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  • il y a 6 jours
Mardi 23 septembre 2025, retrouvez Valérie-Odile Dervieux (Présidente de chambre de l’instruction, Cour d’appel de Paris) dans LEX INSIDE, une émission présentée par Arnaud Dumourier.

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Transcription
00:00On commence tout de suite ce Lex Inside, X LinkedIn, parfois même Instagram, de plus en plus de magistrats prennent la parole, mais que peuvent-ils dire, quelles sont les limites ?
00:20On en parle tout de suite avec mon invité Valérie Odile Dervieux, présidente de Chambre à la Cour d'appel de Paris.
00:27Valérie Odile, bonjour.
00:28Bonjour Arnaud.
00:29Alors on va parler ensemble de la communication des magistrats sur les réseaux sociaux, mais avant toute chose, posons le cadre.
00:36Quelles sont les règles de la communication des magistrats ?
00:39Les règles sont pénales et déontologiques.
00:44Pénales parce que le code de procédure pénale permet à certains membres de la magistrature, et notamment les procureurs de la République, d'évoquer des dossiers pour éviter des fausses rumeurs, des fausses informations.
00:54Déontologiques et institutionnelles, parce que les présidents de chambres, des fameuses audiences de rentrée, enfin les présidents de juridiction, font des discours qui peuvent évaluer les lois en cours, les projets en cours, dire la situation.
01:10On en a eu des exemples extrêmement intéressants cette année avec les déclarations, par exemple sur le narcotrafic ou l'embolisation des juridictions criminelles.
01:17Et puis ensuite déontologiques, parce qu'un magistrat qui, à titre personnel ou au nom d'une organisation syndicale, par exemple, prend la parole, si j'ose dire, ou prend le tweet, doit s'astreindre à des règles qui sont fixées non seulement par le Conseil supérieur de la magistrature,
01:34mais aussi par des instances européennes, comme le comité consultatif des juges. Donc en fait, le devoir de réserve, l'impartialité, sont des règles à suivre absolument dans toutes ces communications qui sont des communications, entre guillemets, personnelles.
01:51Alors on a vu les règles générales de la communication des magistrats. On va s'intéresser à la spécificité de la communication sur les réseaux sociaux.
01:59Qu'est-ce qui rend justement cette communication si particulière ?
02:04Elle est tout à fait particulière parce que d'abord, c'est un mode de communication qui est récent, mais extrêmement répandu, notamment parmi les jeunes collègues.
02:11Plus de 90% des magistrats sont sur les réseaux sociaux à titre personnel ou en tant que magistrat.
02:18Ensuite, parce que les outils de communication sont différents, mais ils diffèrent aussi en fonction des réseaux sociaux.
02:28Bien sûr.
02:28Instagram, ça n'a pas le même public que...
02:31Que Yix, que LinkedIn.
02:32Exactement. Donc il faut choisir son réseau social. Il faut choisir d'où je parle, c'est-à-dire comment on communique et comment on se présente.
02:41Comment on décrit son profil, comment on renseigne les informations, qu'est-ce qu'on dit, comment on le dit, et puis aussi comment on réagit ou comment on ne réagit pas.
02:51Donc en fait, c'est un mode de communication qui est récent et massif.
02:55Donc c'est extrêmement spécifique pour des magistrats qui, normalement, sont plutôt réservés pour ne pas parler...
03:03Plus il y a la culture de l'immédiateté sur les réseaux sociaux, c'est-à-dire que les réseaux sociaux imposent de réagir vite et prudence et de mise quand on est magistrat.
03:12Tout à fait. Alors, c'est l'immédiateté dans la communication, c'est l'immédiateté dans la réaction et on peut aussi utiliser les réseaux sociaux pour ne pas faire de l'immédiateté,
03:21pour essayer d'avoir une vision un peu plus décryptante de l'actualité.
03:25Dans quel cas, par exemple ?
03:26C'est l'exercice auquel je m'assins, c'est-à-dire expliquer les choses.
