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Mardi 24 juin 2025, retrouvez Marie Ekeland (Co-fondatrice et CEO, 2050) dans BOSSA NOVA, une émission présentée par Olivia Vignaud, Caroline de Senneville etCéline Toni.

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00:00Bonjour, je suis Marie-Ecklande et j'ai grandi à mi-chemin entre la France et le Canada,
00:26à Vancouver plus particulièrement. Et depuis que je suis petite, moi je suis très curieuse,
00:31donc j'ai besoin de comprendre les choses qui m'environnent. Et j'aime bien la structure,
00:35donc j'ai besoin de créer des petits modèles. Donc c'est pour ça que j'ai fait beaucoup de mathématiques,
00:39j'ai fait beaucoup d'informatique, ça a été mes études derrière, parce qu'une fois qu'on a compris
00:43un problème, on a envie de pouvoir créer, faire des choses, agir et trouver des solutions aux problèmes
00:48qu'on a rencontrés. Et en fait, ça m'a conduit à devenir informaticienne, à commencer ma carrière
00:54en tant qu'informaticienne à New York, chez J.P. Morgan. C'était la fin des années 90, je suis née en 1975,
01:02donc c'était pile au début de ma vingtaine, mais c'était surtout le démarrage de cette grande vague
01:07de transformation de l'économie. Et donc j'ai participé d'abord en tant qu'actrice, et puis je n'ai pas trouvé
01:11beaucoup de sens en fait à faire ça. Donc je suis revenue en France, j'ai fait des études d'économie,
01:16et puis je suis rentrée dans le monde du capital risque, vraiment au tout démarrage de la French Tech
01:20de ce monde du capital risque en l'an 2000. Et puis depuis l'an 2000, je m'épanouis dans ce secteur
01:25où j'essaie vraiment de comprendre c'est quoi un bon investisseur, comment est-ce qu'on peut
01:29accompagner les entrepreneurs de la meilleure manière possible pour qu'eux puissent régler
01:33les problèmes qu'ils essayent de régler avec leur entreprise. Et puis au fur et à mesure,
01:39finalement, j'ai essayé de m'attaquer aux plus gros problèmes. Et aujourd'hui, je suis fondatrice
01:44d'un fonds qui s'appelle 2050 et qui essaye de façonner un futur fertile, c'est-à-dire un futur dans lequel
01:49on va tous pouvoir manger de manière saine, on va pouvoir habiter la terre et produire
01:54de manière durable, qu'on va pouvoir faire évoluer les modèles éducatifs pour que tout
01:58le monde puisse y contribuer, qu'on va pouvoir prendre soin de sa santé au quotidien, et puis
02:03remettre la confiance au cœur des économies avec un système assurantiel qui nous couvre
02:08sur les nouveaux risques, un système bancaire qui permet de financer la transformation sur
02:12le long terme, et puis un système médiatique et d'intelligence artificielle qui permet que
02:16les démocraties fonctionnent. Donc, voilà, c'est moi.
02:24Je ne pensais pas du tout devenir entrepreneur un jour. Ce n'était pas dans mon imaginaire.
02:33Quand j'étais petite, quand j'étais jeune, ce n'est pas quelque chose que j'avais nativement
02:38en moi, mais j'avais ce côté devoir résoudre des problèmes. Et donc, je pense que ma première,
02:44mon premier pas, en fait, vers l'entrepreneuriat, ça a été quand j'ai monté France Digitale,
02:49qui était une association en 2012, qui est une association qui unissait entrepreneurs
02:53et investisseurs du numérique pour résoudre les problèmes systémiques. Ça veut dire
02:58quoi ? Ça veut dire que moi, comme en fait, quand j'ai creusé au début de ma terrière
03:03vraiment comment est-ce que je pouvais être le plus utile possible pour les entrepreneurs,
03:06et ce que je sais faire, donc, c'est modéliser des problèmes et puis instancier des solutions
03:13et puis ne pas avoir peur d'itérer sur ces solutions pour les améliorer et puis parce
03:17qu'on n'a jamais bon du premier coup. Et en fait, c'est ce que j'ai amené comme compétence
03:21aux entrepreneurs et aux conseils d'administration auxquels je siégeais. Et en fait, ce que j'ai
03:25compris assez vite, c'est qu'il y a beaucoup de problèmes que les entreprises que j'accompagnais
03:29rencontraient qui ne pouvaient pas être réglés au niveau de l'entreprise elle-même.
