00:00Et il vient combattre, comme chaque jour, le consensus, notre expert de marché.
00:03Il est 16h47.
00:05Ceux qui combattent le consensus en bourse sont des combattants.
00:08Notre combattant est François Monnier aujourd'hui.
00:09Bonjour François.
00:10Bonjour Guillaume.
00:11Bonjour à tous.
00:12D'investir.
00:13Total Energy, encore lanterne rouge du CAC aujourd'hui.
00:15Côté à New York désormais aussi, Total Energy, ça va lui permettre, selon certains,
00:19de réduire sa décote de valorisation face aux autres majors, notamment les majors américaines.
00:23Alors certains le pensent, mais pas vous, vous dites bullshit.
00:25Vous foudroyez, François, cette idée que Total Energy aura un jour la même valo que les pétroliers américains.
00:33Pourquoi est-ce qu'ils n'auraient pas le droit d'être valorisés comme ExxonMobil ou Chevron ?
00:36On peut comprendre la démarche, mais je pense que c'est un joli et doux rêve américain.
00:42Parce que d'abord, il faut voir que l'écart de valorisation, il est considérable.
00:46Les sociétés comparables à Total Energy, que ce soit Chevron ou ExxonMobil,
00:52se payent en bourse aujourd'hui deux fois plus cher que Total.
00:55Si on regarde aux critères ratio court sur bénéfice, Total Energy se payent neuf fois les bénéfices de l'année,
01:01quand les autres se payent 17 à 20 fois les bénéfices de l'année.
01:05Ce qui pour Wall Street en plus 17 à 20 fois est peu.
01:09C'est ça qui est vague.
01:09Même si dans l'univers des matières premières, généralement les titres ne se payent pas très cher.
01:14D'accord.
01:15Il y a une grande différence entre Total et les acteurs concurrents américains.
01:20D'abord, Total ne bénéficie pas de la diplomatie américaine qui permet de faire des affaires dans le domaine du pétrole au niveau mondial.
01:31Il faut voir que historiquement, toutes les grandes majors pétrolières ont bénéficié, à un moment donné, dans leur histoire ou à leur création,
01:39d'un réseau diplomatique et militaire assez conséquent.
01:44Et c'est pour ça, par exemple, que la Suisse n'a pas de compagnie pétrolière digne de ce nom.
01:50Donc, Total ne peut pas bénéficier du réseau américain, alors qu'il est français.
01:58Il restera français.
01:59On parle de double cotation.
02:01Donc, alors bien sûr, ce sera plus facile pour les Américains d'acheter les actions totales.
02:05On peut penser qu'il y aura probablement un petit engouement qui peut permettre aux multiples valorisations de progresser,
02:15parce que l'écart est tellement conséquent qu'on peut se dire, ça ne va peut-être pas rester à neuf fois chez Total.
02:21Peut-être qu'on peut viser à dix, onze, douze fois.
02:23Mais il faut voir aussi qu'en faisant les yeux doux à Wall Street, on risque de perdre peut-être quelques investisseurs européens.
02:29Et là, c'est un peu le message, parce que quand on regarde et qu'on échange avec les grands institutionnels américains,
02:35on se rend compte que finalement, les institutionnels américains, quand ils achètent une compagnie pétrolière, ils veulent acheter du pétrole.
02:41Ils ne veulent pas acheter un acteur qui fait du pétrole, mais aussi des énergies renouvelables.
02:45Donc, alors que les Européens, ils étaient très friands de l'histoire racontée par la direction Total Énergie,
02:53qui était de dire, nous, c'est énergie avec un S, on accorde une grande part aux énergies renouvelables.
02:57Et là, ce qu'on voit dans le nouveau plan de relance, c'est qu'ils vont quand même un petit peu réduire leurs motivations, leurs ambitions dans le domaine des énergies renouvelables.
03:07Il y a eu une vente de solaire aux États-Unis.
03:09Voilà, et les investissements, ils sont plus de 5 milliards, ni 4,5 milliards, mais plutôt de 4 milliards de dollars par an.
