- il y a 5 mois
Vendredi 11 juillet 2025, retrouvez Natacha Tréhan (Enseignante-chercheuse, Université Grenoble Alpes) et Franck Amalric (Sponsor du Domaine d'Excellence Sustainability, Square Management) dans SMART IMPACT, une émission présentée par Thomas Hugues.
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00:00Générique
00:00Notre débat, il porte sur l'évolution des règlements européens, CSRD, le bilan extra-financier, CS3D, le devoir de vigilance, simplification nécessaire ou recul désastreux.
00:17Voilà notre titre, on en parle avec Natacha Tréon. Bonjour, bienvenue.
00:20Bonjour.
00:20Vous êtes enseignante chercheuse à l'université Grenoble-Alpes et Franck Amalric, bonjour.
00:25Bonjour.
00:25Bienvenue à vous aussi, sponsor de Domaine d'Excellence Sustainability au cabinet de Conseil Square Management.
00:30On va commencer par le bilan extra-financier, la CSRD.
00:34La première vague de rapports, elle est passée, celle qui concerne les plus grosses entreprises.
00:38Finalement, comment ces grands groupes ont passé l'obstacle ? Qu'est-ce que vous pourriez, qu'est-ce que vous pouvez en dire, Natacha Tréon ?
00:44Alors, par rapport à cette approche-là, grosso modo, l'ensemble de la même donnée des rapports, c'est assez étonnant parce qu'il y a beaucoup de grandes entreprises qui disaient, en fait, on avait 80% des données.
00:54On les avait déjà.
00:55On les avait déjà.
00:57Donc, en fait, par contre, effectivement, il y a eu un gros travail, en fait, d'organisation, de mise en place.
01:03Mais c'est surtout par rapport, en fait, aux conséquences, à mon sens, plus sur la nouvelle réglementation qui est importante et par rapport, notamment, aux nouveaux seuils qui sont mis en place et les risques qui en découlent.
01:13Oui, on va évidemment en parler.
01:14Il y a notamment des grandes banques européennes qui ont publié leur bilan extra-financier.
01:20Franck Kamalek, quel résultat ? Est-ce qu'elles ont toutes joué le jeu de la même façon ? J'imagine que non.
01:25Absolument pas.
01:26Oui.
01:26Absolument pas.
01:27Nous, on a fait un benchmark des 50 grandes banques européennes.
01:31On a regardé leur rapport CSRD et une des grandes questions, c'est qu'est-ce qu'elles allaient publier.
01:38En fait, dans la CSRD, il y a un élément qui est un peu paradoxal, c'est que vous devez publier ce que vous considérez comme matériel.
01:45Donc, il y a cette analyse de double matérialité.
01:47Mais la législation laissait les entreprises assez libres pour réaliser cette analyse de double matérialité.
01:54Pour faire simple, il y avait 10 grands chapitres à publier et on a regardé.
01:59La moitié des banques ne publient que 4 chapitres, donc sur le climat, sur l'eau sociale, enfin leurs ressources humaines, sur les clients et puis sur la gouvernance.
02:08Et puis, il y en a qui ont publié beaucoup plus de choses sur la biodiversité, sur la pollution, sur l'eau.
02:13Et donc, ça rend l'exercice, vous voulez, de faciliter la comparaison entre entreprises.
02:19Mais comme elle publie des choses quand même très différentes, puisqu'elle ne publie pas toutes les mêmes chapitres, cette comparaison devient difficile.
02:25Oui, mais est-ce que ça ne favorise pas ? Parce que comme vous le dites, c'est un outil de comparaison.
02:30On va voir que dans l'évolution, effectivement, il s'est un peu affaibli, mais c'est un outil de comparaison.
02:33Est-ce que ça ne favorise pas les banques qui ont été les plus transparentes, d'une certaine façon ?
02:39Écoutez, on va le voir.
02:41On verra.
02:41On va voir si ça va générer des risques de réputation, si elles vont être soumises à des interrogations de la part de leurs parties prenantes, des acteurs de la société civile.
02:51On va voir.
02:52Maintenant, la législation va évoluer.
02:54Et donc, ce jeu, finalement, d'adaptation, d'évolution dans le temps des rapports, il est un peu interrompu,
03:02puisqu'on ne sait pas, finalement, quelle est exactement la structure des rapports qu'elles devront publier d'ici un an.
03:09Ce que sera ce que sera cet nouvel environnement autour du bilan extra-financier,
03:14puisqu'il y a eu un recul qui a été décidé par le Conseil européen.
