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  • il y a 15 minutes
Marschall Truchot, du lundi au jeudi de 17h à 19h avec Olivier Truchot & Alain Marschall. Deux heures pour faire un tour complet de l’actualité en présence d’invités pour expliquer et débattre sur les grands sujets qui ont marqué la journée.

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Transcription
00:00C'est une histoire de harcèlement scolaire que nous allons vous raconter maintenant avec le témoignage d'un adolescent et de sa mère.
00:05Ils seront en direct dans un instant avec nous, Thaïs et sa mère.
00:09Thaïs a été insulté, brimé, frappé à cause de sa couleur de peau.
00:15Il a failli en finir avec la vie.
00:17Lui-même d'ailleurs, il s'en est émevé sur les réseaux sociaux.
00:21Bonjour, je m'appelle Thaïs. J'ai 10 ans.
00:25Je voudrais vous lire un texte que j'ai écrit avec ma maman.
00:28Depuis hier, je suis triste.
00:30Depuis plusieurs semaines, j'entends quelqu'un me dire bamboula, sale noire ou encore que j'ai été adoptée.
00:36Et hier, il m'a planté un compas dans le bras.
00:40J'ai déjà vécu une situation identique qui a été jusqu'à une tentative d'étranglement dans le car.
00:46Après les insultes et des menaces.
00:48Vivre cela à 9 ans, c'est dur.
00:50Je m'appelle Thaïs. J'ai 11 ans.
00:52Je suis un sale singe, un sale noir qu'on a bousculé et insulté jusqu'au 14 octobre.
00:58Où trois individus m'ont frappé.
01:00Ils m'ont jeté toutes mes affaires scolaires dans les toilettes.
01:04J'ai été le dire au CPE, mais le CPE n'a rien fait, ni le collège.
01:09Ils n'ont eu aucune sanction.
01:11Et hier, en prenant mon bus, il est arrivé et m'a bousculé.
01:15M'a donné un coup de sac.
01:16J'ai réussi à m'attraper.
01:18Ma mère m'a emmenée aux urgences et a porté plainte aujourd'hui.
01:20J'espère que cela ne m'arrivera plus.
01:23Merci de m'avoir écouté.
01:25Bonjour Thaïs.
01:27Merci d'être avec nous.
01:29Bonjour.
01:29À votre côté, votre mère.
01:33Thaïs, vous avez aujourd'hui 15 ans.
01:35L'effet que vous avez dénoncé, c'était lorsque vous aviez 10, 11 ans.
01:40Oui, c'est ça.
01:43C'est quand j'étais scolarisé en sixième.
01:47Et aujourd'hui, comment ça va, justement ?
01:52Aujourd'hui, ça va beaucoup mieux.
01:55Parce que j'ai pu reprendre, là, en septembre, une scolarité normale au lycée.
02:00Je suis fait des amis.
02:02Je suis très vite intégré.
02:05Et puis, ça se passe très bien.
02:07Vous avez le courage, ce soir, de témoigner en direct sur BFM TV.
02:11Pourquoi vous voulez revenir sur ce que vous avez subi ?
02:14On l'a bien compris, un harcèlement fait d'injures racistes, de coups également,
02:20qui vous a rendu particulièrement triste, à tel point qu'à un moment donné,
02:24vous avez même eu des envies de suicide.
02:26Vous avez d'ailleurs fait une tentative de suicide.
02:28Pourquoi, ce soir, revenir sur ces épreuves ?
02:32Parce que j'en ai longuement réfléchi et j'aimerais partager mon histoire
02:39et puis montrer que je ne suis pas seul, que je ne suis pas le seul à avoir été harcelé.
02:45Et je sais qu'aujourd'hui encore, malheureusement, il y a toujours des enfants harcelés.
02:50Et j'aimerais leur dire et leur montrer qu'on peut s'en sortir,
02:54que ça ne nous détruit pas pour toujours.
02:56et que surtout, il faut en parler.
02:59Il ne faut pas rester seul dans son coin, car ce n'est pas comme ça que ça va se régler.
03:04Élodie Pruveau, votre maman, est avec vous là.
03:07Bonsoir Madame Pruveau, merci vous aussi d'être en direct avec nous sur BFM TV.
03:11Que sont devenus les harceleurs de Thaïs déjà ?