03:32Comme, par exemple, le manque de talents digitaux en Europe. Même quand j'étais
03:38au bord de Criteo, qui était le grand succès de la French Tech à l'époque, Criteo
03:42tout seul ne pouvait pas régler ce problème-là. Ou le manque de capitaux de croissance, donc
03:47pour accompagner des entreprises dans leurs dernières étapes de croissance. Pareil, c'est
03:52pas Criteo tout seul ou les problèmes de réglementation sur le digital single market, faire un marché
03:57européen unifié, etc. Criteo tout seul n'y arrivait pas. Et j'avais la même chose à
04:00tous les conseils d'administration auxquels je participais. Et c'est pour ça que je
04:04me suis dit, en fait, on doit agir au niveau écosystème, si on veut s'attaquer à ces
04:08problèmes-là qui empêchent toutes les entreprises du secteur d'avancer et de croître et d'apporter
04:14et de résoudre les problèmes auxquels elles s'attaquent. Et donc, à ce moment-là, j'ai
04:19co-fondé France Digital, que j'ai co-présidé pendant trois ans, pour justement, avec cet objectif-là,
04:25c'est-à-dire, d'abord, il faut qu'on partage des bonnes pratiques entre nous pour faire
04:28écosystème, collaborer et puis avoir plus de puissance de frappe, mais aussi pour pouvoir
04:35parler au gouvernement français d'une seule voix ou à la Commission européenne d'une seule
04:40voix et dire, ça, c'est un énorme problème qu'on doit régler ensemble, etc. Et c'est
04:45en faisant France Digital que, finalement, je suis sortie du monde de la tech, quelque part,
04:51enfin, de ma bulle start-up, on va dire. Et puis, j'ai rencontré des patrons de grands
04:55groupes, d'entreprises familiales, des PME de province. Et puis, j'ai conseillé le
05:01gouvernement au sein du Conseil national du numérique sur des problématiques de santé,
05:06sur la stratégie sur l'éducation. Donc, ça m'a ouvert complètement les chakras. Et
05:11c'est à ce moment-là que j'ai vu qu'il y avait des beaucoup plus gros problèmes que
05:14ceux auxquels les start-up du numérique s'attaquaient, qui étaient laissées libres,
05:18et que la manière dont la finance ou dont le capital-risque les adressait était, à
05:24mon sens, pas satisfaisante. Et c'est pour ça, finalement, que je suis devenue, moi,
05:28une entrepreneuse de la finance, en voulant proposer des nouveaux types de produits financiers
05:32qui accompagnaient beaucoup mieux la transformation durable de la société et de l'économie que
05:38ce que je pense que le capital-risque modèle historique fait.
05:42Donc, 2050, c'est une société, c'est une entreprise, mais qui a plusieurs particularités.
05:56Donc, la première, c'est qu'elle gère un fonds, qui est un fonds d'investissement,
05:59qui accompagne des entreprises qui vont accompagner la transformation durable de leur filière
06:04sur le long terme. Donc, ça, c'est la première brique. On gère un fonds d'investissement.
06:11Ce fonds d'investissement a une particularité importante, c'est qu'il est ouvert, c'est-à-dire
06:16que le modèle historique du capital-risque, ce sont des fonds fermés à 10 ans. Ça veut
06:20dire qu'on accompagne les entreprises sur une durée de 7 à 8 ans. Et puis après,
06:25comme le fonds se termine, on doit rendre l'argent aux investisseurs et donc, quelque
06:28part, on force la sortie des investisseurs. Et moi, je pense que quand on finance des
06:33entreprises qui créent des nouveaux types de matériaux, quand on finance des entreprises
06:38qui vont faire de l'économie circulaire ou n'importe quel type d'entreprise, ce ne sont
06:42pas forcément des cycles à 7-8 ans qu'il faut pouvoir impenser. Ce n'est pas le modèle
06:48d'hypercroissance à tout prix. On va dire qu'il y a un modèle très importé de la Silicon
06:53Valley qui est le plus adapté si on veut tirer le plein potentiel du développement de
06:58ces entreprises-là sur le temps parce qu'on a besoin de leur donner ce temps-là. Donc,
07:02par exemple, on est investisseur d'une entreprise qui s'appelle Pebble en Suède. Et ce qu'elle
07:07fait, c'est qu'elle prend des roches minérales qui sont l'olivine ou le basalte, qui ont une
07:13propriété naturelle qui est qu'au contact de l'air, elles arrivent à stocker du CO2.
