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  • il y a 2 jours
Ce jeudi 2 octobre, les hausses d'impôts prévues dans la copie du budget ont été abordées par Anthony Morlet-Lavidalie, économiste chez Rexecode, Gaëlle Macke, directrice déléguée de la rédaction de Challenges, et Gaël Sliman, président d'Odoxa, dans l'émission Les Experts, présentée par Raphaël Legendre sur BFM Business. Retrouvez l'émission du lundi au vendredi et réécoutez la en podcast.

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Transcription
00:00Et pour parler de tous ces sujets, j'ai le plaisir d'accueillir Gaëlle Mag. Bonjour Gaëlle.
00:04Bonjour.
00:05Directrice déléguée à la rédaction de Challenges.
00:07Gaëlle Slimane, président d'Odoxa. Bonjour Gaëlle.
00:10Bonjour Raphaël.
00:11Et Anthony Morley-Lavidali.
00:12Bonjour Raphaël.
00:13Bonjour Anthony, économiste chez Rex & Code.
00:16On va commencer par la copie budgétaire.
00:19On en parle beaucoup tous les jours dans les experts, mais la copie se précise.
00:24Le Premier ministre Sébastien Lecornu doit l'envoyer aujourd'hui au Conseil des Finances Publiques.
00:30Et ce qu'on attend, ce qu'on attend, c'est pas mal de hausses d'impôts.
00:34Le paquet justice fiscale qui doit servir à décrocher le vote du PS s'annonce autour d'une bonne dizaine de milliards d'euros.
00:43Gaëlle Mag, à quoi on peut s'attendre ?
00:45En gros, on se retrouve toujours dans cette voie un peu de compromis,
00:52puisque je rappelle que dans le budget de François Bayrou, il y avait déjà un peu ce type de mesures,
00:56mais ça n'est pas été précisé.
00:59Mais en gros, le rendement, par contre, on attendait autour de 5 milliards.
01:03Et je rappelle que la taxe Zuckman plébiscitée par les socialistes était autour de 15-20 milliards.
01:09Donc voilà, finalement, on va faire plus ou moins 10 milliards.
01:13On coupe la poire en deux.
01:13On coupe la poire en deux, 10 milliards.
01:15Si on rajoute avec les 8 milliards, quand même, qu'on imagine qui vont encore être prélevés aux entreprises
01:23en reconduction de la précédente taxe de 2025 sur taxe sur l'impôt sur les sociétés,
01:30bon, si on se retrouve avec 18 milliards de hausses d'impôts,
01:34sachant que l'effort global qui était chiffré par François Bayrou à 40 milliards
01:41va être plus bas, manifestement, dans la copie, le corps nu, plutôt autour de 30.
01:47On sait combien ou pas ? Est-ce qu'il y a des chiffres qui commencent à se faire ?
01:49J'en sais rien, mais oui, on commence à se dire entre 25 et 30 milliards.
01:53Ça serait quand même un minimum de faire 25 milliards, peut-être 30.
01:58Bon, en fait, on s'aperçoit que deux tiers de cette note
02:03va de nouveau être acquittée par le biais de hausses d'impôts.
02:07Et d'ailleurs, je veux dire, c'est quand même intéressant de voir que depuis
02:11le suicide de François Bayrou sur l'hôtel du diagnostic de la dette,
02:18plus personne ne parle de baisse de dépense.
02:20Je veux dire, on a enlevé les deux jours fériés
02:22et plus personne ne parle de baisse de dépense.
02:24Anthony Morley-Lavidali, c'est un peu toujours comme ça que ça se termine en France, non ?
02:28Par des hausses d'impôts, finalement ? C'est un peu le cas l'année dernière, déjà ?
02:32C'est un peu le problème, c'est-à-dire qu'on voit bien à la fois
02:34qu'on ne veut pas abandonner l'objectif de réduction de déficit public,
02:37on cherche à atteindre les moins 4-7.
02:40Jusqu'alors, il y a quand même, honnêtement, le budget est peu documenté.
02:43Enfin, je pense qu'il y a des zones d'ombre encore importantes,
02:45donc il faudra voir la copie dans son ensemble.
02:47Effectivement, on aurait pu attendre quelques mesures salutaires sur les dépenses
02:50quand on nous dit qu'on veut préserver la croissance
02:52et qu'on accentue la taxation du Made in France,
02:55c'est-à-dire la taxation sur le capital et sur le travail.
02:58Précisément, ça pénalise la croissance.
02:59Donc, avoir notamment une reconduction de la surtaxe d'IS,
03:02c'est quand même franchement une très mauvaise idée.
