00:00Le Grand Matin Sud Radio, 7h10, Maxime Liedot.
00:057h40, c'est une, et Sud Radio vous explique ce matin le Livret A.
00:08Est-ce que vous le boudez, auditeur de Sud Radio ?
00:10C'est en tout cas la tendance qui semble s'installer.
00:12Bonjour Philippe Crevel.
00:14Bonjour.
00:15Merci beaucoup d'être avec nous ce matin.
00:16Vous êtes le président du Cercle de l'Épargne.
00:18Est-ce que c'est officiel, les Français décident de bouder le Livret A,
00:21ou ce n'est qu'un chiffre qui ne reflète pas réellement une tendance de fond ?
00:26Alors c'est vrai que depuis deux mois, les Français retirent plus d'argent
00:29qu'ils n'en mettent sur le Livret A,
00:32avec un mois d'octobre qui a été particulièrement marqué par la décollecte,
00:373,5 milliards d'euros.
00:39C'est extrêmement important.
00:40Mais il faut voir que nous sortons d'un cycle qui a été extrêmement porteur pour le Livret A.
00:46De 2019 jusqu'à maintenant, il y a eu 200 milliards d'encours supplémentaires.
00:52Donc les sommes sur le Livret A avaient augmenté de 200 milliards.
00:54Donc c'était considérable.
00:56Donc il y a aujourd'hui un ajustement qui est lié évidemment à la baisse du taux
01:00qui a été décidé à deux reprises.
01:03On est à 1,7 aujourd'hui, c'est ça ?
01:04C'est ça, 1,7%.
01:07Et est-ce qu'il y a aussi le mois d'octobre,
01:09c'est ce qu'on voit dans les différentes études sur les dernières années,
01:12c'est-à-dire qu'on approche de la fin de l'année,
01:14c'est souvent les impôts qui tombent, c'est souvent les dépenses imprevues.
01:17Est-ce qu'on peut voir, si vous voulez, le retrait de l'argent de certains Livret A
01:20comme étant quand même la poire pour la soif dans laquelle on vient piocher ?
01:24Alors, il y a un cycle dans le Livret A,
01:27c'est qu'au cours du premier semestre, on met de l'argent dessus,
01:30puis au cours du second, on en retire.
01:32Pourquoi ? Parce qu'il y a les vacances d'été, puis après, il y a le Black Friday,
01:36il y a les dépenses de fin d'année.
01:38Et puis, c'est vrai que le mois d'octobre, c'est un mois un peu maudit pour l'Ugret A,
01:42avec le mois de novembre.
01:43Il y a très, très peu de mois d'octobre avec une collecte positive,
01:47il y en a deux ou trois depuis une vingtaine d'années.
01:50Et donc, c'est vrai que le mois d'octobre est traditionnellement un mois de dépenses.
01:54En plus, il n'y a pas de prime, il n'y a pas de trésième mois.
01:56C'est un mois pauvre sur les revenus, et c'est un mois où il y a des dépenses,
02:00il y a les impôts locaux en particulier, taxes foncières à acquitter.
02:04Elles sont de plus en plus importantes, ces taxes foncières,
02:06et ça oblige les ménages à puiser un peu dans leur livret A.
02:09Philippe Crevel, vous êtes président du Cercle de l'épargne.
02:11Précisément, quand on se penche aussi sur ces chiffres,
02:13on s'aperçoit que c'est l'assurance-vie désormais qui semble connaître une petite période de gloire.
02:18Qu'est-ce qu'on lui trouve ? Qu'est-ce que les Français lui trouvent à l'assurance-vie ?
02:21L'assurance-vie, les Français sont des épargnants beaucoup plus malins qu'on ne le croit.
02:25Et ils ont constaté quelque chose, c'est que le rendement de l'assurance-vie est supérieur au rendement du livret A.
02:31Donc aujourd'hui, sur la partie garantie en capital, qui ressemble un peu au livret A,
02:36c'est un rendement qui tourne autour de 2,6%.
02:38Et puis il y a des assureurs qui font même des promotions à 3,5%, à 4%.
02:43Et donc dans ces cas-là, quand on compare 2,6%, 4% avec 1,7%, le choix est fait,
02:50on met de l'argent sur l'assurance-vie.
02:51Et puis comme je l'ai dit, beaucoup de Français avaient mis beaucoup d'argent sur le livret A
02:56et se disent aujourd'hui, c'est peut-être le temps de faire une réallocation, d'aller chercher du rendement.
03:01Je n'ai pas un besoin immédiat de cet argent, je peux accepter d'attendre 2, 3 ans.