07:18Et en fait, sous condition de pression et de chaleur, en mettant ces roches-là sous forme
07:24de poussière, on augmente la surface de contact avec l'air libre. Et en mettant d'autres types
07:29d'intrants, ce qu'on arrive à avoir en sortie de chaîne, c'est un matériau qui remplace
07:33la pierre-ponce dans la fabrication du ciment. Donc, en bout de chaîne, on a un ciment qui
07:37stocke du CO2 qui a été émis et qu'on a récupéré dans l'air, plutôt que d'en émettre
07:42lors du processus de fabrication. Et donc, cette société-là, elle est clairement, on a
07:48investi en 2022, elle a déjà trois ans, on a un niveau d'industrialisation où on sait
07:53produire à peu près trois tonnes par jour de matériaux, enfin de matériaux pour construire
07:59ce ciment-là. Mais on voit bien que si on veut arriver à… ils ne font toujours pas
08:04de chiffre d'affaires parce qu'ils en font un petit peu, mais pas du tout au niveau
08:07auquel on devrait être pour être rentable. Et donc, il faut laisser le temps, financer
08:11la première usine, voire la deuxième. Donc, pour ce type d'entreprise-là, on a besoin
08:16de plus de temps et c'est clair qu'on a besoin de changer le produit financier. Voilà.
08:20Donc, la première chose de 2050, c'est qu'on gère ce fonds qui va investir dans des
08:24entreprises qui sont pour nous les champions de demain. Donc, tout au long de la chaîne
08:29de valeur, de leur chaîne de valeur. Donc, pas uniquement des nouveaux types de matériaux,
08:33mais des nouveaux types d'infrastructures, du logiciel, de solutions logicielles d'optimisation,
08:38d'intelligence artificielle ou bien de l'économie circulaire. Donc, vraiment, cette idée
08:43de pouvoir avoir une bascule sur l'ensemble d'une chaîne de valeur parce que ça, c'est une
08:49grande différence entre le numérique et le durable. C'est qu'on a besoin que nos fournisseurs
08:54changent. On a besoin que les clients adaptent leur mode de consommation. Et donc, il faut
08:58vraiment penser le financement de la transformation sur une logique de chaîne de valeur. Donc, ça,
09:05c'est le premier changement. Le deuxième changement de 2050, c'est que de la même manière
09:12que les entreprises de la tech rencontraient des nœuds systémiques, ces fameux problèmes
09:19réglementaires ou de partage de bonnes pratiques qui sont nécessaires ou faire avancer la recherche.
09:24C'est la même chose sur toutes les filières, sur le durable. On ne sait pas aujourd'hui comment
09:29construire une entreprise qui soit net carbone. Donc, on ne sait pas mesurer son empreinte environnementale
09:36d'une manière efficiente. On ne sait pas mesurer son risque social. Donc, il y a beaucoup de choses qu'on ne sait pas
09:41encore faire. Et donc, pour ça, on a besoin de financer de la recherche, de créer des nouvelles
09:45bonnes pratiques, de comprendre c'est quoi les nouvelles solutions, donc à partir de ce que la
09:50science nous dit, de changer les réglementations. Et donc, pour intégrer cette action en parallèle
09:55avec le financement des entreprises, pour faire accompagner les solutions du changement du contexte
10:02dans lequel elles évoluent pour qu'il soit beaucoup plus favorable, on dédie 10% de l'argent de nos
10:08investisseurs et la moitié de notre commission de performance à nous. Donc, en gros, on finance
10:13de manière dédiée, en fait, et volontaire. C'est structuré dans le modèle ce qu'on appelle
10:20des actifs pour l'écosystème, donc des communs, qui sont de la recherche, du savoir partagé,
10:25des plateformes ouvertes, de données ou des outils partagés ou bien du plaidoyer.
