00:00Intrusion d'une vingtaine de drones présumés russes sur le territoire polonais dans la nuit du 9 au 10 septembre.
00:06Ulrich Buna, bonjour.
00:07Vous êtes analyse géopolitique spécialiste de l'Europe centrale et de l'Est.
00:11Est-ce que c'est un test clair ?
00:13Donald Trump nous dit cette nuit, non, ils se sont peut-être trompés, c'est peut-être juste une erreur de la part des Russes.
00:18Non, clairement, c'est un test.
00:19Alors oui, clairement, c'est effectivement la version officielle de la part des Russes.
00:22Ce sont des drones qui se sont perdus.
00:24Quand on analyse déjà le nombre, quand on analyse les trajectoires aussi de ces drones,
00:29on n'est pas du tout sur des drones qui auraient été perturbés par éventuellement des perturbations électromagnétiques
00:34de la part des Ukrainiens pour essayer de se défendre.
00:36On est vraiment sur des drones qui ont une trajectoire au-dessus du Bélarus
00:39et ensuite une trajectoire circulaire au-dessus de l'Ukraine pour revenir sur l'Ukraine,
00:42donc c'était au-dessus de la Pologne pour aller sur l'Ukraine.
00:44Donc c'est effectivement une stratégie délibérée de la part de la Russie
00:46qui a fait passer des drones qui n'étaient pas chargés militairement.
00:49C'était des drones Gerbera, donc qui sont des drones un petit peu des leurres en fait.
00:52Mais par contre, effectivement, la trajectoire était complètement voulue au-dessus de la Pologne.
00:55– Je vais vous parler un peu trivialement, mais ils nous testent pour savoir si oui ou non on va faire la guerre.
00:59– Je pense qu'il y a plusieurs choses.
01:01Il y a déjà du fait de voir comment on va réagir, combien de temps on va mettre pour réagir.
01:06Il y avait déjà eu quelques intrusions ou de drones de la part de la Russie au-dessus de la Pologne.
01:10Il n'y avait pas eu de réaction de la part des Polonais.
01:13Là, c'est la première fois, et c'est la première fois dans l'histoire d'ailleurs,
01:15que l'OTAN intervient militairement pour abattre des aéronaves russes, on va dire,
01:21au-dessus du territoire de l'OTAN.
01:22Donc c'est quand même quelque chose d'important, on a réagi, on a réagi rapidement.
01:26Sans doute pas à la hauteur, il semblerait qu'un certain nombre de drones se soient écrasés
01:28sans même qu'on ait eu besoin de les atteindre.
01:30Mais par contre, effectivement, il y avait cette volonté de voir comment l'OTAN allait réagir sur le moment.
01:35Et ensuite, par rapport à la suite, grosso modo, les positionnements politiques et militaires de l'OTAN,
01:40maintenant on est testé sur notre réaction et notre capacité à venir aider la Pologne.
01:44– Annalisa Cabellini.
01:45– La Pologne a toujours dit que Vladimir Poutine ne va pas s'arrêter à l'Ukraine,
01:49c'est la crainte de toute une partie des pays de l'Est, peut-être que c'est là que ça se concrétise,
01:54Vladimir Poutine essaye de voir la suite de sa stratégie sur cette partie de l'Europe.
01:58– En tous les cas, il vérifie si l'OTAN existe encore et si l'OTAN est toujours réactive,
02:02ça c'est une évidence, il le faisait pour l'instant plus effectivement au niveau des États-Baltes,
02:07en perturbant les GPS, en faisant des intrusions dans les espaces aériens de l'OTAN.
02:10Là c'est la première fois que véritablement il y a des drones, et beaucoup de drones, enfin 19,
02:14qui survolent le territoire de l'OTAN et de la Pologne,
02:16donc effectivement là on est sur une escalade en quelque sorte dans les tests vis-à-vis de l'OTAN.
02:21– Mais justement la réponse elle est ultra complexe,
02:24parce qu'évidemment qu'on n'a pas envie d'une escalade,
02:26parce que clairement on n'a pas envie de faire la guerre avec la Russie.
02:28Du coup répondre par une réunion des partenaires de l'OTAN,
02:33arrêter l'espace aérien en Pologne, ça suffit ? C'est la bonne graduation ?
02:38– Effectivement on ne peut pas se permettre de faire la même chose que la Russie,
02:41c'est un petit peu ce qui nous tient, dans le sens où on est des États de droit
02:43et on n'a pas envie justement d'aller à cette confrontation militaire,
02:46l'OTAN ça reste une alliance défensive.
02:48Donc il y a eu effectivement cette réunion par rapport au déclenchement de l'article 4 par la Pologne,
02:54c'est symbolique, il y a quand même l'envoi de trois avions de chasse par la France,
02:57de deux avions de chasse par l'Allemagne,
02:59alors ça paraît symbolique, c'est quelques avions de chasse,
03:01mais c'est un signalement stratégique.
03:02– Petite démonstration de force quoi.
03:03– C'est un signalement stratégique en fait, pour dire on est là,
03:06on aide nos alliés polonais, comme c'est prévu par les traités,
03:09donc c'est quand même important.
03:11Après effectivement cette réponse elle va devoir être plus complexe
03:13et la question qui se pose et que tout le monde se pose c'est
03:16est-ce qu'au bout d'un moment il va peut-être falloir ce fameux sky shield,
03:20c'est-à-dire cette protection de l'Ouest de l'Ukraine
03:21qui serait une extension finalement de la protection aérienne de la Pologne,
03:25est-ce qu'il va falloir le mettre en place ou pas ?
