00:00Good morning business, paroles de patron.
00:03Pierre-Olivier Brigade, bonjour.
00:05Vous êtes le directeur général de Manutan, vice-président du Métis.
00:08Notre objet aujourd'hui, c'est la réforme des retraites.
00:10On revient dessus.
00:11Marie-Élise Léon était avec nous il y a quelques instants de la CFDT.
00:15Elle disait oui, ça va coûter 3 milliards d'euros potentiellement à partir de l'année prochaine.
00:19Mais ça vaut le coup parce que l'instabilité politique pourrait coûter 15 milliards.
00:23Donc allons-y, finalement, ce n'est pas grand-chose.
00:25Qu'est-ce que vous répondez ?
00:26D'abord, c'est vrai que l'instabilité politique est mauvaise.
00:28Parce que nous, chef d'entreprise, on aime bien la stabilité.
00:31Donc si ça peut permettre de revenir à un débat et de stabiliser,
00:35en tout cas d'avoir un peu de perspective dans les semaines qui viennent,
00:38c'est probablement une option sans être expert du sujet.
00:41Mais a priori, c'est ce qui empêche nos politiques de trouver un compromis
00:44comme on le fait tous les jours dans nos entreprises.
00:45Donc même vous, vous dites allons-y, on en est là ce matin.
00:48Il n'y a plus personne pour défendre la réforme des retraites.
00:51Même chez Horizon, je n'ai trouvé personne.
00:53Moi, je ne suis pas un expert du sujet.
00:55Nous, ce qu'on peut dire en termes de bon sens, nous, on est dans plusieurs pays.
00:58Ce qu'on voit, c'est qu'en France, on travaille moins.
01:01Moins longtemps, on est moins à travailler.
01:03Donc, moi, je ne suis pas un expert.
01:05Mais à un moment donné, il faut trouver le sommet de l'équation.
01:08Il faut trouver l'équation.
01:09Alors, cette retraite, est-ce que c'est la bonne ?
01:11Est-ce qu'il faut travailler ?
01:12Est-ce que 64, 67 ?
01:13C'est très difficile à dire.
01:14On n'est pas expert.
01:15Ce qui est sûr, c'est qu'aujourd'hui...
01:16Mais vous dites débloquer, en fait.
01:17Nous, vous savez, on passe notre vie dans les entreprises à se mettre d'accord.
01:22L'essence du chef d'entreprise, c'est de trouver des accords avec ses clients, ses fournisseurs.
01:26Je dirais presque, en tant que parents, on explique à nos enfants qu'à un moment donné, il faut se mettre d'accord.
01:30Il faut que les représentants de la nation fassent un peu ce que tout le monde doit faire, c'est-à-dire trouver un accord.
01:35Alors, si aujourd'hui, c'est le point numéro un et qu'il faut remettre le débat à une présidentielle,
01:40la guerre, pourquoi pas ?
01:41De toute façon, ce qui est sûr, c'est qu'on ne peut pas rester dans cette situation.
01:43Un Premier ministre de gauche, potentiellement, ça vous fait peur ?
01:46On a enterré le macronisme, ce matin, nous, sur cette antenne.
01:50Nous, ce qui nous fait peur, c'est le retour des vieilles lunes qui n'ont pas fonctionné.
01:53Je crois que tout le monde oublie quand même quelque chose, c'est que le chômage a baissé.
01:56Moi, je suis une génération où on ne voulait pas des jeunes sur le marché du travail,
02:00où Mitterrand avait dit « le chômage, on a tout essayé ».
02:03En 2012, il y a 40 ans, un président de la République avait dit « je me représente si la courbe du chômage baisse ».
02:09Donc, c'était le sujet.
02:11Et on a quand même eu une politique de l'offre qui a fait baisser le chômage.
02:14Ça, tout le monde l'oublie, ce n'est plus une préoccupation, alors que c'était la préoccupation des Français.
02:18Donc, si c'est pour revenir à tout ce qu'on a fait avant, qui a fait monter le chômage,
02:23qui a fait monter l'exclusion, alors de gauche, de droite, je ne sais pas.
02:26En tout cas, ça, ça n'a pas marché.
02:27Et la politique de l'offre qui a été mise en place, en fait, depuis 2016, en réalité, avec le CICE,
02:32fonctionne.
02:33Ça marche, mais ça coûte cher.