10:30C'est une très bonne question, puisque souvent je me dis, en fait, on est plutôt un mélange
10:39entre un fonds d'infrastructure et un fonds de capital risque. Donc, fondamentalement,
10:43on finance de l'innovation. Voilà. Donc après, ce n'est pas effectivement le capital risque
10:49de manière, dans sa définition, je dirais, implicite. C'est beaucoup financé de la technologie,
10:59enfin de la digitale, enfin numérique. Et nous, on est sur des types d'innovations
11:04qui sont beaucoup plus larges que ça. Et dans le modèle, rien que le fait de se donner
11:09du temps et d'être sur un fonds ouvert où on a créé une couche de liquidité pour
11:14que nos investisseurs puissent être patients, parce qu'il faut donner de la liberté aux
11:19entrepreneurs pour aller au bout de leurs ambitions. Mais il faut aussi pouvoir faire
11:22en sorte que les investisseurs aient un retour sur investissement qui soit satisfaisant
11:30pour eux et qui ne soit pas uniquement la satisfaction du devoir accompli, on va dire.
11:35Donc, il soit vraiment un vrai retour sur investissement financier. Nous, on est convaincus
11:39qu'on finance les champions de demain, mais on ne peut pas demander aux gens d'attendre
11:4320 ans. Ce n'est pas du tout ça. Donc, on a vraiment pensé un produit où, au bout
11:48de 6 ans, on a un retour annuel, de manière à ce que l'argent travaille, en fait. Et
11:53donc, on ne se pose pas la question. On peut attendre parce qu'on a un retour sur
11:57investissement régulier. Mais donc, je suis d'accord, on n'a pas encore trouvé la vraie
12:03qualification. Et le monde de la finance, c'est un monde de classe d'actifs. Donc, le capital
12:09risque est un actif, c'est celui dont on se rapproche le plus. Est-ce qu'à terme, ce sera
12:14une nouvelle catégorie ? Je ne sais pas.
12:20C'est 2050 ! C'est très clairement ça parce que c'est en fait ce qui est à la fois passionnant
12:29et je dirais le plus complexe, c'est que la manière dont la finance fonctionne, c'est
12:39vraiment en regardant le rétroviseur. C'est-à-dire qu'elle fonctionne comme de l'intelligence
12:45artificielle. On regarde ce qui a marché dans le passé, marché étant gagné beaucoup
12:49d'argent. Et on prend des décisions aujourd'hui à partir de ces apprentissages-là. Et donc,
12:55ça veut dire deux choses. Ça veut dire qu'un, on reproduit les modèles passés. Et donc,
13:00s'ils ont créé des problèmes, on va reproduire les problèmes. Mais deuxièmement, on reproduit
13:05les modèles qui ont fait gagner le plus d'argent. Donc souvent, on est dans une logique d'accélération
13:10parce que ce qui a permis de dégager le plus de marge financière, il y a pas mal de cas
13:14de figure dans lesquels c'est au détriment des ressources naturelles ou ça a un impact
13:20social qui n'est pas forcément positif, etc. Et donc, on ne peut pas, si on veut s'attaquer
13:25à la résolution des problèmes que ce système a créés, continuer à prendre les décisions
13:30de la même manière. Voilà. Donc du coup, nous, ce qu'on fait, c'est pour ça qu'on
13:34s'appelle 2050, c'est qu'on regarde le futur. On se dit, bon ben, c'est quoi la société
13:38dans laquelle on veut vivre ? Parce qu'il y a une autre chose que moi, j'ai non seulement
13:44apprise, mais vraiment que je ressens profondément pour avoir manipulé et travaillé l'argent
13:51depuis 25 ans maintenant, c'est la puissance de l'argent. En fait, l'argent, c'est de
13:56l'énergie. C'est-à-dire que si on veut, si on met beaucoup d'argent pour aller par
14:01là, il y a beaucoup plus de chances que la société allait par là que si on met beaucoup
14:04d'argent pour aller par là-bas. C'est beaucoup plus autoréalisateur qu'on ne croit. C'est
14:08pas du tout un pari où on met de l'argent dans une machine à sous à Las Vegas et où la
14:14chance va nous dire si on a gagné ou pas. En fait, on façade le futur. Et donc, la question
14:18après, c'est à quoi on veut contribuer. Donc nous, 2050, on est parti de ça. On est
14:22parti de c'est quoi notre compas ? D'où ce que j'ai dit au début. En fait, nous, on
14:27veut contribuer à ces cinq essentiels qui sont que tout le monde puisse manger sainement,
14:32qu'on puisse vivre et produire de manière durable. Les cinq objectifs dont j'ai parlé
14:37tout à l'heure. Et puis, ce qu'on fait du coup, parce que comment on prend des décisions
14:41du coup, si on ne peut pas regarder le passé ou en tout cas, eh bien on regarde le présent.
