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  • il y a 4 jours
Patrice Caine, président directeur général de Thales, était l'invité de Laure Closier lors de la cérémonie des BFM Business Awards, ce mardi 2 décembre. Juste après avoir reçu le prix du manager de l'année, sous la pyramide du Louvre, il a répondu à nos questions, notamment sur les talents, sur les maths et sur les terres rares, sur BFM Business. Retrouvez l'émission du lundi au vendredi et réécoutez la en podcast.

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Transcription
00:00On est avec Patrice Kane, le PDG de Thalès, qui vient de recevoir le prix du manager de l'année.
00:04Rebonsoir, Patrice Kane, bravo pour ce prix remporté cette année.
00:08Le prix du manager, évidemment, ça vous parle en tant que chef d'équipe.
00:12Vous l'avez reçu des mains de Xavier Huillard, avec lequel vous avez écrit une tribune sur les mathématiques.
00:17C'est quelque chose qui vous tient à cœur, qu'on puisse s'amuser avec les mathématiques, qu'on se développe sur cette discipline.
00:23Comment on peut faire pour rendre ça sexy ?
00:25Les mathématiques, c'est très drôle. On peut faire plein de choses avec les mathématiques.
00:29Le but du jeu, vraiment, pour nos gamins, pour les enfants, c'est de montrer que c'est concret, c'est appliqué.
00:34On peut faire des choses. Ce n'est pas quelque chose qui est une pure abstraction.
00:38Vous, dans vos multiples, vous avez 83 000 collaborateurs. C'est énorme.
00:43Vous avez énormément de talents de l'IA, de la cybersécurité, d'ingénieurs, un centre de recherche et développement très important.
00:49Vous recherchez des profils spécifiquement qui ont le cerveau qui fonctionne bien avec les mathématiques ?
00:55On embauche beaucoup d'ingénieurs, c'est vrai. D'ingénieurs qui savent faire beaucoup de choses, pas que des mathématiques, bien sûr.
01:00C'est 33 000 personnes en R&D chez nous, sur les 83 000 que vous avez mentionnés.
01:05Et ça représente à peu près 4 milliards d'euros de R&D chaque année. C'est plus que le budget du CNRS.
01:11Ah oui. Ces BFM Awards, cette année, ils sont sous le signe de l'Europe, du réveil européen.
01:16Ici, on a entendu beaucoup de patrons y croire, mais aussi critiquer parfois la lenteur, le manque de conscience, de compétitivité.
01:23Est-ce que vous pensez qu'on va y arriver ?
01:25Alors, je suis optimiste par nature, mais tout en étant réaliste. Il faut qu'on y arrive.
01:30Ce n'est pas « est-ce qu'on va y arriver », c'est « il faut qu'on y arrive ».
01:32D'ailleurs, je veux dire, notre continent le mérite. On a énormément d'atouts, c'est vrai.
01:37Maintenant, il faut juste les mettre en résonance de phase positive.
01:40Ça, c'est de la physique, pas des mathématiques.
01:41pour arriver effectivement à ce que notre continent et notre pays, la France, bien sûr, restent au meilleur niveau mondial.
01:46Mais comment on fait ? Comment on fait pour rester au meilleur niveau mondial avec toutes les contraintes qu'on peut avoir,
01:51que ce soit réglementaire, qu'on se met parfois soi-même ? C'est souvent la critique des entrepreneurs.
01:56Alors moi, je revendique beaucoup le fait de soutenir énormément la recherche et l'innovation.
02:01Il y a d'autres leviers, bien sûr, pour que notre continent reste compétitif.
02:04Mais la recherche, l'innovation, d'ailleurs, notre prix Nobel d'économie l'a bien montré, c'est la différenciation par l'innovation.
02:09C'est ça qui peut permettre à notre continent de tenir son rang, finalement.
02:13À nouveau, la recherche économique est formidable.
02:17Maintenant, comment la maintenir compétitive ?
02:19Et le cri d'import-recherche, pour moi, est un outil absolument existentiel pour nos entreprises,
02:24pour continuer à être dans le peloton de tête, tout simplement.
02:27Mais un groupe comme le Vaud, ça représente quoi, la recherche et développement ?
02:30C'est un pôle de quelle taille ?
02:32C'est 33 000 personnes, je disais, sur les 4, 33 000.