02:35C'est-à-dire que vous avez l'apprentissage, quand même, qui est là-dedans, dans les 2 millions d'emplois créés,
02:39a une bonne part.
02:41Et puis, vous avez quand même une dette qui n'a pas été très fortement résorbée.
02:45On ne peut pas dire le contraire.
02:46Alors, nous, on a une position différente au métier, parce que ce n'est pas la politique de l'offre qui a moins rapporté.
02:51Parce qu'en réalité, aujourd'hui, quand on voit ce que l'État a engagé sur l'impôt sur les sociétés,
02:56ça a augmenté.
02:57C'est la dépense qui a explosé et qui n'a rien à voir, mais alors rien à voir avec la politique de l'offre.
03:01Le Covid, ça n'a rien à voir avec la politique de l'offre.
03:03L'indexation des retraites sur l'inflation, ça n'a rien à voir avec la politique de l'offre.
03:06Donc, il y a une espèce de raccourci extrêmement simple qui est fait, qui est de dire, on a mis une politique de l'offre,
03:11on est en déficit, mais c'est les dépenses qui ont explosé.
03:14Et la politique de l'offre a rapporté de l'argent à l'État.
03:17Parce qu'on a reconstruit des usines, on a développé de l'emploi, mais il y a un raccourci maintenant qui est fait,
03:21qui, à mon avis, est un raccourci qui est simple et facile.
03:25Mais vous savez, c'est comme une entreprise, on a des revenus, on a des dépenses.
03:28Donc, même si les revenus augmentent, mais que les dépenses augmentent plus,
03:31donc on va dire, en fait, on arrête de bien servir ses clients parce que ça n'apporte pas d'argent.
03:35Maintenant, on continue à bien servir ses clients.
03:36Par contre, on réduit les dépenses à des endroits où on peut les réduire.
03:39À quel point, vous, dans votre boîte, ça vous freine aujourd'hui l'instabilité politique ?
03:43D'abord, moi, je suis directeur général d'une ETI.
03:46Donc, une ETI, c'est quand même des entreprises de long terme.
03:48Donc, c'est vrai que si, à chaque soubresaut de nos politiques ou du monde en général,
03:52on changeait nos directions, on irait nulle part.
03:55Après, ce qui est sûr, c'est qu'on voit que l'investissement des ETI,
03:59s'il se poursuit, diminue en France.
04:01Ça crée de la stabilité.
04:03Toutes les entreprises qui sont liées à la commande publique, aujourd'hui, ça crée de l'instabilité.
04:07Et les chefs d'entreprise n'aiment pas la stabilité.
04:08Et je crois que ce qui provoque un peu de colère, en réalité,
04:11c'est qu'on est déjà dans un monde ultra instable,
04:14avec les droits de douane, tout ce qui se passe,
04:16et qu'on voit la France rajouter de l'instabilité à la stabilité.
04:19Et ça, je pense qu'aujourd'hui, c'est incompréhensible.
04:22Mais vous le voyez sur votre carnet de commande ?
04:24Oui, bien sûr, on le voit sur le carnet de commande,
04:26on le voit sur, aujourd'hui, les projets d'investissement qui sont déplacés.
04:29On a eu de la commande publique complètement perturbée
04:31avec le fait que le budget a été voté l'an dernier.
04:34Bien sûr, on le voit.
04:34Alors après, aujourd'hui, on n'est pas quand même dans une crise comme 2008,
04:39où on a eu un effondrement du financement, etc.
04:41Mais on est dans une espèce de faux plat.
04:44Et ce qu'il faut bien comprendre, c'est que la croissance de demain se crée aujourd'hui.
04:48Donc, tout le monde pense que c'est là, en ce moment,
04:51que la stabilité a le plus gros impact.
04:54Mais la stabilité aura un impact dans un an, dans deux ans.
04:56Parce que la croissance de dans un an, deux ans,
04:59ce sont les investissements d'aujourd'hui.
05:00Donc, aujourd'hui, on bénéficie encore des investissements,
05:03notamment qui ont été faits par la politique de l'offre.
05:05Donc, on est encore sur cette courbe-là.
05:07Mais dans un ou deux ans,
05:08on n'aura pas les investissements qu'il faut faire aujourd'hui.
05:10Merci beaucoup, Pierre-Olivier Vryal,
05:12d'être venu ce matin dans la matinale de l'économie.
05:13Et dans un ou deux ans,