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  • 11/08/2025
Il venait à peine de naître que déjà, sa vie ne tenait plus qu’à un fil. Son cœur, ou ses reins, ou son foie — trop fragile, trop malade. Pour lui, aucun traitement classique ne suffisait. La seule option : une greffe, comme ultime espoir. À quelques jours de vie, il a déjà connu les services de réanimation, l’attente insupportable, l’angoisse de ses parents suspendus à un appel. Une course contre la montre s’est engagée. Parce que parfois, dès les premières heures, il faut se battre pour vivre.

Catégorie

Personnes
Transcription
00:00Perdre un enfant, c'est inexplicable en fait, c'est pas dans le bon ordre de la vie.
00:04Au début on priait pour qu'on nous laisse notre fils,
00:06à la fin on priait pour qu'on nous le prenne mais sans douleur.
00:08On voulait pas qu'il souffre et ça, ça a été très très très difficile à vivre
00:12parce que j'ai jamais été confrontée à la mort de cette manière.
00:15Je suis venue vous raconter l'histoire de la grève de mon fils
00:19qui s'est fait greffer à trois semaines de vie.
00:20Le jour de mon accouchement, ce qui s'est passé c'est qu'il a été en hypothermique.
00:25Au début les médecins, les sages-femmes pensaient qu'il avait peut-être juste du mal à se réchauffer
00:29donc on l'a mis contre moi mais ça a duré en fait.
00:31Toute l'après-midi, il est descendu à 35-34 degrés.
00:34Ensuite ils se sont aperçus qu'il était en hypoglycémie
00:36donc ils ont essayé de le resucrer, ça marchait pas.
00:39Vers 17h, il a été emmené en néonatologie.
00:42On lui a fait un premier bilan sanguin et on nous a dit que c'était son bilan hépatique
00:46donc au niveau du foie, le bilan concernant le foie qui était très perturbé.
00:50On m'a demandé d'arrêter d'allaiter mon fils
00:51parce que là je suis tombée sur un premier médecin qui m'a énormément blessée
00:54parce qu'il a dit que c'était certainement de ma faute si son bilan était perturbé
00:58et s'il n'arrivait pas à se resucrer
00:59parce que c'était certainement mon lait qui n'était pas assez consistant.
01:02Donc je suis retournée dans ma chambre d'hôpital et j'ai fondu en larmes.
01:05Donc une sage-femme m'a tout de suite récupérée dans ma chambre.
01:08Elle m'a rassurée en me disant que ça n'avait rien à voir,
01:11qu'il ne pouvait pas se permettre de me dire des choses comme ça.
01:12Au début je pensais vraiment que c'était de ma faute.
01:14Donc ensuite les jours, enfin les heures surtout ont suivi
01:17où les médecins se relayaient, personne n'arrivait à nous trouver de réponse en fait de ce qui se passait.
01:23Et là j'ai commencé à m'inquiéter.
01:24On a commencé à me dire que s'il était en hypoglycémie,
01:27c'est peut-être qu'il avait une maladie qui était l'inverse du diabète.
01:29Donc lui peut-être que son corps ne stockait pas du tout le sucre et détruisait.
01:33Enfin je ne comprenais rien en fait.
01:34On parle là-dessus, très bien, est-ce qu'on va trouver une solution ?
01:37Bah non en fait on n'a pas de réponse à vous apporter, on le transfère.
01:41Et là ça a vraiment été le début du cauchemar.
01:43Parce qu'en fait on est arrivé donc à l'hôpital et il a été pris en charge dans une chambre.
01:46Et là je suis tombée sur un médecin qui a commencé à me faire des blagues.
01:49Ce n'est pas vraiment le moment de me faire des blagues, je ne comprenais pas trop.
01:52Après avoir souri à sa propre blague, il m'a regardé, il m'a dit
01:54écoutez vraiment c'est très grave.
01:56D'accord mais est-ce que vous pouvez au moins nous donner un peu d'informations ?
01:59Enfin qu'est-ce qui se passe ?