02:34Donc c'est probablement l'entreprise qui a le plus d'intensité en matière de R&D que beaucoup d'autres.
02:40Quand je convertis ça en euros, je disais, c'est plus que le budget du CNRS.
02:43Donc c'est des sommes considérables.
02:44Mais si on touche au crédit d'impôt recherche, concrètement chez vous, ça veut dire moins de gens ?
02:49C'est-à-dire que tout de suite, votre budget R&D change ?
02:51Pas tout de suite, mais pour autant, ça veut dire que notre R&D en France deviendra nettement moins compétitif que dans d'autres pays.
02:59En France, on est à peu près, on va dire, aux alentours des 100, une base de 100.
03:02La moyenne de l'Europe, c'est 70.
03:04Nous sommes 30% plus coûteux que le reste de la moyenne européenne en matière de R&D.
03:10Le cri d'impôt recherche nous permet de revenir à cette moyenne européenne.
03:13Ça ne veut pas dire faire mieux, c'est juste revenir à cette moyenne.
03:15Il faut qu'on y reste si on veut rester compétitif par rapport à d'autres centres de recherche que nous avons derrière nous-mêmes, dans d'autres pays européens.
03:22Et je ne parle même pas de l'Asie, effectivement, où les référentiels sont encore très différents.
03:27Il y a les questions de réglementation, les questions de rapidité.
03:30Et puis il y a aussi l'argent sonnant et trébuchant.
03:32On a eu la ministérielle de l'ESA qui nous donne les investissements pour les trois prochaines années.
03:3622 milliards d'euros, c'est assez, c'est une bonne nouvelle ?
03:40Écoutez, on va rester là aussi positif.
03:42Oui, c'est des investissements qui sont significatifs.
03:44Alors maintenant, on aimerait toujours en faire plus, bien sûr.
03:47Mais je pense qu'avec ce montant, l'Europe va pouvoir là aussi rester à très, très bon niveau.
03:53L'autre chose qui va se jouer, c'est le budget pluriannuel de l'Union européenne qui va venir en complément de ça.
03:59Et là, on parle plutôt de 40, 50, 60 milliards d'euros investis dans le spatial.
04:04Et ça nous met au même niveau que les Américains avec ce type de budget ?
04:08Ah, nous y sommes. Sans complexe, nous sommes au meilleur niveau mondial dans le spatial et on se compare aux Américains, aux Chinois ou à d'autres.
04:17L'objectif pour l'Europe, c'est de rester dans la cour des grands, bien sûr.
04:20Et pour ça, effectivement, ça demande d'investir des sommes significatives.
04:23Vous étiez ex-exploration compagnie Ellen Ubi sur Seine, elle, elle y croit évidemment à l'Europe.
04:28Comment vous regardez tout cet écosystème du new space qui se développe et qui change complètement, qui bouleverse un peu ce qu'on appelait le all space avant ?
04:36Oui. Alors c'est formidable. Je veux dire qu'il y a des jeunes entrepreneurs et jeunes entrepreneuses qui s'investissent dans ces domaines, notamment dans le spatial.
04:45Nous, on a besoin de start-up qui réussissent. Je pense que les start-up ont aussi besoin de groupes industriels pour passer à l'échelle.
04:50Donc un évent très complémentaire et ce qu'elle fait est tout à fait formidable.
04:53Dans les questions européennes, il y a aussi le fait de travailler ensemble, d'arriver à faire des champions entre groupes européens.
04:58Ce n'est pas toujours simple. Vous avez, vous, le projet Bromo, Airbus, Thales, Leonardo qui est désormais officiel.
05:04Vous allez fusionner des services satellitaires. Là, clairement, la compétition avec les Américains. Avec ça, on est dans la course.
05:10Je pense que si on y arrive, je dis si, parce qu'il nous faut quand même obtenir un centre d'autorisation pour y arriver et convaincre notamment les autorités de concurrence
05:18qu'on va pouvoir innover plus en fait et être encore plus compétitif. Dès lors qu'on y arrivera, on aura effectivement un acteur de taille suffisante
05:27pour continuer à jouer dans la cour des grands, continuer à tenir la drage haute à nos compétiteurs essentiellement américains aujourd'hui.
