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  • il y a 10 heures
Regardez L'esprit de l'info avec Roger-Pol Droit avec Thomas Sotto du 10 décembre 2025.

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Transcription
00:00Pensez à covoiturer.
00:02Thomas Soto, RTL Matin.
00:04Nous sommes ensemble jusqu'à 9h30, pour l'heure il est 9h15, c'est l'esprit de l'info avec notre grand témoin du mercredi,
00:08l'écrivain, philosophe et journaliste Roger Paul Droit. Bonjour Roger Paul.
00:11Bonjour Thomas.
00:12Donald Trump nous a dans le pif en ce moment pour parler un peu familièrement de la formule,
00:16mais c'est vraiment l'expression qui convient.
00:18Le président américain qui a de nouveau étrillé les dirigeants européens qu'il trouve stupides pour certains, entre autres.
00:25Écoutez, l'Europe doit faire très attention.
00:28Nous faisons beaucoup de choses, nous voulons que l'Europe reste l'Europe.
00:30L'Europe prend une très mauvaise direction, c'est très mauvais.
00:34Nous ne voulons pas que l'Europe change autant, elle prend une très mauvaise direction, c'est très important.
00:39On a l'impression qu'il aimerait rayer l'Europe de la carte Donald Trump.
00:44Pourquoi ?
00:45Surtout parce qu'il méprise finalement l'Europe, il a la Chine dans le collimateur essentiellement,
00:51et puis sa propre domination.
00:53Mais on n'a pas attendu Donald Trump pour savoir que l'Europe ne va pas bien.
00:59Je crois qu'il a ses objectifs, ses critiques, son idéologie.
01:04C'est dans un rapport sur la sécurité des Etats-Unis que se trouvent ces phrases au moment où il le présente.
01:10Un rapport qui est au vitriol pour l'Europe.
01:12Mais absolument, mais absolument, mais il y a ses objectifs, et il y a ce que je voudrais mettre en lumière,
01:19c'est que nous sommes dans une vraie crise de l'idée d'Europe, de la définition de l'Europe.
01:26C'est ça, parce que finalement, que Trump dise qu'on prend une mauvaise direction à cause de l'immigration notamment,
01:34ça c'est son idéologie.
01:36En revanche, moi j'aurais envie de dire, c'est même pas une mauvaise direction,
01:42c'est qu'il n'y a plus de direction du tout.
01:44C'est vrai qu'il y a des choses à retenir dans ce qu'il dit ?
01:45Si on retire l'excès, l'outrance, il y a des choses à écouter ?
01:49Il y a des choses à écouter en ce qui concerne une crise de l'Europe,
01:52mais ça on n'a pas besoin de lui.
01:53Elle est beaucoup plus profonde, elle est beaucoup plus ancienne,
01:55et c'est là-dessus que je voudrais mettre l'accent.
01:59Mais pour ça, il ne faut pas compter par année, il ne faut pas compter par siècle.
02:04La crise de l'Europe dont je veux parler, ça n'est pas celle seulement de la diplomatie,
02:10des difficultés du soutien à l'Ukraine, de tout ce qui se passe aujourd'hui,
02:14des questions migratoires, de l'espace de Schengen, etc.
02:17Non, je crois qu'il faut se regarder autrement, c'est-à-dire ouvrir la focale,
02:24et pas compter par année, mais par siècle.
02:26Par siècle ?
02:26Par siècle, carrément.
02:27Au cours des siècles, l'Europe était toujours synonyme de savoir,
02:31de puissance, d'érudition, de culture ?
02:35Voilà, je crois qu'il y a eu un grand âge d'or de l'Europe,
02:38en très gros, plusieurs siècles, depuis la fin du Moyen-Âge jusqu'au XIXe.
02:43Depuis la Renaissance, en gros.
02:44Voilà, de la Renaissance, les savoirs européens,
02:48la domination de la raison, la naissance des sciences,
02:51mais aussi, bien sûr, la domination militaire, commerciale, les empires coloniaux,
02:59la puissance financière de l'Europe qui s'est étendue sur toute la planète.
03:05Et là, on peut dire que c'était un moment où Europe de l'Ouest, principalement,
03:11et Occident, était superposé.
03:15Et à partir de là, à partir du, disons, du fin 18, tout le long du XIXe siècle,
03:21une première fracture, il y en a eu deux, grande,
03:24première fracture, ça a été la naissance des Etats-Unis.
03:28Oui.
03:28C'est-à-dire, l'apparition d'un Occident, qui n'était plus seulement l'Europe.