03:06Et dans ces cas-là, l'assurance-vie, c'est évidemment le placement préféré des Français.
03:09Il y a des avantages fiscaux, il y a la possibilité d'organiser sa transmission pour ceux qui sont plus âgés.
03:15Donc il y a plein d'avantages à l'assurance-vie qui fait que ce produit, évidemment, c'est le premier produit en volume.
03:20Plus de 2 000 milliards d'euros sur l'assurance-vie.
03:23Oui, c'est considérable.
03:24Est-ce que vous pouvez me confirmer une autre tendance, Philippe Crevel,
03:26qui est que de plus en plus de Français de la classe moyenne, notamment, se dirigeraient vers des placements à l'étranger ?
03:32On parle de la Suisse, on parle de l'Espagne, on parle du Luxembourg.
03:35C'est ce que vous constatez, vous aussi ?
03:37Je n'irais pas juste à dire que c'est un grand nombre de Français, c'est plutôt, je veux dire, encore marginal.
03:44Et puis il faut, voilà, les contrats au Luxembourg, les contrats d'assurance-vie au Luxembourg sont proposés par des compagnies françaises.
03:51Ce n'est pas quelque chose d'illégal.
03:54Il faut bien voir que quand on transfère son argent à l'étranger, c'est en toute légalité.
04:00Et il y a des possibilités aujourd'hui, c'est vrai, d'avoir des contrats luxembourgeois qui ont des caractéristiques un peu différentes des contrats français.
04:05Mais sur la Suisse, je ne pense pas qu'il y a un mouvement de fonds important.
04:10Aujourd'hui, il n'y a plus d'avantages à mettre son argent en Suisse.
04:13Les contrôles fiscaux existent.
04:15Et franchement, donc, il y a aujourd'hui, c'est vrai que les Français regardent un petit peu ce qui se passe avec la fiscalité française.
04:21Et puis les menaces, surtout sur les déficits publics qui angoissent un petit peu les assurés.
04:28Mais il n'y a pas de mouvement de panique.
04:29Aujourd'hui, c'est assez marginal.
04:31Les Français restent confiants dans leurs établissements financiers qui sont très bien notés.
04:35Au niveau de la Banque de France, au niveau de la Banque centrale européenne.
04:41Et puis, il y a aussi l'actualité politique, forcément, qui génère des inquiétudes.
04:45On entend beaucoup dire dans les conversations, que ce soit à l'Assemblée nationale, au Sénat, sur les plateaux télé, dans les journaux,
04:51que l'épargne n'est pas bien, et je mets des guillemets, parce qu'elle ne sert pas l'économie.
04:55Qu'est-ce que vous répondez à ce poncif ?
04:58Alors, c'est complètement surréaliste.
05:00Parce que premièrement, l'État est le premier gagnant de l'épargne des Français.
05:03S'il n'y avait pas un taux d'épargne élevé, on aurait une note, par les agences de donation, bien plus dégradée.
05:10Parce que l'épargne, aujourd'hui, qu'est-ce qu'elle finance ?
05:12Elle finance avec l'assurance-vie, en partie, donc l'État.
05:16D'autre part, à quoi ça sert ?
05:19Il n'y a pas d'épargne qui se dort, sauf si on met sous son matelas.
05:22Ça sert à financer les entreprises, à travers les actions, à travers les obligations.
05:28Ça permet aux banques de faire des prêts.
05:30Quand on a un prêt au logement, derrière, il faut qu'il y ait de l'argent qui sert de référent, et c'est l'épargne.
05:35Donc, c'est vrai que l'épargne diminue la consommation, ça c'est vrai, c'est une renonciation à la consommation.
05:40En revanche, elle sert à l'investissement.
05:41Or, aujourd'hui, en France, on manque de quoi ?
05:43On manque d'investissement, on manque d'offres compétitives.
05:46Donc, si on tue l'épargne, on tue notre économie pour demain et après-demain.
05:49Je dirais qu'aujourd'hui, on ne manque pas du tout d'épargne.
05:52Même, on pourrait se poser la question s'il ne faudrait pas plus ou plutôt une épargne mieux orientée.
05:56Oui, et ne parlez pas de malheur, parce que sinon, certains politiques aimeraient aller la chercher au fond des poches.
06:00Merci beaucoup, en tout cas, pour ce rappel salutaire sur la dernière question.
06:03Mon cher Philippe Crevel, je rappelle que vous êtes le président du Cercle de l'Épargne.
06:06Je vous remercie d'avoir été avec nous ce matin.
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