03:03Enfin, tous ces impôts qu'on présente comme des one-off,
03:06qui derrière, donc des mesures temporaires, qui deviennent pérennes,
03:09ça crée quand même, d'une part, un environnement fiscal très instable.
03:12C'est tout ce qu'il ne faut pas pour stimuler l'activité.
03:15Donc, à un moment donné, il y a quand même des contradictions,
03:17un petit peu, dans le discours gouvernemental.
03:19Qu'est-ce qu'ils en disent, les Français, de ces hausses d'impôts ?
03:22Il y a eu ce désir de justice fiscale depuis un mois.
03:28Vous l'avez dit, Raphaël ?
03:29C'est ce que souhaitent les Français, au final.
03:30Non. Dans notre baromètre économique du mois, on atteint un plus bas quasiment.
03:35On est à des niveaux extraordinaires en termes de pessimisme économique.
03:40Et quand on regarde ce que nous disaient les Français
03:42dans les précédentes vagues du baromètre que l'on réalise ensemble,
03:46on avait notamment nos concitoyens qui anticipaient le pire pour l'avenir.
03:51Là, il y a quelques jours, ce n'est pas dans le baromètre économique,
03:53mais on avait interrogé les Français sur ce qui allait arriver dans les 12 mois à venir.
03:57qu'ils nous disent une hausse des impôts et des prélèvements.
04:00Donc, ce n'est pas un souhait, Raphaël, c'est un pronostic.
04:02Et donc, le pronostic rejoint le Français.
04:06Il sait qu'il est Français et qu'on vit en France
04:07et que tout ça se terminera par des hausses d'impôts.
04:10Il n'a peu de doute à ce sujet-là.
04:12Il pronostique à plus de 80% un faible niveau de croissance économique.
04:15Et il pronostique la catastrophe en termes de chômage et en termes de pouvoir d'achat.
04:20Donc, il pronostique le pire.
04:22Ça, c'était avant notre baromètre économique du mois.
04:24Et ça explique le moral dans les chaussettes qu'ont nos concitoyens.
04:27Et ils nous disent, les Français, on a conscience que la question de la dette et des déficits,
04:32c'est un sujet majeur et que, du coup, il faut faire quelque chose.
04:35Donc, il est faux de dire que les Français ne sont pas prêts à faire des efforts.
04:39Mais on l'avait dit déjà le mois dernier, Raphaël,
04:41le problème, c'est qu'on veut bien faire des efforts,
04:43mais si possible, si ce sont des efforts qui concernent mon voisin sur ma droite
04:47ou mon voisin sur ma gauche.
04:49Et tout le monde est comme ça.
04:51Ça veut dire que quand on regarde les gens qui ont les revenus les plus élevés,
04:54ils disent, non, mais le vrai problème en France,
04:55c'est tous ces gens qui profitent des minima sociaux.
04:58Et donc, il faut taper dans les minima sociaux.
05:00Sauf que quand je regarde dans mes données, les gens qui disent ça
05:02sont des gens qui ne sont pas du tout concernés, ni eux ni leurs proches,
05:06par les aides sociales.
05:07À l'inverse, quand on est dans les tranches de revenus les plus basses,
05:11on dit, non, mais le vrai problème en France, c'est les riches,
05:14et il faut pouvoir les...
05:14Tout le monde est d'accord pour ça.
05:16Il faut pouvoir les taxer.
05:17En revanche, il y a un point de convergence majeur,
05:20c'est de se dire, alors que les Français sont très attachés
05:22à leur service public,
05:24peut-être peut-on consentir à réduire le nombre de fonctionnaires.
05:27Là, on a une majorité de Français qui y est prêts.
05:30Et alors que les Français...
05:31Qui ne sont pas fonctionnaires, j'imagine.
05:32Qui ne sont pas fonctionnaires, c'est ce que j'allais vous dire.
05:33Ok, d'accord, mais ils en profitent quand même.
05:36Ils sont quand même 5 millions et demi.
05:37Oui, mais ils ne sont peut-être pas fonctionnaires,
05:40puisque quand on regarde ce que nous disent les salariés du public,
05:42ils ne sont pas du tout d'accord.
05:43Mais malgré tout, les Français sont très attachés
05:45à l'éducation, à la santé, à leur grand service public.
05:48Et donc là, ils disent, on peut peut-être faire un effort.
05:50Et il y a un autre...
05:51Il y a un effort, en revanche, que les Français ne veulent pas,
05:53voire ne veulent pas que l'on fasse.
