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  • il y a 4 jours
Chaque week-end, Emilie Broussouloux vous accompagne de 22h à 00h dans BFM Grand Soir.

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00:00Générique
00:00Bonsoir et bienvenue dans BFM Grand Soir. Je suis ravie de vous retrouver ce soir jusqu'à minuit.
00:18C'est l'information de ces dernières heures. Volodymyr Zelensky sera à Paris à partir de lundi.
00:25C'est le palais de l'Elysée qui confirme qu'Emmanuel Macron recevra le président ukrainien pour une visite.
00:31Pourquoi faire ? Objectif, réaffirmer l'engagement de la France aux côtés de l'Ukraine.
00:36Qu'est-ce que ça veut dire ? Va-t-on envoyer plus d'armes, plus d'argent ? Va-t-on envoyer nos avions de chasse ?
00:42Et d'ailleurs, où en est-on sur le terrain ? Pour évoquer toutes ces questions.
00:46Et j'espère que vous avez toutes les réponses, amiral. Bonsoir. Merci d'être avec nous, amiral.
00:51Jean-Louis Vichaud, ancien chef de mission militaire française auprès de l'OTAN. Merci d'être là.
00:56Aurore Malval, bonsoir. Bonsoir.
00:58Grand reporter au service politique de Marianne. Thierry Arnaud, bonsoir.
01:01Bonsoir Amélie.
01:02Éditorialiste politique internationale BFM TV.
01:05Puis on est aussi en ligne avec Michel Polacco. Bonsoir.
01:08Vous êtes journaliste et aviateur spécialiste des questions de défense.
01:13Alors, je me tourne d'abord vers vous, Thierry Arnaud.
01:15C'est vrai que c'est la neuvième visite du président ukrainien depuis le début de la guerre.
01:19Et on peut le dire, Volodymyr Zelensky, il a rarement l'habitude de repartir les mains vides.
01:24Oui, d'autant que cette visite, elle va intervenir à un moment particulièrement difficile pour lui, pour de multiples raisons.
01:29Les choses sont compliquées sur la ligne de front, avec cette vide de Pokrov, ce qui pourrait tomber dans les mains russes dans les prochaines heures.
01:36L'Ukraine continue évidemment d'être sous une pluie de drones et de missiles, comme on a pu le constater tragiquement ces dernières heures.
01:43Plus de 400 drones et 18 missiles tombés sur l'Ukraine tôt ce matin, avec au moins 4 morts dans la capitale de Kiev.
01:52Donc un ciel qui reste très difficile à défendre, bien sûr.
01:57Tout cela dans un contexte, par ailleurs, de politique intérieure un peu compliqué pour le président ukrainien,
02:00puisqu'il est en train de se débattre avec un grave et important scandale de corruption,
02:05une centaine de millions de dollars détournés dans des contrats conclus par l'opérateur des centrales nucléaires qui produisent l'électricité.
02:13Donc tout ça plante le décor pour une visite qui sera consacrée effectivement au soutien à l'Ukraine,
02:17au soutien militaire, à l'apport d'équipements, à l'apport de drones, au moyen de défendre le ciel ukrainien.
02:23Il est attendu sur la base aérienne de Villakoublet lundi matin, évidemment sans doute par hasard.
02:29Et ensuite une série de réunions avec cette coalition des volontaires.
02:33Vous savez, cette trentaine de pays qui s'engagent à défendre l'Ukraine dans le cadre d'un accord de paix.
02:39Et puis des réunions qui seront plus spécifiques, dont une notamment qui sera consacrée au drone.
02:43On a vu des images défiler pendant que vous parliez de Volodymyr Zelensky qui était en déplacement à Paris.
02:49C'était en septembre dernier, Ormalval.
02:52C'est vrai que Thierry Arnaud le disait, la situation est critique pour l'Ukraine en ce moment particulièrement.
02:56Et ce n'est jamais anodin quand le président ukrainien vient en France.
03:00C'est pour y chercher quelque chose.
03:01Oui, bien sûr. Effectivement, Volodymyr Zelensky avait d'ailleurs annoncé vouloir renforcer son arsenal.
03:08C'était justement après cette visite aussi en France au mois d'octobre dernier.
03:11Il avait annoncé son désir de se constituer justement une flotte de 250 chasseurs, dont des rafales français.