02:00Non non écoutez, est-ce que vous et votre mari vous êtes parents ?
02:03Non on n'est pas parents.
02:04Vous êtes sûr ?
02:05Oui bien sûr on est sûr.
02:06Mais vous êtes de quelle origine ?
02:07Alors on donne notre origine, donc on est algériens tous les deux.
02:10Vous êtes sûr de ne pas venir du même village ?
02:13Non absolument pas.
02:14On n'est pas parents.
02:15D'accord très bien.
02:15Non parce que vous savez des fois il y a des parents qui sont peut-être cousins, tout ça.
02:19Donc gros cliché en plus, gros cliché.
02:21Très raciste et en plus lui-même était maghrébin.
02:23Donc déjà ça, ça met un coup.
02:25Les jours passent et il a été mis à un moment donné dans un service mieux, entre guillemets.
02:30En gros quand on est arrivé dans ce second service là, on nous a dit que c'était parce que notre fils allait mieux.
02:35Donc on voyait peut-être la peur de la sortie.
02:36On s'est dit peut-être, voilà ça y est c'est peut-être fini.
02:39On n'a toujours pas donné d'informations sur son état.
02:41Juste son bilan hépatique, donc son bilan du foie qui ne faisait que se détériorer.
02:45Et le bilan hépatique, ça inclut tout ce qui est lié au sang, donc à l'hémoglobine et tout ce qui est lié à la coagulation.
02:51Donc le fait qu'on arrête de saigner naturellement.
02:54Et eux, ils avaient vraiment très peur de ça.
02:56Ils avaient peur qu'en gros, que peut-être il fasse une hémorragie interne et que ça ne s'arrête pas de saigner.
03:00Parce que ses facteurs de coagulation sont tellement bas à cause de son foie que peut-être qu'il mourrait d'une hémorragie.
03:06Ils ont essayé de perfuser mon fils et comme il était tout petit, tout nouveau-né, c'est très difficile de trouver des veines.
03:11Et ils n'ont pas réussi.
03:12Et ce qu'ils ont fait, c'est qu'ils ont dû lui raser une partie de la tête pour tenter de lui poser une perfusion sur le crâne.
03:16Ça a été hyper difficile parce qu'on nous a défiguré un peu notre enfant.
03:20On nous a demandé de sortir de la chambre parce qu'on nous a dit qu'il allait énormément pleurer et que ça allait être très douloureux pour lui.
03:26Donc on est sortis de la chambre.
03:27Et le pire dans l'histoire, c'est qu'ils n'ont pas réussi à le perfuser.
03:29Donc on a vu à travers son crâne toutes les marques de piqûres qu'ils ont tenté de faire.
03:33Il a fini par retourner en réanimation et en fait, à un moment donné, j'avais mon bébé sur moi.
03:39Et là, le fameux médecin, le premier médecin que j'ai rencontré qui m'a fait la fameuse blague, il me dit
03:42« Oui, écoutez, j'ai l'impression que vous ne vous rendez pas compte de ce qui se passe. »
03:46Et je lui dis « Mais comment ça ? »
03:48Il me dit « Bah écoutez, je ne devrais pas vous le dire. »
03:50Effectivement, il n'aurait pas dû me le dire.
03:51« Je ne devrais pas vous le dire, mais on a eu une petite fille qui est venue il y a quelques semaines avec exactement les mêmes symptômes que votre fils et elle est morte. »
03:58Et je lui dis « Mais vous êtes en train de me dire que mon fils va mourir et j'étais en larmes. »
04:01Et il me dit « Écoutez, je ne suis personne pour dire que votre fils va mourir.
04:05Ce n'est pas à moi de décider de ça. »
04:06Mais effectivement, c'est ce qui va se passer.
04:08Alors toujours dans mon regain d'espoir, je lui dis « Mais si cette petite fille est morte de la même chose que ce que mon fils a, c'est que vous avez une piste de ce qu'il a peut-être ? »
04:18Non, non, écoutez, les parents ont accepté l'autopsie.
