SMART PATRIMOINE - La fiscalité des LMNP peut-elle être remise en cause ?

  • l’année dernière
Une fiscalité trop favorable pour la location meublée ? C’est à priori l’avis du gouvernement, qui souhaite augmenter la fiscalité pour ce type d’investissement. Objectif ? Aligner la fiscalité des locations vides, touristiques et meublées. Les deux amendements votés étaient inattendus pour les propriétaires, notamment la réforme de la taxation des plus-values immobilières pour les bailleurs de location meublée.

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Transcript
00:00 Et c'est parti pour enjeu patrimoine, je le disais, on parle aujourd'hui de la fiscalité
00:07 des LMNP, les locations meublées non professionnelles.
00:11 On la disait avantageuse et pourtant elle semble aujourd'hui remise en cause.
00:14 Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2024, deux amendements ont été adoptés
00:19 en octobre pour limiter l'intérêt de la location saisonnière et inciter les propriétaires
00:24 à revenir sur le marché de la location traditionnelle.
00:26 On en parle aujourd'hui avec Aïda Kamoun, avocate fiscaliste chez Villarès Avocat.
00:31 Bonjour Aïda.
00:32 Bonjour.
00:33 Merci beaucoup de nous accompagner aujourd'hui.
00:34 Thierry Vignal nous accompagne également, cofondateur de Mastéos, un service d'investissement
00:38 locatif.
00:39 Bonjour Thierry.
00:40 Bonjour.
00:41 Merci beaucoup à tous les deux d'être là.
00:42 Aïda Kamoun, pourquoi elle a longtemps été prisée par les investisseurs immobiliers
00:46 cette location meublée non professionnelle ?
00:48 En fait, elle est avantageuse parce qu'elle permet une fiscalité moins lourde que dans
00:55 d'autres types de locations, notamment la location nue et la location plus longue durée.
01:00 En fait, il y a deux distinctions.
01:03 Il y a la distinction location nue, location meublée et ensuite il y a la distinction
01:08 courte durée, longue durée.
01:09 Par exemple, lorsque l'on est dans le cadre de régimes, de ce qu'on appelle les régimes
01:14 micros.
01:15 Micro, c'est-à-dire qu'on va déclarer les recettes annuelles et après on va appliquer
01:19 un abattement qui est déjà prédéfini.
01:22 Par exemple, pour les locations non meublées, le seuil est de 15 000 euros et puis l'abattement
01:31 appliqué est de 30 000.
01:33 Alors que pour les locations longue durée, on va être sur un seuil de 77 700 euros et
01:40 un abattement de 50%.
01:41 Et enfin, sur des locations courte durée, on va être sur des seuils de 188 700 euros
01:47 et avec un abattement qui va jusqu'à 71%.
01:49 Donc on voit tout de suite que la location meublée courte durée est plus intéressante.
01:55 On comprend l'avantage de cette fiscalité assez rapidement, finalement Thierry.
01:59 Oui, de toute façon, ça laisse peu de place à l'hésitation.
02:04 Le LMNP, c'est quand même le régime qui marche le mieux auprès des investisseurs
02:07 locatifs, courte ou longue durée d'ailleurs, par rapport à des régimes type foncier ou
02:11 SCI, Alier ou Alies.
02:13 Parce qu'on a le beurre et l'argent du beurre, on a d'un côté l'amortissement.
02:16 Alors dans l'option réelle, là on mentionnait les forfaits à 30, 50 et 71%.
02:22 On peut aussi choisir en fonction des seuils l'option réelle.
02:25 Et sur l'option réelle, on pratique l'amortissement qui permet d'écraser, parce que c'est une
02:29 matière déductible qui vient écraser le revenu locatif jusqu'à l'annuler.
02:34 Donc on ne paye en tout cas pas d'impôts ou très peu alors qu'on génère du revenu
02:38 locatif.
02:39 Et ce n'est pas repris en sortie.
02:40 Et c'est ça la magie du LMNP.
02:42 C'est que d'un côté, on a une défiscalisation des revenus et jusqu'à ce que ça soit remis
02:48 en cause, ce n'est pas repris à la sortie.
02:50 Alors que normalement, dans tous les autres régimes où on peut faire de l'amortissement,
02:52 on a une reprise.
02:53 C'est-à-dire que ça vient alourdir la facture sur la plus-value en sortie.
02:57 Et donc le meilleur des deux mondes fait que tout le monde se jette dessus.
