- il y a 21 heures
Ce mardi 9 décembre, le record d’excédent commercial de la Chine de janvier à novembre, Paris qui pousse l’UE à taxer Pékin sur le commerce, et la place de l’Europe dans la compétitivité internationale en matière d’IA, ont été abordés par Erwann Tison, chargé d'enseignement à l'université de Strasbourg, Olivier Babeau, président de l'Institut Sapiens, et Rafik Smati, fondateur de Louxor.ai et président du groupe Aventers, dans l'émission Les Experts, présentée par Raphaël Legendre sur BFM Business. Retrouvez l'émission du lundi au vendredi et réécoutez la en podcast.
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00:00Allez, on est retour pour la seconde partie des experts avec toujours Olivier Babaud, Rafix Maty et Erwan Tizon.
00:06On va partir en Chine avec ce chiffre choc, 1000 milliards d'excédents commerciaux.
00:13C'est un record pour la Chine, 100 milliards uniquement sur le mois de novembre.
00:18Alors Emmanuel Macron était en Chine en fin de semaine dernière.
00:22Il a donné une interview à nos confrères des Echos dans l'avion du retour.
00:26Et dans cette interview, le chef de l'État brandit la menace d'une hausse éventuelle des droits de douane face à la Chine.
00:33Il dit aussi qu'il faut travailler à notre compétitivité, évidemment.
00:36Et c'est un peu les deux écoles qui s'affrontent.
00:39Est-ce qu'on doit dresser un dôme protectionniste au-dessus de l'Europe pour, comme le dit par exemple Nicolas Dufourc de BPI France,
00:48protéger nos PME de la Pologne à la Bretagne ?
00:52Ou alors est-ce qu'il faut accepter qu'on abandonne des pans entiers de notre industrie,
00:57qui de toute façon ne seront plus compétitifs face à l'offre chinoise ?
01:02Et on pense à l'automobile, bien évidemment.
01:04Pour se concentrer sur ce qu'on sait faire, sur ce qu'on vend bien à l'international,
01:08sur le luxe, sur les cosmétiques, sur les utilities.
01:12On a quand même des champions en Europe aussi.
01:15Je commence avec vous Olivier Babot.
01:16Je prends l'exemple de Lucas Déméo assez régulièrement.
01:19Lucas Déméo, il a quitté l'automobile pour aller vers le luxe.
01:21Est-ce que ce n'est pas un indicateur avancé de ce que risque de venir l'économie européenne bientôt ?
01:26Il faut être lucide, le pays le moins développé maintenant c'est nous.
01:30Comme je disais, on est sortis de l'histoire.
01:31La France et puis d'ailleurs l'Europe, on a loupé tous les tournants technologiques depuis les années 90.
01:36On s'est massivement désindustrialisé, la France plus que les autres.
01:40Et on n'a plus aucune grande entreprise parmi les 25 plus grandes entreprises mondiales.
01:45Il faut voir la rapidité avec laquelle on est tous sortis de l'histoire.
01:48Et en fait, on ne s'en est pas aperçus, puisqu'on vivait un peu longtemps sur notre acquis.
01:51On vivait grâce à la dette.
01:52Et puis on voyait la Chine, parfois un peu de commissération.
01:55Quand je faisais mes études dans les années 80-90, la Chine, on n'en parlait même pas.
01:59Les mecs mouraient de faim, ça n'existait même pas.
02:01On parlait du Japon évidemment, mais ils mouraient de faim par millions.
02:04Donc ça n'existait même pas, c'était un pays, c'était le Moyen-Âge.
02:07La rapidité avec laquelle ils se sont développés,
02:08et il faut bien voir que maintenant, si on prend la technologie sur les automobiles par exemple,
02:14ils sont objectivement très très bons, ils sont objectivement meilleurs, avec des coûts inférieurs.
02:18On a été extrêmement naïfs.
02:21Eux n'ont jamais eu une politique d'ouverture, ce n'est pas vrai.
02:24Ça a toujours été une politique où il fallait apporter, faire des transferts des technologies
02:28dont ils ont pu profiter, même si maintenant ils ont les leurs.
02:31Oui, maintenant les rôles sont inversés,
02:32donc il faut au moins avoir la lucidité de s'en apercevoir.
02:35Probablement, moi qui ai toujours été, bien sûr que le libre-échange est meilleur collectivement,
02:40mais je crois que maintenant il faut qu'on soit beaucoup moins naïfs,
02:43il faut qu'on mette évidemment des clauses miroirs,
02:46il faut qu'on soit beaucoup plus protectionniste.
02:48Il y a au moins un moment où le protectionnisme peut justifier dans la théorie économique,
02:52c'est quand il est éducateur.
02:53Au point où on en est, en fait c'est un peu ça, le protectionnisme éducateur.
02:55Qu'est-ce que c'est du protectionnisme éducateur ?
02:56C'est-à-dire qu'on se protège le temps de développer notre propre industrie.
03:00En tout cas, on essaye de se mettre un petit peu à égalité.
03:03On ne peut pas juste accepter l'idée qu'on va perdre notre industrie
03:06en disant qu'on va être meilleur sur le luxe et le tourisme,
03:09et peut-être un petit peu le vin, parce que c'est très illusoire.
03:12En réalité, c'est une peau de chagrin, on va se retrouver avec rien du tout.
03:15On adore acheter, mais en fait on va avoir de moins en moins de choses à vendre.
03:18Non, il faut collectivement qu'on réagisse de façon extrêmement forte.
03:22Cette prise de conscience est en train d'arriver quand même, Rafik, ce matin.
03:24Sinon, on a l'impression que tout le monde est en train d'ouvrir enfin les yeux en Europe.
03:28On n'a pas toujours les solutions encore.
03:30Mais est-ce que moi, la prise de conscience est là ?
