- il y a 3 mois
Marschall Truchot, du lundi au jeudi de 17h à 19h avec Olivier Truchot & Alain Marschall. Deux heures pour faire un tour complet de l’actualité en présence d’invités pour expliquer et débattre sur les grands sujets qui ont marqué la journée.
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00:00On va reprendre maintenant le cours de l'émission et discuter justice, justice et politique avec les commentaires qui continuent suite à la condamnation de Nicolas Sarkozy à 5 ans de prison ferme.
00:12Il connaîtra le 13 octobre prochain la date de son incarcération. On va en parler avec le magistrat Éric Alphen. Bonjour Éric Alphen.
00:19Bonjour.
00:20À la veille de la retraite je crois d'ailleurs.
00:21Absolument.
00:22Le décret c'est le 1er octobre.
00:24Il faut peut-être rappeler qui est Éric Alphen et Alexandra González. C'est le magistrat qui a osé faire témoigner dans une affaire judiciaire un président de la République.
00:35Et à l'époque ça avait créé un scandale, c'était Jacques Chirac.
00:38Il l'avait convoqué. Il l'avait convoqué en tant que témoin mais sauf erreur de ma part il n'avait pas répondu à cette convocation.
00:44Souvenez-vous de cette affaire des HLM de Paris. On est à ce moment-là, quand l'enquête est ouverte, on est en 1994 et donc on est sur des soupçons de financement, d'attribution de marché public dans le cadre de construction de HLM
01:02qui concerne le plus grand parti de l'époque, le RPR, et le maire de Paris, Jacques Chirac.
01:07C'est à ce titre que vous l'aviez convoqué en tant que témoin mais il avait refusé de répondre à cette convocation.
01:14Des années après, un ancien président de la République s'apprête bientôt à dormir en prison, ce qui sera une première dans notre histoire.
01:23Quand vous l'avez appris, comment vous avez réagi ?
01:27Alors déjà le bruit courait depuis quelques jours étonnamment qu'il y aurait peut-être un mandat de dépôt même prononcé à l'audience.
01:36– C'est intéressant ça, quel bruit qui court ? Comment est-ce que ça arrive ?
01:41– De gens qui avaient assisté à l'audience, de gens qui faisaient partie du milieu plutôt journalistique que judiciaire et qui disaient qu'effectivement ce n'était pas impossible.
01:54Voilà. Et du coup, je me suis un peu habitué à l'idée. C'est vrai qu'il y a deux façons en fait d'analyser l'information.
02:05La première, c'est de se dire, c'est quand même incroyable, un président en prison, dans quel pays on est et que font les juges ?
02:12C'est ce qu'on entend beaucoup depuis quelques jours. Et la deuxième façon, c'est de se dire, quand même, on a été dirigé par quelqu'un qui a été condamné trois fois
02:22pour des infractions financières de corruption ou plus généralement d'association de méfait-là.
02:29Qui était ce président ? Et la pensée subséquente que je me suis mise dans la tête, c'est de me dire que tant,
02:38parce qu'on l'a vu avec les réactions, tant que les hommes politiques se croient au-dessus des lois,
02:46quelque part, ils vont nourrir les partis extrémistes de quelque bord qu'ils soient.
02:52Nicolas Sarkozy se croit au-dessus des lois ?
02:54En tout cas, ce qu'on a entendu de sa part, ce qu'on a entendu de la part de son avocat,
03:00comme par le passé, moi j'en souvenir, Georges Kejman, qui était à l'époque ministre de la Justice,
03:05qui, quand le juge Thierry Jean-Pierre est allé faire une perquisition au siège du Parti Socialiste,
03:11Georges Kejman, donc son ministre, est allé sur le plateau de 20h pour parler de cambriolage judiciaire,
03:18alors que c'était un juge qui avait fait son travail.
03:21J'ai évidemment aussi en mémoire Jean-Luc Mélenchon, qui, lorsque des policiers et un membre du parquet
03:28viennent perquisitionner, les accueille avec virulence en disant « la République, c'est moi ».