02:59 Et le problème avec ces amendements, c'est qu'en voulant pénaliser la location courte
03:03 durée, ça vient déborder de manière un peu aveugle et sans discriminer vers la longue
03:09 durée qui pourtant est assez utile sociétalement pour loger des étudiants.
03:12 Contrairement, on pourrait le dire, au Airbnb.
03:15 On va parler des conséquences de ces deux amendements.
03:18 Mais avant de parler des conséquences, on va dire déjà ce qu'il y a dedans.
03:21 Qu'est-ce qu'ils nous disent, Aïda, ces deux amendements adoptés ?
03:24 En fait, on va calquer la courte durée sur la longue durée.
03:33 Donc sur le régime micro dont je parlais tout à l'heure, on va avoir les mêmes
03:39 plafonds et les mêmes taux.
03:41 Ce qui fait qu'on va passer, que ce soit de la location meublée courte ou longue durée,
03:46 on va avoir un abaissement à 77 700 euros sur le seuil de revenu et enfin un abattement
03:53 de 50% contre 71% jusqu'en 2022.
03:57 Donc c'est un impact très très important.
03:59 Un vrai impact sur le portefeuille des clients.
04:01 Oui.
04:02 Alors, une petite nuance pour les zones où l'offre et la demande de logement n'est
04:06 pas très impactée.
04:07 On peut augmenter le taux et augmenter de 21% l'abattement, ce qui fait qu'on passe
04:17 quasi à un taux de 71%.
04:20 Mais il faut que les revenus soient inférés à 50 000 euros l'année d'avant.
04:23 Petite question aussi, Thierry, comment vous expliquez que les meubles touristiques soient
04:27 d'un seul coup un peu pointés du doigt par l'État ?
04:29 Qu'est-ce qui s'est passé là ?
04:30 Politiquement, c'est vrai que ça n'apporte pas grand chose à la société d'enrichir
04:38 des bailleurs touristiques qui profitent de l'effet Jeux Olympiques.
04:41 Donc à la limite, ça en fait une cible facile.
04:44 Pourquoi pas ? Mais comme je le disais, c'est dommage quand ça déborde sur de la longue
04:47 durée et qu'on ne fait pas la distinction parce que là, on est sur une pénurie historique
04:52 du parc locatif.
04:54 Les étudiants peuvent plus loger.
04:56 On a -34% sur Paris d'offres de location en moins et +20% de candidats locataires.
05:05 Et donc en continuant à faire barrage à l'investissement locatif, je suis un peu
05:10 biaisé en disant ça, mais néanmoins...
05:12 Alors qu'on pensait faire mal aux bailleurs touristiques, on fait du mal aux étudiants
05:19 précaires en fait.
05:20 On fait du mal à toute personne qui veut se loger et qui aujourd'hui ne peut pas acheter
05:22 une résidence principale parce que les banques, on est dans un environnement bancaire très
05:26 contraint avec beaucoup de refus de prêts et donc les gens peuvent ni acheter ni maintenant
05:30 se louer.
05:31 Et plus on va mettre de barrages, on a déjà eu les plafonnements de loyers à la limite,
05:35 pourquoi pas ? L'explosion des taxes foncières, la loi sur les passoires thermiques, tout
05:38 ça vient se rajouter et fait effet d'épouvantail sur ce marché.
05:41 Et donc ça vient encore assécher l'offre de location.
05:44 Voilà, donc c'est hyper important de faire la distinction entre courte durée et longue
05:49 durée.
05:50 Vous pensez que cette fiscalité moins attractive, ça va signifier quoi ? Moins d'investissement
05:54 aussi de la part des propriétaires pour acquérir ce type de biens ? C'est ça on va repenser
05:59 à deux fois, on ne sera plus dans la même stratégie ?
06:00 Tout ce qui ne va pas dans le sens de l'investissement locatif crée un climat anxiogène de toute
06:05 manière.
06:06 Déjà que l'environnement macroéconomique n'est pas hyper favorable à ce genre d'investissement
06:09 avec les taux là où ils sont.
06:10 Mais si en plus on vient rogner sur le peu d'avantages fiscales qu'on a là-dessus,
06:16 ça n'encourage pas en fait.
06:17 Et on le voit, l'offre de location ne fait que starir.
06:20 Alors en même temps, il ne faut pas oublier qu'il y a aussi les amendes qui ont été
06:26 mises en place.