03:32La prise de conscience est en train d'arriver.
03:33On est en train de comprendre et de réaliser que la Chine n'est pas que le pays
03:39qui produit des produits bas de gamme.
03:42Non, non, la Chine aujourd'hui est un pays d'ingénieurs.
03:45Un tiers des étudiants aujourd'hui en Chine sont des ingénieurs.
03:49Vous avez en ce moment, en Chine, 7 millions d'ingénieurs en formation.
03:53150 000 en France.
03:55Souvent avec un niveau supérieur au nôtre.
03:57Avec un niveau supérieur et notamment en mathématiques,
03:59qui sont la matière d'excellence de l'avenir.
04:01Donc, pour poser le débat, on est en train de parler de ça.
04:04On n'est plus en train de parler de la Chine des années 70.
04:06On est en train de parler de la Chine qui est en train d'écrire l'avenir,
04:08qui est en train de rivaliser et à certains égards d'ailleurs d'être plus performante
04:12et plus efficace que ce que font les États-Unis.
04:15Donc, c'est de ça dont on parle.
04:18Alors, quand on est confronté à une telle situation,
04:21soit on la regarde de manière passive,
04:22soit on fait comme l'Europe, on légifère,
04:25on invente un IAC pour se protéger contre les méchants innovateurs américains et chinois,
04:32soit on prend acte de la révolution en cours
04:35et on essaye de se mettre en attaque plutôt qu'en défense.
04:38Aujourd'hui, on est en défense, en permanence.
04:40On a mis tous nos joueurs face aux buts adverses
04:45et on essaye de se défendre.
04:46Mais il n'y a personne pour aller marquer des buts.
04:48Aujourd'hui, on est condamné.
04:49Si on veut exister dans la grande bataille qui vient,
04:51on est obligé d'être en attaque.
04:52Être en attaque, c'est quoi ?
04:53C'est accepter, par exemple, l'idée de rentrer dans des rapports de force.
04:57Mais des rapports de force efficaces,
04:59parce que la Chine est beaucoup plus puissante que nous.
05:02C'est ça, c'est-à-dire que le rapport de force entre la France et la Chine...
05:04Oui, mais je vais vous dire qu'elle pourrait être...
05:06Un peu compliqué.
05:07Je vais vous dire qu'elle pourrait être un rapport de force crédible,
05:10et acceptable.
05:13Quand nous avons exporté un certain nombre de produits en Chine dans le passé,
05:16ils exigeaient, ça faisait partie du deal,
05:19un transfert de compétences.
05:20Eh bien, nous devrions être en mesure...
05:22Et souvent un partage actionnarial.
05:24Exactement, et un partage actionnarial.
05:26Nous devrions être en mesure de demander à la Chine,
05:28et ça ne serait pas être arrogant,
05:30ni faire une offense à ce qu'ils font aujourd'hui,
05:33à leur dire, ok, vous voulez pénétrer le grand marché
05:35de 450 millions de consommateurs de type classe moyenne européen,
05:38eh bien pour ça, on va vous demander de créer des entreprises en Europe,
05:43de vous associer avec des acteurs européens,
05:45et de prévoir un transfert de technologie.
05:47Pourquoi je vous dis tout ça, Raphaël ?
05:48C'est qu'il est temps, aujourd'hui, de se remettre dans une logique de planification.
05:52La bataille actuelle, que ça soit dans le domaine du quantique,
05:54que ça soit dans le domaine de l'IA, que ça soit dans le domaine du spatial,
05:56on ne la gagnera pas ces deux prochaines années.
05:58Si on peut avoir une chance de la gagner,
06:00il faut qu'on ait un projet à 10 ans, à 15 ans, à 20 ans.
06:03C'est le grand retour de la planification dont nous avons besoin.
06:06Et donc, la planification, c'est-à-dire être capable d'avoir cette vision à 10 ans ou à 20 ans,
06:10elle exige un transfert de compétences dans la durée.
06:12Donc, on ne va pas chercher à gagner le bras de fer avec la Chine dans l'année qui vient,
06:15ça ne marchera pas.
06:17On ne va pas bomber le torse,
06:18on ne va pas aller faire croire qu'on est meilleur qu'eux,
06:19ça ne marchera pas, on ne sera pas crédible.
06:21En revanche, l'idée qui consiste à dire que certains véhicules BYD
06:25vont être fabriqués en Europe et en France si possible,
06:28avec un transfert de compétences et avec une logique de JV, de joint venture,
06:32là, c'est quelque chose que nous serions en mesure d'expliquer à la Chine
06:35et qu'ils accepteront parce qu'ils l'ont fait.
06:37Je crois qu'aujourd'hui, nous n'avons plus les moyens d'être arrogants.
06:41On est en train de sortir de l'histoire, vous l'avez dit.
06:44On est en voie de tiers mondisation,
06:45mais on a encore un gros marché, 450 millions de personnes,
06:49qui fait rêver tout le monde.
06:50Nous avons des ingénieurs, certes beaucoup moins que la Chine,
06:53nous avons des mathématiciens,
06:54donc il est encore temps de faire quelque chose.
06:56Encore faut-il avoir cette vision politique à long terme,
06:58ce que, par définition, le contexte politique actuel interdit,
07:03et encore faut-il avoir un vrai leadership européen,
07:05ce qui n'est hélas certainement pas le cas avec Ursula Van der Leyen et ses amis.
07:09Oui, dramatiquement aujourd'hui.
07:10Même question, Erwan Tison,
07:12est-ce qu'on doit ériger des barrières douanières massives
07:14pour protéger notre économie européenne
07:16ou miser sur la compétitivité de nos entreprises ?
07:20Deux choses.
07:21Premièrement, moi je pense, comme d'autres,
07:24que la vraie souveraineté, c'est la réciprocité des dépendances.