03:17Écoutez, les harceleurs, eux, sont restés au sein de l'établissement.
03:21Nous avons fait deux dépôts de plaintes qui ont été classés sans suite
03:27parce que mineurs de moins de 13 ans, donc pas de responsabilité pénale.
03:33Et de ce fait, eux sont restés au sein de l'établissement.
03:36Et Thaïs, pour sa sécurité et surtout, on va dire, le côté psychologique,
03:42lui a dû quitter l'établissement et faire 4 ans de scolarité à la maison avec le CNED.
03:47Oui, vous avez été obligé de sortir votre enfant du collège.
03:51Pourquoi ? Parce que les responsables de l'établissement ne vous soutenaient pas ?
03:57Écoutez, c'est les responsables de l'établissement, la justice,
04:03l'inspection académique où nous nous sommes déplacés avec un dossier quand même assez conséquent
04:09parce qu'il y avait dedans des témoignages, les certificats médicaux, les dépôts de plaintes.
04:15Et on n'a même pas été reçus. Nous n'avons même pas eu un rendez-vous pour évoquer la situation de Thaïs.
04:21J'ai été reçu par le maire de la ville de ce collège qui m'a dit que lui, à son niveau, ne pouvait rien faire.
04:28Mais il aurait peut-être pu tenter au niveau du département et tout.
04:32On s'est retrouvés vraiment seuls et démunis par rapport à la situation.
04:37Et malheureusement, la seule solution que j'ai vue, c'était de déscolariser Thaïs.
04:43Et ce n'est pas normal, en fait, de devoir déscolariser un enfant.
04:47C'est la double peine. C'est qu'en fait, il n'est même pas reconnu en tant que victime
04:50et qu'en plus, il doit fuir sa scolarité, une vie sociale avec des jeunes de son âge.
04:58Je trouve qu'encore à l'heure d'aujourd'hui, ça existe et ça ne devrait plus exister.
05:03Thaïs, sur les images, quand vous avez 10-11 ans, on vous voit notamment avec le bras bandé.
05:09C'est-à-dire, que vous est-il arrivé régulièrement ? On vous frappait ?
05:13Ça a été jusqu'à vraiment coup et blessure ?
05:19Assez souvent, c'était beaucoup dans les couloirs, aux intercours.
05:24On me donnait des claques dans la tête, on me touchait mes cheveux en disant que c'était de la moquette
05:28parce que c'était doux.
05:31On m'insultait et il y a un jour où ils sont venus à 3 pendant la pause du midi
05:36et ils m'ont violellement attrapé le bras.
05:40Ils me l'ont tiré et c'est à ce moment-là que j'ai eu...
05:43C'était quoi ?
05:44La coiffe des rotateurs touchée.
05:46Voilà, c'est la coiffe des rotateurs qui a été touchée.
05:49Après, ils ont été prendre mes affaires et ils ont été les mettre dans les toilettes.
05:53Et il y a une surveillante qui a tout vu mais qui n'est même pas venue intervenir.
05:57Elle est restée là à regarder la scène.
06:00Dès que ça s'est fini, ils sont partis.
06:01La surveillante est venue, elle m'a dit d'aller ramasser mes affaires dans les toilettes.
06:08Du coup, c'est ce que j'ai fait et j'ai continué la journée en ayant mal au bras, sans même voir personne.
06:15Et c'est le... Oui.
06:17Pourquoi vous, pourquoi vous étiez pris pour cible ?
06:23C'était par rapport à ma couleur de peau.
06:25On vous l'a fait comprendre.
06:30Il y a eu des insultes racistes ?
06:32Oui, voilà, c'est ça.
06:34Oui, voilà ça.
06:35Il y a eu beaucoup d'insultes racistes.
06:37Des insultes également concernant votre mère ?
06:42Oui.
06:43On avait dit que ma mère...
06:45Enfin, comment dire ?
06:46Que j'ai été adoptée parce que ma mère était blanche.
06:48On a dit que ma mère...
06:50Je ne sais pas si j'ai le droit de dire les insultes.
06:53Allez-y, oui.
06:54Pour qu'on comprenne bien.
06:55Tu dis la première lettre.
06:58On m'a dit que ma mère, c'était une pute parce qu'elle sortait avec un noir et qu'elle avait eu un enfant noir alors qu'elle était blanche.
