Les recours Amazon - Netflix sur la chronologie des médias avec Anne-Marie Pecoraro, Associée, UGGC Avocats.
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00:00On commence tout de suite ce Lex Inside et on va parler des recours d'Amazon et de Netflix
00:15contre l'arrêté sur la chronologie des médias avec mon invité Anne-Marie Pécoraro associée
00:21au sein du cabinet UGGC Avocats. Anne-Marie bonjour. Bonjour Arnaud. On va voir ensemble
00:26les recours d'Amazon et Netflix sur la chronologie des médias. Pour commencer, sur quels fondements
00:33juridiques Amazon Prime Video et Netflix contestent-ils l'application de l'accord interprofessionnel
00:40sur la chronologie des médias ? Arnaud, en deux mots pour rappeler le contexte, il s'agit d'un accord
00:45triennal qui est étendu par arrêté. En l'espèce, les deux plateformes ne sont pas signataires
00:56de l'accord qui a été étendu. L'accord a donc été étendu à l'ensemble des intervenants
01:01du secteur. Les deux plateformes concernées le contestent sur la base d'un certain nombre
01:07d'arguments qui ne sont pas officiellement partagés puisqu'on n'a pas accès aux documents
01:13de saisine. Mais on sait que cela met en jeu le déséquilibre des délais imposés puisque
01:19Disney, qui a été négociatrice et signataire de l'accord, a obtenu un délai de neuf
01:25mois, alors que ce délai est beaucoup plus court que les deux autres plateformes. Elle
01:30se prévale également d'une distorsion de concurrence et elle se prévale de la violation
01:35de la proportionnalité prévue par la directive de 2018 en estimant que les longueurs des délais
01:45ne sont pas proportionnés finalement à leurs efforts et à leurs contributions financières
01:50pour le cinéma. Elles peuvent invoquer également la liberté d'entreprendre en estimant que
01:54ce dispositif pourrait freiner finalement leur développement, leur liberté d'entreprendre,
02:01leur pouvoir de décision. Et c'est de cette manière qu'elle demande que les délais soient
02:07raccourcis à 12 mois.
02:09Alors justement, vous évoquez les délais prévus par la chronologie des médias, il
02:15y a 6 mois pour Canal+, après la sortie des films en salle, 15 mois pour Netflix, 17 mois
02:20pour Amazon. Comment on justifie ces délais différenciés dans les différentes plateformes ?
02:28Alors, la justification principale de la chronologie des médias reste quand même l'exception culturelle.
02:36C'est-à-dire que la chronologie des médias, c'est un fait relativement isolé dans la société
02:41française, mais elle reste quand même en ligne avec la directive qui régit l'audiovisuel.
02:46Et cette directive cherche un équilibre entre l'encadrement, la régulation, la protection,
02:57l'encadrement, l'encadrement, l'encadrement, la diversité, l'exception culturelle, la valeur
03:06de la culture, l'accès au public, à différentes...
03:07Donc c'est réellement la recherche d'un équilibre entre des contraintes économiques
03:13juridiques et des objectifs culturels et de développement.
03:19Ce qui peut aller plus loin finalement que les fenêtres qui sont trouvées dans d'autres
03:26pays sur la base d'accords contractuels.
03:29Mais ici, on a vraiment une politique publique globale et qui jusqu'ici, bien que différente,
03:38c'est très bien combiné au final avec l'ensemble de l'écosystème.
03:42Alors ces plateformes avancent qu'elles financent aussi le cinéma et donc c'est pour ça
03:48qu'elles souhaitent des délais plus courts et d'autant plus que, par exemple, Amazon
03:52dit que c'est un usage déconnecté par rapport à l'usage des Français, c'est-à-dire
03:56que les Français ont l'habitude de consommer rapidement, regarder les films au cinéma.
04:01Qu'est-ce que vous pensez de ces arguments au final ?
04:03L'argument de l'usage déconnecté, il a un historique et il a une portée limitée.
04:10Il est lié à l'argumentation sur la piraterie.
04:15C'est un argument qui revient régulièrement et qui consiste à dire que si les spectateurs
04:20doivent attendre trop longtemps pour voir un film, ils vont avoir tendance à le pirater.
04:25Cet argument, il est d'autant plus pertinent que les fenêtres sont longues.
04:29Et il peut être vécu comme étant moins fondamental si les fenêtres se raccourcissent,
04:35si l'offre de streaming se généralise, se démocratise.
04:40Et au final, plus les films sont disponibles également par une offre de streaming varié
04:45des délais courts comme ceux de Disney actuellement, moins le public aura tendance à pirater.
04:51Donc cet argument, là où il a une source historique, c'est qu'on va le retrouver
04:55effectivement par rapport au délai, aux régulations.
