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  • il y a 50 minutes
Stéphane Boujnah, président du directoire d'Euronext, était l'invité de Laure Closier dans Good Morning Business, ce lundi 15 décembre. Ils ont abordé le nouveau élan de la Bourse grecque, les problématiques liés aux IPO parisiennes, et les discussions autour du budget 2026, sur BFM Business. Retrouvez l'émission du lundi au vendredi et réécoutez la en podcast.

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00:007h44 sur BFM Business et sur AMC Live. Notre invité ce matin dans le grand entretien c'est Stéphane Bougna.
00:05Bonjour, vous êtes le président du directoire d'Euronext. On parle évidemment de marché de capitaux, des critiques contre la bourse européenne.
00:11Mais avant je voudrais qu'on parle de la Grèce, le nouveau président de l'Eurogroupe est grec.
00:16Vous venez de boucler le rachat de la bourse d'Athènes. Il faut quand même se souvenir d'où on vient en 2012 avec la Grèce
00:21qui aurait pu sortir de la zone euro. Aujourd'hui il y a une remontada folle du pays.
00:28Comment vous voyez aujourd'hui les opportunités en Grèce ? Est-ce que c'est là qu'il y a un marché dynamique boursier ?
00:34Oui, nous avons eu les premières conversations avec les autorités grecques au mois de juin-juillet.
00:38Et nous avons finalisé cette opération mi-novembre parce qu'il se passe des choses absolument impressionnantes en Grèce
00:45en termes de, non seulement de compte public, mais ça c'est la partie émergée.
00:48Vous savez que la Grèce va avoir l'année prochaine son troisième ou quatrième budget en excédent.
00:54C'est un pays qui rembourse par anticipation sa dette.
00:57C'est un pays qui a envoyé un chèque d'à peu près un milliard à la France pour rembourser par anticipation
01:01une partie des prêts qui avaient été faits au moment de la grande crise financière.
01:06Et c'est un pays où il y a une confiance dans la mondialisation, dans l'intégration dans les marchés de capitaux européens
01:14qui est très forte. Là vous avez mentionné que Kyriakos Periakakis, la ministre des Finances grecque,
01:18la semaine dernière a été élu président de l'Eurogroupe.
01:21On est dans cette situation absolument savoureuse où le successeur de Varoufakis,
01:25le ministre grec qui négociait pour Tsiriza et Tsipras avec la Troïka,
01:31le successeur de Varoufakis succède à Jeren Desselblom, qui était le ministre néerlandais qui représentait la Troïka.
01:38Donc on a vraiment un retournement et il y a derrière tout ça surtout une réalité industrielle et commerciale et financière.
01:46Vous avez beaucoup de très belles entreprises grecques qui sont pour le moment cotées en dehors de Grèce
01:51parce que le marché grec était trop étroit.
01:53Et qui envisagent de revenir, de faire des doubles cotations ?
01:56Des doubles cotations dans un premier temps, peut-être des rapatriements.
01:59D'un seul coup, quand le marché grec dans quelques mois sera connecté au marché unique d'Euronext en Europe,
02:08au lieu d'être coté en Grèce, vous serez connecté à un marché dont la taille, je le rappelle,
02:12est à peu près deux fois supérieure à celle de Londres.
02:15Chaque jour, on échange à peu près 12 milliards d'euros d'actions sur le marché unique intégré d'Euronext.
02:21C'est deux fois la taille des volumes, un peu plus de deux fois la taille des volumes échangés à Londres.
02:24Et la capitalisation boursière agrégée du marché intégré européen d'Euronext,
02:29c'est 6500 milliards, c'est plus de deux fois la taille de Londres et trois fois la taille de Francfort.
02:34Donc c'est là que se concentre la liquidité, en tout cas pour les marchés actions en Europe.
02:40Est-ce que vous êtes assez gros aujourd'hui ? L'Italie, la Grèce, est-ce qu'il y a d'autres places de marché que vous pourriez racheter ?
02:46Vous savez, les acquisitions, c'est un sport d'adulte consentant.
02:51C'est-à-dire que nous sommes, nous, acheteurs, mais il faut qu'il y ait des vendeurs.
02:56Et donc il y a effectivement des infrastructures, par exemple les infrastructures nordiques,
03:00où nous sommes très présents dans le cadre du groupe qui appartiennent aujourd'hui à Nasdaq Nordics,
03:06donc filiale du groupe Nasdaq, qui pourrait nous intéresser.
03:09Mais Nasdaq, à ce jour, n'a pas l'intention de céder ses activités.
03:12Il y a les activités du groupe SIX, le groupe suisse SIX, en Espagne, autour de BME,
03:17qui pourraient nous intéresser, qui nous ont intéressés dans le passé.