14:45C'est-à-dire qu'on s'appuie, nous, sur la science. Et donc, on a beaucoup de partenariats
14:49scientifiques grâce à cette logique de construction des actifs écosystémiques, où on comprend
14:54c'est quoi aujourd'hui les causes du réchauffement climatique, quelles sont les conséquences
14:58sur les filières, c'est-à-dire les limites planétaires. En fait, ça veut dire qu'il
15:03va y avoir un accès raréfié aux ressources naturelles comme l'eau, mais aussi comme ce
15:07qu'on voit sur la filière cacao aujourd'hui ou sur les métaux rares. Donc, il y a beaucoup
15:12de... Donc, on comprend, en fait, les limites planétaires dans lesquelles on vit et puis
15:20dans lesquelles on travaille. Et puis, on les intègre dans notre réflexion. On essaye
15:25de trouver les solutions qui permettent de régler les problèmes qui existent, en fait.
15:32Et voilà. Et ça, c'est grâce à la science. Mais vraiment, c'est là où je me sens le plus
15:35d'utile. C'est-à-dire que pour le coup, c'est vraiment ce que j'ai fait dans toute
15:41ma carrière qui, je pense, peut avoir l'effet... qui peut résoudre le plus de problèmes.
15:51C'est très certainement de monter 2050 et de ne pas rogner sur son ambition de vraiment
15:59apporter un changement systémique ou un changement... de proposer une alternative complète,
16:03on va dire. Voilà. Mais c'est le résultat de décisions que j'ai prises dans ma carrière
16:11qui m'ont toujours... comment dire... fait aller vers un alignement personnel de plus en
16:18plus précis ou de plus en plus intense, quoi. C'est-à-dire que toutes les décisions
16:24que j'ai prises, comme fonder France Digital, quitter le fonds dans lequel j'étais à l'époque
16:30pour monter une première tentative de... enfin, donc toutes ces décisions-là, ça, à chaque
16:35fois, ça a été une décision de me rapprocher vers ce qui constitue mon propre alignement
16:41personnel. Et effectivement, c'est... on va dire que c'est la plus significative.
16:47Donc, il y a un premier angle qui est... je pense que les produits financiers ne sont
16:55pas adaptés. Et je vais élaborer, c'est-à-dire que la finance oblique, c'est une industrie
17:01en tant que telle. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu'on a des produits qui sont adaptés
17:06à des besoins. Aujourd'hui, le besoin des entreprises, c'est d'être robuste, c'est-à-dire
17:11de pouvoir avoir une chaîne de valeur ou une supply chain, enfin, qui soit prévisible.
17:27C'est de pouvoir penser sa croissance dans le temps à l'intérieur des limites planétaires,
17:33dans un monde géopolitique où ça change un peu tous les jours. Donc, de se penser en robustesse
17:38et en résilience. Et aujourd'hui, le modèle de financement est un modèle qui est adapté
17:45à la transformation digitale et non pas à la transformation durable. Donc, moi, je pense
17:50qu'il faut penser des nouveaux types de produits pour leur permettre de se transformer de cette
17:56manière-là. Et pour arriver à faire ça, il faut qu'on puisse valoriser pas uniquement
18:01la performance financière dans la performance des entreprises, mais aussi la performance environnementale
18:06et sociale. C'est-à-dire accepter le fait qu'une entreprise, en fait, elle a un impact
18:12social et environnemental, qu'il soit positif ou négatif, et que c'est important de pouvoir
18:19la quantifier pour pouvoir être en décision quand on fait un investissement, qu'il soit
18:25une décision complète, en fait, dans une visualisation complète qui permet aussi de gérer les risques
18:31sur le long terme, puisque la finance est un risque rendement et pas uniquement du rendement.