05:00Et notamment, tous les ans, la Motion Picture Association sort un rapport qui, cette année
05:05encore, en mars, a évoqué le fait que ça pourrait créer une fenêtre de piraterie.
05:12Donc ça, c'est l'historique, la justification.
05:14Maintenant, il a quand même une portée limitée parce qu'il est vrai que l'argument du confort
05:21du spectateur est de dire que ça ne correspond pas aux usages, ils veulent voir les films
05:25tout de suite, etc.
05:26Mais d'un autre côté, les fenêtres d'exploitation, encore une fois, elles sont installées à l'étranger
05:32par le biais de clauses contractuelles.
05:34Et elles sont installées chez nous depuis de nombreuses années.
05:38Et elles ont tendance à s'améliorer constamment, comme on le voit avec les plateformes.
05:41Et finalement, à créer une cohabitation.
05:44Le résultat actuel, c'est quand même qu'on a une cohabitation avec les plateformes
05:48qui, certes, investissent, mais aussi ont un réel retour en termes de marché.
05:56Et donc...
05:57Ça fonctionne plutôt bien, c'est ce qu'on voulait dire.
05:59Ça fonctionne aux yeux de la plupart des personnes concernées.
06:03Pas tout le monde, mais la plupart, ça fonctionne quand même plutôt bien.
06:06Et les spectateurs semblent s'y habituer.
06:08On va revenir sur le recours et aux conséquences en cas de succès de ce recours.
06:13Quelle serait-elle ?
06:15Alors, en cas de succès du recours, le Conseil d'État étudie un recours
06:20et va pouvoir, finalement, le critiquer totalement ou en partie.
06:28La critique totale est peu probable, puisque finalement, ça concerne une négociation avec de nombreux acteurs
06:35qui se sont, finalement, tombés d'accord.
06:40S'il y avait une procédure spécifique accélérée, il pourrait y avoir une suspension si les conditions étaient réunies.
06:46L'accord peut également être maintenu comme il est.
06:52Disons que dans l'hypothèse, effectivement, où on rencontre une critique partielle sur un certain nombre de demandes d'Amazon et Netflix,
07:01il y aurait donc une conséquence qui combinera forcément non seulement leur délai, qu'on appelle leur fenêtre,
07:09mais aussi le montant des investissements,
07:10puisque tout l'équilibre de la chronologie repose constamment sur un montant d'investissement
07:16qui va correspondre à un délai.
07:20Et la photographie actuelle, effectivement, est critiquée.
07:23Et d'un autre côté, c'est vrai que Netflix et Amazon ne l'ont pas signée
07:26et se le sont vus appliquer par arrêté.
07:29Donc, le paysage va se redessiner.
07:32Je voudrais simplement aussi rappeler que, à l'occasion du renouvellement de 2025,
07:38il y a eu des tractations et des négociations.
07:41Et le résultat, qui n'était pas évident,
07:43c'est que, finalement, la nouvelle chronologie de 2025,
07:46c'est quasiment la même, je dis quasiment, que celle de 2022.
07:51Donc, il y a eu quand même assez peu de modifications.
07:53Il y a eu surtout des clarifications, notamment sur des fins de fenêtres.
07:57Et il y a eu l'accord parallèle de Disney qui change les choses,
08:01parce que l'accord permet d'obtenir les neuf mois.
08:07Donc, pour répondre à votre question,
08:10finalement, la modification des lignes,
08:12qui n'a pas eu lieu par la négociation et la préparation de cet accord de 2025,
08:19elle va peut-être se préciser par la décision du Conseil d'État
08:27et quand il renverra les partis à discuter.
08:29Et pour finir, ça peut prendre combien de temps avant que le Conseil d'État se prononce ?
08:34Alors, là-dessus, on ne peut pas dire quelque chose de certain,
08:37mais on peut s'attendre à ce qu'il serait peu probable
08:41qu'avant le prochain Festival de Cannes, ce n'est pas impossible,
08:44mais c'est vrai qu'on aime bien avoir le Festival de Cannes comme le temps des annonces.
08:48Bien sûr.
08:48Mais ça ferait quand même un délai court d'à peine plus d'un an.
08:53Donc, si on résorbe en termes de calendrier de cinématographique,
08:59je dirais que ce serait plus après ce Festival de 2026,
09:02peut-être entre juin, septembre.
09:05Et on l'espère quand même que pour la rentrée de 2026,
09:08on aura une réponse,
09:10à moins que le Conseil d'État ne mette un coup d'accélérateur sur ce dossier prioritaire.
09:13On va suivre tout ça avec intérêt.
09:15Merci Anne-Marie d'être venue sur notre plateau.
09:17Je rappelle que vous êtes associée au sein du GGC Avocat.
09:20Merci Arnaud.
09:21Tout de suite, l'émission se poursuit.
09:23Dans la deuxième partie, on va parler de l'impact de la Legaltech sur le marché de l'immobilier.