00:007h44 sur BFM Business et sur RMC Live. Notre invitée ce matin c'est Delphine Manseau.
00:04Bonjour, vous êtes la présidente de la conférence des grandes écoles.
00:07Vous êtes directrice générale de Neoma Business School.
00:10Vous avez été élue en juin dernier. Vous êtes le premier profil non ingénieur à ce poste.
00:15Vous êtes donc aussi à la tête de Neoma Business School.
00:17Je viens de le dire, ça sert à quoi la conférence des grandes écoles ?
00:20C'est une sorte de lobby d'école. Vous défendez quoi ? C'est quoi votre but ?
00:24Notre but c'est de mieux faire rayonner les grandes écoles en France, à l'international,
00:29de partager nos bonnes pratiques entre nous, puisque les choses changent beaucoup auprès des jeunes aujourd'hui.
00:35La conférence des grandes écoles c'est 250 grandes écoles, 500 000 étudiants,
00:40une grande variété des écoles d'ingénieurs, des écoles de commerce, des écoles de la défense, du design.
00:48Et on essaie d'échanger, de travailler ensemble aussi avec les pouvoirs publics
00:51pour faire avancer les sujets liés à la jeunesse et à l'éducation qui sont si importants.
00:56Alors il y a plein de sujets. Le premier ce matin c'est la réindustrialisation.
00:59On voit que quand on demande aux ingénieurs s'ils croient en la réindustrialisation,
01:03la réponse est claire, 84% d'entre eux ont perdu confiance dans la reconquête industrielle du pays.
01:09Comment aujourd'hui on peut se projeter en tant qu'ingénieur demain si on ne croit pas à la réindustrialisation ?
01:13Je crois qu'il faut aussi expliquer que ça prend du temps.
01:16Finalement la désindustrialisation elle a duré pendant plusieurs décennies.
01:21Aujourd'hui c'est vrai qu'il faut je pense réenchanter un peu l'industrie.
01:24Il faut donner envie aux jeunes d'aller dans l'industrie, sortir un peu des clichés qui ont 50 ans
01:29sur ce qu'est une usine, comment ça marche.
01:32Montrer aussi que l'industrie ça fait rêver, ça change la vie des gens.
01:38Et quand je vois le nombre de séries qu'il y a sur le monde médical ou sur le monde des avocats,
01:42il n'y en a pas assez sur le monde des...
01:43Oui une série sur les ingénieurs et sur l'industrie c'est une très bonne idée.
01:48Mais il y a quand même cette question de l'emploi derrière.
01:50On a eu des chiffres de l'APEC, le taux d'emploi des jeunes ayant terminé leurs études en 2023 atteint 72%,
01:56c'est une baisse de 2 points.
01:57Ce qui est peut-être plus qu'étant encore c'est qu'un quart des diplômés issus de la promotion 2024
02:02considèrent leur job actuel comme un job alimentaire.
02:05On parle de gens qui ont fait des études, ce sont des chiffres qui sont un peu inquiétants.
02:09Oui je pense qu'il y a toujours un petit peu un blues du jeune diplômé
02:13qui s'est vu diriger une entreprise et qui réalise que quand on débute, il faut apprendre,
02:20il faut faire des jobs qui sont parfois un peu répétitifs,
02:25mais c'est comme ça qu'on apprend à raisonner,
02:27enfin tous les chefs d'entreprise qui nous regardent le savent.
02:30On est sur des jeunes générations qui ont fait beaucoup d'études,
02:33plus que leurs prédécesseurs et je pense qu'il faut vraiment expliquer qu'une carrière ça se construit dans la durée.
02:41Et dans le monde d'aujourd'hui on veut toujours aller très vite,
02:44mais le monde professionnel il prend aussi du temps.
02:47Là vous touchez du doigt une des problématiques qu'on a parfois avec la génération Z,
02:51avec les managers qui critiquent cette génération,
02:53qui ne veut pas justement passer les étapes et qui veut tout de suite être le chef de tout le monde
02:58quand il sort de l'école.
02:59Ce n'est pas un cliché, vous dites qu'il faut apprendre le long terme et réapprendre que ça va étape par étape.
03:06Oui, alors moi je suis beaucoup moins critique que beaucoup de gens sur la nouvelle génération.
