Il pensait changer sa vie. L’opération des yeux devait lui offrir une liberté nouvelle : plus de lunettes, plus de contraintes. Mais dès les premiers jours, tout a basculé. Douleurs, complications, angoisses… Son cauchemar avait commencé. Ce qui devait être une délivrance est devenu une épreuve qu’il n’avait jamais imaginée.
02:06et bien me sucer la bille, et j'en passe des choses plus horribles encore. »
02:09De la violence physique aussi, parce qu'on me tapait, parce qu'on me crachait dessus.
02:14On estimait, visiblement, que je n'étais pas un être humain,
02:18digne d'être respecté, digne d'être aimé et juste considéré.
02:23Cette honte progressive qui s'installe en moi,
02:25ça vient renforcer déjà cette conviction que c'est moi le problème,
02:28qu'en réalité je le mérite d'une certaine manière,
02:31et que je dois en parler à personne,
02:32parce que c'est tout simplement impossible pour moi d'oser parler de ça.
02:36Et en plus, je ne pouvais pas en parler.
02:37C'était une conviction profonde que je n'avais personne à qui en parler.
02:40Donc je survivais, en fait.
02:41J'ai serré les dents et fait ce que je pouvais pour rester en vie, vraiment.
02:45Donc ça a été deux années de destruction.
02:48Ça m'a détruit au plus profond de mon âme.
02:51Moi, je parle de vie de psychologie.
02:52Je n'ai pas été violé sexuellement, et j'ai envie de dire tant mieux,
02:55mais j'ai vécu un vie de psychologie qui se sont rentré au plus profond de ma personne,
03:00de mon esprit, de ma cervelle, de mes convictions.
03:03Et ils ont tout piétiné, ils ont tout sali, ils ont tout détruit, ils ont tout réduit à néant.
03:08Et en plus, c'est à cette période-là où mon père tombe fortement malade.
03:11Je rentre chez moi et je fais comme j'ai toujours fait, c'est-à-dire semblant.
03:15Mais je sens que je suis à la limite de flancher.
03:18Et du coup, un soir, dans ma tête tout seul, je me dis, demain je vais m'en régime,
03:22parce que ce n'est plus possible.
03:22Et finalement, les 10 kilos, je les perds très rapidement.
03:24Et là, le regard de ma mère commence à changer.
03:27Et c'est à ce moment-là que la rage arrive pour la première fois dans ma vie,
03:30de me dire, je vais réussir, je vais y arriver, parce que l'objectif, c'est de devenir quelqu'un d'autre.
03:35Et j'en suis capable.
03:35Et donc, j'en perds 10 de plus, et puis 10 de plus.
03:38Et là, ma mère, elle me montre quelque chose que je n'ai jamais vraiment eu,
03:42c'est-à-dire, elle s'intéresse, elle est fière.
03:44Je ne me rends pas tout de suite compte, mais ça, je l'intègre.
03:46Et je me dis, ah ouais, en fait, ça, ça l'intéresse.
03:48Et à un moment donné, le régime vrille.
03:51Mon père est toujours malade, la sphère familiale n'a pas changé, je suis en classe de première.
03:54Et tout a changé aussi au lycée, c'est-à-dire que je me suis mis dans une phase où je dois tout défoncer sur mon passage.
04:01C'est-à-dire, l'objectif, c'est félicitations à tous les trimestres.
04:04Donc, je travaille comme un dingue, je ne vis plus que pour ça, en même temps que je fais le régime.
04:09Donc, je m'enferme dans une autre forme de bulle et de contrôle, et je vais me faire vomir.
04:12À ce moment-là, j'avais perdu 45 kilos en une année.
04:15Et en réalité, les désordres alimentaires, l'anorexie, la boulimie,
04:19va très rapidement prendre le contrôle sur tout le reste.
04:21Le quotidien devient guidé par ça.
04:24Et ça devient une autre forme de harcèlement, sauf que je suis mon propre bourreau, en fait.
04:29Mais tout ça, c'est caché.
04:30Personne ne le sait.
04:31Jusqu'à un moment où ma mère commence à avoir des doutes.
04:33Et une fois, elle me suit aux toilettes parce qu'elle se doute de quelque chose.
04:37Et elle m'entend, et là, elle me chope vraiment un peu par...
04:41Et pas avec psychologie.
04:43C'est, je vais te déglinguer, je vais te défoncer.
04:46Qu'est-ce que tu fais ?