18:35Et donc, cette logique de pouvoir bien mesurer les risques environnementaux et les risques
18:39sociaux et la performance environnementale et sociale, en plus des risques financiers et
18:45la performance financière, pour moi, est essentielle si on veut arriver à avoir et créer ces nouveaux
18:50types de produits financiers. Donc, pour moi, ça, c'est la première des choses. C'est créer
18:54les produits financiers qui permettent de faire ça. Et je rajouterai une dernière chose pour vous
18:58donner un exemple précis. En fait, dans tous les sujets de réchauffement climatique, il y a un acteur
19:04qui joue un rôle majeur dans ça, c'est les océans. Donc, les océans captent à peu près 30% du CO2
19:09tous les ans. Ils font vivre 3 milliards de personnes sur la planète. Voilà. C'est la source de protéines,
19:17en fait, les poissons, etc. Et c'est particulièrement les pays du Sud. Et puis, c'est 50% de l'oxygène
19:29qui est produit. Enfin, c'est une économie. 80% des biens qui circulent sur la planète,
19:37c'est aussi sur l'océan. Donc, c'est une économie où on a besoin que les océans soient en bonne santé
19:43pour qu'on puisse continuer à survivre sur cette planète. Et en particulier, les 3 milliards de
19:49personnes qui en dépendent pour se nourrir. Et en fait, aujourd'hui, les types de produits financiers
19:54qu'on a, comme on a des crédits carbone, mais on n'a pas de crédit biodiversité, bien souvent,
20:00on n'a pas le niveau de rentabilité sur des produits historiques qui permettent de financer
20:05cette transformation-là. Et donc, dans l'univers de l'économie bleue, aujourd'hui, on a ce qu'on appelle
20:11de la blended finance. C'est des nouveaux types de produits qui mélangent à la fois de la dette,
20:15de l'action ou de la philanthropie. Et ou alors des modèles assurantiels. Donc, en fait, on est un modèle
20:21où on mélange plusieurs choses à la fois pour s'adapter, en fait, aux contraintes de l'écosystème
20:27dans lequel on navigue. Et la deuxième chose que je dirais sur ce qui manque sur le financement,
20:32c'est que, et je vais reparler de Pebble, du coup, c'est que quand nous, on a financé Pebble
20:38au tout début, il fallait d'abord démontrer que la technologie marchait et qu'on était en capacité
20:43d'atteindre un niveau d'industrialisation qui permettait d'envisager la production d'une première usine,
20:49en fait, la construction d'une première usine. On a atteint ce stade-là. Et puis, l'année dernière,
20:53on a été chercher 25 millions d'euros de capital en plus pour pouvoir financer l'étape d'industrialisation
21:00d'après, qui est celle qui est nécessaire pour démontrer aux banques qu'on a la capacité
21:04de monter une usine et d'avoir une volumétrie en centaines de milliers de tonnes. Voilà.
21:09Et pour faire ça, en fait, de toute manière, comme c'est une nouvelle technologie, il n'y a pas un banquier
21:14qui va financer avec de la dette parce que c'est toujours pareil. En finance, on a besoin des données
21:20passées. Et puis, si on ne les a pas, comment on fait ? Et donc, ce qu'on a fait, c'est ce qu'on sait,
21:25c'est que dans ces cas-là, ce que les banquiers demandent, c'est d'avoir des clients qui préachètent
21:29la production. Et ces clients-là, en fait, ce qu'on a fait, c'est qu'on les a intégrés
21:36dans la levée de fonds. Et donc, quand on a été chercher les 25 millions d'euros,
21:40délibérément, il y a une dizaine de millions d'euros qui ont été réservés à l'aval de la chaîne
21:48de valeur. Et donc, il y a Holcim, qui est le principal acteur du ciment européen qui investit
21:55dans Pebble et aussi Amazon Climate Pledge, qui a investi. Et les deux se sont en parallèle
22:01commités à... Enfin, on émis un intérêt. Donc, on avait déjà pré-négocié les termes
22:10pour qu'ils préachètent la production. Et là, on va équiper des data serveurs d'Amazon
22:17pour tous les nouveaux data serveurs d'IA. Donc, en fait, l'idée, c'est ça. C'est
22:22que Amazon préachète le matériau Pebble qui devient du ciment grâce à Holcim. Et ça
22:27nous permet d'aller chercher les banquiers. Donc, pourquoi c'est important pour l'idée
22:32de qu'est-ce qui doit changer en finance ? C'est que je pense qu'il faut que la chaîne
22:36de valeur se réunisse aussi pour financer ses propres innovations et avoir intérêt
22:41à le faire et accélérer le mouvement.
