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  • il y a 13 heures
Mardi 25 novembre 2025, retrouvez Sacha Bettach (Collaboratrice senior, Bird & Bird) dans LEX INSIDE, une émission présentée par Arnaud Dumourier.

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Transcription
00:00Chine, acteur de la fast fashion, fait la une en débarquant en France entre scandale pénal, enjeu économique et régulation européenne.
00:21De nombreuses questions se posent. Sacha Betach, avocate chez Bird & Bird, est sur notre plateau pour décrypter cette actualité.
00:30Sacha Betach, bonjour.
00:31Bonjour.
00:32Alors on va revenir peut-être sur cette actualité avec Chine qui débarque en France.
00:38Pour ceux qui auraient loupé l'actualité, peut-être revenir sur le contexte.
00:43Sacha, qu'est-ce qui s'est passé avec Chine ?
00:45Bien sûr. Alors au 1er novembre de cette année, la DGCCRF, la Direction Générale des Fraudes, a repéré que Chine commercialisait des poupées pédopornographiques.
00:56Donc elle véhiculait un message sexuel à destination des adultes, mais aussi accessible aux mineurs.
01:02Cette commercialisation est évidemment illégale en France. Ça a été signalé par la DGCCRF.
01:07Et tout de suite, Chine a réagi par trois mesures. Elle a tout de suite retiré les produits.
01:14Elle a aussi suspendu la catégorie adulte de son site Internet. Et enfin, elle a lancé une enquête interne.
01:22Ces faits sont réprimés par le code pénal, évidemment, articles 227, 23 et 24.
01:27Et on n'a pas le droit en France de fixer, diffuser ou d'être en détention d'une image pornographique ou de fabriquer ou de diffuser une image pornographique,
01:38mais qui peut être accessible par un mineur. D'où le problème.
01:42Ce que met en lumière cette affaire, c'est les lacunes de modération de ces plateformes de façon générale.
01:48Puisque aujourd'hui, Chine est dans l'œil du viseur. Mais quelques jours plus tard, on a eu beaucoup d'autres plateformes.
01:53Temu, AliExpress, Wish, qui ont été visées pour des ventes illégales d'armes.
01:59Donc, c'était des machettes et des points américains.
02:03Et d'autres sites, comme Etsy, Le Bon Coin, elles ont été visées, enfin, eux, ces sites ont été visées, ces plateformes,
02:09parce qu'elles mettaient à disposition des mineurs des annonces à caractère pornographique qui n'étaient pas bien filtrées.
02:16Donc, un problème de modération du côté des plateformes.
02:20Exactement. Donc, on a un problème de fond de modération et qui s'est déjà vu chez Amazon en 2023, 2022,
02:28puisqu'il y a eu un procès et une condamnation, non pas d'Amazon, mais qui a été sommé de donner la liste des clients
02:33qui avaient acheté les produits pornographiques en ligne. Et un de ces clients a été condamné à une peine de prison.
02:39Donc, on vient de voir l'aspect pénal de l'affaire Chine et plus largement de la fast fashion.
02:44Est-ce qu'il y a d'autres aspects au-delà de l'aspect de droit pénal ?
02:49Bien sûr. L'aspect droit de la consommation est primordial et c'est, à vrai dire, le nerf de la guerre.
02:53Parce que ces plateformes, notamment Chine et d'autres, se rendent souvent compables de pratiques commerciales trompeuses,
02:59c'est-à-dire qu'elles vendent en ligne n'importe comment, n'importe qui,
03:02parce qu'elles ont un roulement de collection qui est extrêmement rapide.
03:06Donc, elles font, par exemple, des fausses promotions.
03:09Elles utilisent ce qu'on appelle aujourd'hui les dark patterns, ce sont des billets de consommation.
03:13Vous savez, souvent, c'est le compte à rebours qu'on voit pour nous presser d'acheter.
03:15C'est un parmi tant d'autres.