03:19Mais aujourd'hui, il n'y a pas de vendeurs.
03:22Donc il faut être invité par un propriétaire, par une équipe de gestion, par des autorités locales.
03:29Et pour le moment, on a des dialogues un peu partout en Europe,
03:32mais il n'y a pas de choses qui pourraient évoluer.
03:36Il y a des aspirations.
03:38Le chancelier Mers a indiqué qu'il souhaitait que l'Europe évolue vers une seule grande plateforme très liquide.
03:44Nous, nous sommes un peu le socle de ce que pourrait être cette consolidation.
03:49Nos amis allemands opèrent à la Bourse de Francfort, qui représente une toute petite partie de leur activité.
03:55La Bourse de Francfort, c'est moins de 5% des revenus du groupe Deutsche Bourse.
03:59Mais à ce jour, nos amis...
04:01Mais ça pourrait vous intéresser un jour, de racheter Deutsche Bourse.
04:03De racheter en tout cas l'activité boursière du groupe Deutsche Bourse.
04:09Le groupe Deutsche Bourse fait plus de 90% de son activité en dehors de la Bourse,
04:14en dehors des activités de la Bourse.
04:16Et donc, il y a des choses sur ce terrain-là qui pourraient intéresser.
04:20Si on nous demande, et si on a l'opportunité d'approfondir notre rôle,
04:26qui est de connecter l'économie réelle européenne aux marchés mondiaux,
04:30de donner de la puissance aux marchés mondiaux pour financer l'économie réelle,
04:36de connecter ses économies locales avec les marchés européens, on le fera.
04:40Mais vous parlez de liquidité.
04:42Aujourd'hui, il n'y a pas beaucoup d'IPO.
04:44Il y en a deux cette année à la Bourse de Paris.
04:46Il y en a eu quatre l'année dernière.
04:48Il y a parfois des critiques qui sont virulentes.
04:50Je voudrais vous faire écouter ce que disait récemment sur notre antenne Michael Fribourg.
04:54C'est le patron de Chargeur.
04:55Si j'ai un conseil à donner aux entreprises qui envisageraient de s'introduire à la Bourse de Paris,
05:02je leur dis, le faites surtout pas.
05:04Surtout pas.
05:05Pour deux raisons.
05:06D'abord, parce que traditionnellement, les Français, quand même, à part ceux qui vous regardent,
05:09n'aiment pas beaucoup la Bourse.
05:10Deuxièmement, parce qu'il n'y a pas de capitaux longs en France,
05:13parce qu'il n'y a pas de retraite par capitalisation.
05:15Et puis, troisièmement, parce que les organisateurs eux-mêmes de la Bourse à Paris,
05:20notamment Euronext, nous semblent finalement assez peu enclins à soutenir les valeurs moyennes.
05:24Si vous pouvez me citer des valeurs moyennes, de taille moyenne,
05:27qui sont devenues des multi-billions vélues au cours des dix dernières années,
05:32alors je vous tire mon chapeau.
05:34Il n'y en a pas.
05:35C'est une critique qu'on entend régulièrement sur le plateau de BFM Business.
05:38Qu'est-ce que vous lui répondez ?
05:40Moi, je ne suis pas d'accord du tout avec ce que dit ce monsieur, pour trois raisons.
05:44D'abord, il y a plus d'investisseurs particuliers maintenant qu'autrefois,
05:49et notamment des investisseurs jeunes qui ont commencé dans le Bitcoin
05:54et qui s'intéressent à la classe action.
05:56Deuxièmement, il y a un momentum sur l'épargne-retraite.
06:00On n'est plus en retard qu'aux États-Unis.
06:01Évidemment, aux États-Unis, si vous voulez, la Fribo a raison,
06:05si vous voulez aux États-Unis avoir de l'argent quand vous êtes vieux,
06:08il faut acheter des actions quand vous êtes jeune.
06:09En Europe, si vous voulez avoir des revenus quand vous êtes vieux,
06:12il suffit d'espérer que les gens continueront à payer des impôts et des charges sociales
06:14autour de vous au moment considéré.
06:17Mais les choses sont en train de s'anger très vite.
06:20Et donc, bien sûr, il y a une montée en puissance.
06:22La troisième chose, c'est que la raison pour laquelle des entreprises
06:26ont une liquidité qui ne décolle pas
06:28a peut-être un peu à voir avec ce que nous faisons,
06:31mais je vais en parler dans un instant.
06:32Mais enfin, chaque entreprise a son propre parcours.
06:35Il y a des ETI qui réussissent très bien
06:37et qui se développent très bien.
06:40D'où, là, d'ailleurs, le dynamisme de la respiration du CAC 40 et du SBF 120.