07:27La question, c'est quelle dépendance allons-nous créer
07:30auprès de la Chine dans les prochaines années
07:32pour justement nous assurer notre propre souveraineté.
07:34Parce qu'on peut ériger effectivement des barrières douanières,
07:37on peut faire du protectionnisme, etc.
07:38Si on n'a rien à échanger en retour, ça ne marchera pas.
07:40Un exemple empirique, c'est la fameuse diplomatie du Jolipran
07:45qui s'est passée en avril 2020.
07:46Vous vous rappelez, l'Inde décide de fermer ses exportations de Jolipran.
07:50Tous les pays tapent à la porte en disant
07:52qu'on a besoin effectivement de principes actifs, etc.
07:54Il a fallu que Joe Biden, à l'époque c'était Donald Trump,
07:57arrive en disant
07:57« Si jamais vous n'ouvrez pas les frontières,
07:59moi j'annule les commandes de puces de guidage
08:02pour vos missiles air-sol. »
08:03Et bien là, ça s'est décidé en l'espace de 24 heures,
08:05la réouverture des exportations.
08:07Donc c'est ça en fait la souveraineté.
08:08La question c'est sur quoi est-ce que nous on est capables ?
08:10Et donc là, si la Chine nous ferme les terres rares,
08:13on leur fermerait, je ne sais pas...
08:14Mais c'est ça la question.
08:15Les crèmes L'Oréal ou la vente de Cognac ?
08:17C'est pour ça que vous dites effectivement
08:18qu'il faut miser sur nos avantages comparatifs instantanés,
08:20mais ils ne sont pas essentiels.
08:22Et en plus de ça, on sait très bien que l'économie chinoise
08:24tend justement à s'hyperspécialiser aussi sur le luxe
08:27pour ne plus dépendre du continent européen.
08:29Donc une fois qu'on a posé cette question-là,
08:31la question c'est comment est-ce qu'on assume justement
08:33notre leadership ?
08:34Notre leadership, on peut l'assumer en comprenant
08:36qu'on a changé de monde.
08:37C'est-à-dire qu'on est passé d'une économie capitalistique
08:39qui était dominée par la loi Ricardienne
08:40des rendements décroissants.
08:42Donc les rendements décroissants, c'est quoi ?
08:43C'est plus j'utilise un facteur de production,
08:45moins il est performant,
08:46à la loi de Romer sur les rendements croissants.
08:49C'est-à-dire que quand on dit souvent
08:51que l'IA est un changement civilisationnel,
08:53ce n'est pas uniquement du marketing,
08:54c'est-à-dire que d'un point de vue économique,
08:55toutes les lois sur lesquelles nous avons basé
08:57notre croissance ces 200 dernières années
08:58sont caduques, ou en tout cas doivent être complétées.
09:01Et la loi des rendements croissants,
09:02c'est peut-être la loi la plus puissante
09:04qui existe d'un point de vue économique
09:05de ces 200 dernières années.
09:06Expliquez-nous.
09:07Elle nous explique quoi ?
09:08Elle nous explique qu'une technologie,
09:10plus on va l'utiliser, plus elle sera performante.
09:11Donc en fait, pour la première fois dans notre histoire,
09:13on a une fuite en avant,
09:15c'est-à-dire qu'on a la possibilité d'avoir,
09:16quand on a un acteur qui est puissant sur un marché,
09:19en plus avec des effets de réseau,
09:20avec des effets superstars, etc.,
09:22cet acteur-là a la possibilité de rester en place
09:24et donc du coup de consolider son monopole.
09:26Concrètement, ça veut dire quoi ?
09:27On l'a vu sur le numérique.
09:28Exactement.
09:28Là où avant, on avait une revitalisation
09:32des leaders mondiaux tous les 40-50 ans
09:35parce que justement, ils déclinaient,
09:36ils avaient des rendements décroissants,
09:37aujourd'hui, on va avoir l'exact inverse.
09:39La question, c'est comment est-ce que nous,
09:40on fait justement pour être bon
09:41sur certains rendements croissants ?
09:43Et donc, ça ne sert plus à rien, je pense,
09:44de se battre sur les technologies
09:45sur lesquelles la Chine est forte,
09:47mais il faut du coup anticiper le coup d'après.
09:49Il y a un coup d'après,
09:50là-dessus, on était très fort jusqu'en 2017-2018.
09:53C'était, par exemple, pour reprendre l'exemple du véhicule,
09:55c'était le véhicule autonome.
09:57Le véhicule autonome, on sait très bien
09:58que la guéguerre qu'on a aujourd'hui sur l'énergie,
10:00elle sera ridiculement marginale
10:02quand justement, on n'aura plus de conducteurs.
10:04Pourquoi ?
10:05Parce que 70% de la valeur à venir
10:06dans un véhicule autonome,
10:07ce sera le logiciel.
10:08Et on avait Navia, on avait Valeo
10:10pour tout ce qui était capteur
10:11qui nous permettaient tout simplement de se dire
10:13c'est pas grave si on ne fabrique pas
10:15les habitacles en France,
10:15c'est pas grave si tout ça s'est externalisé
10:17en Roumanie, en Chine ou au Vietnam.
10:18Tant que justement,
10:19la tête pensante de la voiture est chez nous.
10:22Vous parlez à l'imparfait.
10:23Or, oui, qu'est-ce qu'on a fait ?
10:24En fait, on a tout simplement dit
10:25principe de précaution,
10:27attention, cette technologie-là ne l'utilisez pas.
10:29Ou alors, on a donné, c'est simple,
10:30on a donné 10 kilomètres en rond
10:32pas très loin de Rouen
10:34pour permettre à nos véhicules de circuler.