03:18C'était ce qui avait été annoncé à l'époque.
03:22Et effectivement, vous l'avez dit, il y a cette question des drones.
03:27En fait, à chaque fois, disons aussi que le président ukrainien se rend en France et qu'il y a ces discussions.
03:32C'est aussi l'occasion pour la France d'espérer gagner des parts de marché aussi à l'export.
03:37Au-delà évidemment de l'aide bienveillante et du côté allié de la France vis-à-vis de l'Ukraine.
03:46Vous voulez dire qu'on a aussi intérêt à proposer nos armes ?
03:48On a aussi intérêt à proposer nos armes.
03:50Et c'est un défi pour la filière française à divers échelons.
03:54Alors on parlera tout à l'heure de la question des rafales.
03:56Mais c'est aussi extrêmement intéressant pour des start-up, notamment sur les drones.
04:01Parce qu'en fait, c'était un domaine dans lequel la France avait énormément de retard.
04:04Et elle cherche justement, à travers l'aide apportée à l'Ukraine, à le combler.
04:09Et c'est vrai qu'il y a plusieurs projets.
04:11On verra s'ils se concrétisent.
04:13Notamment peut-être un de l'installation d'une usine en Ukraine
04:16qui permettrait justement de fabriquer des drones, des drones kamikazes
04:20qui sont développés par une start-up française qui s'appelle Turgis & Gaillard
04:24et sur lequel justement Emmanuel Macron encourage beaucoup.
04:28Je voudrais rebondir justement sur votre hésitation.
04:32Et à un instant, Amiral Vichaud, c'est tabou de dire que nous, la France,
04:36on pourrait aussi tirer notre épingle du jeu ?
04:38Non, c'est d'autant moins tabou qu'en fait, on prône le fait que
04:42toutes les ressources qui sont dégagées par les Européens
04:44alimentent les industries européennes et pas seulement françaises.
04:48Donc ça, c'est parfaitement clair.
04:50Donc dans les européennes et pas seulement françaises,
04:53on va retrouver les Allemands, on pense à Rheinmetall,
04:56mais on va aussi trouver les Français avec Nexter et avec effectivement
05:00tout le réseau des PME, PMI qui sont peut-être aussi un peu moins visibles
05:04et qui pourraient profiter par des apports croisés de l'expérience ukrainienne.
05:10Les Ukrainiens ont beaucoup d'idées.
05:12Les Ukrainiens ont montré une grande habileté,
05:15beaucoup d'annivation et beaucoup d'agilité.
05:18Ils sont très agiles également dans leur dispositif
05:21qui leur permet d'acquérir de l'armement.
05:23Or, ce qui manque à la France précisément, c'est cette agilité.
05:27C'est-à-dire que nous, on est très bons pour faire des grands systèmes,
05:29très sophistiqués dans la durée, ce qu'on appelle la haute couture.
05:32C'est très cher et qui met beaucoup de temps.
05:32Exactement, la haute couture de l'armement.
05:35Or, ce que là, ce qu'on a besoin, c'est même plus du pré-apporté,
05:38c'est du consommable.
05:39On pourrait faire une analogie avec certaines marques de pré-apportés chinois.
05:43C'est quelque chose d'immédiatement utilisable, de pas cher.
05:46Pourquoi c'est pas cher et pourquoi ça doit être immédiatement utilisable ?
05:50Parce que c'est pas cher, donc on peut en faire énormément et c'est immédiatement
05:54inutilisable.
05:55Donc ça permet de faire des impasses sur beaucoup de paramètres de sécurité,
05:59tout simplement parce que ça va vers un pays qui, lui, fait la guerre.
06:02Et la seule chose qui l'intéresse, c'est de mettre un paquet d'armement,
06:07un paquet d'armes sur l'adversaire.
06:09Donc ce que vous voulez dire, c'est qu'on a besoin d'apprendre à faire du low cost.
06:13On a besoin exactement d'apprendre à faire du low cost.
06:15Et en plus du low cost agile, c'est-à-dire du low cost qu'on va adapter en permanence
06:19à l'évolution de la menace.
06:21Il ne vous a pas échappé, et on le voit dans les comptes rendus du front,
06:23que les Russes ont fait un effort extraordinaire sur les drones philoguidés.