06:27 Parce que dans certaines villes, on n'a pas le droit de faire de Airbnb.
06:30 Donc ce n'est pas quelque chose de nouveau.
06:32 Par contre, ce qui peut être anxiogène pour les contribuables, c'est l'instabilité.
06:36 C'est-à-dire que lorsque l'on va faire un investissement locatif, on se projette.
06:40 On se projette sur 20-30 ans.
06:42 Et là, le fait que tout d'un coup, on se rend compte que la loi, elle peut du jour
06:46 au lendemain changer parce qu'en plus, les textes actuels sont applicables dès les revenus
06:50 de 2023.
06:51 Donc quelqu'un qui a investi en 2023 se retrouve en fait avec une nouvelle loi qui n'était
06:59 pas du tout prévue au début de son investissement.
07:01 C'est très rapide.
07:02 Donc c'est plutôt le côté instable et qu'on se rend compte qu'on peut changer très rapidement
07:07 ces régimes qui est plutôt anxiogène.
07:09 Parce que le texte en soi a été, entre parenthèses, un peu limité.
07:13 On aurait pu aller beaucoup plus loin.
07:15 Parce que comme vous le rappeliez tout à l'heure, effectivement, l'amortissement n'est pas
07:19 récupéré à la sortie.
07:20 Et là, il y avait des amendements qui étaient proposés en ce sens-là, de réintégrer les
07:27 amendements au moment de la cession du bien.
07:30 Et là, ça n'a pas été jusque-là.
07:34 Donc c'est plus l'instabilité, le fait que du jour au lendemain, tout puisse changer
07:38 que vraiment cet amendement qui a été voté, enfin qui est passé avec cette loi de Chine.
07:47 Mais donc on pénalise là un peu plus largement finalement le marché de l'immobilier, Aïda ?
07:51 Alors ça, l'avenir nous le dira.
07:54 Mais de toute façon, le marché de l'immobilier est de facto pénalisé depuis quelque temps.
08:00 Et la crise Covid n'a absolument pas aidé.
08:02 La hausse des taux, il y a plein de facteurs qui font que l'immobilier souffre.
08:09 Mais comme vous le disiez Thierry, c'était peut-être la dernière enclave, justement,
08:13 le dernier aspect un peu positif en termes de fiscalité d'investissement immobilier.
08:19 Ce ne sera plus le cas.
08:20 Oui, alors je pose quand même la question.
08:23 On peut toujours faire du réel, il me semble.
08:24 Oui, bien sûr.
08:25 C'est quoi le seuil minimum pour en faire de l'option réelle ?
08:27 Il n'y a pas de seuil minimum.
08:29 Il n'y a pas de seuil minimum, c'est ça.
08:30 Oui, soit on opte pour le micro parce qu'on est en dessous du seuil de 77 700 euros.
08:37 Et dans ce cas, en fait, c'est plus facile.
08:39 C'est juste, on déclare les revenus qu'on a, on applique l'abattement de 50 %.
08:42 On peut faire du réel, tant qu'on peut faire du réel.
08:44 Oui, on peut faire du réel.
08:45 C'est pour ça que je vous dis, l'impact, il est minime cet amendement.
08:47 On peut continuer de faire du réel, bénéficier des amortissements sur le réel.
08:51 C'est ça.
08:52 On aurait eu beaucoup plus peur si l'amendement sur la reprise des amortissements en sortie
08:58 était passé.
08:59 Mais là, il n'est pas passé.
09:00 Il me semble, voilà, il n'est pas passé.
09:01 Donc, on souffle un peu.
09:02 Et donc, cette enveloppe LMNP reste la plus avantageuse possible.
09:08 Et les options possibles désormais ou en tout cas à partir de 2024 pour ces profils
09:13 de propriétaires investisseurs, est-ce que je vous ai un peu déjà posé la question,
09:16 est-ce qu'ils vont changer de stratégie ou pas ? On s'attend à quoi là ?
09:20 Alors, pour moi, on n'investit pas dans l'immobilier avec une motivation fiscale ou en tout cas,
09:26 ça ne serait pas la bonne motivation.
09:27 On investit parce qu'on a trouvé une bonne opportunité de marcher.
09:30 Est-ce qu'il y en a encore ? Oui, en revanche, il faut sortir un peu des sentiers battus.
09:35 Déjà, on est sur un marché qui est très baissier.
