Philippe Pascal, PDG du groupe ADP, était l'invité de Laure Closier dans Good Morning Business, ce mercredi 17 septembre. Il a mis en avant les ambitions de l'entreprise pour fin 2025 sur BFM Business. Retrouvez l'émission du lundi au vendredi et réécoutez la en podcast.
00:00Notre invité ce matin c'est Philippe Pascal, bonjour, vous êtes le nouveau PDG du groupe ADP, vous avez été nommé en février 2025 à la suite d'Augustin Romanet, vous étiez dans le groupe depuis longtemps, depuis 2013, vous étiez directeur financier d'ADP auparavant, on va parler de votre feuille de route, on va parler de trafic, mais quand même cette succession d'Augustin de Romanet ça a pris du temps, ça a été postponné, c'était plus long que prévu, comment on vit ce type de succession, est-ce qu'on est en attente, est-ce qu'on trépigne ?
00:28Non mais je pense qu'Augustin de Romanet a eu à cœur de porter l'entreprise jusqu'au bout, y compris pendant cette période d'intérim qui a été effectivement longue et parfois complexe, mais il a préparé le travail, nous avons travaillé ensemble dans ce cadre-là, avec tout le comité exécutif, et donc la succession, et effectivement en ayant quand même des collaborateurs qui sont passionnés, très engagés, avec une bonne connaissance de l'entreprise, a été globalement facile.
00:53Alors la bonne nouvelle pour vous, c'est que vous arrivez avec un chiffre de fréquentation qui revient sur l'avant-crise sanitaire, on n'est plus du tout sur les craintes d'il y a quelques années, on est sur une augmentation du trafic qui revient clairement en termes de clientèle ?
01:06Alors effectivement, nous allons revenir en 2026 à peu près au niveau du trafic 2019, donc avant Covid, en revanche n'est plus du tout le même trafic, on a 75-80% simplement du trafic domestique, donc avec beaucoup moins de trafic domestique avant crise,
01:20et en revanche plus de trafic international, ce qui est bien, ce qui est bien d'abord pour la planète, puisque c'est bien les avions intercontinentaux qui se développent, et c'est ceux-là qui sont environnementalement pertinents,
01:32et puis c'est aussi bien pour la stratégie du groupe, pour son développement, avec un trafic qui est contributif et qui permet de poursuivre l'investissement et le développement du groupe.
01:41Mais ça veut dire quand même que sur les investissements sur le national, on va sur un affaiblissement complètement de ces vols, ça n'existera plus, des petits vols nationaux ?
01:51Non, pas du tout, je n'irai pas jusque-là, déjà nous on parie sur le fait que le train et l'avion sont complémentaires, donc on cultive et on développe l'intermodalité,
02:00c'est vraiment au cœur de notre stratégie que le train arrive dans les aéroports, que les transports en commun arrivent dans les aéroports,
02:06de telle manière à réduire la part de la voiture, réduire aussi les avions petits porteurs, moyens porteurs,
02:12et puis on en profite pour développer beaucoup de qualités, beaucoup d'expériences passagers pour l'intercontinental,
02:20qui est quand même le cœur de la mission du transport aérien.
02:23Alors que le transport en commun arrive dans les aéroports, c'est une excellente nouvelle, on a vu la ligne 14 arriver à Orly,
02:28vous estimez que ça c'est un changement majeur, ou c'est en termes de flux, ou c'est juste une question de confort,
02:33mais que ça ne change pas grand-chose au choix de cet aéroport par rapport à un autre ?
02:37Non, c'est un élément d'attractivité fort, c'est un élément de confort pour les passagers,
02:40c'est aussi un élément de confort pour les salariés, donc c'est un point majeur avec l'arrivée de cette ligne 14,
02:47mais il va y avoir à Orly aussi la ligne 18 qui va arriver très vite, fin 2026, début 2027,
02:52et puis à CDG, avec l'arrivée de CDG Express tout début 2027, mars 2027,
02:57et puis la ligne 17, la liaison Roissy-Picardie, bref un écosystème qui se construit avec j'espère plus de lignes à grande vitesse aussi
03:06qui arrivent à CDG.
03:07À CDG aujourd'hui, dans la gare, il y a 15 millions de voyageurs,
03:10on sait que d'ici 10 ans, il pourrait y en avoir 45 millions, donc plus gros que Lyon par 2,
03:14donc on est vraiment dans cette stratégie de complémentarité.
03:17Ceux qui ont pris la ligne 14 ces derniers temps disent que c'était vide, est-ce qu'il est utilisé ce métro ?