04:21Et du coup, ça peut prendre quelques mois avant d'avoir des résultats.
04:23D'ailleurs, si vous aussi, si ça vient, il faudra aussi accepter l'autopsie.
04:28De là, j'étais en larmes, j'étais effondrée, j'avais envie de lui hurler dessus, j'avais envie de lui dire de partir en fait, de pourquoi, pourquoi il est rentré dans la chambre.
04:35J'étais tranquille avec mon fils, tranquillement.
04:37Pourquoi, il est qui lui pour oser me dire que je ne me rends pas compte de la situation ?
04:42Comment on peut dire ça à quelqu'un ?
04:43On me demande d'accepter de découper mon fils et de l'ouvrir alors qu'il est là, il vit, il respire.
04:49On nous a totalement déshumanisé la situation.
04:51Pour moi, il était hors de question que je laisse la vie de mon enfant entre les mains de personnes qui ne veulent pas se battre pour lui.
04:56Donc, on m'a parlé de l'hôpital Necker, donc hôpital pour enfants à Paris.
05:00Arrivé à l'hôpital Necker, je suis tombée sur une hépatologue, donc médecin du foie.
05:03C'est une dame qui connaît encore mon fils aujourd'hui.
05:06Et quand on est arrivés, elle nous a dit « Écoutez, voilà, c'est très grave.
05:11On ne va pas vous le cacher, on est obligés de vous le dire, c'est très grave.
05:13On ne sait pas ce qu'il a, mais on fera tout pour savoir. »
05:16Et juste ça, pour nous, ça a été un grand pas.
05:18Donc, il faut savoir que là, à ce moment-là, mon fils, il était au niveau de son...
05:23Enfin, physiquement, il était bien, il pleurait, il interagissait comme il pouvait.
05:28Il n'avait que 10 jours à ce moment-là.
05:30Il était aux alentours de 4 kilos et on nous avait dit que déjà, par rapport à ça, il serait éligible à la greffe.
05:35Parce que c'était 4 kilos minimum pour être éligible à une greffe.
05:38Et nous, pour nous, la greffe, c'était vraiment...
05:41Oui, non, mais vous savez, si ça ne va pas, greffez-le.
05:43Faites-lui une greffe.
05:44Ça paraît tellement simple de dire ça quand on ne s'y connaît pas,
05:47de dire « Non, mais attendez, aujourd'hui, on greffe des gens, greffez-le. »
05:50Et en fait, on nous a dit « Non, mais ça ne va pas se passer comme ça, en fait.
05:53Il faut vous rendre compte que ça, ce serait vraiment le dernier recours.
05:56Parce que pour eux, la greffe, c'est quelque chose de lourd.
05:58C'est risqué.
05:59Ce n'est pas juste prendre un organe et le remplacer par un autre.
06:01Il faut que le corps l'accepte.
06:02Il faut que les heures qui suivent la greffe se passent bien,
06:06que la personne survive, il peut y avoir plein de complications.
06:09C'est vraiment une décision lourde de conséquences.
06:12Et moi, je n'en avais pas conscience à ce moment-là.
06:13Avec mon mari, on se relayait.
06:15Je passais toutes mes nuées à l'hôpital
06:16parce que lui, après, il a été obligé de reprendre le travail.
06:19Donc, je venais la journée, je rentrais le soir à 16h.
06:21Je reprenais le tram, le métro.
06:23Je rentrais chez moi quelques heures pour me doucher,
06:25pour voir mes autres enfants, partager un repas avec eux.
06:27Je repartais.
06:28Et un jour, on est venus avec mon mari.
06:32On a essayé de se reposer un peu ce matin dimanche.
06:34Cette fois-ci, je n'avais pas dormi à l'hôpital.
06:35Et quand on arrivait dans la matinée,
06:37notre fils ne se réveillait pas.
06:38Il avait les yeux complètement fermés.
06:39Et donc, moi, j'essaye de le réveiller.
