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  • il y a 3 mois
Pierre Bastid, président du conseil d'administration de Carmat, était l'invité de Laure Closier dans Good Morning Business, ce mercredi 27 août. Il a défendu son dossier de reprise de Carmat, le fabricant français de cœurs artificiels actuellement en redressement judiciaire, sur BFM Business. Retrouvez l'émission du lundi au vendredi et réécoutez la en podcast.

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Transcription
00:00Il est 7h44 sur BFM Business et SUAMC Découverte et ce matin on va recevoir un homme particulièrement courageux.
00:06Pierre Bastide, bonjour. Vous êtes le président du conseil d'administration de Karmat.
00:10Vous êtes l'homme qui veut reprendre la biotech.
00:13Vous connaissez par cœur ce dossier puisque vous êtes déjà dedans depuis plusieurs années.
00:18Vous êtes actionnaire à hauteur d'à peu près 20% de l'entreprise
00:21et vous êtes le seul à avoir déposé un dossier de reprise de l'entreprise.
00:26Pierre Bastide, les actionnaires n'en veulent pas. Ils n'ont pas remis au pot.
00:31L'action vaut 18 centimes aujourd'hui.
00:34L'État ne veut pas vous aider. C'est très clair.
00:36Bercy a dit qu'il ne remettrait pas au pot pour avoir reçu Nicolas Dufauque récemment de la BPI.
00:41Il a redit que la BPI n'aiderait pas Karmat.
00:44Qu'est-ce qui fait que vous, vous y croyez encore ?
00:47Je crois qu'il faut essayer d'objectiver un petit peu le débat, recadrer les choses.
00:53Et je vais vous dire, de mon point de vue, ce qu'est l'équation Karmat.
00:57Tous les ans, entre Nord-Amérique et Europe, il y a 200 000 personnes qui vont mourir dans les 12 mois
01:02pour des problèmes d'insuffisance cardiaque.
01:04C'est la première cause de mortalité devant le cancer.
01:07La moitié, 100 000, on sait les soigner avec des drogues, des valves, des procédés différents.
01:14Et l'autre moitié, la seule façon de les sauver, c'est une greffe humaine.
01:20Or, des donneurs, il y en a, on ne sait pas très bien, mais entre 5 et 7 000.
01:24Donc on est très loin des 100 000.
01:26En plus, le 100 000 ne va qu'augmenter, cause des problèmes de diabète, obésité, etc.
01:31Et les nombres de donneurs, heureusement, vont baisser, puisque donneur typique, c'est un jeune de 23 ans qui se tue en moto.
01:39Donc ça, c'est le cadre, on va dire, si je peux dire, le marché Karmat.
01:42Karmat, c'est une prothèse qui fonctionne.
01:48C'est très important de le dire.
01:50Il faut dire qu'elle fonctionne.
01:51Elle fonctionne et c'est très objectif.
01:54On vient d'avoir le label MDR, qui est le Medical Device Regulation,
02:00qui est un label européen, qui garantit que le produit peut être utilisé, commercialisé, etc.
02:06Pour dire qu'elle fonctionne, il faut parler en jours de vie supplémentaires, que ça permet ?
02:11Alors, il y a une petite confusion qui est faite quelquefois.
02:14Aujourd'hui, l'indication de Karmat, c'est ce qu'on appelle Bridge to Transplant.
02:19C'est une solution temporaire en attendant un donneur humain.
02:23Parce que c'est une étape obligatoire avant de devenir une prothèse.
02:26Mais on commence des études cliniques pour que ce produit devienne une prothèse,
02:31c'est-à-dire que les gens vivent à vie éternellement, si je peux dire, jusqu'à la fin.
02:36Aujourd'hui, quelques statistiques.
02:39On a 90% de survie au bout de 6 mois d'implantation, ce qui est juste extraordinaire.
02:48On a 2 patients qui ont dépassé 2 ans de survie.
02:52Malheureusement, il y en a un qui est mort d'un cancer.
02:54Donc voilà, c'est la vie.
02:56Donc, je le dis, je le répète, et je suis content d'avoir l'occasion de le dire ici,
03:00le produit marche.
03:00Il ne faut pas qu'il y ait d'ambiguïté.
03:02Le produit marche.
03:03Il répond à toutes les normes, bien meilleures d'ailleurs,
03:05que tout ce qui est demandé en termes de fiabilité, confort de vie également, etc.
03:10Mais est-ce qu'il n'est pas aujourd'hui trop cher par rapport,
03:13alors je sais que c'est compliqué de parler comme ça,
03:15mais au nombre de jours de vie qu'il permet d'obtenir ?
03:19Parce que les investisseurs, et c'est bien de ça dont on parle de survie financière,
03:22c'est comme ça qu'ils calculent.