10:36Et donc, ce qui fait que,
10:37vu qu'on n'a pas compris
10:38que les rendements croissants aujourd'hui,
10:39c'est ça qui dominait le monde
10:40et ça qui dominait l'économie,
10:41on n'a pas justement permis
10:42à notre technologie,
10:43d'apprendre et justement
10:44de se développer
10:45pour être des champions mondiaux là-dessus.
10:46Donc en fait,
10:47c'est peut-être pas encore trop tard,
10:48mais on a raté la prochaine révolution.
10:50Et quand on voit ça sur,
10:52on multiplie ça à d'autres secteurs
10:53comme l'énergie,
10:54comme le transport,
10:55comme l'aérien,
10:56comme l'aéronautique,
10:57on se dit que par principe de précaution
10:58et par ce qu'on veut à chaque fois,
11:00réguler l'innovation
11:01de manière ex-santé
11:02plutôt que de le faire ex-poste,
11:04c'est-à-dire ceinturer bretelles
11:05avant et plutôt que de réparer les dégâts,
11:07et bien en fait, malheureusement,
11:07tout ce génie dont vous avez parlé avant,
11:09on l'a complètement gâché.
11:12Donc il n'est pas encore trop tard,
11:13mais ça demandera là aussi
11:14d'adapter nos structures politiques
11:16et administratives
11:17pour passer vraiment
11:18d'un principe de précaution
11:19à un principe de risque.
11:21Ça nous permettra peut-être
11:22d'enfin faire tourner un petit peu
11:23toutes nos machines
11:24qu'on a sur notre territoire
11:25et de créer nos propres futures dépendances
11:27avec la Chine.
11:27Oui, c'est un changement culturel
11:28absolument majeur
11:29qui prendra sûrement un petit peu de temps.
11:31Oui, mais c'est la seule condition
11:32à laquelle on y arrivera, Raphaël.
11:33Qu'est-ce qu'on a anticipé
11:35pour l'économie d'après ?
11:36On a perdu sur la robotisation,
11:39on a perdu sur le numérique,
11:42on n'est plus vraiment en selle
11:45pour l'intelligence artificielle,
11:46même si on pousse énormément Mistral.
11:48On voit que les ordres de grandeur
11:49n'ont rien à voir avec ce qui se passe
11:50ni aux Etats-Unis, ni en Chine.
11:53Qu'est-ce qu'on a pour le coup d'après ?
11:57Quantique fait silence sur le plateau.
12:00Vous me faites très peur.
12:01L'Europe n'est quand même pas complètement perdue.
12:02Quantique, véhicule autonome,
12:03on sait que le spatial,
12:04les télécommunications,
12:05par exemple en Europe,
12:06c'est quelque chose qui est souvent répété
12:08sur votre plateau,
12:09on a 130 opérateurs téléphoniques.
12:10Si par exemple, demain,
12:11on opérait une consolidation
12:12en ayant 5,
12:13on ferait des économies d'échelle,
12:14des économies de rendement
12:14et des rendements croissants
12:16qui seraient absolument fantastiques
12:17et qui nous permettraient,
12:18avec des programmes spécifiques
12:19via Ariane,
12:20d'avoir effectivement
12:21des télécommunications
12:22qui soient un programme
12:23qui soit peut-être aussi ambitieux
12:24que celui de SpaceX.
12:25SpaceX, il y a 10 ans,
12:25c'était rien.
12:26Donc en fait, le temps aussi,
12:28c'est énormément raccourci.
12:29On peut effectivement
12:29faire émerger des champions
12:30de manière extrêmement rapide
12:31à condition d'y mettre
12:33le paquet financier
12:33et réglementaire.
12:34Et lever les barrières
12:35au sein de l'Europe.
12:36Ça demanderait un changement majeur,
12:37en particulier la politique
12:38de concurrent.
12:39Il faut rappeler
12:40qu'une des erreurs de l'Europe,
12:41une des naïvetés,
12:42si vous voulez,
12:42c'est qu'on a privilégié
12:44énormément le consommateur.
12:45On a dit,
12:45il nous faut des prix bas,
12:46il nous faut de la diversité.
12:48Alors, des prix bas
12:48de la diversité de l'offre,
12:49ça, on en a eu.
12:50Oui, mais on est tous très contents
12:51de payer nos forfaits téléphoniques
12:5310 euros aujourd'hui.
12:54Oui, ou plutôt,
12:55le t-shirt à 1 euro,
12:56plutôt que le t-shirt local,
12:57ça en coûterait probablement
12:5810 à 15 fois plus.
13:00Sauf que, ce qu'on a dit du coup,
13:01dès qu'on avait des géants,
13:02enfin des géants,
13:03dès qu'on avait des entreprises
13:04européennes qui voulaient s'allier,
13:06oh là là,
13:06droit de la concurrence,
13:07c'est pas possible,
13:08le consommateur va très mal
13:10s'en vivre.
13:12Et du coup,
13:13on n'a jamais créé
13:14les géants
13:15que tous les autres ont.
13:16On s'est complètement préservés
13:18de ces effets.
13:19On n'a évidemment pas créé
13:20nos grandes plateformes non plus.
13:22Il y a aussi,
13:23c'est pour boucler
13:23ce qu'on a dit tout à l'heure,
13:24un état d'esprit
13:25qui n'est plus celui de l'innovation,
13:26mais qui n'est plus celui
13:27de l'achat de la certitude
13:29contre le risque.
13:30Et ça, c'est évidemment dramatique.
13:31On n'a pas voulu faire ça.
13:33Et je crois que c'est David Baverez
13:34qui a écrit un très bon livre
13:35« Bienvenue en économie de guerre ».
13:36Où il explique que l'économie de guerre,
13:38c'est une économie
13:38qui repose sur l'offre.
13:39C'est-à-dire que vous allez produire
13:41et produire en utilisant
13:43toutes les capacités
13:44de synergie.