05:56Ça concerne les entreprises.
05:57Ils sont une nette majorité à dire
06:00qu'il ne faut surtout pas taxer davantage les entreprises.
06:03Ça, c'est très net dans votre sondage du mois.
06:04Et ça, c'est très net et c'est très nouveau.
06:06Et ça tient, à mon avis, au fait que les Français savent
06:09ou pensent, ou savent, ou vous y mettrez ce que vous voudrez,
06:13que dans un contexte angoissant en termes économiques,
06:17si on commence à trop serrer la vis sur les entreprises,
06:21il y aura du chômage,
06:22il y aura des difficultés à augmenter les salaires,
06:25et qu'ils le paieront à terme.
06:28Donc, on est dans ce panorama global aujourd'hui.
06:3182% des Français ont une bonne opinion des entreprises.
06:37Tout ça arrive dans un contexte de mobilisation, aussi, du patronat.
06:41C'est nouveau, ça, Gaëlle Mac ?
06:43En tout cas, ça s'accentue.
06:46Ce n'est pas si nouveau, mais ça s'accentue.
06:48Alors, je pense qu'il y a une partie un peu par défaut,
06:53parce que c'est vrai que les entreprises et les entrepreneurs
06:57et les chefs d'entreprise paraissent un peu comme les adultes
07:00dans la pièce, en ce moment.
07:02C'est-à-dire que, bon...
07:04Par contraste aux politiques.
07:04Voilà, la défiance devient tellement forte vis-à-vis des politiques,
07:08des partis politiques, des dirigeants politiques,
07:11qui ne font que se chamailler, disons,
07:15et qui n'aboutissent à aucun compromis,
07:16et dont on a l'impression qu'ils sont déconnectés de la vie réelle,
07:19et qu'ils entretiennent une instabilité délétère.
07:23Donc, par contraste, c'est vrai que les entrepreneurs sont,
07:27et les chefs d'entreprise sont un peu considérés
07:29comme des gens de terrain, pragmatiques,
07:32qui sont un peu les forces vives de la nation,
07:34sur lesquelles on s'appuie pour la croissance,
07:38pour l'emploi, voilà.
07:39Et par ailleurs, c'est vrai également
07:42que les patrons se sont montrés bien plus bruyants
07:46et bien plus engagés dans le débat public,
07:50et notamment, il y a eu cette période
07:54de l'université d'été du MEDEF,
07:57là, ils prévoient quand même une sorte de...
08:01Un grand meeting à Paris-Garcy,
08:03à Fort Arena,
08:04donc voilà, ce qui est quand même peu fréquent.
08:06Et c'est vrai qu'ils interviennent plus dans les médias
08:09et surtout sur ce mode,
08:12c'est-à-dire en disant,
08:13attention, quand on attaque l'entreprise et l'entrepreneur,
08:18on n'attaque pas les riches,
08:19mais on attaque les forces productives
08:22qui créent des emplois.
08:24Et bon, il faut croire qu'au bout d'un certain temps,
08:26se discourper.
08:28Je voudrais revenir quand même aux mesures du budget
08:31qui devraient arriver.
08:33La nouveauté, c'était ce matin dans les échos,
08:37c'est éventuellement une hausse de la CSG
08:40sur l'ensemble des revenus du patrimoine,
08:42sur l'assurance-vie, sur les revenus locatifs.
08:46Est-ce qu'on sait mesurer l'impact sur la croissance
08:49qu'une telle mesure peut avoir ?
08:51Alors, c'est toujours difficile sur des petites mesures.
08:52Ce que l'on voit bien,
08:53c'est que comme on ne veut pas s'attaquer aux gros tuyaux,
08:56on va chercher tout un tas de petites mesures paramétriques
08:58qui sont en plus des petits montants.
09:00La réalité, c'est que c'est toujours difficile de chiffrer,
09:02je veux dire, ce type-là de mesures.
09:03C'est quelques milliards.
09:04Là, cette mesure, c'est 2 milliards, par exemple.
09:05C'est un petit 2 milliards d'euros, 1,9 milliards, effectivement.
09:08On voit qu'on est loin de l'effort nécessaire
09:10pour redresser les conditions.
09:11C'est probablement préférable à taxer directement le travail
09:13ou l'outil de production.
09:15Néanmoins, on est quand même dans un moment
09:16où, on l'a dit, le taux d'épargne des ménages
09:18est très élevé.
09:19Il y a une forme d'épargne de précaution
09:20qui est en train de se constituer
09:21puisqu'ils deviennent ricardiens, les ménages.
09:23Ils se disent que les hausses d'impôts vont arriver.