03:24Alors, je ne sais pas très bien comment calculent les investisseurs.
03:27Je pense qu'ils ont, et c'est par illégitime, un doute sur le temps que ça va prendre pour arriver au break-even.
03:34Est-ce que le produit est trop cher ?
03:36J'allais dire, ça sera aux assurances et aux Sécurités sociales nationales d'en décider.
03:41Mais aujourd'hui, si vous prenez quelqu'un qui est en insuffisance cardiaque,
03:44donc il va mourir dans les 12 mois, ça coûte extraordinairement cher.
03:47Parce que malheureusement, avant de décéder, il se passe des tas de choses qui coûtent très très cher.
03:52Et ceux qui ont la chance d'être greffés, la greffe humaine, ça coûte assez cher,
03:57mais surtout, il y a une consommation de drogue qui fait qu'au bout de quelques années,
04:01on a largement, si je peux dire, amorti le coût d'une prothèse.
04:04Donc, est-ce que le produit est trop cher ? Objectivement, non.
04:08J'en viens à vous, Pierre Bastide, parce que ce dossier de CARMAT, il est lié à vous,
04:11c'est vous qui faites cette proposition de reprise.
04:14Vous-même, avec en grande partie votre argent, vous avez demandé un délai au tribunal de commerce
04:19parce que vous ne voulez pas y aller complètement seul,
04:22vous voulez que d'autres vous permettent notamment de lever des fonds dans la durée,
04:25parce que c'est aussi ça qui a pêché dans le dossier de CARMAT.
04:28Est-ce que vous avez réussi à convaincre d'autres investisseurs ?
04:31Alors, d'abord, moi-même, je vais investir dans ce dossier.
04:35La difficulté, c'est le délai.
04:38Il faut trouver des liquidités, un montant assez important.
04:40J'ai la chance, on va dire, d'avoir le patrimoine qui me permettrait de le faire,
04:44mais il faut le liquider, le rendre liquide.
04:47Et donc, j'ai demandé un délai jusqu'à fin septembre au tribunal de commerce
04:52pour obtenir ces liquidités.
04:54Donc, en parallèle, je réalise, on va dire, quelques opérations sur mon patrimoine,
04:59mais je cherche effectivement à convaincre d'autres investisseurs
05:02de m'accompagner dans cette aventure,
05:04sachant que ceux qui vont investir en premier,
05:07récolteront les fruits plus que les autres.
05:09La reprise de l'entreprise, c'est un peu plus d'un million d'euros.
05:13Il faut combien à Karmat, sur les, je ne sais pas si vous faites un plan,
05:16à cinq ans pour pouvoir être en ordre de marche ?
05:20Pour atteindre le break-even, il faudrait qu'on soit capable d'implanter
05:24500 unités par an, et on pense arriver à ça d'ici deux à trois ans.
05:29On a la capacité de production, facilement d'ailleurs,
05:31et donc, pour y arriver, pour faire ces 500 unités,
05:37il faut de l'ordre de 150 à 160 millions d'euros encore pour y arriver.
05:44La problématique Karmat, pour revenir dessus,
05:48j'insiste, je suis navré, mais le produit marche.
05:51Il n'y a plus de risque clinique, il y a des risques, bien sûr,
05:53mais largement maîtrisés.
05:55Il n'y a plus de risque technologique, il n'y a plus de risque médical, etc.
05:59Karmat, aujourd'hui, en fait, on est dans une course
06:03que tous les industriels connaissent, lorsqu'on lance un produit nouveau,
06:06c'est la course entre monter les volumes et réduire le cost of goods solde,
06:10le coût de revient du produit. Voilà.
06:12Mais il n'y a pas ce risque de s'être plantée de technologie ?
06:17Je vais vous faire un parallèle que vous n'allez pas aimer,
06:19avec Insect, ou avec McPhee dans l'hydrogène,
06:22où là, il y a parfois une technologie sur laquelle on a misé,
06:25on s'est planté, les actionnaires prennent leurs pertes,
06:27et puis c'est l'histoire industrielle,
06:29et c'est aussi l'histoire de l'économie.
06:31Pour vous, on n'est pas du tout là-dedans, ça fonctionne ?
06:33On a déjà eu la démonstration que ça marche ?
06:35Alors, on n'est absolument pas dans ce schéma-là,
06:38parce qu'on est bien au-delà d'une proof of concept.
06:40On a un produit qui marche, je le répète,
06:43la technologie marche, et le produit est industrialisé.
06:46Ça a pris du temps, ça n'a pas été facile,
06:47il y a eu beaucoup, on va dire, de difficultés
06:49et de problèmes de qualité,
06:51mais aujourd'hui, le produit marche,
06:52sans aucune ambiguïté.
