Ce mercredi 17 décembre, Anne-Catherine Husson-Traoré, fondatrice d'ACT'ors for Sustainability, s'est penchée sur le renoncement de l'Europe au tout-électrique en 2035, la finance durable délaissée, et les initiatives ESG face à Trump, dans l'émission BFM Bourse présentée par Guillaume Sommerer. BFM Bourse est à voir ou écouter du lundi au vendredi sur BFM Business.
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00:05Antoine, juste avant d'attaquer la suite, une petite nouvelle autour d'Oracle qui s'est retourné en forte baisse.
00:11Moins 4,7%, on est à 179,90€.
00:15Alors qu'un des acteurs prépondérants du financement de ces data centers s'est retiré du dossier.
00:21Il s'agit de Blue Owl, c'est un gros investisseur institutionnel, on ne sait pas trop à hauteur de combien.
00:26Enfin bon, quand les intervenants commencent à quitter une dynamique de développement telle, il y a peut-être de quoi nourrir 2-3 inquiétudes.
00:34Nasdaq en baisse, très limité, moins 0,29% en ce moment.
00:37Anne-Catherine Husson Traoré nous rejoint, fondatrice d'Actors for Sustainability.
00:41Bonjour Anne-Catherine.
00:41Bonjour Guillaume.
00:42Sur l'ESG, il y a quand même une grande vague descendante, la marée se retire.
00:45On voit beaucoup d'initiatives pour être moins en avant de la vague ESG effectivement.
00:50Les acteurs qui y sont moins engagés, rien que Bruxelles hier qui a annoncé finalement la fin de ses ambitions en matière de tout électrique.
00:58Finalement, au-delà de 2035, on pourra continuer de vendre des véhicules thermiques ou encore hybrides.
01:03Alors pour vous, c'est anti-ESG ou c'est quand même ESG parce que socialement, ça permettra, ce petit recul de Bruxelles, de maintenir des emplois et des constructeurs vivants ?
01:10Non, ce n'est pas ESG et surtout, c'est une drôle de façon de célébrer le dixième anniversaire de l'accord de Paris sur le climat.
01:17Puisqu'en fait, alors, ils n'ont pas complètement démantelé cette obligation, ils l'ont assouplie.
01:22Le problème, c'est qu'il est de plusieurs natures et pourquoi ce n'est pas du tout ESG ?
01:26C'est-à-dire que c'était une des mesures emblématiques de ce qu'on appelle le Green Deal, adopté en 2019 et qui consiste à, en fait, positionner l'Europe dans l'économie de demain.
01:36C'est-à-dire, au-delà des engagements, le sujet, c'est que le modèle économique qui restera debout et qui sera profitable, il sera vraiment, a priori, tout électrique.
01:46Il y a un pays qui l'a très bien compris, c'est la Chine.
01:49Et nous, en ce moment, sous le texte que Trump a été élu, enfin nous, Européens, a priori par une commission qui est en plus présidée par la même qui avait adopté le Green Deal,
02:00est en train de défaire tout ce qu'elle avait essayé de construire.
02:02Et ce n'est pas ESG parce que croire qu'on va préserver l'emploi, qui est en train de se déliter complètement,
02:09il y a des charrettes absolument partout en Allemagne dans le secteur automobile, qui est vraiment un des secteurs malades de l'Europe,
02:15croire qu'on va juste le sauver, c'est le lobbying que font les constructeurs, en supprimant une réglementation sur laquelle ils étaient préparés,
02:22parce que, en fait, les seuls qui sont vraiment compétitifs sont chinois, ça ne va pas du tout résonner leurs problèmes.
02:27Et en plus, c'est ce qu'on appelle, dans la façon de prendre en compte l'impact des changements climatiques sur l'économie,
02:34c'est ce qu'on appelle un risque de transition.
02:36C'est-à-dire que le secteur automobile est en train de se retourner parce qu'il ne tient pas compte d'une chose,
02:41c'est que le modèle qui consiste à acheter des voitures assez régulièrement pour renouveler le parc tous les 4-5 ans, etc.,
02:46ce modèle, il est mort, en fait.
02:48Il est mort parce que ceux qui ont vraiment de l'argent, alors certains, c'est des SUV,
02:52mais comme tout le monde est positionné sur le même segment, il y a un petit problème de saturation,
02:56d'autres prennent le vélo, les transports, enfin, dans les grandes villes qui est le cœur de leurs consommateurs,
03:01on change d'habitude.
03:03Donc, moins ils anticiperont là-dessus, moins ils seront sur la mobilité durable,
03:07moins ils seront sur l'idée que les gens vont moins acheter de voitures,
03:09ce qui ne veut pas dire plus en conduire, mais ils vont les louer, en disposer, etc.,
03:13plus ils vont être dans un sacré problème.
03:16On voit, par exemple, Porsche a perdu un quart de sa valeur,
03:19et en fait, on voit comment, dans la stratégie actuelle dans laquelle on est tous azimuts,
03:23il faut un bouc émissaire.
03:25Donc, en fait, la raison de tous leurs problèmes, ça aurait été cette réglementation, sérieusement.
03:29Par contre, le message qu'on voit à la Commission est désastreux,
03:31parce qu'elle recule sur tout, à l'heure actuelle.
03:34Elle recule, certes, sur l'automobile, elle recule sur les pesticides,
03:36elle recule sur tout, elle dérégule à tout vin, pour faire plaisir à Trump.
03:40Ça n'a même pas l'air de lui faire plaisir, en plus,
03:42puisqu'il se déclare officiellement notre ennemi.