09:25Si on souhaite encourager encore un peu plus
09:27ce sentiment de renforcer sa capacité d'épargne,
09:30c'est un peu le type de mesures qu'il faut prendre.
09:33Et malheureusement, on aimerait au moins voir en miroir
09:35les mêmes choses côté dépenses,
09:37des réductions un peu similaires.
09:38On documente très bien les hausses d'impôts
09:40dans le budget, en tout cas dans ce qui a futé pour l'instant.
09:43Et ça reste très flou sur les potentielles mesures d'économie
09:46où, en tout cas, pour l'instant, on a très peu de détails.
09:48Et c'est ça qui est ennuyeux.
09:49Et sur les deux principaux postes de dépense publiques
09:51que sont les retraites et la santé,
09:53on sent qu'il y a très peu d'efforts faits.
09:56Alors qu'on parle de 750 milliards d'euros de dépenses.
09:59Si on ne s'attaque pas aux gros tuyaux,
10:01malheureusement, on ne peut pas réduire le déficit dans la durée.
10:03Donc, à un moment donné, il faut accepter de parler de ces sujets
10:05qui fâchent, mais c'est nécessaire.
10:07Mais il faut voir aussi que, politiquement,
10:09il n'y a pas de parti qui défendent, en fait,
10:12des baisses de dépenses publiques drastiques.
10:15C'est-à-dire que...
10:16Droits et gauches confondus.
10:17Voilà, quand on doit faire un compromis pour obtenir son budget
10:21et ne pas que son gouvernement soit censuré,
10:24on doit faire des concessions aux uns et aux autres.
10:28Donc, il y a certains partis, comme le Parti Socialiste,
10:31qui demandent une augmentation de l'imposition des riches.
10:34Donc, on fait toute une liste de courses pour lui faire plaisir.
10:38Mais qui demande une grande baisse de dépenses publiques ?
10:42Qui nous dit non, mais là, sur telle et telle ?
10:44Personne.
10:45Au contraire, les autres forces politiques,
10:47le Rassemblement national, lui aussi,
10:50ne veut pas de dépenses publiques.
10:53Ils ont quand même censuré le gouvernement Barnier
10:56sur les hausses de franchise, sur la santé
10:58ou sur les efforts qui allaient être demandés,
11:00peut-être, aux retraités,
11:01le gel des retraites pour six mois.
11:05Ils étaient absolument contre les deux jours fériés,
11:08la suppression des deux jours fériés.
11:09Et, bon, la droite républicaine,
11:14donc, les LR seraient censés être un peu ceux qui sont les plus stricts,
11:20les plus austères, voilà, sur la question des finances publiques.
11:23En fait, ils ne le sont pas du tout.
11:24C'est pas ce qu'on voit dans les débats budgétaires,
11:26sur les retraites notamment.
11:27Alors, c'est aussi leur électorat, c'est-à-dire qu'ils suivent leur électorat.
11:29– Exactement, ils ne le sont pas du tout,
11:31ils ne réclament pas non plus,
11:32ils n'ont pas une liste de courses, un peu comme aurait...
11:35Donc, finalement, je veux dire,
11:37le Premier ministre,
11:38qui cherche quand même, à la fin, à faire adopter un budget,
11:42je veux dire, il va là où les compromis sont possibles
11:45et donc, ce qui va se faire,
11:48au détriment d'un certain bon sens budgétaire,
11:53recensé par les économistes, malheureusement.
11:55– Ça veut dire, Galsimane,
11:57qu'on termine sur un plus petit commun des nominateurs,
11:59mais qu'on n'est pas au rendez-vous de l'efficacité, au final.
12:02– Oui, et moi, je vous trouve paradoxalement très optimiste,
12:07Gaël, parce qu'on parle au futur,
12:09mais dans ce qui fuite ou dans ce qu'a indiqué Sébastien Lecornu,
12:14il n'y a pas grand-chose qui soit de nature
12:17à pouvoir être considéré comme des concessions suffisantes,
12:20ni pour le Parti Socialiste,
12:22ni pour le Rassemblement National.
12:24Dans ce qui se dessine,
12:26a priori, le plus probable,
12:28c'est qu'il n'y ait pas du tout de budget,
12:30et qu'il n'y ait plus du tout de Sébastien Lecornu.