06:54Qu'est-ce que vous faites de l'équipe de direction ?
06:57On a reçu régulièrement M. Pia,
07:00qui lui mettait en cause régulièrement la bourse,
07:03disait qu'il était mal compris,
07:04qu'on ne comprenait pas en France,
07:06la notion du risque même,
07:07qu'on n'arrive même pas à comprendre
07:09comment fonctionnaient les biotech,
07:10qui ont besoin d'argent régulièrement.
07:11Est-ce qu'il faut qu'ils partent ?
07:12Alors, bon, je vais prendre mon joker,
07:17parce que je suis toujours en train de travailler
07:18avec mon équipe sur le dossier social en général,
07:21donc je ne souhaite pas rentrer dans le détail.
07:23Je vais simplement dire qu'on va conserver
07:25la majorité du personnel.
07:28Pourquoi ? Parce qu'avec les difficultés financières,
07:30on a eu de l'attrition,
07:31et donc les effectifs sont déjà largement réduits.
07:34Deuxièmement, parce qu'il y a des compétences rares,
07:37très difficiles à trouver.
07:38Et troisièmement, parce que pour conserver
07:41nos accréditations des CRA, les labels, etc.,
07:44il faut qu'on conserve une structure minimum.
07:47Voilà.
07:47Donc, il y aura des petits ajustements.
07:49Encore une fois, je ne souhaite pas
07:50me prononcer tout de suite dessus,
07:52parce qu'il y a encore un peu de travail.
07:54La bourse, qu'est-ce qu'on fait des petits actionnaires ?
07:56On sort complètement de la cote,
07:57vous reprenez l'entreprise,
07:59vous considérez qu'il y a encore une place,
08:01qu'il pourrait y avoir peut-être
08:02une levée de fonds avec des actionnaires ?
08:05Alors, les actionnaires, petits et gros,
08:07il faut qu'ils acceptent qu'ils aient tout perdu.
08:10Moi, le premier, je suis le premier actionnaire.
08:11Vous avez 20% ?
08:13Je ne suis pas loin de 20%, oui.
08:15J'ai mis dedans plusieurs dizaines de millions d'euros.
08:17Voilà, c'est la vie, c'est la vie des affaires,
08:19de l'innovation, etc.
08:20Donc, oui, malheureusement,
08:21c'est la règle du jeu de la bourse.
08:24On va tout perdre et je me mets dedans.
08:26Alors, par contre, moi, ce que j'aimerais beaucoup,
08:29et je réfléchis à ça avec un avocat,
08:31ce que j'aimerais beaucoup,
08:33c'est offrir la possibilité à qui voudrait,
08:36mais aux actionnaires historiques,
08:38de revenir dans des conditions préférentielles.
08:41Encore une fois, on va faire plusieurs tours de financement.
08:43C'est évident que les premiers tours,
08:45pour ceux qui resteront,
08:47seront beaucoup plus, si je peux dire,
08:48lucratifs que le financement à la fin.
08:51Donc, vous avez d'abord accepté de perdre.
08:52Oui.
08:53On s'est planté.
08:54Et ensuite, revenir avec un discount, quoi.
08:56C'est un peu l'idée.
08:57Exactement.
08:58Pierre Bastide, qu'est-ce qui vous anime ?
09:00Vous avez quel âge ?
09:02Un peu plus de 70 ans, j'imagine ?
09:03Il vient de passer 70 ans.
09:05Physiquement, hein ?
09:05Oui.
09:06Vous pourriez clairement,
09:07je vous l'ai déjà dit plusieurs fois,
09:09vivre au Bahamas,
09:09les doigts de pieds en éventail.
09:11Qu'est-ce qui vous anime
09:12pour qu'à plus de 70 ans,
09:13vous vous dites,
09:13je vais reprendre Carmat,
09:14je vais remettre cette entreprise
09:16à l'endroit où elle devrait être, selon vous ?
09:19J'ai vendu mon entreprise
09:20il y a une dizaine d'années, maintenant.
09:24Et donc, avec beaucoup d'argent.
09:25On m'a dit, mais c'est super,
09:26tu as du temps, de l'argent,
09:28qu'est-ce que tu vas faire ?
09:28Je vais faire la même chose.
09:29Moi, j'adore mon métier.
09:30Donc, je n'ai pas de raison de m'arrêter.
09:32Moi, je suis un industriel.
09:33L'industrie, c'est la technologie,
09:35c'est les gens,
09:36c'est des projets, c'est bâtir.
09:38Voilà, je vais continuer.
09:40Merci beaucoup, Pierre Bastide,
09:41d'être venu ce matin
09:42dans la matinale de l'économie.
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