03:45Et, en fait, il est en train, juste en faisant pression,
03:49de faire éclater le modèle européen, qui est le seul brevet de survie qu'on a.
03:53L'Europe espérait, à travers l'ESG, devenir la puissance normative mondiale.
03:58Avec ce recul, elle ne risque pas d'y arriver, encore moins.
04:02Non, non. En fait, le problème, c'est qu'elle va cesser d'exister,
04:05parce qu'on voit bien qu'il y a, en fait, un rapport de force assez violent
04:08entre les États-Unis, qui mise sur le fossile, enfin, en tout cas, au plus haut niveau de l'État,
04:13et qui, en gros, est un tout-tech, c'est pas vous que je vais apprendre.
04:17Et puis, la vraie puissance montante, c'est la Chine,
04:21qui, elle, mise sur le tout électrique,
04:23et qui est déjà en train de...
04:25C'est le seul moyen de faire baisser les émissions, c'est de passer au tout électrique.
04:28Nous, on est dans une espèce d'entre-deux, qui ne se passe pas très bien.
04:32RTE a sorti des statistiques en expliquant qu'on avait plus d'électricité qu'on en consommait.
04:36C'est pas du tout une bonne nouvelle pour le Green Deal et pour notre avenir,
04:40parce que ça veut dire qu'on ne travaille pas sur la demande.
04:43Et en envoyant ce message sur la réglementation,
04:46l'Union européenne envoie effectivement le mauvais message,
04:49qu'on a le temps d'attendre le passage électrique.
04:51Pendant ce temps, la Chine aura gagné depuis longtemps.
04:54Il y a d'ailleurs statistiques, enfin, pas amusantes du tout,
04:59mais la consommation mondiale de charbon va atteindre un pic cette année,
05:03un record absolu.
05:04Preuve que l'électrification, elle est bien belle,
05:07mais si l'électricité est générée par du charbon, on ne va pas aller très très loin.
05:11Mais c'est ça, beaucoup disent que la transition énergétique,
05:13ce n'est pas une transition, c'est une accumulation.
05:14C'est-à-dire qu'on vient rajouter de nouvelles couches,
05:16mais ceux qui préexistaient déjà ne disparaissent pas.
05:18C'est une des choses, par exemple, qui était sortie de la période pré-accord de Paris,
05:22c'était l'idée que les investisseurs devaient sortir du charbon
05:24pour décarboner leur portefeuille.
05:26En fait, ils ont juste fait ce qu'on appelle dans le jargon des « soirs des assets »,
05:30c'est-à-dire qu'effectivement, les actifs se sont complètement dépréciés,
05:33mais personne n'a arrêté de les faire tourner.
05:35C'est ce qui a fait la fortune de Daniel Crétines, qui est en particulier.
05:37Cela dit, on voit que la BCE reste proactive,
05:40on voit qu'il y a certains mouvements qui restent proactifs à la marge en France.
05:45On voit que les entreprises, elles-mêmes, tiennent à garder, à conserver des engagements environnementaux.
05:52Est-ce que ce n'est pas finalement les entreprises qui ont peut-être la clé de tout ça ?
05:55Alors, les entreprises, et puis certains investisseurs de long terme,
05:58parce qu'en fait, aujourd'hui, il y a eu un backlash,
06:02et en particulier dans le secteur financier, dans le milieu politique,
06:05et c'est aussi dans les médias, il faut bien le dire.
06:08Mais en revanche, dans la réalité, ces risques climatiques sont des risques économiques et financiers
06:13qui, quand on a un horizon qui est pas lointain, 5-10 ans,
06:17on voit très bien comment il va peser, en fait, sur les business models des entreprises
06:21et sur les investisseurs.
06:23Donc, du coup, on assiste à un backlash du backlash,
06:25c'est-à-dire qu'il y a, par exemple, deux fonds de pension néerlandais
06:28qui ont enlevé à BlackRock un mandat de près de 15 milliards,
06:32un autre de 5 milliards, quand même 20 milliards.
06:34Reprochant à BlackRock de ne plus avoir d'engagement climat.
06:37D'accord.
06:38Alors que c'était les fondateurs du truc.
06:40Voilà.
06:41Et même message du contrôleur de l'État de New York.
06:43Donc, ça veut dire que même aux États-Unis, ce contre-message est en train de monter
06:47parce que les risques climatiques sont matériels, sont concrets.
06:51De la même façon, les grandes institutions de la retraite publique
06:55sont interpellées par l'organisation des étudiants du réveil écologique en disant
06:58« Écoutez, pour notre retraite, il faudrait peut-être vous préoccuper du fait
07:01qu'elles ne soient pas sous 50 degrés dans des modèles économiques qui s'effondrent
07:05parce qu'ils ne se sont pas adaptés à temps. »
07:07Donc, on voit bien que les contre-messages sont en train de monter
07:09et qu'il faut les écouter.
07:11Anne-Catherine Husson Traoré, fondatrice d'Actors for Sustainability.
07:15Merci beaucoup.
07:15Anne-Catherine a répondu sur l'actu des constructeurs automobiles
07:18qui ne profitent absolument pas de la volte-face, c'est un grand mot,
07:21mais du recul de Bruxelles sur le tout électrique, ils n'en profitent pas.
07:24Même les constructeurs allemands, pas tellement non plus.
07:27On en parlera dans la suite de BFM Bourse.
07:29On parlera également de DBV Technologies.
07:31Ça, c'est le carton du jour.
07:32Après, une bonne nouvelle pour l'un de ces traitements.
07:34DBV gagne encore 26% aujourd'hui depuis le début de l'année.
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