06:41Et avant, juste le fait d'entendre le son de ma voix,
06:43tout de suite, il ouvrait les yeux et tout de suite, il réagissait.
06:45Là, rien.
06:46Je lui prends la main et sa main, elle tombe.
06:48Poupée de chiffon.
06:49J'appelle l'infirmière et je dis, écoutez, il ne se réveille pas.
06:51Il ouvre les yeux et ses yeux repartent en arrière
06:53et sa tête tombe.
06:54Et on se regarde avec mon mari, on dit un truc qui ne va pas.
06:57Je ne le sens pas.
06:58L'infirmière ne veut pas m'écouter.
06:59Et je ne lui en veux pas.
07:05Elle a peut-être eu un manque d'attention.
07:07Et on essaye de le faire manger, il ne mange pas.
07:08On essaye de lui mettre le biberon dans la bouche et il ne mange pas.
07:11Et rien ne se passe.
07:12Le médecin arrive.
07:13Elle dit à l'infirmière, vous avez pris sa température ?
07:15L'infirmière, elle dit, ah bah non.
07:16Prend sa température, mon fils, il est à 34 degrés.
07:19Hypothermie sévère.
07:20De là, il y a au moins 5 ou 6 personnes qui déboulent dans la chambre.
07:23Ils amènent une couveuse, ils le déshabillent, ils le mettent dans la couveuse.
07:26Et de là, il y a une dizaine de personnes qui rentrent.
07:28Et là, je vois le médecin se décomposer.
07:31Elle me dit, écoutez, bah ça y est, ça ne fonctionne plus.
07:34Et là, je comprends directement que le foie de mon fils ne marche plus.
07:36Il faut savoir que le foie, ça sert à filtrer.
07:38Et que si le foie ne fonctionne pas, tous les déchets, entre guillemets, s'accumulent dans le sang.
07:42Et quand ça s'accumule dans le sang, ça fait monter le taux d'ammoniaque dans le sang.
07:47Chose qui n'est pas normale.
07:48Et en fait, son taux d'ammoniaque ayant augmenté dans son sang, ça a rendu son sang acide.
07:54Et en fait, ils avaient peur que son cerveau soit en train de se détruire.
07:56Et elle nous a dit, on ne peut plus rien faire, il faut le greffer en urgence.
08:00Elle m'a dit, là, on va voir déjà s'il tient la nuit.
08:03Et là, on s'est effondré.
08:04Et là, il a commencé à devenir tout rouge.
08:06Il a commencé à gonfler partout.
08:07Donc du coup, on nous a expliqué qu'il fallait qu'il passe la nuit pour avoir que les hépatologues
08:11y aient le temps d'arriver.
08:12Et ils donnaient leur diagnostic, entre guillemets.
08:14Et on nous a dit que si à un moment donné, son activité cérébrale posait problème,
08:19qu'ils arrêteraient tout.
08:20Qu'ils donneraient plus de soins, qu'ils ne feraient plus rien.
08:22Parce que ça voudrait dire que si le cerveau lâche, tout lâche.
08:25Et que ça serait un légume.
08:26Pour faire une grève de foie, il faut avoir des autorisations.
08:28Il faut faire des documents.
08:29Ça ne se fait pas juste comme ça.
08:31Il faut avoir un donneur.
08:32Il faut avoir un greffon.
08:33Il faut être inscrit sur la liste de demandeurs de greffes.
08:35Et tout ça, ça ne pouvait pas se faire en une seule nuit.
08:37Donc, on a attendu toute la nuit.
08:39Et mon mari et mon étaient en larmes.
08:41En fait, on est passé dans une phase où au début, on priait pour qu'on nous laisse notre fils.
08:44À la fin, on priait pour qu'on nous le prenne, mais sans douleur.
08:46On ne voulait pas qu'il souffre.
08:47Et ça, ça a été très, très, très, très difficile à vivre.
08:50Parce que je n'ai jamais été confrontée à la mort de cette manière.
08:53J'ai déjà perdu des êtres très chers.