03:33Et évidemment, plus récemment, l'entourage de Marine Le Pen et l'entourage de Nicolas Sarkozy
03:38laissent entendre, plutôt que peut-être qu'effectivement on a mal agi ou commis une infraction,
03:44uniquement c'est un complot des juges, c'est de la faute des juges.
03:47Les juges sont politisés.
03:48Et les juges sont politisés, ils sont évidemment de gauche.
03:52Ce qui est faux, la majorité des magistrats n'est pas de gauche.
03:56Ils sont globalement centristes.
03:59Et parler des juges rouges, comme on le faisait dans les années 80,
04:02à l'époque c'était les juges qui s'étaient pour la première fois intéressés aux chefs d'entreprise.
04:07Donc parler de juges rouges s'est démodé et s'est terminé.
04:09– C'est quand même le syndicat de la magistrature qui représente 30% de la profession.
04:15– Non, 30% des votants.
04:16– 30% des votants ?
04:17– Or, la moitié des magistrats, dont je fais partie, ne vont pas voter aux élections professionnelles.
04:23Donc ce n'est pas 30%, c'est 15% en fait.
04:29– Vous savez bien que le mur des cons a fait du mal à votre profession.
04:31– Mais évidemment.
04:32– Et il faudrait un devoir de réserve à ce moment-là, vous pensez, pour les magistrats,
04:35comme il y a un devoir de réserve dans d'autres professions ?
04:38– Non, pas de syndicalisation.
04:39– Mais vous avez beaucoup entendu les magistrats s'exprimer.
04:42– La présidente du tribunal, Nathalie Gavarino, qui était au syndicat USM,
04:47donc le syndicat majoritaire, avait manifesté contre Nicolas Sarkozy, alors président.
04:52C'était un engagement.
04:52– Comme tous les magistrats à l'époque.
04:54– Est-ce qu'elle pouvait juger Nicolas Sarkozy ?
04:56– Non, mais tous les magistrats, à l'époque, étaient mécontents de ce qu'avait fait
05:01et ce qu'avait dit Nicolas Sarkozy.
05:03Et donc il y avait une journée nationale dans tous les tribunaux de France et de Navarre.
05:06– Vous-même vous aviez manifesté ?
05:07– Absolument, j'étais sorti sur la cour du palais de justice de Paris, en robe, pour soutenir…
05:12– Là, ça donne raison à ceux qui disent que les magistrats se vengent
05:15de la politique pénale de Nicolas Sarkozy.
05:17– Mais pourquoi ?
05:19Enfin, je veux dire, si on devait se venger de toutes les politiques pénales,
05:22je veux dire, on aurait condamné Dupond-Moretti, on aurait…
05:25Vous voyez ce que je veux dire ?
05:26C'est mettre dans l'esprit des magistrats quelque chose qui n'y est absolument pas.
05:31– Et à contrario, vous, est-ce que vous diriez que les hommes politiques
05:34qui commettent des infractions ou qui sont soupçonnés d'avoir commis des infractions
05:38ont un problème avec la justice ?
05:40– Je ne sais pas s'ils ont un problème avec la justice,
05:42mais il y a un moment quand même où la question se pose,
05:45c'est ce que je disais tout à l'heure sur l'extrême mine,
05:47de savoir comment on peut faire en sorte que la confiance des Français
05:52dans le personnel politique soit rétablie.
05:55Parce que le début de ce qu'on entend en ce moment,
05:58c'est-à-dire une critique des institutions de la République,
06:02à quoi ça va aboutir ?
06:03Ça va aboutir à ce que des gens vont venir,
06:06vont s'exonérer de la police et de la justice,
06:09vont dire les lois, on s'en moque,
06:10et ils vont prendre par la violence la direction du pays.
06:16Ça, évidemment, on est rempart en fait,
06:18c'est ça qu'il faut bien comprendre,
06:20c'est que les magistrats, les professeurs d'ailleurs aussi,
06:23les policiers, ce sont des remparts des institutions républicaines.