03:18On va dire que c'est l'organisme qui regroupe les représentants des États,
03:23mais ça doit encore être voté au Parlement à l'automne.
03:25Donc, effectivement, on est un peu encore dans cette incertitude.
03:28Il y a quand même, alors c'est le mot « backlash » qu'on a beaucoup employé ici, retour en arrière, ce climat général.
03:33Votre avis déjà sur la démarche, la décision du Conseil européen, notre achatréant ?
03:37Alors, juste par rapport à ça, il y a eu véritablement, en tout cas, effectivement, une montée de boucliers
03:41par rapport notamment à tout ce qui est plutôt association patronale,
03:44pour dénoncer, en fait, la lourdeur, et puis, évidemment, par rapport au rapport Draghi.
03:49Mais surtout, ce que je voudrais mettre en avant, c'est justement, c'est le fait de dire,
03:52« Attention, ça va être trop contraignant pour nous. »
03:55Mais au contraire, je pense que c'est l'inverse.
03:58C'est-à-dire, je voudrais juste alerter, par rapport au risque, maintenant, donc, on est à un seuil,
04:01c'est 1 000 personnes et donc 450 millions d'euros de chiffre d'affaires.
04:04Et puis, justement, par un souci d'alléger, en fait, les exigences, on dit,
04:07ils ont mis en place ce qu'on appelle un « value chain cap »,
04:10c'est-à-dire le fait que, dorénavant, une entreprise qui est soumise à la CSRD
04:14ne pourra pas exiger des informations qui vont à des entreprises non soumises à la CSRD
04:19qui sont trop importantes.
04:21Donc, l'idée aujourd'hui, une entreprise qui n'est plus soumise à la CSRD,
04:23va pouvoir, en fait, utiliser les normes volontaires.
04:26Sauf que les normes volontaires, elles étaient, en fait, à l'origine prévues pour des PME.
04:30Et très rapidement, les normes volontaires, aujourd'hui, vous avez deux modules.
04:33Un premier module dans lequel, en fait, on dit, le scope 3, c'est plus obligatoire.
04:36Et puis, la chaîne de valeur, elle est exclue.
04:39Et puis, un deuxième module, un peu plus avancé, on dit,
04:41le scope 3, c'est toujours pas obligatoire, mais si pertinent.
04:44Et en termes d'analyse des risques, c'est un peu plus poussé.
04:47Mais, par exemple, on va dire, si jamais il y a des événements qui sont avérés,
04:50en termes, par exemple, de travail forcé, etc., dans la chaîne de valeur,
04:52et si jamais vous avez un plan de transition,
04:55il doit, effectivement, prendre en compte la chaîne de valeur,
04:56mais si c'est possible.
04:58Donc, c'est très, très léger.
04:59Et du coup, pour moi, les risques,
05:01et c'est pour ça que c'est assez étonnant,
05:02ça va à l'encontre de ce qu'on pouvait imaginer.
05:05Le premier risque, c'est, vous comprenez bien,
05:06que les entreprises fournisseurs, en Europe,
05:09qui sortent de la CSRD
05:11et qui ont des donneurs d'ordre qui, eux, sont soumis à la CSRD,
05:14le principal risque pour elles, c'est qu'elles vont perdre du business.
05:16Elles vont perdre du business, pourquoi ?
05:18Quand vous êtes un grand donneur d'ordre,
05:20en fait, quels sont les critères ?
05:21Vous prenez des critères de coût,
05:22vous prenez des critères, en fait,
05:23de sécurisation de vos supplies de chaînes,
05:25et puis vous prenez des critères en termes de décarbonation.
05:27Si je prends simplement sur la chaîne de valeur...
05:29Parce que là, le temps file.
05:31Si je prends simplement sur la chaîne de valeur,
05:32en fait, ce que demandait la CSRD avant,
05:35c'était justement de faire une cartographie de sa chaîne de valeur,
05:37d'aniser la résidence, etc.
05:38Donc aujourd'hui, un donneur d'ordre,
05:40il n'est plus capable d'avoir une transparence des risques
05:42et de pouvoir comparer les entreprises par rapport aux autres.
05:45Donc il va plutôt prendre des entreprises qui restent soumises.
05:47Oui, j'ai compris.
05:48Et c'est pareil sur la décarbonation.
05:50J'ai compris.
