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  • il y a 2 jours
Ce jeudi 13 novembre, Michel Fayad, professeur de géopolitique à l'Institut du pétrole et des énergies nouvelles, était l'invité de Caroline Loyer dans Le monde qui bouge - L'Interview, de l'émission Good Morning Business, présentée par Laure Closier. Ils sont revenus sur la stabilité de l'Irak après plusieurs décennies de guerres et de repressions. Retrouvez l'émission du lundi au vendredi et réécoutez la en podcast.

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Transcription
00:00Retour sur les élections en Irak. La liste du Premier ministre remporte une large victoire.
00:04Il brigait un second mandat. Notre invité, c'est Michel Fayad.
00:06Bonjour. Vous êtes professeur de géopolitique à l'Institut français du pétrole et des énergies nouvelles.
00:12L'Irak a connu une stabilité ces dernières années après plusieurs décennies de guerres et de répression
00:17avec l'époque Saddam Hussein. Avant de parler des élections, est-ce qu'aujourd'hui vraiment en Irak
00:21on est dans une situation démocratique ou est-ce qu'il y a une certaine fragilité derrière ces élections à regarder ?
00:28Il reste encore une fragilité parce qu'il y a de l'argent qui circule dans le pays
00:33parce que les Iraniens veulent toujours influer donc ils payent les proxys qu'ils ont
00:38c'est-à-dire les H&S et leur relais politique.
00:41Et puis il y a également les États-Unis qui essayent de faire une certaine pression
00:45pour justement contrer l'influence iranienne.
00:48Donc il y a quand même des enjeux et des influences étrangères et même saoudiens
00:52qui essayent de jouer à nouveau un rôle à travers la minorité sunnite.
00:55Donc il y a quand même énormément d'influence qui pèse sur les élections
01:00mais en tout cas bien sûr c'est beaucoup plus démocratique que d'autres pays.
01:03C'est quand même une élection organisée officiellement avec des gens qui votent.
01:08Et qui a attiré l'engouement de beaucoup d'Irakiens.
01:10Alors vous dites l'engouement, on est quand même sur des taux, on est autour de 50% de participation.
01:15Même un peu plus, 55.
01:17Mais vous dites engouement.
01:17Oui parce que par rapport aux dernières élections, il n'y en avait que 41%.
01:21Et il y a eu en plus le boycott de Mokhtar el-Sadr qui est le leader chiite
01:28qui avait remporté les dernières élections.
01:30Donc malgré son absence, son boycott à ces élections, il y a un taux de participation encore plus élevé.
01:35Donc ça montre quand même un certain engouement de la part de la population.
01:39Et même côté kurde, la participation en fait augmente à plus de 60%.
01:45Donc il faut voir à mon avis tous les éléments.
01:49Annalisa Capellini.
01:50Le Premier ministre est soutenu par des parties, des factions chiites liées à l'Iran.
01:55Donc il y a encore effectivement, si ce n'est pas une mainmise, du moins une influence de l'Iran sur la région.
02:02Vous pensez que ça va se reproduire pour le deuxième mandat du Premier ministre ?
02:07En fait, il n'a pas totalement le choix parce qu'il fait partie de ce qu'on appelle le cadre de coordination chiite
02:12avec l'ancien Premier ministre Maliki et les Haché-Sharbi.
02:15Donc le proxy iranien dans le pays qui compte 150 000 combattants qui ont vaincu Daesh durant la dernière guerre.
02:22Et donc il est obligé de faire avec ses alliés à la fois politiques et ses gens qui sont présents militairement dans le pays,
02:30qui le souhaitent intégrer dans l'armée irakienne parce qu'aujourd'hui ils sont plus forts même que l'armée irakienne.
02:34Et pour lui donc, il est obligé de faire une espèce de grand écart entre un accord avec les Iraniens,
02:42parce qu'ils sont tellement influents dans son pays,
02:44et la pression américaine qui lui dit par exemple de ne plus acheter de gaz auprès de l'Iran,
02:49qui lui dit de faire attention à ne pas tomber sous sanctions américaines,
02:56sachant qu'il y a même certains partis irakiens pro-iraniens qui sont vraiment sous sanctions américaines pour le coup.
03:01Donc il est obligé de faire ce grand écart, et ce n'est pas toujours évident pour lui.