12:33À partir du moment où vous avez un Premier ministre
12:36qui ne fait pas les concessions suffisantes
12:39aux yeux des deux partis qui lui permettront de se maintenir,
12:43Parti Socialiste et Rassemblement National,
12:45que pour les raisons qu'a évoquées Gaël,
12:46ils n'ont pas intérêt, ces partis, à être facilitants,
12:50puisqu'ils ne sont pas au pouvoir,
12:52ils ne sont pas aux manettes,
12:53ils aspirent à l'être bientôt.
12:54Moi, je pense que ça ne passera pas,
12:58ce sera insuffisant et ça ne passera pas.
13:00Votre scénario principal, c'est une censure d'entrée, d'emblée ?
13:03Oui, mon scénario principal,
13:04parce qu'il faut bien penser à une chose,
13:06c'est que même si ce n'était pas l'intérêt,
13:09et ça se discute,
13:10des partis concernés,
13:12que de censurer Sébastien Lecornu.
13:14Il se trouve que ces gens-là ont un truc
13:16qui s'appelle des électeurs,
13:17et que leurs électeurs ne supporteront pas
13:20les mesures qui sont insuffisantes
13:24par rapport au déficit,
13:25qu'annonce Sébastien Lecornu.
13:27Et comme par ailleurs,
13:28Emmanuel Macron a commis une faute politique majeure
13:32l'année dernière,
13:33en faisant comme s'il n'avait pas perdu
13:35les élections législatives,
13:37ce qui hérisse à peu près les deux tiers des Français.
13:40Donc, il a considéré qu'il allait pouvoir
13:42poursuivre la même politique qu'il menait depuis sept ans.
13:44Et bien, du coup, il n'y a aucune raison
13:48qu'on n'ait pas, après Barnier-Bayrou,
13:50après Bayrou, Lecornu,
13:52après Lecornu, Christophe Castaner,
13:55peut-être qu'il sera ressorti des tiroirs,
13:58je n'en sais rien,
13:58mais tout ça ne pourra se terminer
14:01que par des élections législatives anticipées
14:06et une dissolution.
14:07Ce que vous nous dites gentiment,
14:08c'est aussi peut-être un départ anticipé
14:10du président de la République,
14:11parce qu'après les élections,
14:13c'est quand même le dernier rempart.
14:15Le dernier rempart,
14:16normalement, avant une démission du président
14:18et une présidentielle anticipée,
14:20il y a quand même l'idée de législative anticipée
14:22qui peut-être pourrait accoucher
14:24d'un gouvernement qui aurait une majorité.
14:28Ce ne serait sans doute pas
14:28un gouvernement Renaissance-LR,
14:31mais ce serait plus probablement RN.
14:33Mais voilà, c'est de la politique fiction.
14:36Mais en tout cas,
14:37le scénario le plus probable aujourd'hui,
14:39c'est plutôt celui-là,
14:41à moins que Sébastien Lecornu fasse des gros bougés,
14:44comme on dit,
14:45et que ça suffise à ORN et au Canada.
14:46Non, mais là, je ne voulais pas du tout
14:48me livrer à des prédictions politiques
14:49qui sont hautement incertaines.
14:51Je voulais simplement dire
14:52qu'il n'y a pas de force politique en France
14:54pour appuyer sur une rigueur budgétaire
14:58et s'intéresser
15:01et avoir des propositions fortes sur la dette.
15:04Et il n'y a pas non plus finalement d'électorat,
15:07parce que derrière le parti politique,
15:10il n'y a pas vraiment d'électorat.
15:12Il y a peut-être une certaine conscience
15:14sur la dette dans l'électorat,
15:16mais elle reste un peu abstraite quand même.
15:18C'est-à-dire que quand on rentre
15:19dans les mesures qu'on demande aux Français,
15:22telle ou telle ou telle mesure
15:23de baisse de dépense,
15:24est-ce que vous seriez prêts
15:25à payer plus cher vos médicaments ?
15:27Est-ce que vous seriez prêts
15:28à ce qu'il y ait moins de policiers ?
15:30Ou est-ce que vous seriez prêts...
15:31Moins d'infirmières.
15:32Moins d'infirmières, voilà,
15:33parce que vous parlez des fonctionnaires.
15:34Mais quand on rentre dans
15:36qui sont les fonctionnaires,
15:37là, d'un coup, ça ne marche pas bien.
15:39Ou est-ce que vous seriez prêts
15:41à travailler plus longtemps ?
15:43Voilà.
15:45Et c'est toujours non.
15:47Donc, en fait, finalement,
15:49les forces politiques françaises
15:50ne sont que le reflet
15:51de l'électorat français.
15:54Ce qui est devenu la société, oui.
15:55Qui a été quand même habituée
15:57depuis 50 ans à vivre à crédit.