06:28Quand on commence à les contester,
06:29ce qui se voit de plus en plus sur les réseaux sociaux,
06:32quand on incite à cette protestation,
06:34ce qu'on voit justement dans les entourages
06:36des personnalités politiques condamnées,
06:38au-delà de leurs cas qu'on peut comprendre,
06:41quand Nicolas Sarkozy vient montrer son émotion
06:44au jour de la condamnation,
06:46on comprend qu'il soit embêté, fracassé, etc.
06:51Mais parler de haine, pour autant,
06:53pour un ancien président de la République,
06:55est-ce que c'est admissible ?
06:56Est-ce que ça ne laisse pas penser
06:57que les magistrats ne font pas leur travail,
07:00qui est d'examiner des faits
07:02et d'en tirer les conséquences juridiques,
07:04mais qu'ils sont animés par un sentiment autre ?
07:07Est-ce que ça mérite la prison ferme,
07:08pour autant, pour un ancien président de la République ?
07:11On met en prison les gens pour protéger la société.
07:13Est-ce qu'en mettant en prison Nicolas Sarkozy,
07:15ancien chef de l'État,
07:18ça ne va pas un peu trop loin ?
07:19Ce sont mes collègues.
07:20Moi, je ne vais pas me mettre à la place de mes collègues.
07:22Ils ont décidé,
07:24avec un jugement que j'ai lu,
07:26qui fait 380 pages,
07:27et qui est extrêmement bien argumenté,
07:30ils ont décidé que ça valait la prison.
07:32– Si le condamné actuel n'est pas content,
07:36il fait appel, il fera appel.
07:37– Non, le mandat de dépôt.
07:38– Non, mais il va quand même faire appel.
07:40Vous savez très bien qu'après le mandat de dépôt,
07:43il peut faire une demande de mise en liberté.
07:45– Pardon, mais la polémique n'est pas tant
07:49sur les 50 prisons fermes,
07:50et c'est plutôt sur l'exécution provisoire,
07:52ce fameux mandat de dépôt,
07:54où à Prion on se dit,
07:55les mandats de dépôt, quasiment immédiats,
07:58même s'il a quelques jours pour s'y préparer,
08:00c'est pour quelqu'un qui risque de fuir,
08:03pour un individu violent, dangereux,
08:06qui pourrait faire pression sur des témoins.
08:10Et là, peut-être qu'on se dit,
08:11finalement les juges voulaient vraiment voir
08:13Nicolas Sarkozy dormir en prison,
08:14même avant l'appel.
08:16– Alors ça, ce que vous évoquez,
08:18c'est le mandat de dépôt par un juge d'instruction,
08:20où effectivement il y a un certain nombre de critères
08:22qui figurent dans le code de procédure pénale.
08:25En matière de condamnation par le tribunal correctionnel,
08:28ce qui est essentiellement pris en compte,
08:30c'est la gravité objective des faits.
08:33Et effectivement,
08:34quand on se dit qu'un ancien ministre
08:36a pu, peut-être,
08:38en tout cas c'est ce qui lui est reproché
08:39dans l'association de malfaiteurs,
08:41envoyer des émissaires,
08:43ces deux bras droits les plus proches,
08:46chercher du financement auprès d'un pays,
08:49et en voyant la personne qui est suspectée
08:54d'avoir dirigé l'attentat contre le DC-10
08:59qui a entraîné plus de 100 morts français
09:02quelques années auparavant,
09:05moi je ne sais pas si j'aurais délivré le mandat de dépôt,
09:09mais en tout cas je comprends
09:11que des collègues étaient pessimistes,
09:13c'était grave.
09:13Mais l'exécution de prison s'applique quand même
09:15dans une très grande majorité des cas,
09:18plus de 85% lorsqu'il y a une peine supérieure à 2,5%.
09:23Ce n'est pas spécifique à cette affaire.
09:26Je comprends bien,
09:27mais c'est l'argument qu'on avance,
09:29mais quand on fait appel,
09:30on est présumé innocent.
09:31Est-ce qu'on est présumé innocent
09:32lorsqu'on est en prison ?
09:32Tous les jours,
09:33en comparaison immédiate,
09:34ils sont présumés innocents aussi,
09:38tous les jours,
09:39en comparaison immédiate,
09:40il y a des trafiquants de drogue,
09:42il y a des gens qui sont violents,
09:43il y a des gens qui ont commis
09:46des associations de malfaiteurs terroristes,
09:49il y a aussi des gens
09:50qui ont fait des choses moins violentes
09:52et peut-être moins graves,
09:53qui sont condamnés.