04:47Elle est horrifiée, mais moi, je m'en fous.
04:49Parce que c'est trop tard.
04:51Moi, je suis déjà embarqué dans mon obsession, dans ma volonté de contrôle.
04:54Je suis déjà ailleurs.
04:55Tout ça dans l'optique de devenir quelqu'un d'autre.
04:57Parce que dans ma tête, il faut devenir quelqu'un d'autre.
05:00Mais il va falloir aussi devenir quelqu'un d'autre socialement parlant.
05:03Et là, je tombe sur juriste d'entreprise, avocat.
05:06Je fouine un peu tout ça, le parcours d'études qu'il faut faire.
05:10Et je me dis, ok, c'est parti.
05:11Et je suis allé l'accepter en classe préparatoire normale sup au lycée Turgot, à Paris.
05:16Alors là, je suis super content.
05:17Parce que je me dis, c'est bon, de toute façon, le processus de changement et de création de la nouvelle créature, le nouveau Alexandre, est en marche.
05:24Il n'y a plus rien qui peut m'arrêter.
05:26J'intègre la classe prépa.
05:27Donc, qui dit classe prépa dit rythme effréné.
05:29Et je me sens microscopique.
05:32J'arrive dans cette salle de cours avec des gens très, très snobs, issus de familles très bourgeoises, qui parlent de leur été comme étant des étés.
05:40Moi, j'ai vécu un été où j'ai travaillé dans une usine pour gagner un peu d'argent.
05:43Et eux, ils me parlent d'un été où ils ont soit préparé le concours Science Po, soit ils sont partis.
05:47Je ne sais pas sur quelle île, quoi.
05:49Donc, je me dis, d'accord, ok, on n'est pas du tout dans le même monde.
05:51Et dans quel milieu je suis ?
05:53Qu'est-ce que je fais là ?
05:53Et puis, il se passe quelque chose dans mon inconscient, et dans mon conscient, plutôt.
05:58C'est qu'on est à plus un an de la mort de mon père, à laquelle je n'ai absolument pas réagi.
06:03Sauf que là, je commence à réagir.
06:04Et c'est comme si je venais d'apprendre que mon père était mort.
06:06Et au bout de trois semaines, je quitte un cours parce que j'ai tout.
06:09Parce que je suis en crise d'angoisse, parce que je n'arrive plus à respirer.
06:11Il faut que je sorte de cet endroit, ce n'est plus possible.
06:13Et j'explose dans la rue, et plus rien n'est possible, en fait.
06:16La seule chose que je veux, c'est rentrer et me coucher.
06:18Je reprends le train et je rentre.
06:19Où je vais rester plus de six mois, enfermé dans ma chambre, chez ma mère, dans le noir.
06:23A ne plus m'alimenter, à ne plus sortir et à dormir.
06:25J'ai 18 ans, je mesure 1m75, je pèse 45 kilos.
06:30Et j'ai l'impression que ma vie est foutue.
06:32Et au bout de six mois, je repointe un peu le bout de mon nez dehors.
06:35Un peu poussé quand même par ma mère et ma sœur.
06:37Essaye peut-être de trouver un petit job, faire quelque chose.
06:39Il va falloir faire quelque chose à la rentrée prochaine.
06:42Et puis, à un moment donné, je leur dis, en fait, à la rentrée, je repars à la fac de droit.
06:45Et alors là, ils se disent, mais il est complètement paré.
06:47La prépa, il a brillé complet, alors que c'est déjà une prépa en droit.
06:51Ouais, mais c'est ce que je veux faire.
06:52Donc, je pars.
06:52Je suis dans un état d'angoisse, de pression.
06:56Parce que je me dis, là, il faut réussir.
06:58Donc, je travaille, je travaille, je travaille, je travaille.
07:00Et puis, je découvre le milieu gay parisien.
07:03Et au fond de moi, je n'aime pas ça.
07:04Parce que je suis très mal à l'aise.
07:06Parce que je suis toujours dans ce sentiment d'être moche, d'être nul.
07:11Enfin, voilà.
07:11Donc, je corrige tout.
07:13Je corrige ma manière de me tenir, ma manière de m'habiller, ma manière de parler.
07:17J'ai passé des mois et des mois à m'auto-corriger pour qu'à aucun moment, dans ma manière de parler, j'ai des tics de langage.
07:25Il fallait que ce soit parfait.
07:26Et un jour, un mec me dit, moi, j'adore quand tu ne portes pas de lunettes.