13:46Donc, vous allez grandir.
13:47On n'a pas voulu faire ça.
13:48On n'a pas voulu créer aussi,
13:50c'est sans doute très compliqué
13:51pour l'Europe,
13:51mais ce marché des capitaux,
13:53cette union des marchés,
13:55en particulier réglementaire,
13:57qui aurait permis plus facilement
13:58la croissance de ces géants.
13:59Donc, on n'a aucun de ces géants.
14:01Nous sommes des nains.
14:03Nous sommes nanisés.
14:04C'est « dwarfed » en anglais.
14:05L'Europe est nanisée.
14:07Et donc, c'est très difficile
14:08de remonter la pente.
14:09C'est-à-dire qu'on peut prendre
14:09des décisions bonnes maintenant,
14:11mais le temps qu'on arrive à nouveau
14:12à recréer, regarder...
14:14Derrière les robots humanoïdes,
14:15c'est compliqué de dire aujourd'hui.
14:17On disait le quantique, peut-être,
14:18effectivement.
14:19Peut-être la révolution
14:20de main de l'énergie
14:21avec la fusion nucléaire.
14:22Il y a des trucs,
14:23mais il faut s'y positionner
14:24très en amont.
14:26Et effectivement,
14:26ne pas avoir le syndrome
14:27de la ligne Maginot
14:29et se dire « tiens,
14:30maintenant, on va essayer
14:31d'être bon sur l'intelligence artificielle ».
14:33C'est raté.
14:34Je veux dire,
14:34il faut être assez lucide.
14:36Il va falloir qu'on...
14:37C'est un très big business.
14:38C'est à coup de centaines
14:41de milliards d'euros d'investissement.
14:42Ça se joue à coup de centaines
14:42de milliards maintenant.
14:43On les a pas.
14:44J'adore Mistral,
14:45mais tu utilises le chat ici.
14:46Je veux dire, bon, entre nous.
14:48Que je trouve d'ailleurs,
14:50objectivement,
14:50d'un point de vue économique,
14:51plus puissant et plus pertinent
14:53que TchadGPT.
14:54Parce que ?
14:55Parce que tout simplement,
14:56en termes de sources,
14:56en termes de raisonnement
14:57et en termes de connexion
14:59entre différentes données,
15:00je trouve qu'il est plus intuitif
15:01qu'il est plus malin
15:02que TchadGPT.
15:03Oui, Made in France.
15:04Ça fonctionne, Olivier.
15:06Rafix Maty,
15:06le grand spécialiste
15:07dans l'intelligence artificielle.
15:11bataille de l'IA en Europe.
15:12On a perdu la bataille
15:13des LLM probablement.
15:15Sur la superintelligence.
15:17Mais l'avenir n'est pas
15:17forcément du modèle.
15:19Mais vous savez,
15:20le problème que nous avons
15:21aujourd'hui en France
15:22et en Europe
15:22n'est pas un problème
15:22de compétences.
15:23Ce n'est pas un problème
15:24de génie.
15:24C'est un problème politique.
15:25Je dis les choses clairement
15:26de manière basique.
15:28Les véhicules autonomes,
15:29nous avions les capacités
15:30de le faire.
15:31On se croit plus intelligents
15:32que les autres.
15:33On interdit les conduites
15:33autonomes de niveau 4 et 5
15:35en Europe.
15:36Donc, c'est juste pas possible.
15:37Vous avez ce principe
15:38de précaution
15:39qui bride tout.
15:41Vous avez dans le domaine
15:43de l'IA,
15:44l'acte fondateur
15:45de l'Union Européenne.
15:46C'est l'IA acte.
15:47C'est un acte de régulation.
15:48Le monde entier
15:48est en train d'être
15:49en mode conquête.
15:51Nous, on est en régulation.
15:53Allez à Shenzhen.
15:53Allez à Shenzhen.
15:54Et vous comprendrez
15:54ce qui se passe
15:55quand vous entrez
15:56dans une usine,
15:57qu'il n'y a pas de clim,
15:58que les lumières sont éteintes
15:59parce que vous avez
15:59des robots qui tournent
16:01tout seuls.
16:02Quand vous avez
16:04des voitures autonomes
16:05et des taxis autonomes
16:07que ce soit à Shenzhen
16:07ou que ce soit avec Waymo
16:09à Houston
16:10ou à San Francisco
16:12ou à Londres
16:14qui arrive très vite
16:15et que tout ça
16:16est juste interdit chez nous,
16:18je crois que nous sommes
16:19aujourd'hui responsables
16:20de notre problème.
16:20C'est-à-dire que
16:21à force d'être
16:22prisonniers de la protection,
16:24à force de vouloir dire
16:25non mais nous,
16:25on est là,
16:26nous on est plus intelligents
16:27que les autres,
16:28on va vous protéger
16:28contre le mal.
16:29Mais pendant ce temps-là,
16:30les autres y font,
16:30les autres y avancent,
16:31les autres y créent.
16:32Et à chaque fois
16:34que je reviens
16:34des Etats-Unis
16:35et bientôt d'ailleurs,
16:36je compte aller faire
16:37une virée à Shenzhen
16:38pour voir ça
16:38de mes propres yeux.
16:39Je sais que je vais me prendre
16:40une baffe,
16:40je sais que je vais me prendre
16:41une baffe
16:41parce que le monde avance
16:43et le monde ne nous attend pas.
16:44Donc il faut qu'on arrête
16:44avec notre complexe
16:45de supériorité européen
16:46qui consiste à dire
16:47nous,
16:48alors nous,
16:49on va faire un DSA,
16:50on va faire un DMA,
16:51on va faire un IACTE
16:52et avec ça,
16:52on sera les maîtres du monde
16:53en numérique.
16:54Ben non,
16:54c'est un petit peu compliqué que ça.