07:10Vous avez même été étranglé dans un bus scolaire.
07:15Oui, c'est ça.
07:16C'était la fin des cours.
07:18Je suis parti dans mon bus pour rentrer à la maison.
07:21Et il y a un des élèves qui est venu et il m'a étranglé.
07:25Heureusement, il y avait une amie qui était là et qui a prévenu un adulte parce que sinon, je ne sais pas, qu'est-ce qui aurait pu m'arriver si elle n'avait pas été là.
07:33Mais on a affaire à des mineurs.
07:34Elodie Pruveau, vous le disiez vous-même, c'est-à-dire que le dossier, on n'a pas donné suite.
07:39Mais les parents, est-ce qu'il y a un moment...
07:40Les agresseurs avaient moins de 13 ans.
07:42Les parents des agresseurs, des harceleurs, est-ce qu'il y a un moment, ils ont été convoqués par la direction ?
07:47Est-ce qu'on a essayé de discuter avec eux ou pas du tout ? Jamais ?
07:51Écoutez, lorsqu'il y a eu l'agression, Thaïs, la première agression, on va dire, raciste qu'il a subie, c'est celle qu'il vient de vous raconter, où il a été étranglé dans le bus.
08:06Les parents sont quand même venus jusqu'à devant notre domicile nous dire qu'ils votaient un certain parti politique.
08:16Et ça a été des insultes, des menaces.
08:21Et ils ont même été jusqu'à aller à l'école pour demander à ce que Thaïs soit exclu de la classe.
08:27Attendez, attendez, je comprends.
08:28Quand vous assistez à ça en tant que parent...
08:29Attendez, madame Pruveau, qu'on comprenne bien.
08:31C'est-à-dire, les parents des harceleurs sont venus devant chez vous, en fait, vous dire quoi ?
08:36On est chez nous, voilà ce que l'on vote, et vous n'êtes pas chez vous, quoi.
08:41C'est ça qu'on vous a dit ?
08:44C'est ça, exactement.
08:45C'est-à-dire, en quel terme est-ce que ça vous a été dit ?
08:46Ce à quoi j'ai répondu...
08:48En quel terme ça vous a été dit précisément ?
08:50On m'a dit, nous, on vote Front National, et on ne veut pas que notre fils soit au contact de votre fils qui est noir.
09:00Oui, il a dit aussi qu'elle ne voulait pas de noirs et d'étrangers dans son village.
09:04Et qu'elle ne voulait pas d'étrangers dans son village.
09:06Oui, on est dans une zone rurale, c'est ça ?
09:10Oui, on est dans une zone rurale de l'Oise, mais quand même à proximité de grandes villes.
09:18On n'est quand même pas dans des campagnes isolées, et c'est quand même...
09:22Enfin, j'estime que même à notre époque, zone rurale ou pas, tenir ce genre de discours, ça n'a pas lieu d'exister, en fait.
09:30Surtout que, comme je lui ai dit, mon fils a beau avoir une couleur un peu plus foncée, il en demeure pas moins français.
09:39Justement, est-ce que cette montée, puisque vous dites que ces gens-là sont venus revendiquer le fait d'être du Rassemblement National,
09:45donc ça vous inquiète, ce que l'on voit, cette radicalisation, cette montée des voies RN ?
09:53Écoutez, ça m'inquiète dans le sens où, effectivement, je ne comprends pas qu'on puisse vouloir évincer un enfant de la classe
10:05parce qu'il a une couleur un peu plus pigmentée que le reste de la classe,
10:10et qu'on ne s'intéresse même pas à l'histoire, on va dire, des origines.
10:15Ce que, certes, Thaïs est d'origine sénégalaise, mais son beau-père est d'origine martiniquaise,
10:22et jusqu'à preuve du contraire, la Martinique, voilà, c'est les dom-toms.
10:26Donc, ce qui est préjudiciable aussi, c'est que les gens n'ont pas de culture, n'ont pas un minimum de savoir,
10:32et qu'ils ne s'intéressent même pas, c'est juste que vous avez une couleur un peu plus foncée,
10:36donc automatiquement, vous n'avez pas votre place dans la société.
10:39Je trouve que c'est quand même très très réducteur, en fait.