03:33Mais on a quand même su être fort, pardon, je vous interromps,
03:36on a su être fort en même temps que les Etats-Unis étaient là.
03:39Bien sûr, mais on n'a jamais su, me semble-t-il,
03:42et c'est là-dessus que je vais insister,
03:43on n'a jamais su se définir en tant qu'Europe,
03:46une fois que l'Occident était dédoublé.
03:49D'accord.
03:49Vous voyez ?
03:50C'est-à-dire que l'idée européenne face aux Etats-Unis,
03:54ou bien c'était une sorte de détestation d'un nouveau monde mauvais,
04:01ou bien c'était l'alliance avec lui,
04:02ou bien c'était la fascination et l'imitation.
04:06Mais ce qu'est une idée européenne au moment où l'Occident devient un nouveau monde,
04:14ça, ça n'a pas été, je crois, véritablement élaboré, véritablement pensé.
04:18Et puis la deuxième terrible grande fracture,
04:20c'est évidemment les deux guerres mondiales du XXe siècle,
04:24où d'une certaine manière l'Europe s'est auto-détruite.
04:28Elle s'est suicidée, des dizaines de milliers de morts,
04:31la fin finalement de la grandeur de la culture, de la puissance et des empires européens,
04:37et même de l'idée d'Europe.
04:39Et là, une reconstruction après-guerre, bien sûr.
04:42Une reconstruction, mais une reconstruction avec cette idée,
04:45on va en finir avec les frontières, on va en finir avec les Etats-nations.
04:50C'est là qu'on s'est planté ?
04:50On s'est planté en imaginant que ce modèle était bon pour l'ensemble du monde.
04:57Si vous voulez, il me semble que la grande erreur,
04:59ça a été de vouloir construire quelque chose de bon pour l'Europe,
05:02c'est-à-dire plus jamais ça, nous nous sommes faits la guerre,
05:05nous allons devenir finalement sans frontières, sans Etats-nations,
05:09et avec un espace de libre circulation des biens et des marchandises,
05:13de marchés communs, etc.
05:13Mais tout ça, ça ne suffit pas, me semble-t-il, à faire quelque chose,
05:19une identité dans un monde où il continue à y avoir des frontières
05:23et où il continue à y avoir des Etats-nations.
05:24Tout le monde ne pense pas comme Donald Trump.
05:26J.P. Morgan, le patron de J.P. Morgan, la première banque américaine,
05:29prône lui une Europe forte, parce qu'il dit qu'une Europe faible,
05:32c'est mauvais pour l'ensemble du monde libre et démocratique.
05:34C'était il y a quelques jours, le 6 décembre, lors d'une conférence de presse.
05:37Qu'est-ce qu'il faut réinventer pour retrouver une Europe forte, Roger Paul ?
05:42Alors, si j'avais la solution, je serais bien content.
05:46Je crois que j'ai la question, mais je n'ai pas la réponse.
05:49Ce qui manque, en fait, c'est ce que ce vieux mot « âme » disait.
05:55Il manque une âme à l'Europe.
05:57C'est-à-dire quelque chose, une force, un idéal,
06:01quelque chose qui donne envie, qui mobilise.
06:03Un projet éditorial, nous, on dirait, dans notre métier ?
06:05Oh, plus qu'éditorial, un projet de vie, un projet mobilisateur,
06:11un horizon, un récit qui fasse quelque chose, qui fasse envie.
06:15Et ça, ça ne se décrète pas.
06:17Alors, bien sûr, je crois qu'il y a des pistes.
06:21Il y a des pistes du côté de l'écologie,
06:23il y a des pistes du côté des libertés, du respect des données des citoyens,
06:28il y a des pistes du côté des passerelles
06:30que l'Europe pourrait inventer entre les civilisations.
06:34Mais, en tout cas, on attend.
06:35Et je pense que, si rien n'émergeait,
06:40eh bien, on risque de devenir, effectivement, dans une ou deux générations,
06:44une sorte de, je ne sais pas, un mélange
06:47de musées, de maisons de retraite et de villages de vacances
06:52pour l'ensemble du reste du monde.
06:54Et je pense qu'on pourrait faire mieux.
06:56Attention, parce que village de vacances,
06:57vous allez nous donner envie un petit peu à cette saison.
06:59Merci beaucoup, Roger Pauldroit,
07:01le supplément d'âme qui manque à l'Europe
07:03et que vous nous apportez tous les mercredis
07:05dans l'esprit de l'info sur RTM.
07:06Merci.
07:07Merci.
07:08Merci.
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