09:54Oui, il y a des gens qui sont en liberté
09:56alors qu'ils ont fait des choses graves.
09:57Je pense notamment aux jeunes
09:59qui ont agressé ce policier à Tourcoing,
10:00ils ont fait 2-3 jours de détention provisoire,
10:02on les a libérés.
10:03Je vais vous dire,
10:04je reconnais que la décision du mandat de dépôt
10:08peut prêter à un certain nombre de débats
10:12et d'objections.
10:14Néanmoins, est-ce que ça justifie
10:17que tout le monde s'en prenne au juge
10:20en donnant les noms,
10:21parce que c'est quand même notamment
10:23l'avocat de Nicolas Sarkozy
10:24qui a donné le nom de la présidente du tribunal
10:29en oubliant que ce n'est pas une présidente
10:31qui a décidé,
10:32mais une collégialité,
10:34c'est-à-dire trois magistrats,
10:35et qu'avant le tribunal correctionnel,
10:37il y a eu une dizaine de juges d'instruction,
10:40il y a eu les membres du parquet national financier,
10:43il y a eu la chambre de l'instruction
10:44qui a été saisie à de nombreuses reprises.
10:46Il y a combien ?
10:46Des dizaines et dizaines de magistrats qui se sont prononcés ?
10:48Il y a une cinquantaine de magistrats
10:50qui ont jugé qu'effectivement,
10:52contrairement à ce qu'on entend aujourd'hui,
10:53il n'y avait pas rien dans le dossier,
10:55mais il y avait des éléments importants et graves.
10:59Et par ailleurs,
10:59si vraiment il y avait des doutes
11:02sur la personne de la présidente du tribunal correctionnel,
11:06il suffisait de faire une requête en substitution légitime
11:08au début de l'audience,
11:09ce qui n'a pas été fait.
11:10Est-ce qu'il faut changer la loi ?
11:12Certains le disent,
11:12l'exécution provisoire,
11:14il faut la supprimer.
11:16Pas de mandat de dépôt avec l'exécution provisoire
11:18lorsqu'il y a un appel possible.
11:20C'est les mêmes qui disent ça aujourd'hui,
11:22qui reprochent au magistrat
11:24quand quelqu'un qui a commis un acte de violence
11:26qu'on a vu sur toutes les chaînes,
11:28notamment la vôtre,
11:29et qui ont suscité à juste titre l'émotion,
11:32que ces gens-là restent dehors.
11:35Et quand vous voyez quelqu'un
11:36qui s'en prend par exemple à un policier,
11:38qui le frappe et qui est arrêté,
11:43qui passe en comparaison immédiate,
11:44est-ce qu'il faut qu'il sorte
11:45en attendant l'appel ou pas ?
11:48C'est la question que je pose.
11:49C'est-à-dire que vous avez bien compris
11:51qu'il y a deux poids de mesure.
11:53Il y a une loi
11:54pour la majorité des délinquants,
11:58et puis il y a une loi,
11:59c'est ça qu'on voudrait,
12:00pour les délinquants politiques.
12:02– Parce que c'est un ancien président.
12:03– Vous comprenez bien que ce n'est pas acceptable.
12:05– Parce que vous savez très bien
12:05que l'impact n'est pas le même
12:06de mettre un ancien président.
12:07– Vous parlez d'un ancien président,
12:09mais Marine Le Pen,
12:09qui n'est pas encore une ancienne présidente
12:11à ma connaissance,
12:13a revendiqué les mêmes choses.
12:16Elle a dit pas d'exécution provisoire
12:17sur l'inéligibilité.
12:20– Ça remet en cause
12:21la double juridiction quand même.
12:22Ce n'est pas moi qui le dis,
12:23c'est beaucoup de l'avocat qui le disent.
12:25Beaucoup d'avocats sont contre
12:26cette exécution provisoire.