05:34Sans doute demain, Chinois, ils font beaucoup de choses chez eux, mais ils pensent à sortir de leurs frontières et faire qu'on soit toujours fiers en Europe d'avoir une industrie leader au monde.
05:42Il y a un point sur lequel on a une technologie que personne n'a d'autre, c'est le projet Aurore. Est-ce que vous pouvez nous raconter comment ça fonctionne ?
05:48C'est une technologie qu'on n'a nulle part dans le monde.
05:50Alors, on travaille, oui, sur une technologie de radar dans une certaine bande de fréquence, on ne va pas faire trop de technique, mais qui permet de faire plein de choses.
05:58L'application Aurore consiste à regarder depuis le sol, finalement, ce qui se passe dans l'espace, avec une précision qu'on ne peut pas, je dirais, donner forcément à tous nos téléspectateurs,
06:08mais qui est extrêmement importante, notamment dans les applications militaires, surveiller, regarder les satellites qui défilent au-dessus de notre tête en orbite basse jusqu'à 2000 kilomètres.
06:18C'est quelque chose de remarquable, mais il y a d'autres applications que nous avons en tête sur cette même bande de fréquence pour faire des radars, par exemple, d'alerte avancée, tout à fait intéressant.
06:26Aussi dans le civil, pas que dans le militaire ?
06:28L'alerte avancée, c'est plutôt dans l'omène, là encore militaire, on va chercher une précision extrêmement forte à 2000, 3000, 4000, 5000 kilomètres,
06:37typiquement pour repérer des départs de missiles balistiques, qui menacent potentiel, malheureusement, effectivement, plus d'application militaire que civile.
06:45Il y a aussi le sujet des minerais critiques, là, on est en concurrence avec le monde entier pour s'approvisionner du côté des Chinois qui ouvrent et qui ferment le robinet.
06:53Il y a une concurrence, évidemment, entre les entreprises du monde entier pour s'approvisionner. Est-ce que vous, aujourd'hui, vous sentez des tensions ?
06:59Alors, pas ou pas encore, je ne sais pas comment le dire. C'est sûr qu'on est un peu plus loin dans la chaîne de valeur.
07:05Nous, on dit plutôt les composants. Donc, ce qu'on voit, c'est les composants, les cartes électroniques, ce n'est pas les terres rares, typiquement.
07:10Maintenant, bien sûr, s'il n'y a plus de terres rares accessibles, il n'y aura plus de composants, il n'y aura plus d'électronique.
07:13C'est vrai qu'aujourd'hui, on fait face à une situation où ce n'est pas tellement d'un point de vue minier.
07:18Il y a des mines dans beaucoup de pays dans le monde où on peut, je pense, se désensibiliser à un seul pays.
07:23Il faut les traiter, les raffiner.
07:24Voilà, c'est le traitement où 80% du traitement est aujourd'hui fait en Chine et donc qui donne, je dirais, à l'industrie mondiale une forte dépendance à ce pays.
07:32Mais on est capable d'anticiper un problème majeur à venir ?
07:35Alors, on peut stocker, mais ça, c'est limite, bien sûr. On peut faire aussi du recyclage, mais là aussi, ça, c'est limite.
07:42Il faut qu'on arrive, je dirais, à travailler en paix les uns les autres pour que les chefs de valeur puissent fonctionner au niveau mondial.
07:49Vous avez reçu le prix du manager, je le disais. Est-ce que vous avez un conseil à donner à cette jeune génération qui s'apprête à diriger des entreprises, à gravir les échelons ?
07:57Parfois, certains n'ont pas envie de devenir chef. Est-ce que vous avez un message pour eux ?
08:01D'abord, chef, ça ne s'apprend pas. Je pense que ce n'est pas un métier des chefs. C'est plutôt une question de caractère, d'envie.
08:06J'ai simplement envie de leur dire, typiquement, faites des maths, faites des sciences.
08:10Les sciences vous ouvrent énormément de portes dans plein de domaines industriels, pas uniquement les domaines que nous faisons chez Thalès.
08:16Et surtout, avec la science, je pense qu'on peut vraiment améliorer le monde dans lequel on vit. Et ça, c'est quelque chose qui est inspirant pour nos jeunes.
08:23Merci beaucoup, Patrice Kane, d'avoir été avec nous. Et bravo pour ce prix du BFMO1, du manager de l'année.
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