15:59Je crois qu'on n'a pas fait
16:00un budget à l'équilibre depuis 1974.
16:03Donc, finalement...
16:05Et puis, on a annoncé...
16:07François Fillon nous a prédit
16:09la faillite en 2011.
16:10On est en 2025.
16:12Et finalement, on n'est toujours pas en faillite.
16:14Donc, finalement, je pense
16:16qu'il y a une sorte d'inconscience
16:18généralisée dans la population française
16:20qui ne veut pas, sur le fond,
16:22s'attaquer à cette question.
16:24Est-ce qu'on se dirige vers la faillite,
16:25Anthony Manlet ?
16:26Alors non, on est...
16:27La France ne va pas faire faillite demain.
16:28En revanche, est-ce que nos fondamentaux
16:30vont se dégrader lentement,
16:32mais sûrement ?
16:33Très probablement.
16:34C'est un peu l'histoire du nœud coulant.
16:35C'est qu'à la fin, vous êtes étouffé
16:37parce que vous avez des charges d'intérêt
16:38qui représentent une part croissante
16:39de votre budget.
16:40Vous pouvez investir de moins en moins
16:42dans ce qui est important
16:43pour préparer justement la croissance de demain.
16:45Donc, c'est plutôt un lent étouffement
16:46de la France qu'une faillite qui se dessine.
16:49Néanmoins, il y a eu quand même quelques...
16:50Quand on parle d'incapacité
16:52à faire des consolidations budgétaires en France,
16:54c'est qu'on a laissé s'installer
16:54quand même tout un tas de fausses idées.
16:56On le voit bien sur les dépenses publiques.
16:57Le fait que, par exemple,
16:58on pourrait la diminuer
16:59sans que personne ne soit pénalisé.
17:00L'idée qu'on ferait baisser le train de vie de l'État,
17:03ce qui ne veut pas dire grand-chose.
17:04C'est l'année blanche,
17:04l'idée qu'on gèle pour tout le monde.
17:06Tout à fait.
17:06Et on a besoin de remettre un peu de vérité,
17:09de véracité dans ce débat budgétaire
17:11en disant que quand on baisse la dépense publique,
17:12ça fait des perdants.
17:13De la même manière que quand on augmente des impôts,
17:15il faut bien sûr les désigner.
17:16Et quand, par exemple,
17:17on parle de la dépense des collectivités locales
17:24ça fait des perdants.
17:25Mais il faut être en capacité de le dire.
17:27Il n'y a pas de baisse de dépense
17:28dont personne ne profite.
17:29Et à un moment donné,
17:30il faut aussi le rappeler.
17:31Je pense que les partis politiques
17:32ont entretenu un peu cette idée
17:33qu'au fond,
17:34il y avait des efforts
17:35qui étaient coûteux pour personne.
17:37Ça, je pense que ça coûte...
17:38Il n'y a pas d'effort magique, quoi.
17:39Il n'y a pas de l'effort magique.
17:40C'est ce que vous nous dites ce matin.
17:41Les efforts, au moins, ça pèse.
17:43Je suis tout à fait d'accord.
17:44Et pour rebondir sur ce que vous venez de dire
17:46l'un et l'autre,
17:47et préciser pourquoi je me lançais
17:48dans de la politique fiction hasardeuse,
17:51c'est simplement qu'on est
17:53dans une situation impossible.
17:55Impossible.
17:56Vous ne pouvez pas demander des efforts,
18:00et notamment sur des réductions de dépenses,
18:03et donc moins de fonctionnaires,
18:05et donc moins de services publics,
18:06et donc moins d'argent aux collectivités.
18:08C'est absolument impossible en France
18:09si vous n'avez pas une majorité
18:12qui a été élue, si possible,
18:13avec un minimum de mandat pour ça.
18:15Donc, c'est pour ça que je dis
18:16qu'on est dans une situation impossible,
18:17quel que soit le talent de Sébastien Lecornu,
18:21même en étant un magicien,
18:23il ne peut pas résoudre ce problème.
18:25La seule solution pour pouvoir réaliser
18:28les efforts budgétaires envisagés,
18:3030 milliards, 40 milliards, peut-être plus,
18:32le seul moyen de le faire,
18:34c'est d'avoir une majorité claire
18:36au pouvoir, d'une façon ou d'une autre.
18:38Soit dans le cadre d'élections législatives,
18:41soit dans le cadre d'une élection présidentielle.
18:43Et ce parti au pouvoir,
18:45ou cette formation politique au pouvoir,
18:47pourra, à ce moment-là,
18:49dans la foulée de son élection,
18:52mener des réformes difficiles, pénibles,
18:55qui pourraient être acceptées par les Français.