12:27Ça remet en cause les deux juridictions,
12:30et notamment la possibilité
12:31de faire appel en étant...
12:32– Les magistrats sont là
12:33pour appliquer la loi.
12:35Si les parlementaires nous disent
12:37il y a l'exécution provisoire,
12:40il y a un mandat de dépôt,
12:41on applique.
12:42Si demain, ils nous disent
12:43il n'y a plus d'exécution provisoire,
12:45il n'y a plus de mandat de dépôt,
12:47on appliquera.
12:48On fait un procès au juge
12:50qui en fait concerne les parlementaires
12:53qui ont voté cette loi.
12:54– Donc c'est comme l'association de malfaiteurs.
12:57– C'est souvent remis en cause aussi.
12:59– C'est une infraction attrape-tout, etc.
13:02– Il n'existe pas d'ailleurs
13:03dans d'autres codes juridiques.
13:04– Qui a voté le retour
13:07de ce délit d'association de malfaiteurs
13:09qui avait été supprimé
13:10par Robert Badinter, garde des Sceaux,
13:13qui l'a remis ?
13:14Ça s'est passé sous Jacques Chirac.
13:16Donc il faudrait savoir.
13:17Je veux dire, nous,
13:17on est là pour appliquer la loi.
13:18– Depuis toutes ces affaires politiques
13:21au judiciaire,
13:21il y a eu la plus retentissante,
13:23c'était notamment l'affaire Caliza
13:25qui a eu la haute autorité
13:26pour la transparence de la vie publique.
13:28Il y a eu le procès de Marine Le Pen,
13:29le procès de Nicolas Sarkozy.
13:30Est-ce que vous avez l'impression
13:32que la vie politique
13:33est plus transparente aujourd'hui ?
13:36Plus vertueuse ?
13:37– On pourrait avoir cette impression
13:38parce qu'effectivement,
13:39les gens dévoilent leur patrimoine.
13:41Mais est-ce que le fait de dire
13:43j'ai une voiture Mercedes
13:45ou j'ai une maison de campagne
13:47au bord de la mer…
13:48– Ou un PEL ?
13:49– Ça, d'ailleurs,
13:51est-ce qu'on a le savoir,
13:52nous, citoyens ?
13:53– C'est une vraie question.
13:54– Est-ce que ça empêche
13:55les mêmes personnalités politiques
13:57de commettre des infractions ?
13:59Ça pourrait,
14:00mais peut-être qu'apparemment,
14:01ça ne marche pas.
14:02Donc, on ne va pas dire
14:03que c'est nul la transparence
14:05parce que c'est important aussi
14:07et ça fait partie
14:09de ce qui peut peut-être
14:10éviter un certain nombre d'infractions.
14:12Mais néanmoins, surtout…
14:14Moi, je pense que…
14:15On a parlé tout à l'heure
14:17du personnel politique
14:18qui n'aspère pas confiance.
14:19Il faudrait peut-être
14:20poursuivre les actions
14:23d'éducation
14:24des gens qui viennent
14:25d'être élus parlementaires,
14:27leur expliquer
14:28ce qu'ils doivent faire,
14:29leur expliquer
14:30ce qu'ils ne doivent pas faire
14:31parce que ça paraît
14:32simple et enfantin,
14:33mais beaucoup
14:34de parlementaires,
14:36notamment par les temps
14:37qui courent,
14:37ne connaissent pas
14:38tout simplement la loi.
14:39Moi, j'ai connu
14:39quelqu'un qui…
14:40– La loi n'est pas simple
14:41non plus,
14:42l'épaisseur du code civil.
14:44– Non, mais au moins,
14:45les lois qui concernent
14:46les rapports
14:47entre les personnalités politiques,
14:49les marchés publics,
14:50parce que ce n'est pas du tout su.
14:52Il faut savoir que souvent,
14:53on donne des marchés publics
14:55à des élus,
14:56à des présidents
14:56d'exécutifs régionaux
14:58ou locaux
14:58qui ne savent absolument pas
15:00comment ça fonctionne.
15:01– Donc, un problème
15:01de compétence juridique.
15:03– Au moins, de connaissance.