16:56Je vous le dis,
16:56Raphaël,
16:57on a les ingénieurs,
16:58on a un génie entrepreneurial
17:01en France.
17:01Moi,
17:01je rencontre des entrepreneurs
17:03réels
17:04et en puissance
17:06tous les jours.
17:07D'ailleurs,
17:07beaucoup d'entre eux
17:08aujourd'hui se posent la question
17:08de savoir s'ils vont aller
17:09entreprendre à l'extérieur de France.
17:11Un,
17:11il n'y en a pas qu'en France
17:12et deux,
17:12les salaires sont meilleurs ailleurs.
17:13Exactement,
17:13parce que les signaux envoyés
17:14ne sont pas forcément les bons.
17:15Donc le terreau,
17:17malgré tout,
17:18est extrêmement fertile.
17:19Vous enlevez de la réglementation
17:20et vous mettez
17:21une logique
17:22objectivement tournée
17:23vers l'avenir.
17:24Prenez l'exemple du nucléaire,
17:26avantage compétitif majeur.
17:28Le président de la République
17:30a annoncé en 2022
17:31un projet de six nouveaux EPR
17:33et huit en option.
17:34Il n'y a pas eu une seule brique
17:36qui a été posée.
17:37Il n'y a pas eu une seule brique
17:38qui a été posée.
17:38Ce n'est pas sérieux.
17:39Quand on a un avantage compétitif,
17:42parce que quand on parle d'IA,
17:43l'énergie
17:43et de véhicules autonomes
17:45et de robots,
17:46tout ça,
17:46les armées de robots,
17:47les milliards de véhicules autonomes,
17:49il va falloir les alimenter en énergie.
17:51On a la base pour ça.
17:52Ça s'appelle le nucléaire.
17:53On a prévu
17:5414 réacteurs de type EPR.
17:55Il y a quelques petits problèmes
17:56de financement qui sont réglés,
17:57mais ça ne veut pas dire
17:58que le gouvernement
17:59n'y travaille pas
18:00non plus très activement.
18:01Oui, mais c'est très intéressant
18:02ce que vous dites.
18:02Il y a quelques petits problèmes
18:03de financement.
18:04Qu'est-ce que ça veut dire ?
18:05Ça veut dire qu'en fait,
18:06on est capable de s'endetter
18:06pour payer des retraites.
18:07On est capable de s'endetter
18:08pour payer des chèques énergie.
18:10Mais on n'est pas capable
18:10de s'endetter pour payer
18:12l'énergie qui va assurer
18:13la souveraineté de la France
18:15ces 50 prochaines années.
18:16Un mot sur,
18:17c'est le dernier thème
18:18des experts aujourd'hui,
18:19le plan Made in Europe
18:20qui devait être présenté demain
18:21par la Commission européenne
18:23et qui devait notamment
18:23instaurer une préférence européenne.
18:26C'était beaucoup défendu
18:27par le commissaire français
18:28à l'industrie,
18:29Stéphane Séjourné.
18:31On parlait de la politique industrielle
18:32justement avec vous,
18:33Olivier Babot,
18:33tout à l'heure.
18:35La Commission a vu des dissensions
18:36entre les États membres,
18:37c'est toujours le même problème
18:38au sein de l'Europe,
18:39pour qu'on se mette d'accord,
18:40à repousser ce plan Made in Europe
18:43à au moins, au plus tard,
18:44enfin au plus tôt,
18:45fin janvier 2026.
18:48Est-ce qu'on peut bâtir,
18:49Erwan Tison,
18:51une politique
18:51et une stratégie industrielle cohérentes
18:54quand les États membres
18:55ne sont pas d'accord
18:56les uns avec les autres ?
18:57Parce qu'on n'a pas
18:58les mêmes intérêts économiques.
18:59Alors oui,
19:00d'ailleurs il y a pas mal
19:01de papiers universitaires
19:02qui pointent là-dessus,
19:04qui sont en train d'être rédigés là-dessus,
19:05une littérature émergente
19:06très intéressante.
19:07En fait on peut le faire
19:08mais pas à 27.
19:09C'est ça la question.
19:10En fait il y a la solution
19:12que nous disent les économistes,
19:13c'est qu'il faut cartographier déjà
19:15les forces et les faiblesses en Europe
19:17et créer des clusters inter-industriels.
19:20Par exemple,
19:21avoir de la chimie effectivement
19:22entre l'Allemagne
19:23et le nord de l'Europe,
19:23avoir de l'agriculture
19:25au niveau du sud de l'Europe,
19:26avoir effectivement de l'IA
19:27ou de l'industrie un peu plus lourde
19:29que ce soit dans la fameuse Europe centrale.
19:32Et donc l'idée c'est de se dire
19:33il faut effectivement
19:34qu'il y ait ces clusters
19:35qui soient réalisés,
19:35donc des coopérations inter-
19:37Est-ce que c'est pas un peu
19:38ce qui se passe au niveau du spatial,
19:40au niveau de la défense,
19:42le projet Bravo ?
19:42Ça se fait de manière poussive.
19:48Ça se fait de manière poussive,
19:49ça se fait sur certains secteurs
19:50et ça se fait de manière
19:51extrêmement diffusée
19:53et d'un point de vue temporalité
19:55on n'a pas les mêmes choses
19:55en même temps.
19:56Il y a une chose
19:57qui serait très simple
19:57et c'est là-dessus
19:58qu'on attend quelque part
19:59la Commission européenne
20:00sans partir sur le volet planification,
20:02mais c'est de se dire
20:03effectivement
20:03on va abolir énormément
20:05de nos règles,
20:06le faire comme Juncker avait dit
20:07par exemple déjà
20:07de supprimer la règle
20:08de la lignité
20:09pour passer à une règle de majorité
20:10et on va voter tout simplement
20:11des financements
20:12et des allègements
20:13un petit peu sous le côté bac à sable,
20:14des allègements normatifs
20:15sur certains secteurs
20:16dans certaines zones géographiques européennes.