03:09Je pense qu'ils sont très curieux, qu'ils sont très connectés,
03:13qu'ils appellent beaucoup, parfois on leur reproche d'avoir du mal à se concentrer,
03:17mais en même temps ils ont une vision internationale,
03:19ils connaissent plein de domaines, ils apportent autre chose.
03:22Ça aussi il faut que les entreprises le réalisent.
03:25Certes ils sont différents des générations précédentes,
03:27mais c'est le cas de chaque génération, elle est différente.
03:29Mais il faut aussi que les dirigeants d'entreprises intègrent ce qu'ils peuvent apporter,
03:34tout ce qui est reverse mentoring, toutes ces préoccupations.
03:38Et parfois cette impatience des jeunes, ça fait aussi évoluer les entreprises de l'intérieur
03:42et ça peut être très positif.
03:44Vous qui dirigez aussi une école de commerce, Néoma Business School,
03:47on a beaucoup raconté sur cette antenne qu'il y avait une sorte de désamour,
03:50qu'il y avait moins de gens dans les prépas aux grandes écoles de commerce.
03:54Est-ce que vous êtes toujours sur cette ligne-là ?
03:57Est-ce que l'école de commerce réenchante à nouveau ?
04:00Complètement, puisque le nombre d'étudiants en prépa avait diminué
04:03après la réforme du lycée, il est reparti.
04:06Donc aujourd'hui, les prépas attirent plus qu'il y a 3-4 ans,
04:11donc les chiffres montent.
04:12C'est vrai qu'on a beaucoup parlé de la baisse, on parle moins de la hausse.
04:15Ça monte, ça a augmenté de 5% depuis deux ans.
04:18Et donc la prépa réattire les jeunes.
04:22Je pense que c'est aussi l'idée, l'envie des jeunes
04:25de poursuivre un peu leurs études sur les matières fondamentales,
04:28la littérature, les maths.
04:30Ils se rendent compte que dans un monde qui change très vite,
04:32ces fondamentaux-là comptent énormément.
04:34Sur l'intelligence artificielle, c'est aujourd'hui le grand rendez-vous à Marseille.
04:38L'AIM, on retrouvera Anthony Morel à partir de 8h10
04:41depuis ce rendez-vous important en partenariat avec La Tribune.
04:45On avait ces chiffres sur les jeunes entre les 11 et les 15 ans.
04:49Ils sont 52% à utiliser l'intelligence artificielle pour travailler, pour réviser.
04:54Ils sont 63% entre 16 et 18 ans.
04:56Ça veut dire que quand ils arrivent chez vous après une prépa
04:59ou qu'ils rentrent dans le supérieur, ils l'utilisent quasiment tous.
05:03Comment vous voyez l'usage de l'IA ?
05:04Comment vous vous adaptez au quotidien ?
05:06Alors, ils l'utilisent tous.
05:08Nous, ce qu'on fait depuis le lancement de ChatGPT en version gratuite,
05:13on a formé plus de 8000 étudiants à l'IA,
05:17parce que c'est bien de l'utiliser,
05:18mais c'est aussi important de connaître ses limites, ses biais,
05:22tous les biais cognitifs.
05:23On forme aussi nos professeurs,
05:25parce que c'est très important que les professeurs soient au même niveau
05:27que les élèves dans la compréhension de l'IA et dans son utilisation.
05:30On a changé aussi nos modes d'évaluation,
05:33parce que le but, ce n'est quand même pas qu'on évalue des devoirs faits par l'IA.
05:39Donc, c'est le grand retour de l'oral.
05:40On fait beaucoup travailler nos étudiants
05:42et on les évalue de plus en plus à l'oral.
05:44C'est aussi le retour de l'examen.
05:46Parce qu'à l'oral, on voit vraiment qu'il y a quoi à l'intérieur ?
05:49Voilà, à l'oral, il n'y a aucun doute.
05:51On voit, même si l'étudiant a préparé avec l'IA,
05:54on voit ce qu'il a compris, ce qu'il maîtrise.
05:57Aussi le retour des examens papier-crayon
05:59ou plutôt ordinateur en bloquant les accès Internet.
06:02Donc, on change à la fois nos manières d'enseigner,
06:05le contenu de nos enseignements,
06:07nos manières d'évaluer les étudiants
06:09et on change aussi ce à quoi on prépare nos élèves.
06:12Parce qu'ils vont, dans leur métier, utiliser l'IA au quotidien.
06:15Donc, il faut qu'ils sachent l'utiliser,
06:17il faut qu'ils sachent prompter,
06:18il faut qu'ils sachent repérer les hallucinations.