07:30Donc, à chaque fois que je le voyais, je ne portais pas de lunettes.
07:32Sauf que je ne voyais rien.
07:33Et je me dis, bon, c'est pas grave, je vais porter des lentilles.
07:35Donc, je vais voir mon ophtalmo, je l'explique.
07:37Je vais essayer des lentilles.
07:38Je n'ai jamais essayé.
07:39On essaye.
07:40Manque de bol, je ne supporte aucune lentille parce que j'ai les yeux assez humides.
07:45Et à ce moment-là, il me dit, mais alors, vous ne supportez pas les lentilles, mais il existe une nouvelle possibilité, c'est de se faire opérer des yeux au laser pour ne plus porter de lunettes.
07:52La communauté gay et ce garçon en particulier, même avant tout quand je n'ai pas de lunettes, donc je vais le faire.
07:58Donc, je me fais opérer et l'opération rate.
08:00Moi, je ne vois rien.
08:01Je vois tout trouble, pire qu'avant.
08:03Et j'ai des douleurs atroces.
08:05La seule comparaison que j'ai, c'est que je ressens des coups d'aiguille dans les yeux.
08:1024 heures sur 24.
08:11Et donc, je ne peux plus lire, même pendant 10 minutes.
08:13Je ne peux plus regarder un écran.
08:14Je ne peux plus rien faire.
08:16Ça a duré 8 mois.
08:17Et à ce moment-là, je viens de rentrer à l'école du Barreau.
08:19Et l'école du Barreau, c'est très intensif.
08:22C'est des stages en cabinet.
08:24Et il faut lire, bien évidemment.
08:25Il faut travailler.
08:26Et je ne peux pas.
08:26Le chirurgien disparaît de la circulation.
08:29Et je suis tout seul.
08:30Et là, je replonge.
08:30Je refais une dépression.
08:31Parce qu'il n'y a personne.
08:32Parce que je consulte tout le monde qui ne savent pas quoi faire.
08:35J'ai fait tout ça.
08:35Je suis à ça de devenir avocat.
08:37Et d'enfin confirmer à cette planète entière que je suis capable de quelque chose.
08:41Et boum.
08:42Donc, j'arrive chez ma mère.
08:43Je n'ai plus une thune.
08:43Je n'ai plus rien.
08:44J'ai mis tout en suspens parce que je n'ai pas le choix.
08:46Et je fais une dépression qui dure 8 mois.
08:47Et puis, je rencontre un professeur grâce à un ami.
08:50Et il m'examine, etc.
08:52Et il trouve un traitement qui peut potentiellement me convenir.
08:54Et qui, dans les faits, me convient.
08:56Et ça, c'est en 2012.
08:57Et ce traitement, je l'ai toujours et je l'aurai toute ma vie.
08:59Parce que l'opération m'a complètement détruit les nerfs de la cornée.
09:03Et donc, je ne sécrète plus de film lacrymal ou quasiment plus.
09:06Et le traitement, c'est me faire prélever mon sang.
09:09Tous les deux mois à peu près.
09:10En grosse quantité.
09:12Duquel, ils extraient le plasma.
09:13Et avec le plasma, il faut un colire.
09:15Mais c'est très contraignant parce que tous les deux mois,
09:17c'est délivré uniquement à l'hôpital.
09:19Tous les 15 jours, je suis obligé d'y aller pour aller le chercher.
09:21Comme c'est un produit dérivé du sang, ça doit être réfrigéré tout le temps.
09:24Même quand je me déplace.
09:25Et donc, ça fait 10 ans que je vis avec, mais heureusement.
09:28Parce que c'est ce qui m'a permis de retrouver l'espoir,
09:30de recommencer un petit peu à travailler,
09:32de terminer mes études, de devenir avocat, d'avoir mon diplôme.
09:36Et de me sortir de cette nouvelle ornière dans laquelle j'étais tombé.
09:39Et là, à ce moment-là, je me dis, ah ouais.
09:41Et en fait, ce qui t'est arrivé, ça s'est arrivé.
09:43Mais c'est parce que tu ne t'aimais pas et que tu n'avais pas confiance en toi.
09:46Là, j'ai pris peur.
09:47Clairement, je me suis dit, qui est en face de moi et c'est quoi ce bordel ?
09:51En réalité, je pense que d'un seul coup,
09:53pourquoi à ce moment-là, je ne sais pas.