20:17Là aussi,
20:18est-ce que ça n'existe pas
20:19avec les PIEC ?
20:20Non,
20:20non,
20:20non,
20:21parce qu'on n'a pas le volet...
20:22On a des projets
20:22qui permettent,
20:23projets européens,
20:25d'innovation
20:26qui permettent
20:26de se libérer
20:27de certaines contraintes normatives.
20:28Mais on n'a pas le côté bac à sable,
20:30on n'a pas le côté
20:30faites la preuve
20:31justement
20:32de la nécessité
20:33de votre technologie
20:34et on a l'évaluation ex-poste.
20:37Pourquoi ?
20:37Parce qu'on a toujours
20:38cette évaluation ex-ante
20:39qui du coup nuit
20:40quelque part
20:41à ce côté investissement.
20:42Si on met l'effort,
20:43si on a effectivement
20:44quitte à faire des emprunts européens,
20:45un gros emprunt européen,
20:46en tout cas flécher
20:46les budgets qu'on a actuellement
20:47quitte à mutualiser
20:49certaines de nos ressources
20:49parce que de toute façon
20:50on se targue toujours
20:52d'avoir un marché
20:53de 400 millions de...
20:54Mais c'est faux,
20:54ça n'existe pas
20:55le marché de 400 millions
20:56de consommateurs.
20:57À part la monnaie commune,
20:57on ne partage rien d'autre en commun.
20:59On n'a pas,
20:59sans revenir sur le rapport
21:00McCarthy 56.
21:02Non mais on n'a pas,
21:03l'Union Européenne
21:04n'a pas d'existence politique
21:05et budgétaire.
21:06Tant qu'elle n'aura pas ça,
21:07elle ne pourra pas exister
21:08en commun.
21:09Donc peut-être il faut aussi,
21:11les révolutions se font aussi
21:12dans les crises,
21:13peut-être qu'on pourra
21:14se permettre justement
21:15de créer une véritable
21:16Union Européenne
21:16telle qu'elle est nécessaire
21:18parce que justement
21:19on a besoin d'un levier fiscal
21:20et budgétaire
21:20qui soit commun
21:21pour compléter le budget monétaire
21:23et c'est à ces conditions-là
21:24qu'on pourra justement
21:25faire des investissements
21:25ciblés, régionalisés
21:26sur certains secteurs
21:27pour faire émerger
21:28des champions régionaux.
21:29Bon, la crise existentielle
21:30elle arrive là quand même,
21:31tout le monde alerte
21:32de Mario Draghi
21:33jusqu'à la politique,
21:35la nouvelle stratégie
21:37de politique internationale
21:38présentée par les Etats-Unis
21:40vendredi.
21:41Je reviens sur
21:42la souveraineté industrielle,
21:43est-ce que le report
21:44du plan Made in Europe
21:46est un coup dur
21:46pour la souveraineté industrielle
21:48européenne ou pas Olivier ?
21:49Oui je pense parce que ça prouve
21:50encore une fois
21:50notre incapacité
21:51à se mettre dans la temporalité,
21:53dans le rythme
21:53où vivent les autres pays.
21:55Quand les autres
21:55sont capables de construire,
21:56de s'implanter
21:57en quelques mois,
21:58nous c'est comme si
21:59on vivait dans un temps
22:00complètement différent.
22:01C'est souvent des problèmes
22:02de décalage d'ailleurs
22:03dans les rythmes
22:04comme il y a un problème
22:06de décalage entre
22:06le temps économique,
22:07le temps politique,
22:08le temps judiciaire par exemple.
22:09On a exactement
22:10ce problème-là.
22:11Quand on enseigne la stratégie,
22:12on dit qu'il faut à tout prix
22:13éviter d'être ce qu'on appelle
22:14stuck in the middle,
22:15collé au milieu,
22:16c'est-à-dire ni bas de gamme
22:17ni haut de gamme.
22:17Le bas de gamme ça peut être très bien,
22:18le low cost c'est super efficace,
22:20quand vous êtes haut de gamme
22:20il faut l'être vraiment.
22:21Quand vous êtes ni l'un ni l'autre,
22:22vous avez les inconvénients de tout.
22:24L'Europe,
22:24il faut bien le dire,
22:26stuck in the middle,
22:27on est au milieu.
22:29On n'est pas assez fédéraux.
22:30Si on avait beaucoup
22:31les plus fédéralistes,
22:32si on avait un marche forcée
22:33vraiment créé,
22:34je ne dis pas que c'est ça
22:35qu'il fallait faire,
22:36mais si on avait créé
22:36un vrai marché unifié,
22:38réglementé,
22:39au niveau de la réglementation,
22:40politique,
22:41avec un budget,
22:42là on pouvait faire quelque chose
22:43et prendre des décisions
22:43et là on était effectivement
22:44puissant à 450 millions.
22:46Ou alors,
22:47il aurait fallu ne pas perdre
22:48notre souveraineté
22:49au niveau des États
22:50et être capable de réagir
22:51avec un principe
22:53de subsidiarité économique
22:54qui fait qu'on va prendre
22:55la décision au meilleur niveau
22:57et malheureusement
22:58on est entre les deux.
22:59On a perdu la souveraineté
22:59mais on n'est pas assez fédéraux
23:01et on a cru
23:02que l'union allait se faire,
23:06l'union sur le réglementaire
23:08allait se faire
23:08beaucoup plus facilement
23:08et ce n'est pas du tout
23:09réglementaire et politique
23:10et ce n'est pas du tout
23:11ce qui se passait.
23:12On parlait tout à l'heure
23:12des salaires,
23:13c'est là qu'il faut voir
23:13le côté cercle vicieux terrible.