10:42Thaïs, aujourd'hui, vous êtes au lycée, c'est ça ?
10:45Comme c'est réducteur de dire à Thaïs.
10:47Oui, c'est ça.
10:50Donc, ça se passe bien au lycée ? Il n'y a plus de harceleurs ?
10:53Oui, ça se passe très... Non, non, il n'y a plus du tout de harceleurs,
10:57puis ce qui change entre la période, le collège-lycée, c'est le fait qu'au collège,
11:03comme c'était comme on a dit tout à l'heure, c'est en zone rurale,
11:05donc il n'y a pas forcément de mixité, mais maintenant que le lycée est dans une zone plus urbaine,
11:12il y a beaucoup plus de mixité, de diversité,
11:15donc le jugement est beaucoup plus différent, il n'y en a même pas du tout.
11:21Tout le monde, on vit tous ensemble, il n'y a aucun jugement.
11:25Et vous continuez la boxe ?
11:28Non, j'ai arrêté.
11:31Parce que vous y aviez commencé la boxe pour mieux vous défendre aussi.
11:34Et d'ailleurs, je crois qu'un jour vous vous êtes défendu,
11:36et on vous a reproché, vous vous êtes battu pour vous défendre tout simplement.
11:41Oui, c'est ça, j'étais en pause, et il y a un des élèves qui est venu,
11:50qui m'a insulté, alors je lui ai donné un coup de poing pour me défendre,
11:53et la CPE n'a même pas cherché à savoir quoi que ce soit,
11:57elle m'a directement puni, moi, en me disant qu'on n'avait pas à se battre
12:01au sein de l'établissement.
12:05Que tu n'avais pas à répondre par la violence.
12:09Merci Elodie Pruveau, et merci Thaïs Pruveau, merci de ce témoignage.
12:14Témoignage courageux, Véronique Fèvre, vous êtes notre spécialiste éducation BFMTV.
12:20Le harcèlement, c'est aussi libérer la parole, ce que fait Thaïs, et courageux.
12:24Où en est-on, justement, dans les lois contre le harcèlement,
12:27les directives qui ont été mises en place à l'école ?
12:29Parce qu'on voit qu'à l'époque, Thaïs, il est obligé de partir.
12:32Il est obligé de quitter l'établissement, c'est lui qui doit partir.
12:35On peut dire que l'éducation nationale, elle connaît ce phénomène de harcèlement
12:37depuis 15 ans, mais on peut dire que
12:39depuis 2021, c'est-à-dire l'année
12:41où le jeune Thaïs a été harcelé
12:43et a dû quitter son collège, les choses ont
12:45beaucoup bougé. D'abord, il y a eu le programme phare, c'est-à-dire que
12:47maintenant, vraiment, quand vous arrivez dans des collèges,
12:50vous avez les personnels ressources,
12:52c'est-à-dire des professeurs, une équipe
12:53de 5-6 qui sont formés,
12:55vous avez des affiches avec leur visage,
12:57ça va pouvoir être des gens auxquels
12:59les jeunes vont pouvoir s'adresser, c'est très
13:01important. Et puis, des moyens
13:03ont également été mis, on a 150 postes
13:05qui sont répartis dans l'érectorat pour gérer
13:07les situations quand un jeune
13:09ne parvient pas à être entendu
13:11au sein de son établissement.
13:13Et la loi, un décret a également
13:15changé, puisqu'à partir d'août
13:172023, on a décidé
13:19que les jeunes qui
13:21harcelaient, c'est-à-dire les auteurs de harcèlement,
13:24devaient partir, et que ce n'était
13:25pas aux jeunes qui étaient harcelés
13:27d'être changés d'établissement.
13:30Et on a vu récemment des chiffres...
13:31Oui, on a quand même eu des chiffres
13:33du ministère de l'Éducation pour le jour
13:35de la journée du harcèlement, début novembre,
13:37qui nous a dit qu'un peu plus de 300
13:39élèves ont été déplacés,
13:41changés d'établissement depuis
13:43deux ans. Donc, la justice aussi
13:45évolue. On évoquait une plainte qui était classée
13:47sans suite. On a eu 600 poursuites pénales
13:49engagées en 2022
13:51pour des cas de harcèlement scolaire
13:53entre 2022 et 2024, pardon.
13:55de l'Éducation
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