22:46Je pense que le plus grand risque reste le réchauffement climatique parce que les climato-sceptiques,
22:52en fait, ils vont devoir faire face à la réalité des faits. C'est-à-dire qu'aujourd'hui,
22:57les prévisions des Nations Unies, c'est qu'il y a 40% des besoins d'eau industriels qui
23:06ne vont pas être satisfaits en 2030. 2030, c'est dans cinq ans. 40%, c'est beaucoup.
23:11On a vu, là, sur le cacao, il y a une volatilité où ça a pris 400% de son prix en quelques semaines, en fait.
23:20On a vu aussi que la crise de la sécheresse à Taïwan, en 2022, je crois, en fait, elle a eu
23:27un impact sur l'industrie automobile européenne dont elle se remet à peine.
23:31Donc, on a qu'on soit… En fait, ce à quoi on croit, finalement, est assez peu important
23:38puisque il va y avoir une réalité des faits à laquelle les entreprises vont devoir s'adapter.
23:43Et cette réalité, c'est qu'on a une rareté des ressources naturelles qui est en train,
23:51qui est en cours, en fait, qu'elle va entraîner une hausse des prix, qu'il y a déjà une volatilité
23:58des prix sur les ressources. Enfin, il y a beaucoup de ressources qui vont être considérées
24:01comme géostratégiques ou géopolitiques sur lesquelles il peut y avoir une augmentation des prix
24:05juste avec des hausses de tarifs. Et puis, il y a une incertitude liée à la production
24:11qui va naître de tous les aléas climatiques qui vont faire qu'aujourd'hui, n'importe quel PDG
24:18d'entreprise doit se poser la question de est-ce que le business plan que je suis en train de construire
24:22dans les cinq ans ? Il est résistant aux aléas climatiques ? Est-ce qu'il est robuste
24:29par rapport à mon... Est-ce que j'ai accès aux ressources dont je vais avoir besoin
24:33de manière assez sécurisée ? Est-ce qu'il n'y a pas un risque d'augmentation des prix là-dessus
24:37qui pourrait faire complètement diminuer mes marges ? Donc, je pense qu'on est dans une phase, en fait, de l'économie
24:45où c'est même pas un débat. En fait, la question, c'est comment on s'adapte au monde qui est là ?
24:57C'est gérer le tempo. C'est-à-dire que, en fait, quand on est entrepreneur, l'entreprise, elle a un pouls.
25:06Et ce pouls, il émet des tensions, des opportunités. Et il faut savoir les entendre et gérer le tempo.
25:14Donc, il y a des moments où il faut accélérer. Il y a des moments où il faut plutôt aller en profondeur.
25:17Il y a des tensions qui doivent être réglées maintenant. Il y en a d'autres.
25:20Et donc, c'est vraiment cette idée de gérer le tempo, mais en ayant toujours deux choses en tête.
25:25Un, pas dévié de son cap. Et deux, l'analyse des tensions actuelles. Et de pouvoir que l'étape d'après, en fait,
25:31le pas d'après, il doit être en résolution des tensions qu'on vit aujourd'hui, mais dans la direction du long terme.
25:38Donc, c'est toujours une alliance subtile entre ce qu'on appelle en anglais « backcasting » et « forecasting ».
25:44Voilà. Donc, c'est hyper important de jamais perdre le cap, en fait, et de toujours être en bonne connexion
25:52aux tensions qui empêchent l'entreprise d'aller aussi vite ou de grandir de la manière dont on aimerait qu'elle grandisse
25:59pour pouvoir prendre les bonnes décisions.
26:02OK.

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