06:29Pourquoi ? Parce que le brouillage des Ukrainiens était de plus en plus efficace,
06:31perturbait leurs drones.
06:33Donc l'apparade au brouillage électronique, c'est le philoguidage.
06:36Parce que là, ça veut dire que tout ce qu'on transmet au drone passe par un fil,
06:40un fil extrêmement ténu, en fait c'est une fibre optique souvent,
06:44et ça permet d'éviter le brouillage.
06:46En tout cas, ça permet de s'en affranchir beaucoup.
06:49Et les Ukrainiens ont aussitôt rebondi là-dessus.
06:51Or, le philoguidage, c'est aussi une expertise française.
06:55Donc vous voyez qu'on a aussi là des points communs.
06:58Le premier drone français, il date du siècle dernier.
07:01C'était un poisson autopropulsé pour chasseurs de mines,
07:05et ça marchait très bien.
07:06Moi, j'ai dirigé des tempis philoguidés,
07:08ça fonctionnait aussi remarquablement.
07:10Et maintenant, on est à des générations,
07:12où on a remplacé le fil de cuivre par de la fibre optique.
07:15Donc vous voulez dire qu'il y a aussi un échange de bons procédés,
07:18disons, entre ce qui se fait au sein de l'armée ukrainienne et de l'armée...
07:22C'est notre allié.
07:23Enfin, c'est notre allié au sens où c'est la nation que nous soutenons,
07:27parce que c'est elle qui a été agressée.
07:28Donc on remplit nos obligations de la charte de l'ONU,
07:32on soutient l'agressé contre l'agresseur.
07:34Oui, Michel Polacco, vous êtes d'accord avec ça ?
07:36On a aussi beaucoup à apprendre de l'Ukraine,
07:39notamment sur cette partie low cost, des équipements low cost.
07:43Alors, d'accord sur le type de conflit et le type de guerre
07:47qui se déroulent en Ukraine.
07:48Mais de là à dire que c'est ça la défense de la France,
07:52c'est-à-dire faire face à une guerre avec des drones,
07:57avec des systèmes qui sont relativement simplifiés.
08:01Non.
08:02La France, d'abord, elle a à se défendre.
08:05Elle a beaucoup réduit ses moyens depuis la chute du mur de Berlin.
08:09Elle a touché les dividendes de la paix.
08:12Elle a réduit énormément la dimension de son industrie.
08:15Et donc aujourd'hui, elle arrive difficilement à combler ses besoins.
08:20Vous voyez, quand on parle des rafales, c'est une plaisanterie.
08:24Bien évidemment, on ne livrera pas de rafales à l'Ukraine
08:26parce qu'on n'arrive même pas à en produire suffisamment.
08:30Et d'ailleurs, c'est même pas à en produire suffisamment.
08:32C'est à en payer et à en commander suffisamment
08:34pour nos armées, l'armée de l'air et la marine.
08:37Puisqu'on a des commandes de rafales qui s'étalent sur 30 ans,
08:42vous vous rendez compte ?
08:43Donc, si vous voulez, déjà, Dassault ne produira que si on paye.
08:48Donc, ça veut dire qu'il faut que le gouvernement paye.
08:50Deuxièmement, il y a quelques clients à l'exportation.
08:53Troisièmement, les chaînes de montage, pour les faire grimper en rythme,
08:57il faut beaucoup de temps.
08:58Actuellement, on est à peine à 3 par mois.
09:00Et on était à 1 par mois il y a 5 ans.
09:04Et donc, par exemple, les rafales,
09:06ce n'est pas la peine que le président Macron propose des rafales à l'Ukraine.
09:09Alors, justement, Michel Polacco, c'est vous qui mettez les rafales sur la table.
09:14Moi, je voudrais vous lire ce qu'a dit il y a deux semaines Volodymyr Zelensky.
09:18Il veut constituer une flotte de 250 nouveaux avions pour le futur.
09:24Ça, c'est son objectif.
09:25Et il expliquait aussi, je mène trois discussions parallèles concernant les avions
09:29avec les Suédois, les Français et les Américains.
09:33Alors, que veut-il si de toute façon, on ne peut pas lui donner de rafales ?
09:36Peut-être, Amiral Vichaud, vous vouliez y répondre.