03:14Donc, on voit qu'ils prennent un biais un petit peu plus américain, parce que le gérant américain, l'institutionnel américain,
03:19lui, ce qu'il veut, c'est que si jamais on lui dit, je veux du pétrole, mais des énergies renouvelables,
03:24eh bien, il va prendre ou du Chevron ou du Dexion Mobile, et éventuellement, il mettra du Hiberdrola pour faire son mix.
03:30Mais il veut que ce soit lui qui fasse la composition de son portefeuille, plutôt que d'acheter un acteur qui prend toute la chaîne de valeur.
03:37Quand même, sa décode de valorisation va quand même progresser avec une base d'investisseurs élargie,
03:42et c'est le but aussi de Total Énergie de faire cette opération.
03:45Oui, mais il faut arriver à convaincre tous ceux qui sont fans des énergies vertes et renouvelables que Total reste un acteur majeur dans ce domaine-là.
03:54Pourtant, il l'a prouvé, c'est, j'ai envie de dire, parmi les compagnies pétrolières qui ont ce statut de major, l'une des plus vertueuses.
04:01Mais il va falloir démontrer qu'il reste vertueux.
04:04Et là, ce qu'on voit, c'est que, en tout cas, le plan stratégique, pour l'instant, n'a pas vraiment convaincu les investisseurs.
04:10On a vu le titre plutôt mal se comporter hier, encore aujourd'hui, il n'y a pas eu vraiment de nouveau.
04:16On savait déjà, tout avait un petit peu fuité les jours précédents.
04:20Donc voilà, il va falloir convaincre.
04:21Et la véritable heure de vérité, c'est la croissance des bénéfices.
04:25À quel rythme Total va être capable d'améliorer ses bénéfices, sa rentabilité ?
04:30Et c'est ça qui sera juge de paix, plus que la place de cotation.
04:32Antoine ?
04:33Alors évidemment, autour de Total, il y a toutes ces interrogations.
04:35Moi, en premier, de cette histoire d'être coté aux heures de Wall Street.
04:40Alors, pas vraiment une double cotation, une cotation du titre Total à Wall Street.
04:45Est-ce qu'il a été rentable, un jour, pour une entreprise européenne, par exemple, d'être coté aux États-Unis ?
04:50Il y en a eu beaucoup.
04:51Il y a eu SAP, pendant un moment, qui était coté.
04:53Ensuite, c'était cher.
04:54Mais est-ce que, pour certaines entreprises, ça a été un véritable avantage ?
04:57Ce qu'on a pu voir, nous, c'est qu'on a eu un très bel exemple en Europe,
05:01avec l'IN2, qui était la plus grande valeur allemande au sein du DAX 40.
05:07C'est l'air liquide allemand.
05:08C'est l'air liquide allemand, exactement.
05:10Qui, en 2023, a décidé de quitter l'Allemagne,
05:13parce qu'il trouvait que le marché allemand était trop petit,
05:16que lui, avec sa capitalisation, il avait atteint le seuil max dans son indice,
05:20qui était de 10%.
05:21Et donc, il s'est dit, moi, je quitte l'Allemagne,
05:23et ma principale place de cotation, donc là, c'est même plus une double cotation,
05:26c'est je pars complètement, je me fais délister d'Europe et d'Allemagne,
05:29pour aller aux États-Unis.
05:30Qu'est-ce qu'on constate ?
05:32On constate qu'il y a eu peut-être une petite revalorisation.
05:35En 2018, la société se payait 25 fois,
05:38elle se paye 29 fois aujourd'hui,
05:40donc on a une revalorisation de près de 4 points,
05:43mais dans le même temps, son principal concurrent européen,
05:46qui s'appelle Air Liquide,
05:47lui, a une revalorisation beaucoup plus importante.
05:51Si l'IN2 a pris 4 points,
05:53eh bien le Français, il a pris 5 points entre 2018 et 2025.
05:57Donc on voit que finalement, il n'y a pas eu de véritable gain
06:02de performance boursière, de revalorisation de l'IN2,
06:05alors que l'IN2 est aujourd'hui à son siège aux États-Unis
06:10et sa principale place de cotation à New York.
06:12Hyper instructif, toujours.
06:13François Monnier, directeur de la rédaction d'Investi.