03:27Je pense que c'est ce qu'il y a dans toutes les têtes
03:28et c'est probablement ce que certains pays espèrent, notamment l'Ukraine.
03:32– Annalisa ?
03:33– Il faut dire pour organiser la riposte, il faut aussi tenir en compte
03:36le fait que cette incursion a quelque part montré une faiblesse
03:40sur le flanc est de l'OTAN, les drones sont rentrés dans le territoire.
03:43– Effectivement mais c'est toute la complexité d'avoir une guerre à nos frontières,
03:46c'est-à-dire que pour l'instant les états de l'OTAN se sont arrêtés
03:49grosso modo à la frontière en disant ce qui se passe en Ukraine,
03:51alors on aide bien évidemment l'Ukraine,
03:52mais ce qui se passe véritablement en Ukraine,
03:55on ne doit pas intervenir directement.
03:58Et donc on voit bien qu'effectivement cette guerre elle déborde,
04:00puisque les Russes justement nous provoquent,
04:01donc il va falloir voir effectivement si au bout d'un moment nous-mêmes
04:04il ne va pas falloir qu'on déborde, pas en envoyant des militaires sur place,
04:07mais peut-être simplement en instaurant une no-fly zone au-dessus de l'Ouest de l'Ukraine.
04:10– Quand Donald Trump il dit que c'est potentiellement une erreur,
04:13donc il reprend ce que dit la Russie,
04:16ça veut dire que clairement il croit qu'il y a potentiellement encore une paix à négocier,
04:19il croit encore pouvoir obtenir quelque chose de Vladimir Poutine,
04:22donc il va dans son sens ?
04:23– Alors je pense qu'il n'a effectivement jamais renoncé à l'idée
04:26d'obtenir quelque chose de la part de Vladimir Poutine
04:28et de séparer la Russie de la Chine, je pense que c'était un leurre,
04:30mais bon il y croit toujours,
04:32et le fait est que plus globalement Donald Trump c'est quelqu'un
04:35qui ne veut pas être fort avec les États qui lui résistent,
04:37avec la Chine au niveau économique, avec la Russie au niveau militaire,
04:40donc effectivement il choisit toujours d'esquiver le problème
04:43en disant qu'il est très inquiet, que ce n'est pas bien du tout,
04:45mais que finalement il n'agit pas derrière.
04:47Et c'est sans doute l'un des problèmes en fait aussi de cette réponse de l'OTAN,
04:50c'est que les Américains ne montrent pas finalement
04:53la dissuasion qu'ils devraient montrer pour soutenir nos alliés.
04:56– Annalisa ?
04:56– On a assisté la semaine dernière à un réveil politique de l'Europe
04:59à travers la coalition des volontaires
05:01qui a déclaré qu'elle était prête à assurer la sécurité de l'Ukraine
05:04après la guerre, est-ce qu'on est prêt à un sursaut militaire aussi ?
05:07– Je pense qu'il va falloir, en fait par rapport à tout ce qu'on vient de se dire,
05:10avec une Russie qui est agressive à nos portes,
05:12avec des États-Unis qui sont probablement au minimum aux abonnés absents,
05:15il va falloir effectivement, si on veut peser dans le monde de demain,
05:18être capable de déjà se défendre nous-mêmes militairement
05:21et probablement aussi d'assurer la sécurité de l'Europe
05:23et la sécurité de l'Europe, ça passe par l'Ukraine.
05:25– Là c'est une vingtaine de drones, mais après c'est quoi ?
05:27C'est une quarantaine de drones ou c'est d'autres tests ?
05:30– Ça va dépendre sans doute de notre réponse,
05:34de la fermeté de notre réponse, c'est un premier point,
05:36mais effectivement on peut s'attendre à ce que la Russie,
05:38de façon générale, pas que en Pologne, dans les Pays-Bas,
05:41en Finlande d'ailleurs, teste notre capacité à réagir,
05:44ça c'est une évidence, encore une fois,
05:46quel que soit ce qui se passe en Ukraine,
05:48la Russie restera une puissance agressive à nos portes,
05:50quoi qu'on fasse, et donc il faut le prendre en compte
05:51et effectivement mettre en place cette Europe de la défense.
05:54– Et fermer l'espace aérien, comme on l'a vu là,
05:56il y a des compagnies aériennes qui se plaignent
05:58que ça va évidemment abîmer le business, c'est obligatoire ?
06:02– Alors, je dirais qu'il y a une surcouche supplémentaire
06:04qui est qu'il y a des exercices militaires entre le Bélarus
06:07et la Russie entre maintenant, enfin à partir d'aujourd'hui,
06:10jusqu'à la semaine prochaine, enfin au début du milieu de semaine prochaine,
06:13et donc effectivement, pour éviter, on va dire, dans ce contexte-là,
06:16les Polonais ont fermé effectivement l'espace aérien
06:18au niveau de leurs frontières avec le Bélarus,
06:20c'est normalement censé être une mesure temporaire,
06:22mais effectivement, si ces provocations continuent,
06:25il est possible que ça dure dans le temps.
06:26Je dirais que ça dépend aussi en partie de la réponse du Bélarus et de la Russie.
06:29– Merci beaucoup, Ulrich Bounin, d'être venu ce matin
06:31sur le plateau de la matinale de l'économie.