15:04– Et c'est pour ça
15:04qu'il faudrait axer
15:06un peu plus
15:08la connaissance
15:10de ces personnalités politiques
15:12vers le fonctionnement
15:14de la société.
15:14– Est-ce quand même,
15:15parce qu'il y a quand même
15:15beaucoup de lois,
15:16notamment qui ont encadré
15:17le financement de la vie politique,
15:19est-ce qu'on va quand même
15:19vers un mieux ?
15:21Parce qu'il y a une période
15:21où il y avait,
15:22c'était le Far West,
15:24pour financer notamment
15:25les campagnes,
15:25tout était permis,
15:26on a quand même encadré
15:27les choses.
15:28Est-ce qu'aujourd'hui,
15:29on a une classe politique
15:30quand même un peu plus vertueuse
15:31qu'avant ?
15:32– Alors, vertueuse,
15:33je ne sais pas,
15:34mais ce qui a amélioré
15:35grandement les choses,
15:36c'est la coopération judiciaire
15:38en matière notamment européenne,
15:40puisque avant,
15:42vous savez très bien
15:42qu'en matière financière,
15:43on l'a vu dans le dossier
15:44de M. Sarkozy,
15:46l'argent passe
15:47dans énormément de pays
15:48avant de revenir.
15:50Et jusqu'à une période,
15:52jusqu'à il y a environ
15:5410 ans ou 15 ans,
15:55les pays,
15:56certains pays,
15:56ne répondaient même pas
15:57aux jeux d'instruction français.
15:58La Suisse répondait
15:59en caviardant
16:00un bon nombre
16:00de renseignements.
16:02Des pays,
16:03comme le Luxembourg,
16:05le Liechtenstein,
16:06et même l'Allemagne,
16:06parfois,
16:07même l'Espagne,
16:08parfois,
16:08ne répondaient pas.
16:09Et donc,
16:10ça incitait
16:11un certain nombre
16:12de gens
16:13qui avaient des idées
16:14derrière la tête
16:15à utiliser
16:16ces pays-là.
16:17Maintenant,
16:18ça va beaucoup mieux,
16:19la coopération fonctionne,
16:20les mandats d'arrêt européens
16:22fonctionnent,
16:23et donc,
16:23ça a quand même
16:23grandement modifié
16:25un certain nombre
16:26de pratiques.
16:27mais ça ne suffit pas.
16:29Je veux dire,
16:30sur le côté exemplaire
16:31des choses,
16:32on parlait du Rassemblement
16:33National tout à l'heure.
16:34Quelques jours
16:35après la condamnation
16:36de Marine Le Pen,
16:38je lis dans le journal
16:39qu'il y a deux députés
16:41du Rassemblement National
16:42qui ont échangé,
16:43en quelque sorte,
16:44leurs assistants parlementaires.
16:46L'un prend la cousine
16:48de l'autre
16:48et l'autre prend
16:49le beau-frère de l'un.
16:51C'est un peu
16:52à désespérer, quoi.
16:54Ça veut dire
16:54que même
16:55une condamnation
16:55retentissante,
16:57ça ne sert pas
16:58à modifier
16:58les pratiques.
17:00Et alors,
17:00on se pose la question
17:01comment faire, quoi.
17:03Après,
17:04c'est une question
17:04d'individus,
17:05de responsabilité individuelle.
17:06On ne doit pas faire oublier
17:07que la très grande majorité
17:08des élus,
17:09des élus du quotidien,
17:10dans les conseils municipaux,
17:12ils sont honnêtes.
17:12Il y a une différence
17:13entre les élus locaux
17:14et les chefs d'exécutifs.
17:16Oui,
17:16des affaires locales,
17:17il y en a eu
17:18dans les années 80-90.
17:20C'est vrai que
17:20sur les 60 000 élus
17:23locaux,
17:24municipaux,
17:24la majorité d'entre eux
17:25sont honnêtes
17:26et se dévouent
17:28à leurs fonctions.
17:28Il y en a certains
17:29qui utilisent leurs fonctions.
17:30Eric Alphen,
17:31vous partez à la retraite,
17:32je crois que c'est demain
17:32officiellement que vous êtes
17:33à la retraite.
