils puissent candidater.
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