08:54Mais perdre un enfant, c'est inexplicable, en fait.
08:58Et ce n'est pas dans le bon ordre de la vie.
09:00Le matin, son hépatologue est venu.
09:02Elle m'a dit, voilà, c'est ce que je redoutais.
09:04Elle m'a dit, écoutez, on va tenter une greffe.
09:05Son cerveau réagit bien.
09:06En tout cas, pour le moment, on va tenter la greffe.
09:08Mais par contre, on n'est pas du tout sûr que ça va fonctionner.
09:12Et on nous a dit, voilà, on inscrit votre fils sur la liste super urgente.
09:15Il y a plusieurs stades de liste au niveau des demandeurs d'organes.
09:19Et il y a la liste super urgente.
09:21C'est vraiment la liste, bah, tu es en train de mourir et on te met en priorité des priorités.
09:25Ensuite, peut-être une heure plus tard, une hépatologue vient.
09:28Elle dit, écoutez, je ne devrais pas vous le dire.
09:30Mais ça y est, on a un greffon compatible en une heure.
09:33Et là, on s'est regardé.
09:35On s'est dit, ce n'est pas possible.
09:37Elle nous a dit, écoutez, on ne devrait pas vous le dire.
09:38Mais c'est un truc qui n'arrive jamais.
09:41On a inscrit votre fils sur la liste super urgente des dons d'organes.
09:45Dix minutes après, on a eu un appel.
09:47On nous a proposé un greffon compatible.
09:48Et voilà, là maintenant, il faut qu'il passe la nuit supplémentaire.
09:51Parce que le greffon n'est pas ici, il n'est pas à Paris.
09:53Et on nous a dit, là, c'est la dernière nuit.
09:54Il faut vraiment qu'il survive à cette nuit.
09:56Il faut qu'il tienne.
09:57Dites-lui, dites-lui qu'il faut qu'il tienne.
09:59Alors, on a passé la nuit avec lui.
10:00Mon mari est rentré.
10:01Et donc, du coup, le matin, 5h du matin, je dis, ça y est.
10:04Et elle vient de me voir.
10:05Elle me dit, ça y est, madame, on l'emmène.
10:07Et du coup, j'accompagne mon fils.
10:08Je vais jusqu'au bout.
10:09Je revois, du coup, son anesthésiste, tout ça.
10:12Elle me dit, voilà, faites-lui un dernier bisou.
10:15Embrassez-le, faites-lui un dernier câlin.
10:16Parce qu'on ne sait pas comment ça va se terminer.
10:18L'opération a duré 10h.
10:20On m'a dit de rentrer.
10:22Et on est rentré et je suis tombée KO, en fait.
10:24J'étais tellement épuisée que je suis tombée KO.
10:26Et ensuite, dans l'après-midi, je reçois un appel.
10:29Et là, je secoue mon mari.
10:31Je lui dis, il y a un main.
10:32On m'appelle, on m'appelle.
10:32Il y a un 01 qui m'appelle.
10:34Réveille-toi.
10:34Et de là, le professeur qui m'appelle et qui me dit,
10:37bonjour, madame, vous êtes la maman d'Isaïa ?
10:41L'opération s'est bien passée.
10:43Ne vous inquiétez pas, tout va bien.
10:44Il n'y a pas eu de complications pendant l'opération.
10:46Le greffon a bien pris sa place.
10:48Les prochaines 48h vont être décisives.
10:50Parce que c'est les prochaines 48h les plus dures.
10:52Et il faut qu'ils survivent à ça.
10:54Pas ni une, ni deux.
10:55On s'est habillés.
10:55On est partis comme des dingues.
10:57Mais rien n'était joué.
10:58Parce qu'en fait, il ne savait pas si ce greffon allait bien tenir.
11:00S'il n'allait pas y avoir de rejet.
11:02Et ce qui était décisif, c'était ses prises de sang.
11:04Mon fils passe les 72 premières heures, normalement.
11:07Ça va.
11:08Il sort de la case à risque, on va dire.