09:54Mais tous mes revenus, tout ce que j'ai vécu,
09:57tout ce que je qualifie de vie psychologique,
09:59depuis ces années que j'avais enterré,
10:01ça a tout fait ressurgir.
10:03Sauf que j'ai tellement enterré de choses que quand ça remonte,
10:06ce n'est pas possible en fait.
10:07Donc tout flanche.
10:08La cervelle, le corps, ce n'est plus possible.
10:10Donc ça fait déjà des années que je suis en thérapie,
10:11mais je me dis, il va falloir intensifier les choses.
10:14Parce que là, seul, ce n'est plus possible.
10:15C'est violent, ça fait mal, ça désoriente,
10:19ça fait culpabiliser aussi.
10:21Parce que moi, je me suis dit,
10:23et j'ai passé des années à me le dire,
10:24que finalement, je n'étais qu'un dépressif honteux,
10:27qui était totalement déphasé psychologiquement,
10:30et que évidemment, personne ne voulait m'aimer.
10:32Qui veut aimer un dépressif complètement déphasé ?
10:34Donc ça entretenait la machine.
10:36Jusqu'au jour où j'ai rencontré une sophrologue,
10:39et un jour, elle me dit,
10:40moi, j'ai une très bonne amie à moi qui est psychologue,
10:42qui est spécialisée dans le fait de détecter
10:44les gens qui sont haut potentiel et hypersensibles.
10:46Et elle me dit, j'aimerais bien que tu la voies.
10:48Et puis, je ne sais plus, quelques mois après,
10:51je crois que je vois un morceau de reportage
10:53sur les HPI hypersensibles,
10:55et je me dis, quand même,
10:56il y a des choses qui me parlent beaucoup.
10:58Je me dis, bon, prends rendez-vous.
10:59J'arrive le jour du rendez-vous,
11:01et moi, ça fait des années, à ce moment-là,
11:02que je vis une vie de montagne russe,
11:05c'est-à-dire, j'ai deux jours où je vais bien,
11:07le troisième jour, je vais méga bien,
11:09et les quatre jours qui suivent, je ne peux pas sortir de mon lit.
11:11Et donc, je suis un dépressif cyclotimique dans ma tête.
11:14Et elle me fait passer toute une batterie de thèse,
11:16ça dure, je ne suis plus 4, 5 heures,
11:17mais je suis complètement à l'ouest.
11:18Et elle me dit, ok, donc, ça se termine,
11:20et je vous ferai un...
11:21On se recueille à un rendez-vous d'ici 15 jours, 3 semaines,
11:23le temps que je fasse l'analyse de tout.
11:25Les 15 jours, 3 semaines passent,
11:26et j'arrive au rendez-vous de restitution,
11:28je suis un peu mieux.
11:29Et là, elle me dit, bon, j'ai eu un peu de mal,
11:30parce que le jour J, vous n'étiez pas du tout connecté.
11:33Mais elle me dit, quand même, c'est assez évident,
11:35alors elle me dit, hypersensible, il n'y a aucun doute.
11:37Et elle me dit, vous êtes haut potentiel intellectuel.
11:39Et pendant une bonne heure, elle m'explique.
11:41Elle m'explique que je ne suis pas un dépressif, honteux,
11:43que c'est juste que ma cervelle ne s'arrête jamais,
11:45et que quand les jours où je ne peux pas sortir de mon lit,
11:48c'est parce que je suis en état d'épuisement intellectuel et psychologique,
11:50que je suis certes différent des autres,
11:53mais que ça peut être une vraie force et une vraie chance,
11:55et qu'il faut que je la saisisse comme ça.
11:56Que l'hypersensibilité, ça amène beaucoup de choses,
11:59notamment la nécessité de se retrouver seul,
12:01de s'extraire de beaucoup de choses,
12:02sans avoir à se dire que c'est parce qu'on n'est pas capable de se socialiser,
12:06qu'on est moins bien, c'est juste qu'on a un besoin différent.
12:09Et là, d'un seul coup, j'ai une masse de 10 tonnes de culpabilité qui s'envole.
12:15Parce qu'elle me dit, il faut que vous compreniez que vous êtes comme ça,
12:18et que ce n'est pas de votre faute, vous ne l'avez pas choisi.
12:20Ah oui, ça se soulage, mais ça se soulage plus, plus.
12:23Mais bon, je ressors hyper soulagé, mais avec toujours cette question,
12:27ok, mais j'en fais de quoi de ça ?