23:16Si on a un brain drain terrible,
23:18c'est-à-dire une fuite des cerveaux,
23:19si on a du mal aussi à créer,
23:21c'est que de plus en plus
23:21on est pauvres en fait,
23:24on s'est appauvris.
23:25En PIB par tête,
23:26on a décroché l'Europe
23:27par rapport au reste du monde
23:28et la France par rapport à l'Europe.
23:30Ça veut dire qu'on paye moins cher
23:32objectivement nos gens.
23:33Quelqu'un disait,
23:34c'est un grand constructeur,
23:35un avionneur,
23:36on a un super ingénieur,
23:38on voulait le payer
23:38en tout début de carrière,
23:3980 000,
23:40c'est vachement bien
23:4080 000 bruts,
23:41c'est quand même quelque chose
23:42normalement.
23:43Et bon,
23:43il y a une grande plateforme
23:45que je ne ciserai pas américaine
23:46qui a proposé 800 000.
23:47Voilà, tout simplement.
23:48C'est-à-dire qu'à partir
23:48de ce moment-là,
23:49quand vous êtes une sorte
23:50de pays sous-développé,
23:52vous proposez forcément
23:53des salaires de pays sous-développés,
23:55les gens s'en vont,
23:56la difficulté à créer
23:57sur votre sol,
23:59elle n'est pas seulement
23:59réglementaire et fiscale,
24:00même si elle est aussi
24:01réglementaire et fiscale,
24:02elle est aussi que la vie
24:04se passe ailleurs.
24:05Voilà, c'est ça qui est dramatique.
24:06Et encore une fois,
24:07on s'en sortira,
24:07puisqu'on voit que
24:08toutes ces choses-là
24:09sont imbriquées,
24:10par une remise à plat,
24:11mais radicale,
24:12par une libération,
24:14comme disait Rafik,
24:15un principe de liberté
24:16qui tout d'un coup redonne
24:17de l'énergie à toutes ces énergies,
24:20de la liberté à ces énergies
24:21qui sont effectivement
24:22bien présentes.
24:23Bon, le sursaut européen
24:24est donc absolument indispensable,
24:26si je comprends bien.
24:27Il est indispensable,
24:28mais il n'est pas gagné,
24:28parce que malheureusement,
24:30on le voit bien,
24:31quand il s'agit de sortir une norme,
24:32alors là,
24:33on est extrêmement rapide,
24:34on est extrêmement efficace,
24:34mais lorsqu'il s'agit de parler
24:35de l'avenir,
24:36on le voit dans ce cas,
24:37là, ça devient tout de suite compliqué.
24:38Mais là, on a les omnibus
24:39qui sortent quand même,
24:40le rapport Draghi,
24:40à marche forcée,
24:41avance petit à petit,
24:42on a présenté une stratégie
24:43de défense économique,
24:44le rapport Draghi,
24:45qui est un excellent rapport
24:48et qui donne d'ailleurs
24:49la feuille de route,
24:50objectivement,
24:50je crois qu'on est à 14 ou 15%
24:52de...
24:52Oui.
24:53Donc, ça pose quand même le sujet.
24:55Et moi, ce qui m'inquiète,
24:56voyez-vous,
24:57et je le dis en étant...
24:58C'était avant l'été,
24:58peut-être qu'avec les paquets
24:59qui arrivent,
25:00on va un peu accélérer quand même.
25:02Peut-être qu'on va arriver
25:03à 20%.
25:03Oui, mais enfin,
25:04pendant ce temps-là,
25:05je parlais de Shenzhen tout à l'heure,
25:07quand vous allez à Shenzhen
25:08et que vous allez dans un Fab Lab,
25:09vous arrivez avec une idée
25:11et vous ressortez
25:11avec le prototype
25:14en moins de 24 heures.
25:15Enfin, il faut juste comprendre
25:16qu'est-ce qui se passe là-bas
25:17et qu'est-ce qui se passe ici.
25:18Moi, ce qui m'inquiète,
25:19voyez-vous,
25:19et c'est ce qui me rend
25:20un peu pessimiste,
25:21c'est que même en accord bilatéraux
25:25entre deux pays extrêmement frères,
25:26on n'est parfois pas capable
25:27de se mettre d'accord.
25:28Pour moi, l'exemple
25:29de l'avion de combat franco-allemand,
25:32le SCAF,
25:34qui n'arrive pas...
25:35Alors qu'on est sur les deux
25:36premières économies de la zone euro,
25:37on devrait être main dans la main,
25:38on n'arrive pas à le faire.
25:40L'histoire n'est pas dite,
25:42la baisse n'est pas encore
25:42complètement dite,
25:43mais c'est compliqué.
25:45Jusqu'à présent,
25:46ce n'est pas gagné.
25:47Dernier point,
25:48il y a quelques signaux faibles aussi.
25:49Pour se réjouir,
25:49en fin de l'émission,
25:51Yann Lequin, par exemple,
25:52a décidé d'installer
25:52sa nouvelle start-up à Paris.
25:54Ben voilà,
25:54on termine sur une pointe d'optimisme.
25:56On attire encore les talents,
25:57effectivement.
25:58C'est la preuve aussi,
25:58peut-être que parmi tous
25:59les écosystèmes du monde,
26:00il a choisi Paris,
26:01donc peut-être qu'il se passe
26:01quelque chose aussi
26:02dans notre pays
26:02sur ce thème-là.
26:03Mais évidemment,
26:04la France et l'Europe
26:04ne sont pas morts.
26:05On aura l'occasion
26:06d'en rediscuter.
26:06Merci à tous les trois,
26:07Erwan Tizon,
26:08Rafix Mati,
26:09Olivier Babaud,
26:10d'avoir participé
26:10à cette émission.
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