03:21Non, déjà, la ligne 14 est très fréquentée et jusqu'à l'aéroport de Paris-Orly.
03:28Effectivement, elle est très capacitive pour faire face à des besoins de centre-ville,
03:33mais elle va jusqu'à l'aéroport maintenant.
03:36Elle a fait baisser le nombre de pourcentages de voitures qui arrivent.
03:41Ça vous l'avez remarqué ?
03:41De combien ?
03:43De presque 10%.
03:44Donc on voit quand même que ça désature, ça désature les autoroutes,
03:49ça désature toute la voirie autour de l'aéroport.
03:52C'est une bonne chose pour les riverains,
03:54qui est aussi un élément qui est important pour nous,
03:56insérer l'aéroport dans les territoires.
03:59Le marché français, c'est 68% de votre chiffre d'affaires global,
04:03parce que vous avez évidemment d'autres aéroports dans l'ensemble du monde.
04:06Est-ce que vous avez peur des questions de taxes ?
04:08Il y a eu la taxe sur les billets d'avion qui a été changée deux fois ces derniers temps.
04:11On cherche de l'argent partout.
04:12Il y a Ryanair qui a annoncé qu'ils baissaient leurs capacités en France.
04:16Alors ça ne vous concerne pas directement Ryanair,
04:18mais vous bossez avec d'autres compagnies locaux.
04:20Est-ce que vous craignez que certaines compagnies désertent la France ?
04:23Alors, il y a une légitimité à contribuer au redressement budgétaire du pays,
04:28et c'est normal pour une entreprise, pour toutes les entreprises.
04:31Mais à un moment donné, il y a un niveau de taxation
04:35qui effectivement peut être destructeur de valeurs pour tout le pays,
04:38destructeur d'emplois aussi.
04:39Et là, on est arrivé à ce stade où il faut un moratoire sur la fiscalité du transport aérien.
04:45Juste aux bornes d'ADP, nos impôts ont augmenté de 300 millions d'euros,
04:50c'est-à-dire plus de 50 à 60%.
04:52Donc l'entreprise peut faire face, peut faire face conjoncturellement,
04:56pour aider au redressement.
04:58En revanche, structurellement, si vraiment cette taxation devait être pérennisée,
05:01effectivement, il y aura un à-coup sur un secteur aérien,
05:04qui est un secteur industriel clé pour la France.
05:07Imaginez, nous avons Airbus, Thales, Safran, Air France, Dassault, ADP.
05:12Donc c'est un secteur...
05:13Vous dites qu'il y a un niveau où on abîme, en fait.
05:15Il y a un niveau où on abîme, et on approche de ce niveau,
05:18voire on a déjà dépassé ce niveau pour certains segments.
05:21Sur la question de la clientèle européenne,
05:23parce que vous êtes un bon baromètre de l'économie européenne,
05:26qu'est-ce que vous voyez en développement de clientèle ?
05:29Vous voyez surtout des Américains, des Asiatiques qui voyagent
05:31et qui nous prennent pour un hub,
05:32vous voyez des Européens qui bougent,
05:34ou on est sur quand même un contexte de croissance assez molle ?
05:37Alors, le trafic européen,
05:39il croit globalement à la hauteur du PIB de l'Europe,
05:42qui est à peu près l'équivalent d'un pays mature.
05:47Le trafic le plus dynamique pour nous,
05:49comme on l'a dit, c'est le trafic international,
05:51le trafic nord-américain, clairement,
05:53les États-Unis, mais aussi le Canada,
05:55le trafic d'Amérique du Sud,
05:56le trafic africain, le trafic Middle East, Moyen-Orient.
05:59Donc, on est quand même sur une dynamique de trafic international,
06:02intercontinentale, qui est importante,
06:04et qui, encore une fois, témoigne d'une demande,
06:06d'un envie de voyager qui est très fort,
06:08et qui est aussi le fait des jeunes.
06:10Et vous bénéficiez, dans ce cas,
06:11vous parliez des Nord-Américains,
06:13d'un euro qui est fort.
06:14On parlait ce matin de record avec la baisse du dollar.
06:17On est sur des records de 4 ans.
06:18Ça, c'est plutôt positif pour l'arrivée d'un Américain ?
06:21Alors, c'est positif pour l'arrivée d'un Américain.
06:23Ce n'est pas forcément positif pour nous, dans l'absolu.
06:27Mais à ce stade, on résiste,
06:28compte tenu de la bonne dynamique de trafic,
06:31de cette envie du voyage qui monte, qui augmente.