18:58Mais là, on est dans une sorte
18:59de no man's land politique,
19:00avec un gouvernement qui ne tient sur rien,
19:04aucune majorité possible,
19:06et des efforts à faire.
19:08Cette équation-là, elle n'est pas...
19:10C'est un triangle d'incompatibilité,
19:12comme on dit en économie,
19:13qui est assez fort.
19:14Exactement.
19:15Alors, le seul moyen de s'en sortir,
19:17et ça arrivera peut-être vite,
19:18au pire en 2027,
19:20c'est d'avoir une majorité,
19:21quelle qu'elle soit,
19:22qui aura été installée par les Français.
19:25Ce sera encore mieux
19:26s'il n'y avait pas trop de mensonges
19:27dans la campagne,
19:28et si elle assumait certaines des mesures difficiles
19:29qu'elle allait les prendre après.
19:31Ce serait mieux.
19:31Mais ce n'est même pas en disant ça.
19:33Est-ce qu'on est sûr d'avoir
19:34une majorité aux législatives
19:35après l'élection présidentielle de 2027 ?
19:37Alors, on n'est même pas sûr,
19:38si demain il y avait une dissolution
19:40pour continuer dans le scénario
19:41de politique fission,
19:42on n'est même pas sûr
19:43qu'il y aurait une majorité.
19:45Enfin, une majorité absolue.
19:47Ou une majorité assez solide
19:48du type de celle de 2022
19:50qui avait permis à Emmanuel Macron
19:52de faire passer des textes
19:54avec une majorité inconfortable,
19:57mais jouable.
19:58C'est quand même plus probable,
20:00si aujourd'hui il y avait des législatives,
20:01il est quand même plus probable
20:02qu'il y aurait une majorité plus nette
20:04qui se dessinerait que la dernière fois.
20:05Mais ce n'est pas sûr.
20:06Je voulais revenir sur ce chiffre
20:08cité par Emmanuel Macron
20:10dans le Frankfurter Allgemeine Zeitung
20:12aujourd'hui.
20:12La France, c'est quand même
20:1410% de croissance depuis 2017,
20:17même avec un déficit,
20:20avec un budget en déficit
20:21depuis plus de 50 ans.
20:22Donc finalement relativement
20:24par rapport à nos voisins européens.
20:25Je rappelle les chiffres,
20:267,8% pour l'Italie,
20:283,44%,
20:303,44%
20:31pour l'Allemagne
20:32depuis 2017.
20:34J'ai refait les calculs
20:35de mon côté hier soir,
20:37j'arrivais plutôt à 5,7%.
20:38Mais c'est quand même la moitié
20:39et on était à 10,7% en France.
20:40C'est quand même la moitié
20:41de la croissance française.
20:42Donc on se débrouille pas mal.
20:44C'est sûr que si on se compare
20:44à l'Allemagne,
20:45on performe plutôt bien.
20:46En réalité,
20:47on est dans la moyenne
20:48de la zone euro.
20:48Si on rajoute l'Espagne,
20:49d'un coup le comparatif
20:50est nettement moins salutaire.
20:52Il faut quand même avoir en tête,
20:53comme vous l'avez dit,
20:54on a financé la croissance
20:55avec du déficit public.
20:57On avait eu quand même
20:57une très bonne nouvelle
20:58en France post-Covid,
20:59c'est que l'investissement
21:00des entreprises
21:01avait incroyablement bien rebondi.
21:03Il était même revenu
21:03sur sa tendance pré-Covid
21:05jusqu'à la mi-2023.
21:06Et depuis,
21:07il y a un point d'inflexion
21:07qui s'est créé.
21:08Et là, on est 10%
21:09sous la tendance pré-Covid.
21:10Qui est dû à quoi ?
21:11Alors, c'est une conjonction
21:12de phénomènes.
21:13On a à la fois eu
21:14une hausse des taux d'intérêt
21:15qui a quand même pénalisé
21:15significativement ces investissements.
21:17Parce qu'il y a un bout
21:18des investissements,
21:18c'est de la construction.
21:19Donc, c'est la BCE.
21:20C'est la hausse des taux
21:20de la BCE suite
21:21à la crise inflationniste.
21:22Mais il y a aussi
21:23tous les chocs d'incertitude
21:24désormais que l'on cumule
21:25depuis quand même maintenant
21:27plus d'un an.
21:29On le voit bien
21:29quand nous,
21:30on fait des enquêtes,
21:30notamment avec la BPI France
21:32auprès des TPE-PME.