03:33Quand on a un fait divers, expliquer les choses, justement, c'est ce que, exactement selon le schéma que vous m'avez indiqué,
03:40c'est quelles sont les règles, comment ça marche et quelles sont les questions qui se posent.
03:44Et donc, il faut absolument que le magistrat fasse attention à la manière dont il agit, dont il réagit et dont il veut s'exprimer sur les réseaux sociaux.
03:53Et il y a aussi la façon dont il doit s'exprimer, c'est-à-dire aussi par rapport à ses fonctions.
03:58Est-ce qu'il s'exprime au titre de ses fonctions ou il s'exprime à titre personnel ?
04:03Quelles sont les limites de l'exercice ?
04:05Alors, en fait, les limites de l'exercice, ce sont celles que l'on se pose aussi,
04:08parce que certains peuvent aller sur les réseaux sociaux anonymement, ce qui n'est pas forcément extrêmement conseillé,
04:15mais le CSM, le Conseil supérieur de la magistrature, évolue sur ce point.
04:18Est-ce que je dis qui je suis ? Si je dis qui je suis, est-ce que je donne mes fonctions ?
04:22Est-ce que je donne juste la fonction de magistrat ?
04:26Et donc, ça dépend aussi quels profils, comment on s'exprime.
04:29Ça dépend aussi quels éléments d'identification on donne.
04:32Et en fonction de ces éléments-là, qui déterminent la manière dont on se situe sur le réseau social,
04:39on peut exprimer des choses.
04:40Alors, il y a deux choses qui sont assez particulières.
04:44Premièrement, c'est que quand on est magistrat, qu'on le veuille ou qu'on ne le veuille pas,
04:49on représente l'institution judiciaire.
04:51Donc, la manière de s'exprimer doit être empreinte non seulement de réserve,
04:55mais de délicatesse et de respect.
04:57Parce que c'est l'institution judiciaire qu'on engage.
04:59C'est-à-dire qu'on n'engage pas forcément l'institution judiciaire,
05:02mais on l'incarne, qu'on le veuille ou qu'on ne le veuille pas.
05:06Un magistrat, ce n'est pas n'importe qui, ce n'est pas n'importe qui qui s'exprime sur les réseaux sociaux.
05:10Et on voit mal, par exemple, qu'un certain vocabulaire puisse être utilisé.
05:15Alors, qu'est-ce qui fait qu'un magistrat va décider de se lancer
05:19et d'avoir une communication sur les réseaux sociaux ?
05:22Vous en faites partie.
05:23Oui.
05:24Comment ça se passe ?
05:25Alors, j'en fais partie.
05:26Fabrice Vert, qui est premier vice-président au tribunal judiciaire de Paris, en fait partie.
05:31Maxime Delivier en fait partie.
05:33Et chacun a ses thématiques.
05:35Ça peut être pour soutenir les étudiants et leur proposer des activités de formation.
05:41Ça peut être pour faire passer un message sur la médiation.
05:45Et ça peut être pour faire de la pédagogie.
05:47Je pense, et le comité consultatif des juges européens qui dépend du Conseil de l'Europe l'a dit,
05:51on se doit de communiquer pour faire de la pédagogie.
05:55On ne peut pas, le magistrat aujourd'hui, à mon sens, ne peut pas rester absent des réseaux sociaux.
05:59Faire de la pédagogie, ça veut dire vulgariser, expliquer ?
06:02Vulgariser, expliquer, aller au-delà des présupposés, des fausses informations, des fake news,
06:10qui peuvent être des fake news statistiques ou des fake news tout court,
06:14ou des erreurs, pour aider l'usager à comprendre.
06:19Alors, effectivement, il faut trouver une forme qui soit adaptée aux réseaux sociaux,
06:22parce que sans ça, c'est illisible et il faut avoir un vocabulaire adapté,
06:27il faut faire attention aux acronymes.
06:29Mais je pense vraiment que c'est une nécessité, aujourd'hui, d'expliquer ce qu'on fait,
06:34comment on le fait et pourquoi on le fait.