03:17Elles ont un étiquetage non conforme, donc elles vendent des produits qui ne sont pas conformes sur le marché européen,
03:21donc pouvant être dangereux.
03:23Et enfin, elles font souvent du greenwashing, c'est des allégations environnementales qui sont fausses.
03:27Ce ne sont pas les seuls.
03:28Il y a aussi, par exemple, une condamnation qui est assez célèbre de Wish,
03:31la plateforme américaine en 2021, qui vendait des produits qui étaient dangereux,
03:36en l'occurrence, c'était des jouets, qui contenaient des produits cancérigènes
03:40et qui ne respectaient pas les normes européennes.
03:42Wish a été déréférencée.
03:44Et c'est une des procédures qui est possible selon le Code de la consommation.
03:49La justice peut décider d'un déréférencement, c'est-à-dire que la plateforme est supprimée des moteurs de recherche.
03:55Et on ne peut plus la trouver lorsqu'on la tape.
03:57Et donc, la vente en tant que telle n'est pas interdite.
04:01En revanche, si vous ne pouvez plus la trouver dans vos moteurs de recherche, c'est plus difficile d'acheter.
04:05Bien sûr. Alors, vous parlez du déférencement, mais est-ce qu'on peut interdire l'accès à la plateforme Chine
04:11ou lui interdire l'accès au marché français ?
04:14C'est une bonne question.
04:15C'est compliqué parce qu'en France, on a un régime d'hébergeurs qui a été mis en place par la loi LCUN qui date de 2004.
04:22Et il y a donc les hébergeurs, à contrario des éditeurs.
04:27Les hébergeurs ont un régime de responsabilité allégé.
04:31Ce qui veut dire qu'ils n'ont pas d'obligation a priori de modérer les contenus.
04:35En revanche, dès qu'ils ont un signalement, ils ont une obligation de retrait prompt.
04:39Et c'est bien ce qu'a fait en l'occurrence Chine, et c'est ce qu'on n'avait pas fait en 2021 d'ailleurs, Wish.
04:44Elle a retiré immédiatement les contenus litigieux.
04:47S'il y a une récidive ou s'il y a des faits répétés, là on peut envisager une demande de blocage en justice.
04:52Mais ce n'est pas simple.
04:53D'ailleurs, le gouvernement, la ministre du Numérique a demandé ce fameux blocage et un déréférencement en parallèle.
05:00Elle n'a pas obtenu le déréférencement il y a quelques jours.
05:02Et la demande de blocage est toujours en cours, mais c'est compliqué parce qu'elle se base par exemple sur la vente d'armes
05:08qui a été découvert quelques jours plus tard, les poupées pédopornographiques.
05:12Mais il n'est pas certain que ça soit considéré comme une récidive et un fait assez grave,
05:16puisqu'à chaque fois, Chine coopère avec la justice.
05:19Donc on voit que ce n'est pas si simple.
05:21Est-ce que le fait d'avoir une implantation physique comme Chine au BHV, ça change la donne ?
05:27Ça change quelque chose ?
05:27Alors oui, il faut être bien de le rappeler.
05:29Chine vient d'arriver au BHV, qui est dans le groupe Galerie Lafayette,
05:31donc potentiellement va s'étendre partout en France.
05:33Le fait d'avoir un ancrage physique a un avantage, c'est qu'on a un contrôle physique des produits.
05:40C'est d'ailleurs ce qu'a déclaré le BHV.
05:41À l'évidence, elle n'aurait pas laissé des produits illicites dans ses rayons.
05:44Donc ça permet quand même plus de contrôle et aussi de transparence vis-à-vis des consommateurs,
05:48puisque vous voyez la matière, le tissu de ce que vous achetez.
05:51En revanche, les problèmes que cela soulève, c'est que ça génère une conversion d'images pour Chine.
05:57Ça veut dire quoi ?
05:57C'est-à-dire que Chine devient dans la norme, elle devient acceptable au sens du consommateur.
06:04Comme un acteur traditionnel, c'est ça ?
06:05Comme un acteur traditionnel qui, lui, respecte les règles du jeu.