21:33Quand on interroge
21:34les chefs d'entreprise
21:35sur à quel point
21:36vous êtes prêts
21:37à reporter ou annuler
21:38vos décisions d'investissement,
21:39ça bondit à chaque fois
21:40qu'il y a un choc d'incertitude.
21:41Donc, on voit bien
21:42qu'on alimente malheureusement
21:44le fait.
21:45Et moins d'investissement
21:46aujourd'hui,
21:47c'est moins de croissance demain.
21:48Donc, ça,
21:48c'est vraiment la variable
21:49peut-être la plus préoccupante,
21:51j'allais dire.
21:51Puisque sinon,
21:52si on regarde
21:52la consommation des ménages,
21:53par exemple,
21:54comme on a distribué
21:55plus de pouvoir d'achat
21:56que dans le reste de la zone euro,
21:57on a une consommation des ménages
21:58qui, au fond,
21:59fait même un peu mieux
21:59que la moyenne zone euro.
22:00C'est vrai.
22:01Elle n'est pas en forme en ce moment.
22:02Elle n'est pas très en forme.
22:03Mais c'est plus côté entreprise
22:04qu'il faut aller regarder
22:05les signaux d'inquiétude aujourd'hui.
22:08Et ça, encore une fois,
22:09ce n'est pas que de la croissance
22:09d'aujourd'hui,
22:10c'est surtout de la croissance
22:11de demain.
22:11Oui, si je vous comprends bien,
22:13il faut s'attendre
22:14à un ralentissement
22:15assez net de la croissance.
22:16On n'a pas préparé
22:17notre croissance future.
22:18Complètement.
22:19Et puis l'Allemagne,
22:19encore une fois,
22:20est un mauvais benchmark
22:20puisque l'Allemagne
22:21a vraiment des difficultés
22:22qui dépassent le conjoncturel.
22:23Ils sont beaucoup plus structurels.
22:24Et c'est vrai que là,
22:25pour le coup,
22:25si on regarde l'investissement
22:26des entreprises allemandes,
22:28on est même 5% en deçà
22:29des niveaux de 2019.
22:31Donc, il y a un vrai sujet en Allemagne.
22:32Ce n'est pas aujourd'hui
22:32le bon benchmark.
22:33Qui pourrait être compensé
22:34par la hausse des investissements
22:36en Allemagne aussi.
22:37126,7 milliards d'investissements
22:39prévus dans le budget de 2026
22:41du côté allemand.
22:43850 milliards sur plusieurs années.
22:45Ça peut être un game changer.
22:46Alors, il faut être très prudent.
22:47D'une part,
22:48parce que les Allemands
22:48sont très forts pour annoncer
22:49des enveloppes importantes
22:50et des caisses peu.
22:52Nous, on n'annonce pas
22:53beaucoup de choses,
22:54mais souvent,
22:54on dépense beaucoup plus
22:55que prévu.
22:55Les Allemands,
22:55c'est parfaitement l'inverse.
22:56C'est un peu le miroir.
22:58Et il y a également un fait,
22:59aujourd'hui,
22:59qu'ils sont un peu
23:00en surcapacité d'offres.
23:01C'est-à-dire qu'on voit bien
23:02les taux d'utilisation
23:03des capacités de production
23:04en Allemagne
23:05qui sont très faibles.
23:06Ils ont déjà un appareil
23:07excédentaire en termes d'offres.
23:09Est-ce qu'ils vont rajouter
23:09de l'investissement par-dessus ?
23:11Ce n'est pas certain.
23:11Donc, je pense qu'il faut
23:12être très prudent.
23:13Ils ont surtout un problème
23:13de demande adressée,
23:14les Allemands.
23:15Ils ont une demande intérieure
23:15très faible.
23:16Le monde leur adresse
23:17de moins en moins de demandes
23:18puisque c'est le débouché
23:19chez moi, c'est le faire.
23:20Et les États-Unis
23:21importent de moins en moins
23:23de produits allemands.
23:24Donc, ils ont surtout
23:24un sujet de demande.
23:25Ce n'est pas réellement
23:26un besoin d'augmentation
23:27des capacités de production.
23:29Donc, la réalité,
23:29c'est que je pense
23:30qu'il faut être prudent
23:31sur ce qu'on peut attendre
23:32de positif en Allemagne
23:33d'un point de vue
23:33de l'investissement.
23:34Très bien.
23:35Bon, l'investissement
23:37pour l'avenir,
23:37c'est aussi l'emploi.
23:38Merci.

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