03:04Et le grand enjeu à mon avis de ce nouveau mandat qui se profile pour lui,
03:09c'est vraiment l'entente avec les Haché-Sharbi pour qu'ils intègrent l'armée irakienne.
03:16Et ce qu'il faut aussi à mon avis prendre en compte,
03:20c'est qu'il va y avoir maintenant pendant plusieurs mois des négociations pour former ce nouveau gouvernement.
03:26C'est encore pire qu'en France.
03:28Sachant que c'était des élections législatives où il fallait choisir entre plus de 7000 candidats.
03:35Alors là, c'est encore un autre level.
03:377000 candidats, c'était des listes, et ça marchait comment ?
03:40En fait, non seulement 7000 candidats, mais on a en plus barré la route de plus de 300 candidats
03:44qui étaient accusés d'être bahasistes, c'est-à-dire liés à l'ancien régime de Saddam Hussein.
03:49Et en fait, il y avait une nouvelle loi électorale qui était beaucoup plus localisée
03:53pour, en principe, combattre la corruption, empêcher justement l'achat de voix.
03:58Et le système irakien est assez particulier, il ressemble un peu au système libanais,
04:02c'est-à-dire qu'il y a une répartition confessionnelle et ethnique du Parlement.
04:08Vous avez 329 députés, dont 9 minoritaires, dont les chrétiens.
04:13Et donc, les 320 autres sont répartis à la hauteur de 65% de chiites, 15% de kurdes et 20% de sunnites.
04:24Et donc, il y a tout un schmilbik, disons, à se mettre en place,
04:30sachant que le président de l'Irak est généralement kurde.
04:34Le premier ministre est donc chiite, et c'est lui qui contrôle l'exécutif.
04:38Et le président du Parlement, lui, est sunnite.
04:41Et ce qu'il faut aussi voir, c'est que, donc, pour former cette coalition gouvernementale,
04:46il ne peut pas, Soudanie, qui a remporté les élections, enfin, en tout cas, qui est arrivé en tête,
04:50ne peut pas gouverner tout seul.
04:52Donc, il est obligé de faire des alliances avec les Kurdes, avec les sunnites, etc., pour gouverner.
04:56Et donc, chez les Kurdes, il va faire alliance avec Barzani,
05:01qui est le chef du Parti démocratique du Kurdistan,
05:03et qui a remporté largement les élections parmi les Kurdes.
05:07Et il va faire alliance également avec l'ancien président du Parlement,
05:13qui a remporté, lui, pour le coup, les élections côté sunni.
05:16Oui, ce n'est pas simple.
05:17Non.
05:17Parlez-nous de l'économie irakienne.
05:19Aujourd'hui, le pétrole, à quelle place ?
05:22Elle est totalement prédominante, j'imagine.
05:23Mais à quel niveau ?
05:25Aujourd'hui, l'Irak, c'est le deuxième pays exportateur de pétrole au sein de l'OPEP.
05:30Donc, on parle de 4 millions de barils à peu près produits par jour.
05:35L'ambition de Soudanie, c'est de monter à 6 millions de barils de brut produits chaque jour.
05:40Mais pour cela, il doit attirer les investissements.
05:42Et vous savez aussi qu'il est quand même de plus en plus compliqué
05:45pour les entreprises européennes et même américaines,
05:48du fait de la pression écologique, environnementale, d'investir dans le pétrole.
05:53Et ça, ça crée quand même beaucoup de soucis pour les Irakiens,
05:56puisque justement, on parlait avant du fait que Soudanie doit prendre en compte
06:00les intérêts iraniens, les intérêts américains.
06:02Mais du coup, pour le pétrole, il est obligé de prendre également en compte les intérêts chinois.
06:06Ah oui, les intérêts chinois.
06:07Puisque les Occidentaux, comme je vous le dis, sont bloqués par les aspects environnementaux.
06:11Donc, ils investissent de moins en moins dans le pétrole.
06:13Et donc, ils se tournent vers les Chinois qui, eux, n'ont pas de problème à investir dans le pétrole.
06:18Et donc, ils doivent vraiment jouer par rapport à toutes ces puissances,
06:21à la fois internationales et régionales.
06:23Merci beaucoup, Michel Fayad, d'être venu ce matin dans la matinale de l'économie.

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