06:35Sur les autres aéroports mondiaux,
06:37en Inde, vous êtes toujours sur des niveaux inférieurs.
06:40La catastrophe aérienne qui a eu lieu a toujours un impact ?
06:43La catastrophe aérienne a toujours un impact.
06:46Nous, on opère notamment l'aéroport de Delhi,
06:48qui est la base d'Air India,
06:51mais aussi l'aéroport d'Hidérabad, de Goa,
06:53bientôt de Bokhapuram et de Nagpur.
06:55Donc, on a une base indienne qui est très forte.
06:58Effectivement, la coût liée à l'accident est forte.
07:01Les compagnies aériennes se mettent en ordre en Inde
07:04pour redresser cette situation,
07:06s'armer, mieux maintenir leurs avions.
07:09Donc, on est dans une dynamique aussi qui est positive.
07:12Le trafic reste dynamique en Inde.
07:14On voit des compagnies aériennes qui s'associent,
07:17Air France, KLM,
07:18entre autres.
07:19Est-ce qu'il pourrait y avoir à nouveau
07:20un mouvement de consolidation dans les aéroports ?
07:23Est-ce que vous avez des cibles européennes
07:24ou internationales ?
07:26Alors, effectivement, il y a deux grands groupes français
07:29qui ont un réseau aéroportuaire.
07:31Il y a Vinci Airport et le groupe ADP.
07:33Il y a aussi des groupes étrangers assez peu nombreux.
07:36Il y a le groupe Fraport.
07:37Il y a aussi le groupe ANA, Fraport en Allemagne,
07:39ANA en Espagne,
07:41qui sont en fait les quatre grands groupes mondiaux.
07:44Donc, cette consolidation dans les aéroports,
07:46elle a lieu.
07:47Elle est liée à des expertises qui se développent.
07:50Nous, quant à nous, nous nous essayons d'être positionnés
07:53sur des aéroports de capital de pays plutôt émergents.
07:57Voilà.
07:57C'est ça, c'est le positionnement du groupe ADP
08:00dans la mesure où c'est notre expertise
08:02d'opérer des aéroports de grande taille
08:03et de développer ces aéroports sous exploitation.
08:06L'expertise du groupe ADP est là.
08:08L'État a 60% de votre capital.
08:10On cherche de l'argent partout.
08:12On a parlé dernièrement dans les débats
08:14de revoir les participations de l'État.
08:16Est-ce que c'est important que l'État soit partout ?
08:18Est-ce qu'on reparle autour de vous de privatisation ?
08:21Est-ce que c'est un sujet qui revient ?
08:23Alors, déjà, ADP, c'est une société anonyme cotée en bourse.
08:26L'État a 50,6%, 49,4% détenu par des actionnaires privés.
08:32Donc, à ma connaissance, il n'est pas prévu
08:34que l'État descende du capital ou baisse sa participation
08:38dans la mesure où le groupe ADP est lui aussi contributif.
08:42Contributif par la taxation, comme on a pu le dire,
08:44mais aussi contributif par les dividendes qu'il va verser
08:46et qu'il continuera à verser si le secteur se développe encore
08:50et on a la potentialité et le projet pour se développer à l'avenir.
08:55– C'est que ça vaut 6,5 milliards ce matin,
08:57rien que la participation de l'État, donc dans une quête d'argent ?
09:00– Ça vaut, oui, 6,5 milliards aujourd'hui pour la participation de l'État.
09:03Après, c'est un actif stratégique, vital pour le développement
09:06et l'attractivité du pays.
09:08Et c'est aussi un actif qui s'autofinance.
09:10– Vous êtes plutôt contre, en fait.
09:11Augustin Dromanet a toujours été contre la privatisation.
09:13– Non, je ne sais pas si on peut être pour ou contre
09:15quand on est à la tête du groupe ADP.
09:17– Si on n'a pas le choix.
09:17– Puisque c'est un choix qui appartient aux actionnaires.
09:21En revanche, comme on l'a toujours dit,
09:22l'objectif c'est de bien gérer l'entreprise,
09:24qu'elle soit publique ou qu'elle soit privée.
09:26Et oui, on arrive à faire la démonstration
09:28que l'entreprise peut se développer,
09:30investir seule, sans subvention publique,
09:33le système s'autofinance,
09:35alors qu'on a un actionnaire majoritaire qui est l'État.
09:37– Merci beaucoup Philippe Pascal,
09:38est venu ce matin dans la matinale de l'économie.
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