06:45Mais si vous voulez attirer de la liquidité,
06:47il faut que votre stratégie soit lisible.
06:49Il faut que votre performance soit régulière.
06:52Il faut que votre communication financière soit adaptée
06:54à une base d'investisseurs mondiaux.
06:56Donc, Euronext est un facilitateur d'un certain nombre de ces opérations.
06:59Mais chaque entreprise a son propre projet,
07:01a sa propre phase de développement.
07:03Une entreprise peut décider que ce qui est bien,
07:06c'est de se diversifier énormément,
07:08mais la contrepartie, c'est que la lisibilité de votre stratégie
07:12devient plus douloureuse ou compliquée à exprimer.
07:15Une entreprise peut, au contraire, essayer de se concentrer.
07:18Alors, elle perd en diversification.
07:20Elle est très lisible.
07:21Donc, chaque entreprise a son propre parcours.
07:23Est-ce que la meilleure stratégie, ce n'est pas total ?
07:25On vient d'accueillir au CAC 40, la semaine dernière,
07:27EFAH, qui est un magnifique succès industriel,
07:30avec une détention du capital par les salariés
07:33qui est absolument remarquable.
07:35Ce succès est spectaculaire.
07:38Et donc, ça montre bien qu'il existe des entreprises
07:40de taille intermédiaire qui peuvent devenir des champions globaux
07:43dès lors qu'on comprend exactement ce qu'elles font.
07:46Est-ce que la double cotation, c'est la meilleure des solutions ?
07:49Non, la double cotation, c'est un outil que certaines entreprises cotées
07:52ont développé en pensant qu'elles auraient accès
07:55à une liquidité plus importante sur un autre marché.
07:58Récemment, Total Energy s'est lancé dans cette aventure
08:02en transformant leurs ADR en actions à New York.
08:04C'est très bien.
08:05Total Energy est un groupe magnifique
08:06qui considère qu'il a un problème de valorisation,
08:10notamment aux US.
08:11Jusqu'à présent, l'essentiel de la liquidité,
08:1390% de la liquidité reste en Europe.
08:16Les gens qui investissent sur le titre Total Energy continue à investir en Europe,
08:20mais ils ont souhaité développer cette optionnalité.
08:22Très bien.
08:23Vous savez, nous, nous sommes un facilitateur.
08:24Nous avons beaucoup de programmes,
08:25contrairement à ce qui vient d'être dit dans le son que vous avez passé,
08:28beaucoup de programmes dédiés, orientés vers les entreprises de taille intermédiaire
08:35comme IPO Ready,
08:36comme des choses qu'on fait dans le domaine de l'aérospatial et de la défense,
08:40où on essaye de construire une base industrielle et technologique de défense européenne,
08:44avec beaucoup de programmes dédiés à ce secteur.
08:47Et j'observe, dans la tech et dans l'aérospatial et la défense,
08:52un pipeline, une file d'attente de sociétés
08:55qui envisagent de faire des opérations de marché en 2026,
08:58qui est assez considérable.
09:00Donc on aura plus d'IPO en 2026 que les deux qu'on a connus cette année ?
09:03Bien sûr.
09:03Bien sûr.
09:03D'ailleurs, en Europe, on reste toujours ceux qui, à l'échelle européenne,
09:07qui réalisent le plus d'introductions en bourse,
09:10notamment d'introductions en bourse de sociétés internationales,
09:13de sociétés qui ne sont pas européennes.
09:14Donc c'est encore sur ce marché d'Euronex que les sociétés internationales viennent se prêter.
09:19Sur les questions budgétaires, on a parlé des retraites,
09:22on va peut-être arriver à la fin de la séquence, on l'espère.
09:24Comment vous regardez les trois mois qui viennent de se dérouler,
09:28de débats à l'Assemblée nationale et au Sénat ?
09:31Avec perplexité, détermination et un peu de colère aussi.
09:40Détermination et colère sur quoi ?
09:42Parce que le spectacle de 58% du PIB confié à 900 personnes
09:52réparties sur deux sites, à l'Assemblée nationale et au Sénat,
09:56avec l'espoir qu'on puisse aller vers une sorte de redressement choisi
10:02plutôt que dans quelques mois ou quelques années, une austérité subie,
10:06pouvait susciter des attentes d'une forme de responsabilité plus ferme, plus aboutie.
10:15On vous parlait de la Grèce tout à l'heure, le rétablissement de la Grèce,
10:18comme d'ailleurs celui du Portugal, comme d'ailleurs celui de l'Italie,
10:22comme d'ailleurs celui de l'Espagne, qui il y a dix ans était qualifié sous l'acronyme PIGS
10:27par la presse londonienne, ce n'est pas fait par hasard.