06:21Donc, voilà, on travaille beaucoup là-dessus.
06:23On a signé un partenariat avec Mistral.
06:25Néoma a été la première grande école à signer
06:27un partenariat de design avec Mistral.
06:29Ça veut dire qu'on travaille avec Mistral
06:31sur comment utiliser l'IA
06:32dans l'enseignement supérieur et dans l'éducation.
06:35Mais j'imagine qu'il y a une inquiétude du côté des profs.
06:36Il y a une sorte de besoin de formation continue
06:38sur l'intelligence artificielle.
06:41Est-ce que ça, c'est des choses que vous proposez ?
06:42Oui, on forme tous nos professeurs
06:44à l'utilisation de l'intelligence artificielle.
06:48Aussi à la manière de pousser leurs étudiants
06:50à bien l'utiliser.
06:52Et puis même qu'eux puissent l'utiliser
06:54pour préparer leurs cours,
06:56pour se mettre à jour sur ce que devient une entreprise.
06:59Et aujourd'hui, c'est un outil comme aujourd'hui
07:03tout le monde utilise Google.
07:04C'est quelque chose qu'on a appris à faire
07:06il y a quelques années.
07:07Il faut que tout le monde apprenne
07:08à utiliser l'intelligence artificielle
07:10à bon escient, en ayant conscience
07:12des biais, des limites.
07:13Les frais scolarités ont augmenté
07:14dans une bonne partie des écoles,
07:16notamment dans les écoles de commerce.
07:18Est-ce que ça change du coup
07:19le profil de ceux qui arrivent ?
07:21Est-ce qu'il y a plus de demandes de boursiers ?
07:22Est-ce que vous avez eu des impacts ?
07:23On a beaucoup augmenté, globalement,
07:26toutes les écoles de commerce ont beaucoup augmenté
07:28les budgets bourses.
07:29À Neoma, par exemple,
07:30on a multiplié par quatre notre budget bourse
07:32en quatre ans.
07:33L'idée, c'est vraiment que l'argent
07:35ne soit pas un obstacle.
07:36Nous, on veut recruter
07:37les meilleurs étudiants possibles
07:38et on trouvera toujours des solutions
07:40pour qu'ils financent leurs études.
07:42On augmente les frais de scolarité
07:43parce qu'une éducation,
07:46un enseignement supérieur de qualité,
07:47ça coûte cher.
07:48Ça coûte cher en termes de campus,
07:51de professeurs, d'équipement.
07:52On parlait d'IA.
07:54On n'a pas de subvention publique.
07:56Dans les écoles de commerce,
07:57on ne reçoit pas d'argent public.
07:58Donc, c'est financé par les frais de scolarité.
08:01Par contre, ce qui est important,
08:02c'est qu'on trouve toujours des solutions
08:04pour un étudiant qui n'aurait pas les moyens
08:06de payer ses frais de scolarité.
08:08On a des bourses,
08:09on a des prêts étudiants,
08:10on a des jobs étudiants.
08:12Moi, le message que j'ai envie de faire passer
08:13aux parents, aux jeunes,
08:15c'est qu'on trouve toujours des solutions.
08:16Réussissez les concours
08:17et on trouvera des moyens de financement.
08:19Et on verra après.
08:20Delphine Manceau, un échec quand même,
08:22c'est les filières scientifiques et les femmes.
08:23Là-dessus, on n'y arrive toujours pas à attirer.
08:25Qu'est-ce qui manque ?
08:27Écoutez, moi, c'est un sujet qui m'est cher,
08:29qui est très important pour moi.
08:31Je pense qu'il faut créer des rôles modèles,
08:34comme on dit.
08:34Il faut aussi faire rêver autour de l'industrie,
08:37montrer que la science compte donner
08:39une image de la science qui fait sens.
08:42Quand on voit le nombre de femmes
08:43qu'il y a dans les études de médecine
08:45et qu'on compare aux études d'ingénieurs,
08:48on se dit qu'il y a vraiment
08:49beaucoup de progrès,
08:50mais qu'il y a un vrai vivier aussi,
08:52un vrai potentiel.
08:54Merci beaucoup, Delphine Manceau,
08:55d'être venue ce matin
08:55dans la matinale de l'économie.
08:57dans la matinale.
08:57Merci.
08:57Merci.
08:58Merci.
08:58Merci.