12:29Moi, je ne sais pas, en fait, je ne suis pas équipé pour, je ne comprends pas trop.
12:32Sauf que les mois passent et les années passent aussi,
12:36et que sans me rendre compte, j'intègre les choses.
12:38Et à partir de ce moment-là, je décide que je vais monter mon cabinet d'avocat,
12:40que je vais faire les choses comme je veux, en étant qui je suis,
12:43et que les clients que j'aurai m'auront choisi pour mes compétences, certes,
12:46mais pour ma personnalité.
12:48Et c'est aussi à ce moment-là que je me dis,
12:50mais ça fait des années que tu écris beaucoup de choses,
12:52pourquoi pas tenter de le punir ?
12:53Et là, une petite maison d'édition me dit oui.
12:55C'est très étrange, parce que c'est à la fois de la peur,
12:58parce que c'est un bouquin où je dis tout,
13:00je me mets complètement à nu sur des choses que j'ai pu faire,
13:03notamment quand j'étais étudiant, notamment la prostitution.
13:07J'étais à la fac étudiant et je n'avais pas d'argent,
13:10je n'avais rien à manger.
13:11J'avais des loyers de retard dans ma petite chambre de bonne,
13:13et j'étais pour le coup tout seul.
13:14La première nécessité, c'était de manger et de payer mon loyer.
13:17Et c'était aussi dans un schéma d'autodestruction.
13:18C'est-à-dire que c'était aller chercher dans ces moments-là,
13:21certes, de l'argent, beaucoup d'argent en peu de temps,
13:23mais c'était aussi aller chercher un peu d'attention.
13:26J'avais l'impression que pendant, je ne sais pas, 30 minutes,
13:29l'heure que ça pouvait durer,
13:30dans ma tête, de manière un peu brouillon,
13:32je me disais, on m'a payé moi parce qu'on me veut moi,
13:35parce qu'on me désire moi.
13:36Et là, je me sentais beau, je me sentais désirable,
13:40je me sentais sexy et je me sentais unique.
13:42Après, cette première fois, déjà, je suis arrivé jusqu'à la dernière minute,
13:45j'ai cru que j'allais faire demi-tour.
13:46J'ai fait toc-toc à la porte, la porte rouge.
13:48Il a ouvert la porte, glaciale, en me traitant comme ce que j'étais,
13:51c'est-à-dire une pute et une objet.
13:52Et dans ma tête, je me suis dit, fais les choses, vite, rapidement,
13:56que ça se termine.
13:56Je suis parti avec mon argent.
13:57Et à ce moment-là, dans la cage d'escalier, je me suis mis à pleurer.
14:00J'étais mal, j'étais sale, je me sentais nul.
14:03Et en même temps, je suis sorti de l'immeuble en me disant,
14:06tu vois que rien ne pourra jamais t'atteindre.
14:08Rien ne pourra jamais t'arrêter.
14:09Tu te sortiras toujours de tout, tu es plus fort que tout.
14:11Parce que quoi qu'il arrive, quand je tombe, je me relève.
14:13Et je me relèverai toujours.
14:15Même si j'ai peur, même si le cabinet ne fonctionne pas,
14:17même si on m'en fout plein les dents pour x ou y raison,
14:20je me relèverai et je serai en phase avec moi-même,
14:23avec qui je suis, avec ce que je veux,
14:25ce que je ne veux plus, ce que je ne veux pas.
14:26Et que ce sera le début de ma vraie quête de paix.
14:29Parce que je me suis aussi rendu compte que
14:31si depuis toutes ces années, je me sens seul au monde,
14:33en réalité, je ne suis pas seul au monde.
14:35Que malheureusement, il y a aussi des milliers,
14:39des millions de gens qui se sentent comme moi j'ai pu me sentir
14:41et comme je peux encore me sentir aujourd'hui.
14:43Et qui tous les jours combattent contre eux-mêmes,
14:45qui sont leurs pires ennemis.
14:46et qui se sentent peut-être à l'instant T, au plus bas.
14:50Donc pourquoi est-ce que moi, je garderais ça pour moi
14:52si ça peut potentiellement aider quelqu'un d'autre ?
14:54Et parce que je me dis aussi que ce peu d'espoir,
14:57moi, j'aurais aimé l'avoir.
14:58Par une lecture, par une personne,
15:00par quelle que soit la manière.
15:01Donc je me dis une seule chose,
15:04c'est que quel que soit le temps encore que ça prendra,
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