Passer au playerPasser au contenu principal
  • il y a 2 jours
Ce vendredi 26 septembre, Florent Parmentier, secrétaire général du Cevipof de Sciences Po, était l'invité d'Annalisa Cappellini dans Le monde qui bouge - L'Interview, de l'émission Good Morning Business, présentée par Laure Closier. Ils sont revenus sur les enjeux des élections législatives en Moldavie et l'inquiétude des gouvernements européens du fait de l'ingérence russe pour influencer les résultats du vote. Retrouvez l'émission du lundi au vendredi et réécoutez la en podcast.

Catégorie

📺
TV
Transcription
00:00La Moldavie, 2,5 millions d'habitants, tout petit pays, grand comme la Bourgogne,
00:05mais coincé entre la Roumanie et l'Ukraine, petit pays, mais très très gros enjeux électoraux ce dimanche.
00:10Laurent Parmentier, bonjour, vous êtes le secrétaire général du Cevipov de Sciences Po,
00:14chercheur associé au Centre des Jeux Politiques d'HEC, des élections législatives cruciales,
00:19avec une Union Européenne qui retient son souffle parce qu'on parle là d'ingérence russe.
00:24Concrètement, qu'est-ce qui s'est passé ces dernières semaines en Moldavie
00:27pour qu'on puisse dire que la Russie, clairement, essaye d'influencer les élections ?
00:32Alors, la Moldavie est indépendante depuis 1991.
00:35Le fait que la Russie essaie d'avoir de l'influence sur le jeu électoral
00:38est à peu près aussi vieux que l'indépendance de la Moldavie.
00:41Ce qui a changé en revanche ces dernières semaines,
00:43c'est une intensification de ce qu'on peut appeler la guerre informationnelle,
00:47c'est-à-dire la présence sur des réseaux sociaux d'un certain nombre d'informations
00:49non vérifiées, fausses, et faites à dessein,
00:53c'est-à-dire de faire dérailler le projet européen que porte Maya Sandou.
00:56Maya Sandou a été réélu présidente l'année dernière.
01:00Cette fois-ci, ce qui se joue ce dimanche,
01:02c'est tout simplement la possibilité pour elle, au Parlement,
01:04de pouvoir confirmer sa politique pré-européenne.
01:07Et donc, c'est là que se jouent les enjeux pour la Russie,
01:09montrer que ce chemin vers l'intégration européenne,
01:12eh bien, il n'est pas un long fleuve tranquille.
01:14Annalisa Cabellini.
01:15En ce moment, en Moldavie, il y a aussi beaucoup de vulnérabilités économiques.
01:18Il y a l'inflation, il y a une crise énergétique,
01:20il y a la population active qui quitte de plus en plus le pays.
01:24Finalement, pour la Russie, c'est une proie facile.
01:26Oui, vous avez raison de souligner,
01:28c'est peut-être l'un des enjeux de campagne sur lequel on insiste moins,
01:3130 à 40 000 Moldaves quittent le territoire chaque année.
01:34Ce qui explique la raison pour laquelle vous avez 2,6 millions d'habitants.
01:37Pour mémoire, en 1991, c'était 4,3 millions d'habitants au sein de la République.
01:41Où est-ce qu'ils vont ? En Ukraine ?
01:43Non, plus en Ukraine.
01:45Ils allaient beaucoup en Russie pendant un temps.
01:48Il y a à peu près 300 000 Moldaves qui sont en Russie.
01:50Mais également, et plus massivement, dernièrement, vers l'Italie.
01:53On a besoin de main-d'oeuvre dans le domaine du soin.
01:58En Espagne, en France également, vous avez un certain nombre de Moldaves.
02:02Du coup, l'enjeu, si jamais c'est plus le front pro-russe qui gagne,
02:08il y a un enjeu pour la guerre en Ukraine sur un accès potentiel à la Russie vers Odessa.
02:12Ça, c'est fondamental ?
02:14Oui. Disons que pour l'instant, ce qu'on a vu, c'est que la Moldavie a plutôt été protégée,
02:19en quelque sorte, par Odessa.
02:23Parce qu'aujourd'hui, la Moldavie, à la fois un territoire séparatiste à l'est de la République,
02:29ce territoire séparatiste, c'est celui de la Transnistrie, où vous avez une armée russe.
02:33Cette armée russe, en réalité, est la seule armée russe qui n'a pas mis le pied en Ukraine le 24 février 2022.
02:44Pourquoi ? Tout simplement parce qu'ils ne sont pas suffisamment nombreux pour faire la différence.