10:30Ce sont des pays qui ont travaillé sur plus de travail, plus de fiscalité,
10:36en ce compris la TVA, qui est un angle mort de notre débat budgétaire.
10:40Les pays qui se sont redressés ont tous une TVA qui est entre 21, 22, 23 et 24,
10:44et pas autour de 20.
10:45Des pays qui ont travaillé sur les prélèvements, qui ont travaillé sur le travail,
10:50et qui ont travaillé sur une réduction significative de la dépense.
10:52On ne fait pas le job ?
10:53Je pense que dans le fait que l'Assemblée nationale ait été incapable d'ouvrir la discussion sur les dépenses,
11:00il y a ce que les psychanalystes appellent un acte manqué.
11:02C'est-à-dire que nous n'avons pas résolu notre addiction à la dépense.
11:05C'est-à-dire qu'on s'est passé beaucoup de mois, beaucoup de semaines sur comment augmenter les prélèvements.
11:11Mais alors l'idée qu'il faille passer un peu de temps pour se poser la question de réduire la dépense publique n'existe pas.
11:18Donc je suis en colère.
11:19Je suis déterminé parce que je pense qu'il va bien falloir trouver des solutions
11:22et que toutes les bonnes volontés seront bienvenues
11:24et que les responsables d'entreprise doivent participer activement et de manière vocale à ce débat
11:30pour aider ceux qui décident à trouver des solutions un peu plus responsables.
11:35J'ai beaucoup de compassion pour le travail que fait le Premier ministre
11:39qui fait de son mieux et qui est en train de sortir des compromis qui ne sont pas très esthétiques
11:44mais qui ont le mérite d'exister.
11:46Mais enfin, on n'a rien résolu puisqu'on va être la troisième année avec un déficit budgétaire supérieur à 5%.
11:50On est très original.
11:53Vous parliez de la Grèce tout à l'heure.
11:55La France aujourd'hui emprunte autour de 3,4%, 3,5% à 10 ans.
12:00La Grèce depuis le mois d'août emprunte autour de 3,2%, 3,3%.
12:03Vous êtes inquiet par une montée des taux potentiels ?
12:05Je pense que nous n'avons pas de risque de choc brutal type FMI
12:11puisque la dette française restera solvable et liquide
12:17même si les conditions de sa gestion pourraient être modernisées.
12:20Mais enfin, elle va rester solvable et liquide.
12:23Par contre, ce que je crains, c'est l'étouffement.
12:26C'est-à-dire que le problème de la dette française, ce n'est pas un problème de choc.
12:30Ce n'est pas un problème pour les prêteurs.
12:32Les prêteurs vont continuer à nous prêter.
12:34C'est un problème d'emprunteurs.
12:36De prix.
12:36On a un problème d'addictologie, d'addiction à la dépense.
12:42C'est-à-dire qu'on trouvera toujours des dealers pour nous fournir des substances.
12:46Le prix va augmenter.
12:47Et nous, on sait que ce n'est pas bien de boire et de conduire ivre et de prendre des substances.
12:53On sait que ce n'est pas bien.
12:54Mais on continue à en prendre et on continue à boire.
12:56Pourquoi ? Parce qu'on est dans une addiction.
12:59Et la question, c'est comment on sort de l'addiction à la dépense publique.
13:02Et comment, peut-être qu'il nous faut des addictologues d'ailleurs,
13:05et comment on sort de cette addiction à la dépense publique.
13:07Parce que les prêteurs, eux, ils sont ravis de nous prêter aujourd'hui à 3,5,
13:11demain à 4, 4,5, comme les Britanniques qui empruntent à 4,5% sur 10 ans.
13:15Vous ne souhaitez pas que l'addictologue soit le FMI ?
13:17Je suis en train de vous dire que l'addictologue ne sera pas le FMI.
13:20Et qu'il faut qu'on trouve nous-mêmes le chemin du redressement choisi
13:24pour éviter l'austérité subie.
13:25Mais qu'entre-temps, nous allons avoir une asphyxie,
13:28ce que Villeroy de Gallo appelle un étouffement.
13:31Mais c'est la même chose.
13:32C'est-à-dire une augmentation du coût de notre dette qui va atteindre...
13:35Vous savez, quand en 2027-2028, on aura 100 milliards de charges de la dette,
13:39en 2028 plutôt qu'en 2027,
13:40ça veut dire qu'on ne discutera plus au Parlement
13:43de quelque chose qui représente à peu près trois fois
13:46ce qui a été le cœur de la discussion budgétaire depuis quelques mois.
13:48Merci beaucoup Stéphane Bougenard d'être venu sur le plateau de la matinale de l'économie.
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