09:38Oui, évidemment, il n'aura pas les rafales tout de suite,
09:41ne serait-ce que parce qu'il faut former les mécaniciens, les pilotes.
09:44Et parce que, comme le dit justement M. Polacco,
09:46on a déjà bien de mal à réaliser suffisamment de rafales pour nous.
09:50Mais je rappelle qu'on n'a pas hésité à confier des rafales au BAC
09:54de telle manière qu'on accroche le contrat avec eux
09:56et que de la même façon, on avait pris des rafales de l'armée de l'air
10:00pour soutenir l'export et pour soutenir certains contrats prometteurs.
10:04Je pense également à l'Inde.
10:06Donc, on a besoin maintenant de construire plus de rafales pour la France.
10:10On a choisi de donner des rafales, j'allais dire, d'occasion
10:12à nos clients potentiels pour être sûrs qu'on les amarreille sur le rafale,
10:16qu'on formait leurs pilotes, qu'on formait leurs mécaniciens.
10:19Et nous, on a fait un effort.
10:20Et en doublant la chaîne de production, voire même en la triplant en cinq ans,
10:27mais je suis tout à fait d'accord avec M. Polacco, ça n'est pas suffisant.
10:30Et d'ailleurs, M. Trappier, le président, directeur général de Dassault,
10:34ne cesse de le répéter.
10:35Le problème, c'est qu'effectivement, vous connaissez l'état des finances de la France.
10:38On en parle suffisamment sur cette chaîne et ailleurs.
10:42Voilà, ça coûte cher à commander un rafale, ça coûte cher de produire cela.
10:47Et Dassault, c'est une entreprise, ça n'est pas un arsenal.
10:50Par conséquent, pour pouvoir embaucher, pour pouvoir acheter des machines d'outils,
10:56pour pouvoir faire tout cela, elle a besoin qu'on lui passe des commandes fermes
11:02et donc qu'on engage de l'argent.
11:04J'ai une question pour vous, Amiral.
11:06Comment vous expliquez que les Suédois, avec justement leur avion Gripen,
11:10est aussi agile et finalement moins coûteux ?
11:14Et eux, ils réussissent justement, je crois que c'est 150 avions qui ont été premiers à l'Ukraine,
11:19même avec une usine peut-être de pièces détachées qui sera établie en Ukraine.
11:23Oui, oui, mais parce que d'une part, les Suédois sont des gens qui sont extrêmement mobiles
11:28et effectivement qui ont une culture de défense.
11:31Eux, ils n'ont pas baissé leur garde.
11:32Les Suédois ont beau être neutres depuis toujours,
11:35les Suédois n'ont jamais touché les dividendes de la paix puisqu'ils ont toujours été neutres.
11:39Donc, si vous voulez, ils n'ont jamais ralenti leur chaîne de production.
11:42Par contre, ils savent faire d'excellents matériels.
11:45D'ailleurs, la France leur en achète, en particulier pour les Alpins,
11:48les forces qui sont dans les montagnes.
11:52Bon, voilà.
11:52Donc, ils sont déjà très bons et ils ont des chaînes efficaces et ils savent produire.
11:57La Suède, elle sait produire, elle n'a jamais, comme nous, exporté son industrie.
12:03L'industrie suédoise est restée suédoise.
12:05Donc, ils ont des ouvriers qualifiés, ils ont des machines-outils et ils savent s'en servir.
12:10Donc, ça, ça explique leur production.
12:12Bon, ceci étant, les performances du Gripen, aussi bonnes souhaitelles, ne sont pas celles du Rafale.
12:18Ce qui est important, Émilie, c'est de rappeler que, évidemment, lorsqu'on parle de ces sujets-là,
12:21on n'est pas en train de parler du sujet du début de notre conversation,
12:25c'est-à-dire, en gros, comment l'Ukraine va pouvoir passer l'hiver et se défendre dans les prochains mois.
12:29Si on parle de cette volonté ukrainienne de se doter de cette flotte de 250 avions de chasse,
12:34on parle d'un programme qui va s'étendre sur des années, pour ne pas dire peut-être même des décennies.