11:11Mes enfants ont pu le voir pour la première fois.
11:13Et venu le jour, on nous a dit
11:14« Ben voilà, madame, vous allez être formée par l'infirmière. »
11:17Je lui dis « D'accord ».
11:19Il me dit « Vous savez ce que ça veut dire ? »
11:20Je lui dis « Non. »
11:21« Ben, ça veut dire que vous allez bientôt sortir. »
11:22Et là, pour moi, c'était improbable.
11:25Et en fait, c'était une nouvelle page qui s'ouvrait.
11:27Pas forcément plus simple.
11:28Parce que j'entrais vraiment dans le vif du sujet.
11:30Dans le sens où tous les médicaments, maintenant, ça allait être moi.
11:33J'allais être un peu son infirmière à mon fils.
11:35Et j'allais prendre cette casquette-là en plus d'être maman.
11:37Et donc, on m'a formée à ça.
11:38Quand il est sorti de l'hôpital, il devait avoir, je sais pas,
11:41un traitement avec 12 médicaments différents par jour.
11:44Il avait des piqûres aussi le matin, très tôt,
11:46par des infirmières qui venaient le piquer.
11:47Des prises de sang toutes les semaines.
11:48Ma sortie de l'hôpital, ça a été...
11:51En fait, c'est simple.
11:52C'est très très bête.
11:52Mais la première chose que j'ai faite quand je suis sortie...
11:54Et je suis partie à Action.
11:56J'avais besoin de faire quelque chose de totalement normal avec lui.
11:59Et de lui faire découvrir le soleil, les arbres, la pollution, n'importe quoi.
12:06Mais juste qu'il découvre et qu'il observe ce qu'il n'a pas pu observer
12:11pendant tout le temps qu'il était dans sa chambre d'hôpital.
12:15Depuis sa sortie, j'ai pas pris le temps de me poser.
12:20Mais j'ai dû me calmer.
12:23Parce qu'en fait, j'avais emmagasiné tellement de choses en moi.
12:26Que ce soit de la tristesse, de l'inquiétude, de la rage, de la colère.
12:30Il fallait que ça sorte.
12:30Et à un moment donné, j'avais beaucoup trop de colère en moi.
12:32Et il m'a fallu à un moment donné reprendre soin de moi.
12:36Et heureusement que j'ai un mari extraordinaire qui me pousse à le faire.
12:40Parce qu'il pourrait ne pas écouter mes besoins et en faire qu'à sa tête.
12:43Mais c'est pas du tout le cas, au contraire.
12:44Et si aujourd'hui, j'arrive à reprendre soin de moi, à me remaquiller, à me racheter des beaux vêtements.
12:49C'est parce qu'à un moment donné, j'étais complètement dans l'oubli de moi-même.
12:52Et que je ne vivais que pour ça.
12:54Ça nous a remis un peu les pendules à l'heure, cette épreuve-là.
12:57Parce que, bien qu'on n'a jamais été des gens très extravagants ou quoi que ce soit.
13:02Mais je pense que pour n'importe quelle personne, ça te remet les pieds sur terre.
13:06Dans le sens où tu te dis, sur cette terre, t'es pas grand-chose.
13:09Et si tu te raccroches pas, tu n'y arrives pas.
13:11Et si tu y crois pas, tu n'y arrives pas non plus.
13:13Et si mon fils est passé par tout ça, on peut pas aujourd'hui se plaindre de futilité.
13:18On peut juste croquer la vie à pleines dents, profiter un maximum.
13:21Je profite de ma vie, je profite de ma vie de couple, je profite de ma vie de maman.
13:24Et je crois que j'ai jamais, même professionnellement parlant,
13:27je crois que j'ai jamais été aussi ambitieuse que maintenant de vouloir faire plein de choses,
13:30de vouloir m'ouvrir à plein de choses.
13:31Alors qu'avant, je m'en empêchais.
13:33Parce qu'avant, je voyais que mes enfants, mon mari.
13:35Et maintenant, je pense que je suis bien plus que ça.

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