06:36Bien évidemment, à la limite, c'est le secret professionnel.
06:39Il est hors de question de s'expliquer sur un dossier en cours dont on a la charge,
06:43ce serait une infraction pénale.
06:44Mais en tous les cas, je considère que c'est un devoir.
06:50La question, c'est comment on fait ?
06:52Ça fait partie aussi de la modernisation de la justice ?
06:55Ça fait partie de la modernisation.
06:57La loi sur la confiance qui avait été adoptée il y a quelques années
07:02a parlé justement de la publicité, de filmer les audiences,
07:06de donner à voir comment on fonctionne.
07:07Et ça fait partie, en fait, c'est une exigence.
07:12Je ne pense pas que ce soit moderne, je pense que c'est juste une nécessité.
07:16Pourquoi c'est une nécessité ?
07:17Parce qu'on ne peut pas être absent de là où se passent les choses.
07:20Les nouveaux médias, les réseaux sont les réseaux sociaux.
07:22Ce ne sont plus, les jeunes n'ont plus la télévision,
07:25ils ne regardent pas forcément les actualités.
07:28Ils sont algorithmés, si j'ose dire, par des réseaux sociaux ou asociaux.
07:32Ça dépend des fois.
07:33Et il s'agit ici de dire le droit et de dénoncer les fake news.
07:41C'est important d'éduquer les jeunes générations ?
07:44Je pense que ça fait partie de notre mission.
07:47Est-ce qu'il y a d'autres bonnes pratiques à avoir ?
07:49Pas que les jeunes générations, Arnaud.
07:50Oui, parce que c'est vrai que le droit est souvent ignoré,
07:54même si nul n'est censé ignorer la loi.
07:56C'est-à-dire que le droit, il est difficile à appréhender
07:58parce qu'il bouge tout le temps.
07:59Donc, c'est plutôt les grands principes, le rôle du magistrat,
08:02comment ils se déterminent, quels sont les textes.
08:04Vous savez, on est toujours là à dire laxisme, sévérité,
08:09trop sévère, trop laxiste, trop tout et pas assez beau.
08:11À chaque garde des sceaux, on a les petites phrases.
08:14Voilà, c'est ça.
08:15Et donc, en fait, il ne s'agit pas d'attaquer des personnes
08:17ou de dire ça, c'est mal et ça, c'est bien.
08:20Ça serait complètement inefficace.
08:21Il s'agit de dire comment ça marche.
08:23Et aujourd'hui, ce qui est bien, c'est que l'ENM intègre cette dimension.
08:26Tout à fait.
08:27L'ENM intègre totalement cette dimension dans sa formation.
08:30On a déjà depuis longtemps des formations à la communication,
08:32que ce soit des communications de presse,
08:34la manière de s'exprimer à la télé, si j'ose dire.
08:38Et depuis quelques années, on a effectivement une session de formation
08:42qui est dédiée à la communication,
08:44avec des heures qui sont consacrées aux réseaux sociaux.
08:47J'ai d'ailleurs la chance d'être invitée bientôt
08:49à participer à cette formation.
08:52La difficulté, c'est que la déontologie,
08:57on a très peu de décisions du CSM sur ce sujet.
09:01On a pas mal de communications.
09:03Et on voit que la théorie évolue.
09:05En fait, elle évolue avec les réseaux sociaux,
09:07elle évolue avec les besoins
09:08et elle évolue aussi avec la communication institutionnelle.
09:12Donc, il y a un trou dans la raquette, entre guillemets ?
09:17Je ne sais pas si c'est un trou dans la raquette
09:18ou si c'est une raquette qui est en train d'être construite.
09:22C'est peut-être ça le sujet.
09:23On va conclure là-dessus.
09:24Merci Valérie Odile-Dervieux.
09:26Je rappelle que vous êtes présidente de Chambre
09:28à la Cour d'appel de Paris.
09:29Merci.
09:30Tout de suite, l'émission continue.
09:32On va parler des rapports entre l'avocat et son client
09:36dans quelques instants.
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