12:40Et ce qui expliquait, dans les déclarations que vous citiez partiellement, Volodymyr Zelensky,
12:44c'est qu'il voit une sorte d'échéancier, avec, dans un premier temps, la capacité à solliciter,
12:48et l'on a déjà reçu, et où ça commence tout juste,
12:51des F-16 américains, qui sont des avions d'un type ancien,
12:54ensuite, les Grippens, ces doigts dont on vient de parler,
12:58et il a fait la demande, on n'a pas, pour l'instant, de la réponse.
13:00Il a eu des Mirages 2000, aussi.
13:02Sur les Rafales, il a reçu des Mirages 2000 français.
13:05Mais de tout cela, on parle d'un programme qui s'étale sur des années.
13:09Donc, c'est aussi pour préparer l'après-guerre, en quelque sorte ?
13:12Moyen et long terme, c'est vraiment pour préparer la capacité de défense du ciel ukrainien,
13:16effectivement, bien au-delà des prochains mois,
13:20et bien au-delà de ce qui pourrait être un accord de paix.
13:22Et juste un dernier point, je parle sous votre contrôle,
13:25mais si on parle d'une flotte d'avions de chasse de 250 au total,
13:28on est sur un volume qui est à peu près équivalent à ce dont dispose la France aujourd'hui.
13:32C'est celui de la France, exactement.
13:34Non, mais ça montre bien l'ambition, mais surtout, c'est une vision de long terme,
13:36comme vous le soulignez fort bien, on est à 10-15 ans.
13:39C'est la posture dissuasive de la paix qu'on espère voir un jour s'installer en Ukraine,
13:46en sachant parfaitement que c'est à 15 ou 20 ans.
13:49Mais on en est déjà là.
13:51Aujourd'hui, vous avez un livre qui vient de sortir,
13:53qui s'appelle Zabad, l'heure des guerriers,
13:55qui parle de l'offensive russe en 2028.
13:58Pourquoi en 2028 ?
13:59Parce qu'on estime qu'à ce moment-là, le conflit ukrainien est stabilisé,
14:04et que les Russes qui, eux, sont passés en économie de guerre,
14:07j'allais dire, ils ne savent plus quoi faire de leur matériel
14:10qu'ils continuent à produire en très grande série,
14:11et par conséquent, il est temps d'aller agresser d'autres territoires.
14:15D'autres territoires que l'Ukraine ?
14:17D'autres territoires que l'Ukraine.
14:18Ce qui signifie que Vladimir Poutine n'a pas l'intention de s'arrêter à l'Ukraine, encore une fois.
14:22Ne serait-ce que pour rester au pouvoir, une fois qu'il a mis son économie
14:26dans l'état où elle est aujourd'hui,
14:27c'est-à-dire tout orienté sur la production et l'utilisation des armements,
14:32il ne peut pas s'arrêter comme ça.
14:33Et comme il n'y a pas tellement d'autres exutoires que le front de l'Ouest,
14:38à moins qu'il ne retourne contre la Chine, mais j'en doute,
14:41il faudra bien qu'il attaque quelqu'un pour justifier tout cet armement.
14:45Dans ce contexte-là, Michel Polacco, et vous nous le disiez il y a un instant,
14:50ce qu'on a compris, c'est qu'il était hors de question pour la France
14:52d'affaiblir en tout cas sa propre flotte aérienne
14:56et sa propre défense en cédant des rafales à l'Ukraine.
14:59Ça, il n'en est pas question.
15:00– Alors d'abord, les rafales qui ont été fournies à la Grèce, à la Croatie,
15:06ce sont des rafales qui ont été vendues.
15:07Ils ont été vendus d'occasion, c'est-à-dire prélevés sur les équipements
15:12de l'armée de l'air et pas de la marine puisque c'est des rafales différents.
15:16Et bien sûr, ils doivent être remplacés et les commandes sont passées
15:19pour les remplacer, bien que je crois qu'il en manque 12 encore
15:22par rapport aux exportations.
15:23Mais si vous voulez, le besoin des Ukrainiens,
15:29ce n'est pas des rafales de toute façon.
15:31La guerre qu'ils livrent avec les Russes, ce n'est pas une guerre
15:33contre des Sukhoi 31, ce n'est pas une guerre contre des avions
15:37de dernière génération, ce n'est pas une guerre avec des armements
15:40extrêmement sophistiqués.
15:41Donc de toute façon, ça ne conviendrait pas.