09:37 Ça ne se reflète pas encore dans les chiffres des notaires, mais sur le terrain, on voit
09:41 des baisses de 10, 15 % selon les villes.
09:43 Et donc, il faut profiter de ce marché baissier pour négocier agressivement à l'achat, ce
09:48 qui permet de faire des bonnes affaires, qui viennent un peu faire oublier le montant des
09:51 mensualités avec les taux qui sont temporaires parce qu'on peut toujours négocier son crédit
09:55 à la baisse alors que notre prix d'achat est éternel.
09:57 Donc, il faut profiter de cette situation pour être agressif en égo et aller voir
10:02 des villes qui ont moins subi la volatilité du marché.
10:06 Il y a plein de villes moyennes qui sont hyper intéressantes, rentables, accessibles, avec
10:09 une forte demande des revenus par habitant élevé.
10:12 Je pense à des villes qui ne sont pas Lyon, Bordeaux, Paris, mais si on va du côté de
10:18 Angoulême, de Colmar, de Albi, Cholet, Montauban, ces petites villes qui ont des très bons
10:25 fondamentaux, qui sont un peu oubliées.
10:27 C'est ce que vous allez vous recommander chez Matheos.
10:29 Ce que je recommande, c'est oublier un peu les grandes villes qui, de toute manière,
10:33 malgré la timide baisse de prix, restent trop chères pour être finançables dans le contexte
10:36 actuel et aller voir du côté des villes moyennes qui sont un peu les grandes oubliées,
10:39 alors que ce sont des marchés fantastiques d'un point de vue en termes de potentiel
10:42 financier.
10:43 Il y a plein de belles choses à faire là-bas.
10:44 Mais il faut bien manier les statistiques pour comprendre quelles villes offrent un
10:48 rendement élevé sans offrir le risque qui va avec.
10:51 Par exemple, à New York, c'est spectaculaire, c'est 2000 euros du mètre carré, capital
10:54 des banques et des assurances, locataires en nombre, solvables, un marché qui est safe
10:59 et rentable à la fois.
11:01 Donc mieux privilégié à New York que la grosse coloc à Lyon en ce moment.
11:04 Aïda Kamoun, vous êtes d'accord avec ça ? Il faut peut-être dériver sur d'autres
11:08 villes finalement.
11:09 Alors probablement, de toute façon, il y a des villes, notamment Paris, où en principe,
11:14 on n'a pas le droit de faire du Airbnb sans avoir un accord préalable.
11:19 Donc de toute façon, ce type de location n'est pas adapté aux grandes villes que
11:25 vous citiez.
11:26 J'étais sur la longue durée mais ça marche aussi pour la courte durée.
11:28 En tout cas pour la courte durée.
11:29 Et aujourd'hui, ce qui est impacté dans la fiscalité, c'est la courte durée.
11:33 La longue durée, il n'y a rien qui a bougé.
11:36 En fait, c'est juste l'abattement qui est impacté.
11:41 Parce qu'en fait, l'abattement de la courte durée est le même aujourd'hui que celui
11:46 de la longue durée.
11:47 Donc ça ne change rien.
11:48 C'est ça ce qu'il faut retenir.
11:50 Pour résumer, Aïda Kamoun, coup dur ou pas coup dur pour ses propriétaires quand même ?
11:55 Moyen coup dur.
11:57 C'est-à-dire que moi, la seule chose, c'est effectivement, comme je vous l'ai dit, c'est
12:01 plutôt le côté instable où on se rend compte que ça peut changer et qu'un investissement
12:06 fait aujourd'hui, en tout cas, comme vous le disiez justement, on n'investisse pas
12:10 uniquement pour des raisons fiscales.
12:11 Il y a effectivement l'opportunité du projet.
12:14 Et on se dit potentiellement que les règles peuvent changer.
12:16 On se dit potentiellement que du jour au lendemain, ça peut changer.
12:18 Merci beaucoup à tous les deux d'être venus nous voir aujourd'hui, d'avoir parlé de
12:21 fiscalité des LMNP.
12:23 Merci Aïda Kamoun.
12:24 Je rappelle que vous êtes avocate fiscaliste chez Villaret, avocat et Thierry Vignal, cofondateur
12:28 de Masteo, service d'investissement locatif.
12:30 Merci beaucoup à tous les deux d'être venus nous voir.
12:33 On passe tout de suite à l'œil du CGT.

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