05:51Franck Améric, ce que nous dit Natacha Tréhan,
05:54c'est qu'en fait, sous couvert de simplification,
05:56on va se retrouver avec les grandes entreprises
05:58qui resteront soumises à cette CSRD,
06:01avec des choix qui vont être quasi impossibles à faire
06:05ou une sorte d'indécision pour ces grands donneurs d'ordre.
06:10Votre avis ?
06:12Je pense qu'il y a un vrai risque.
06:14Il faut revenir aux raisons qui ont présidé à la CSRD.
06:18Il était dit très clairement que vous avez tout un tas d'acteurs
06:21qui ont besoin de donner,
06:22sur la manière dont les entreprises gèrent les enjeux de durabilité,
06:28les banques, les donneurs d'ordre, etc.
06:31Et que cela allait générer des coûts pour les entreprises.
06:35Et afin de réduire ces coûts-là,
06:37la CSRD proposait d'avoir un cadre commun.
06:40D'accord ?
06:40Donc la CSRD, au départ,
06:42voulait être une solution pour adresser ce problème
06:45de la demande d'informations aux entreprises,
06:47afin d'avoir un cadre commun, la comparabilité
06:51et réduire les coûts que cela allait générer
06:53pour les entreprises dans ce sens.
06:55Avec, étape par étape, toutes les entreprises.
06:57Là, on a tout remis en cause,
07:02pas en regardant ce qui s'était passé
07:03en se disant comment on peut simplifier,
07:05parce qu'on a remis en cause,
07:06avant de voir les premiers rapports,
07:08ce qui est quand même assez extraordinaire.
07:09Et donc, on va se retrouver avec ce problème-là,
07:11une multiplicité de demandes de données
07:14qui vont être adressées à différents endroits.
07:15Oui, parce que les donneurs d'ordres,
07:16qui, eux, sont les grandes entreprises,
07:19les très grandes entreprises,
07:19qui, eux, elles, sont soumises à la CSRD,
07:22elles vont continuer d'adresser des demandes
07:25à leurs bénisseurs, effectivement.
07:27Oui, et puis, il y a toute la problématique des risques.
07:29Il y a quand même la Banque Centrale Européenne,
07:31qui vient d'émettre un avis,
07:32en disant, il y a quelques semaines,
07:34en disant qu'il ne faut surtout pas
07:36trop rehausser les seuils,
07:38parce que les banques ont besoin de données
07:40pour gérer les risques de durabilité.
07:42Donc, la Banque Centrale Européenne propose
07:43un seuil de 500 employés.
07:45Et ce qui correspondrait à l'ancienne NFRD,
07:47donc ce qui serait tout à fait cohérent.
07:48Et juste en termes de risque,
07:50ce qu'on ne se rend pas compte aussi,
07:51c'est qu'aujourd'hui,
07:51vous êtes un grand donneur d'ordre en Europe,
07:53mais c'est-à-dire qu'à terme,
07:54vous allez plutôt les sourcer en Chine.
07:56Pourquoi ?
07:56Parce qu'aujourd'hui,
07:57quel est le seul pays au monde
07:58qui a fait un copier-coller de la CSRD ?
08:00C'est la Chine.
08:01Et en 2030, la Chine estime que,
08:03ce qu'elle veut,
08:03c'est que l'ensemble des standards soient déployés,
08:05pas simplement au niveau des grandes entreprises,
08:07mais aussi des PME.
08:08Donc ça veut dire qu'un donneur d'ordre en Europe,
08:10il sélectionne ses fournisseurs sur trois critères.
08:12Le coût, la sécurisation, la décarbonation.
08:14Malheureusement, il aura tout en Chine à partir de 2030.
08:17Donc effectivement, il est essentiel,
08:18et je suis d'accord avec vous,
08:19d'abaisser les seuils à minima à 500 personnes,
08:22puis de simplifier.
08:23Oui, il faut simplifier pour éviter
08:24que ça devienne effectivement un gaz.
08:25Parce qu'effectivement,
08:26c'était trop compliqué.
08:29On m'a souvent dit 800 pages,
08:31on a l'impression d'être face à un Everest.
08:33Les 800 pages ne concernaient pas
08:34toutes les entreprises.
08:35Il y a eu beaucoup de débats
08:38qui ne sont pas été basés
08:40sur une lecture fine des textes.
08:43On entend 1000 points de données,
08:45ou 1200, 1300.
08:46Mais ça, c'est si vous devez répondre
08:48à toutes les exigences.