06:08Parce que Chine, si elle respectait les règles du jeu, notamment en matière d'environnement,
06:12de production fiable, de rotation des stocks, on n'aurait pas de problème.
06:16Là, aujourd'hui, ça pose problème parce que, notamment, il y a des produits illicites,
06:19mais pas que. Il y a des produits dangereux qui ne respectent pas les normes aujourd'hui.
06:22Et ça échappe à une réglementation, ce qui dérègle aussi la concurrence.
06:25Alors, l'Union Européenne essaye de réguler tout ça, notamment avec le DSA.
06:30Est-ce que ça change quelque chose aussi ?
06:32Alors, normalement, oui.
06:33Le DSA, qui est en application progressive depuis 2024,
06:37met en place de lourdes obligations à l'encontre des plateformes, de façon générale,
06:41et des VLOPS, c'est les Very Large Platforms,
06:43c'est celles qui ont plus de 45 millions d'utilisateurs dans l'UE.
06:46Et parmi elles, il y a Shein, mais beaucoup d'autres, Apple, Google, etc.
06:51Et donc, ces Marketplace et ces très larges plateformes ont l'obligation d'agir a priori.
06:58C'est-à-dire qu'elles doivent évaluer les risques systémiques.
07:00Parmi les risques systémiques, on a notamment ces fameuses commercialisations de produits légaux,
07:05accessibles aux mimeurs, etc.
07:06Et elles doivent atténuer ces risques, faire des études en amont.
07:10Donc, elles doivent avoir une modération proactive.
07:13Ce qu'aujourd'hui n'est pas vraiment fait par Shein et ses grandes plateformes.
07:17Alors, vous venez d'évoquer les produits légaux.
07:19On ne peut pas les interdire ?
07:21C'est difficile en France et en UE de les interdire
07:24parce qu'on a un commerce transfrontalier entre l'UE et la Chine qui est extrêmement important.
07:28On a un niveau de colis qui arrive en Europe de plusieurs milliers par seconde
07:33et l'Europe laisse passer beaucoup de petits colis
07:35parce qu'il y a une exonération de taxes douanières sur les colis,
07:39le montant des colis inférieur à 150 euros.
07:42La France, et l'UE d'ailleurs, n'a pas les moyens suffisants
07:45pour permettre les contrôles sur tous les colis
07:47et donc aucun moyen de contrôler ces flux.
07:50On a dans la PLF, donc le projet de loi de finances de 2026
07:54qui est actuellement en cours de discussion à l'Assemblée,
07:57il y a une volonté de taxer à 2 euros les petits colis
08:00mais pas exactement les articles contenus dans les petits colis.
08:03Ça serait une bonne solution, ça permettrait de financer ces fameux contrôles.
08:07Et on a des initiatives européennes qui seraient de créer un data hub européen,
08:10mais ça c'est Horizon 2028,
08:12et ça supprimerait l'exonération des 150 euros.
08:15Donc tout le monde serait taxé et ça réduirait l'entrée dans l'UE de ces fameux petits colis.
08:19Et pour terminer, où en est la loi sur la fast fashion ?
08:22Oui, la loi sur la fast fashion qui était discutée depuis 2024 en France,
08:26qui avait pour volonté de taxer l'ultra-fashion,
08:29a été retoquée par la Commission européenne,
08:31donc pour l'instant elle est bloquée en France.
08:34Une initiative beaucoup plus large européenne devrait voir le jour
08:37qui s'appelle l'étiquetage textile durable,
08:40qui a vocation aussi de traiter les histoires de greenwashing
08:43et de durabilité des produits pour éviter justement réduire le volume,
08:49la durée des produits, la vitesse de production et réguler en la matière.
08:53On va suivre tout ça de près.
08:55Merci Sacha Betta, je rappelle que vous êtes avocate chez Bird & Bird.
09:00Tout de suite, on va parler d'une décision majeure en matière de droit social
09:04avec l'action de groupe en matière de discrimination.
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