02:48Mais si on part du principe que l'enjeu essentiel pour la Russie, maintenant, c'est de viser Odessa,
02:53alors Odessa fait clairement partie de cette équation qui va se jouer dimanche.
02:56En tout cas, on comprend que quand trois leaders européens, Emmanuel Macron, Frédéric Mertz et Donald Tusk,
03:01se rendent à Chisinau ces dernières semaines pour apporter le soutien à Maya Sandou,
03:07il y a une partie du projet européen qui se joue là, ce dimanche, en Moldavie.
03:11On peut estimer que la crédibilité de la politique d'élargissement de l'Union européenne va se jouer en partie à Kichino.
03:16Pourquoi ?
03:17Si vous regardez un petit peu les développements politiques des autres États qui sont concernés par cette politique d'élargissement
03:22entre la Russie et l'Union européenne aujourd'hui,
03:25vous voyez que ce ne sera pas la Biélorussie, ce ne seront pas les États du Caucase du Sud.
03:31Pour l'instant, un État comme la Géorgie, qui a vocation à se rapprocher de l'Union européenne,
03:35dont l'opinion publique est très favorable,
03:38vous avez entendu Volodymyr Zelensky, à la tribune des Nations unies, dire en substance
03:42« Vous, Européens, vous avez perdu la Géorgie, vous ne pouvez pas vous permettre de perdre la Moldavie. »
03:48C'est là que se situe l'enjeu.
03:48Mais quand vous avez une inflation qui a pris 30% depuis le début de la guerre en Ukraine,
03:54quand vous avez l'énergie qui a explosé, vous avez des arguments russes pour dire
03:58« Rejoignez-nous, tout sera plus simple, on vous donnera l'énergie qu'il vous faut »,
04:03c'est poreux dans l'opinion publique, ça fonctionne ?
04:06Oui, il y a une partie de l'opinion publique qui est très sensible.
04:10Et d'ailleurs, si on regarde le bilan économique du parti au pouvoir,
04:14qui est arrivé en juillet 2021, naturellement, il faut voir qu'il y a deux manières de regarder le bilan.
04:20Si vous regardez le bilan d'un point de vue diplomatique,
04:23jamais la Moldavie n'aurait pu rêver d'un rapprochement aussi rapide vers l'Union européenne.
04:28Il y a encore quatre ans, l'idée qu'il soit même reconnu comme un État candidat à l'Union européenne
04:33n'était pas une idée acquise.
04:34La guerre en Ukraine a fondamentalement changé cette orientation-là.
04:38Mais vous avez raison de souligner que pour le parti au pouvoir,
04:41il y avait, j'allais dire, il y a aujourd'hui quatre ans d'exercice du pouvoir
04:46dans lequel la Moldavie n'a pas réussi à retrouver un rebond économique.
04:50C'est normal, ils sont juste à côté.
04:52En 2024, le taux de croissance est quasiment à l'arrêt, 0,1% de croissance.
04:58Après une chute importante en 2022, mais là aussi, les conséquences de la guerre.
05:02Donc oui, si on regarde cet élément du bilan,
05:03le pass est peut-être moins flatteur.
05:06Si on regarde le bilan diplomatique, il est beaucoup plus flatteur pour le parti au pouvoir.
05:10C'est la raison aussi pour laquelle le parti au pouvoir a intérêt à mettre en avant cette préférence européenne.
05:14Soutenu par les Européens, vous avez eu raison de mentionner cette visite
05:17des trois chefs d'État et de gouvernement le 27 août dernier à Kishino.
05:22Mais aussi, si on regarde tout simplement,
05:23l'Union européenne s'est engagée avec Ursula von der Leyen l'an passé.
05:28Dix jours avant le scrutin présidentiel, Ursula von der Leyen est venue en Moldavie
05:32et a proposé une aide importante pour la Moldavie, 1,8 milliard d'euros,
05:37ce qui représente une partie significative du PIB.
05:40Donc oui, on a quelque chose qui est de l'ordre de la volonté de la part des Européens
05:44de consolider cette trajectoire européenne de la Moldavie.
05:47Parce que si vous pouvez le faire là, l'idée est tout simplement qu'on pourra le faire ailleurs.
05:51Si vous ne pouvez pas le faire là, alors il y aura des difficultés.
05:53Merci beaucoup Florent Parmentier d'être venu ce matin dans la matinale de l'économie
05:56pour cette élection majeure en Moldavie.
05:59Élection évidemment qui concerne toute l'Europe.

Recommandations