17:33Vous avez rendu
17:34votre ordinateur ?
17:35Justement,
17:36ce que je pensais
17:37tout à l'heure,
17:38ce qui m'a fait drôle,
17:39ce n'est pas de faire
17:40mon pot de départ,
17:41ce n'est pas
17:41ma dernière audience,
17:43c'est aujourd'hui
17:44quand j'ai débranché
17:45mon ordinateur professionnel
17:47chez moi
17:47et je l'ai rapporté
17:49au palais de justice
17:50parce que là,
17:50vraiment,
17:51on coupe le lien,
17:52on n'a plus
17:52les mails professionnels.
17:54Attendez,
17:54juste avant de parler
17:54de la vie d'après,
17:55restons un petit peu
17:56sur votre vie d'avant,
17:57est-ce que vous pensez
17:58avoir fait des erreurs judiciaires ?
18:01Mais personne n'est à l'abri
18:02d'une erreur judiciaire.
18:03Ce qu'il faut,
18:04c'est essayer
18:04de prendre toutes les garanties
18:06pour essayer de les éviter.
18:08C'est-à-dire...
18:08Donc vous en avez fait,
18:09sûrement.
18:10Vous avez envoyé des gens
18:11en prison
18:12qui ne le méritaient pas,
18:12sûrement.
18:13Moi,
18:13je n'en voyais pas en prison,
18:14très franchement.
18:15Mais par exemple,
18:16dans les affaires
18:17de violences sexuelles,
18:19où c'est la parole de l'un
18:20contre la parole de l'autre,
18:22où on n'a pas
18:23d'éléments objectifs,
18:25on ne trouve pas
18:26de traces de coups,
18:28on ne trouve pas
18:28d'éléments médicaux,
18:30parfois,
18:31évidemment,
18:32qu'il n'est pas impossible
18:33qu'on se soit trompé.
18:34Et je me le suis dit,
18:35moi,
18:35je me le suis dit une fois
18:36sur un dossier de viol,
18:37effectivement,
18:38où j'avais écouté
18:40la plénage,
18:41j'avais ressorti
18:42la personne suspecte.
18:44Et puis après,
18:45justement,
18:45c'est la chambre
18:45de l'instruction
18:46sur un supplément
18:49d'information
18:49qui m'avait dit
18:50de remettre en examen
18:52la personne
18:52et de le placer
18:53en détention.
18:54Et je pense qu'effectivement,
18:55ce n'est pas impossible
18:56qu'il y ait eu
18:56une erreur judiciaire.
18:57Vous allez faire quoi
18:58maintenant, alors ?
18:59Qu'est-ce que fait
19:00un juge à la retraite ?
19:01Chroniqueur judiciaire
19:01sur BFM TV ?
19:02Un juge, je n'en sais rien,
19:03mais moi,
19:03j'ai quand même
19:04une activité d'écriture.
19:06J'ai d'ailleurs
19:06un roman policier
19:08qui sort prochainement
19:09dans une maison
19:10d'édition bretonne
19:11avec un ancien policier.
19:13On a écrit
19:14un roman à quatre mains.
19:15Et puis pour le reste,
19:17j'aime bien m'occuper.
19:19On a un service
19:20poli-justice,
19:20ceux de BFM TV,
19:21vous l'appréciez ?
19:22Vous sûrement.
19:23Mais je ne veux pas
19:24prendre la place
19:24de quiconque.
19:25Mais vous allez continuer
19:26à vous battre
19:27contre la corruption ?
19:27Parce que vous avez été
19:28l'un des confondateurs
19:29d'Anticor,
19:29il faut le rappeler.
19:30Voilà, sérieusement,
19:31c'est une des choses
19:32qui me motive,
19:33c'est la lutte
19:34contre la corruption.
19:35Et je pense
19:36que je vais essayer
19:37de trouver ma place
19:38dans une association
19:39anticorruption
19:40parce que c'est important
19:41pour l'intérêt général.
19:43Merci Eric Alphen,
19:45le juge Alphen.
19:46Merci Alexandra González
19:47d'avoir été avec nous.
19:48Merci.
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