15:44On leur a livré six Mirage 2000, ça veut dire qu'on a quasiment
15:47divisé par trois l'escadron des cigognes qui est basé à Luxeuil,
15:53qui est en train de disparaître, si je puis dire, qui va disparaître d'ailleurs.
15:57Et donc, ils en ont perdu un, ils ont cinq avions,
16:00ils vont en avoir sans doute quelques autres.
16:02Ça, ça fait partie des cadeaux ou des aides qu'on peut leur apporter.
16:05Mais on ne leur apportera pas plus.
16:07Et de toute façon, on n'en a pas du tout les moyens,
16:09parce que n'oubliez pas, quand vous fournissez un avion,
16:11vous êtes obligés de fournir tout ce qui est le soutien qui va avec.
16:15Or, notre armée, nos armées ont des moyens en termes de soutien
16:19qui sont très réduits.
16:20Et puis, pour revenir sur le Gripen, c'est un avion qui est vraiment
16:23d'un niveau inférieur à celui du Rafale.
16:26Mais de toute façon, les Suédois n'en feront pas cadeau.
16:29Et évidemment, comme le disait l'amiral il y a un instant,
16:32ça, c'est pour dans 10-15 ans.
16:34Ce n'est pas pour dans un an ou dans six mois.
16:37Amiral, vous voulez répondre à M. Polako ?
16:40Non, je viens de dire exactement ce sur quoi j'allais mettre le doigt.
16:46Effectivement, on est sur du long délai.
16:49Bon, ceci étant, les Rafales, ils ont un gros avantage.
16:52Ça a été souligné d'ailleurs dans votre présentation.
16:54Ils ont un canon de 20 mm.
16:55Donc, le canon de 20 mm, c'est quand même très utile contre les drones.
16:59Je veux dire par là qu'on n'a pas besoin d'utiliser des missiles ultra sophistiqués
17:02pour les détruire.
17:03Mais effectivement, il n'est pas question aujourd'hui de mettre des Rafales
17:06dans le ciel ukrainien.
17:08On a déjà mis des Rafales, souvenez-vous, dans le ciel roumain.
17:11Précisément, pour être sûr que la police de l'air des États de l'OTAN,
17:16ceux qui sont nos alliés, j'allais dire, bien installés et bien constitués,
17:21cette police de l'air soit efficace.
17:23Donc ça, c'est très clair.
17:26Qu'est-ce qui fait que le Rafale, aujourd'hui, est le meilleur avion du monde ?
17:29Pourquoi est-ce qu'on s'en vante autant ?
17:31Vous me disiez tout à l'heure, en coulisses, il est très beau, ce Rafale.
17:33C'est vrai qu'on est très fiers en France.
17:35Mais qu'est-ce qui fait qu'on est enviés partout dans le monde ?
17:39C'est un avion, alors lui, il est très agile.
17:42Je veux dire, en tant qu'avion, c'est un avion absolument remarquable.
17:46D'ailleurs, tous les pilotes qu'on connaît sont unanimes sur le sujet,
17:49qu'ils soient français ou étrangers.
17:50C'est un avion remarquable et extrêmement efficace.
17:53Et surtout, il est extrêmement polyvalent.
17:55C'est-à-dire qu'il peut remplir tous les rôles.
17:57Et c'est d'ailleurs pour ça qu'on l'apprécie tellement dans l'aéronaval.
18:00Parce qu'il peut être à la fois un chasseur contre les avions de dernière génération,
18:04comme vient de le souligner M. Polacco.
18:06Mais il peut être aussi un avion qui fait de la guerre électronique.
18:09Il peut être un avion qui fait de la reconnaissance.
18:11Il peut être un avion qui fait le ravitailleur pour les autres avions.
18:15Et cerise sur le gâteau, il peut même emporter la bombe atomique.
18:19– Et en plus, on l'imagine, il est très peu coûteux.
18:22C'est ça aussi ?
18:23– Alors très peu coûteux, je ne le dirais pas jusque-là.
18:25Mais il est certainement moins cher qu'à F-35.
18:28– Ça coûte combien, Michel Polacco, un rafale ?
18:32– Ça dépend si vous prenez l'avion tout court,
18:34l'avion avec ses pièces de rechange qui doivent obligatoirement l'accompagner,
18:38ou l'avion avec son système d'armes.