08:50En fait, il y a dans la CSRD
08:52cette idée de dire
08:53vous ne devez produire que les données
08:56qui sont pertinentes pour vous,
08:58c'est-à-dire qui sont matérielles.
09:00Et donc, ça veut dire que vous pouvez choisir.
09:02Nous, nous avons accompagné
09:04des petites entreprises,
09:04elles étaient très, très loin
09:06des 1000 points de données.
09:07Tout à fait.
09:07Après l'analyse de double matérialité.
09:09Donc, il y avait dans le texte lui-même
09:11des provisions pour simplifier
09:13l'exercice pour les entreprises.
09:15Oui, effectivement.
09:16Et donc, moi, ce que j'entends,
09:18c'est un recul presque à contre-courant
09:21d'une certaine façon.
09:23Le Parlement européen,
09:25enfin, le Conseil européen
09:25et le Parlement,
09:26ils font de la politique.
09:27Et ils sont aussi le résultat
09:28des élections européennes d'il y a un an.
09:31C'est aussi un message
09:32que les électeurs ont envoyé.
09:34Est-ce qu'il y a encore une fenêtre
09:36pour ne pas reculer
09:39autant que prévu ?
09:40C'est-à-dire, il y a...
09:41Avant l'automne.
09:43Non, non, c'est ce que vous disiez.
09:44Quelque part, rien n'est joué, quand même.
09:46Donc, je pense qu'il faut rester
09:47quand même assez optimiste.
09:47Et puis, le fait de pouvoir...
09:49Oui, il est important.
09:50Il faut être pragmatique.
09:51Il faut entendre aussi
09:51qu'on dit les entreprises.
09:52Donc, oui, il est important
09:53de simplifier.
09:53Et je pense aussi
09:55que les cabinets de conseil
09:56ont eu aussi quelque part
09:58une responsabilité.
09:58C'est-à-dire qu'à vouloir aller
10:00trop dans l'excellence,
10:01ça a été à un moment donné
10:02un ennemi quelque part.
10:04Le mieux, l'ennemi du bien
10:05quelque part.
10:06Mais sinon, oui,
10:07il faut rester optimiste.
10:08Et je crois beaucoup, en fait,
10:09à la possibilité quand même
10:11qu'on aille plutôt vers un seuil
10:12à 500 personnes
10:12qu'à 1 000 personnes.
10:14Et simplifier, oui,
10:14ce serait bien.
10:16Effectivement.
10:17Avec ce qui était quand même
10:18le principe,
10:20c'est la comparaison.
10:20les entreprises
10:21qui ont joué le jeu,
10:24qui ont fait des efforts,
10:25est-ce qu'elles vont finalement
10:25en pâtir
10:26ou au contraire,
10:27d'après vous,
10:28continuer d'en bénéficier ?
10:31Je pense que c'est trop tôt
10:33pour se prononcer là-dessus
10:35parce qu'il y avait
10:37un mouvement
10:38qui était enclenché
10:39qui a été interrompu quand même.
10:40Donc, tous les acteurs
10:41qui se sont penchés
10:42sur la CRD,
10:43maintenant,
10:43ils sont un peu en pause.
10:45On va regarder.
10:46Est-ce que,
10:47je pense que les acteurs
10:48qui se sont mis,
10:49d'abord les grands acteurs,
10:50a priori,
10:51c'est-à-dire les entreprises
10:51qui ont plus des seuils,
10:53même les plus élevés
10:54dont on parle,
10:55eux,
10:55ils vont continuer
10:55à produire la CRD,
10:57notamment les grandes banques,
10:58les grandes entreprises
10:59françaises,
11:00etc.
11:01Donc, eux,
11:01ils ont enclenché le mouvement.
11:03Il y avait une marche
11:03à franchir,
11:04ce que vous avez dit,
11:05il y avait un problème
11:05de réorganisation
11:07de la manière dont on publiait.
11:08Donc, ça, c'est fait
11:09et maintenant,
11:10ils vont être
11:10dans un processus
11:11de réplication.
11:13Est-ce que la CRD
11:14va véritablement faire
11:16ce qui était son objectif,
11:17c'est-à-dire inciter
11:18les entreprises
11:19à adopter des modèles
11:21qui soient plus alignés
11:22avec nos engagements
11:23en termes de durabilité ?
11:25Ça, c'est beaucoup
11:26trop tôt pour le dire.
11:27Merci beaucoup.
11:28Merci à tous les deux
11:29et à bientôt
11:30sur Bsmart4Change.
11:31On passe tout de suite
11:31à notre rubrique
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