18:40Quand vous prenez l'avion tout court, vous êtes dans les 80 millions d'euros.
18:43Quand vous prenez l'avion avec son système d'armes,
18:45les rechanges, tout ce qui doit aller avec,
18:47c'est-à-dire tout ce que vous êtes obligé d'acheter,
18:49en fait, quand vous achetez un avion ou une flotte d'avions,
18:51on est dans les 120-130 millions d'euros.
18:54– Et d'après vous, Michel Polacco,
18:55il va falloir apprendre à en fabriquer de plus en plus vite des rafales,
19:00si justement il est demandé ?
19:03– Alors ce n'est pas si simple que ça,
19:04parce que si vous voulez, on ne peut pas développer une industrie pour produire.
19:08Par exemple, aujourd'hui, on est à peu près à 3 par mois.
19:10On va sans doute monter vers 4 par mois,
19:13parce qu'il y a quelques commandes à l'exportation.
19:16Mais on ne peut pas monter à 5, 6, 8,
19:18parce qu'il faut bien se dire qu'une fois qu'on aura produit ses avions commandés,
19:23on se retrouvera sans commande.
19:25Et donc à ce moment-là, il va falloir licencier,
19:27fermer des usines, etc.
19:29Donc l'industriel, il est prudent.
19:32Il doit penser à son personnel,
19:34il doit penser à l'avenir de son entreprise.
19:36Donc il ne va pas chercher à monter en cadence
19:39d'une manière déraisonnable et non maîtrisée.
19:45Donc ce n'est pas possible d'imaginer
19:47qu'on va se mettre à produire des rafales
19:48à la pelle comme on produit des drones.
19:51Ce sont des choses très chères, très sophistiquées,
19:53d'autant plus qu'il y a des versions qui évoluent.
19:56Tous les 15 ans à peu près,
19:57on a une nouvelle version du rafale.
19:59Aujourd'hui, on est au F4,
20:01on va passer au F5.
20:03Et ensuite, il y aura peut-être un F6
20:04s'il n'y a pas un avion de génération future
20:07qu'on est censé fabriquer avec les Allemands,
20:10même si plus le temps passe
20:11et plus on peut penser que cette affaire-là va foirer.
20:14Alors, Amiral Vichaud,
20:16au moins ça a le mérite d'être clair, M. Polacco.
20:17Je suis tout à fait d'accord avec M. Polacco.
20:19Et ceci près qu'on peut espérer,
20:21il faut toujours espérer,
20:22en particulier en ce moment,
20:24on peut espérer que les Européens
20:26vont de plus en plus comprendre
20:28l'intérêt de continuer à produire européens
20:31plutôt qu'américains.
20:32Et on est beaucoup aidés par M. Trump en ce moment.
20:35Donc ça, c'est parfaitement clair.
20:38Il est clair que le F35 est inutilisable
20:40en cas de véto américain.
20:41Et les Européens le savent,
20:45ils l'assument,
20:46mais c'est parfaitement clair.
20:48Donc ce qu'on peut espérer,
20:50c'est qu'effectivement,
20:50comme il l'a évoqué,
20:52l'avion du futur européen
20:54ne sera peut-être pas le SCAF,
20:56mais sera peut-être quelque chose
20:57qui ressemblera beaucoup à un rafale.
20:59Et à ce moment-là,
21:00on a derrière l'Ukraine
21:01ou à côté de la production pour l'Ukraine,
21:04on pourrait produire pour d'autres Européens
21:06qui, eux, auraient pris conscience
21:07de la dépendance dans laquelle
21:09ils se sont mis vis-à-vis des Américains.
21:11Par hasard, je pense aux Suisses.
21:12Vous voyez,
21:13ce n'est pas un très gros marché, les Suisses,
21:15mais c'est quand même un marché
21:16qui fut un français à un moment
21:17et qui l'avait beaucoup apprécié.
21:19Donc voilà,
21:20on peut avoir un retour de pays européens
21:22vers la France
21:23parce qu'ils ne veulent plus
21:24de la dépendance américaine.
21:26Oui.
21:26Merci beaucoup d'avoir été avec nous
21:29pour évoquer ce sujet
21:31sur la guerre en Ukraine.
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