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En 2017, il démissionnait avec fracas de son poste de chef d'état-major des armées après avoir critiqué les coupes de crédits dans le budget de la Défense. Aujourd'hui, il pousse un cri d'alarme dans son dernier livre "Pour le succès des armes de la France" (Ed. Fayard). Le Général Pierre de Villiers est l'invité ce mercredi à 8h15 de Marc-Olivier Fogiel dans RTL Matin.
Regardez Face à Fogiel du 10 décembre 2025.
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00:00Pensez à covoiturer.
00:01RTL Matin, Thomas Soto.
00:06Il est 8h18 face à Fogiel, l'interview de Marc-Olivier Fogiel ce matin,
00:09l'ancien chef d'état-major des armées, qui n'a rien d'un grand muet
00:12et qui manie le stylo aussi bien que les armes,
00:15Pierre Devilliers, qui publie Pour le succès des armes de la France, chez Fayard.
00:18Bonjour Pierre Devilliers, merci d'être là ce matin sur RTL.
00:21Bonjour Monsieur.
00:21Le grand public vous a découvert lorsque vous avez démissionné de chef d'état-major des armées,
00:25c'était en 2017, vos prises de parole sont toujours remarquées.
00:28Certains vous imaginent même en candidat à la présidentielle
00:31et dans votre nouveau livre, vous alertez, je vous cite,
00:33la France parle beaucoup aujourd'hui de réarmement et affiche des ambitions budgétaires
00:37mais continue de vivre comme si la paix devait être éternelle.
00:41Vous êtes inquiet, la paix est terminée ?
00:44Inquiet, ce n'est pas le bon terme.
00:46La question que je me pose, c'est sommes-nous prêts ?
00:49Sommes-nous prêts face à la situation mondiale très instable que nous vivons
00:53et que j'avais pressenti dès 2017
00:56et c'était l'objet de mon différent avec le président de la République.
00:59Mais la paix elle est terminée, inquiet, on l'entend, ce n'est pas votre propos.
01:02La paix, c'est derrière nous ?
01:05C'est vrai qu'on vient de vivre 80 ans de paix et que ça crée des habitudes
01:08mais l'art de gouverner c'est la vision, c'est de voir beaucoup plus loin en anticipant
01:13et l'objet de mon livre c'est précisément cette vision.
01:16Que va-t-il se passer ? Que faut-il faire pour être prêt face à ces enjeux ?
01:21Mais en même temps, vous voyez un chef d'État, on va parler budget dans un instant
01:24qui a considérablement augmenté le budget des armées de 32 milliards à 50 milliards depuis 2017.
01:30Votre successeur, le général Mandon, qui dit lors du congrès des maires de France
01:34il faut accepter de perdre ses enfants.
01:36On a l'impression que la conscience et les moyens sont là.
01:39Vous l'auriez dit d'ailleurs, vous, il faut accepter de perdre ses enfants ?
01:42Alors moi j'ai une liberté de parole supérieure à celle d'un chef d'État-major des armées en titre
01:47et puis j'ai mon expérience, donc je peux voir plus large.
01:50Et donc, il faut perdre ses enfants en voyant plus large ?
01:53Il faut voir plus large dans le contenu du modèle d'armée,
01:57il n'y a pas que l'urgence du dossier russe-Ukraine
02:01et puis il faut voir plus large dans le calendrier.
02:04La revue nationale stratégique de l'été dernier, qui est un document de qualité,
02:08est trop sur le présent, pas assez sur les dix ans qui viennent.
02:12Vous ne me répondez pas à ma question.
02:13Est-ce que vous auriez dit, est-ce qu'il faut accepter de perdre ses enfants ?
02:16Est-ce qu'on en est là ?
02:18Alors après, il y a un principe qui est très simple dans l'armée.
02:21Je m'y tiens, on ne critique jamais ses successeurs.
02:24Depuis que je suis capitaine, chaque fois que je commande, quand je pars, je ne dis plus rien sur mes successeurs.
02:28Et comme vous n'en dites pas du bien, on comprend bien que ça serait plutôt du mal,
02:31puisque vous n'en dites pas du bien.
02:32Vous ne dites pas la même chose, donc...
02:34Non, je crois qu'on peut toujours polémiquer sur le moment, le contenu, la cible.
02:40Ce qui est clair, c'est que ce qui m'intéresse, c'est l'unité nationale.
02:43L'unité nationale, la cohésion nationale.
02:45On y vient, les menaces d'aujourd'hui.
02:47La Russie, vous dites le terrorisme, la Chine.
02:49Vous parlez de conglomérats anti-occidentaux de plus en plus déterminés
02:53et qui possèdent la palette complète des armements susceptibles de mener à tous les types de combats.
02:58Nous sommes revenus à l'âge des empires et des autocrates.
03:00Oui, c'est ça, et je sens ça depuis 2015, petit à petit.
03:06Un conglomérat dont, finalement, la seule chose qu'ils ont en commun,
03:09tous ces états-puissances, c'est la haine de l'Occident et du grand satin américain.
03:14Et ce retour du monde bipolaire est très inquiétant.
03:17D'un côté, 4 milliards d'habitants, ils réarment de 5 à 10% par an depuis 20 ans.
03:21Et de l'autre, l'Occident, aligné derrière les Etats-Unis,
03:24qui sont en train progressivement de nous abandonner,
03:26ce qui ne me surprend pas pour aller vers la Chine, vers le Pacifique.
03:31Et on a besoin de quoi concrètement aujourd'hui, nos militaires,
03:33pour être prêts le jour J, peut-être demain ?
03:36On a besoin de passer d'une armée qui mène des opérations de guerre,
03:40avec une belle armée des soldats, marins, aviateurs capables d'aller jusqu'au bout,
03:46et je n'ai aucun doute là-dessus.
03:48Mais il faut passer des opérations de guerre à la guerre.
03:50La guerre, ça nécessite la capacité à durer, l'épaisseur, la logistique, la formation.
03:56Mais on n'en est pas là ?
03:57On n'en est pas là, on n'en est pas là.
03:59Si vous voulez, nous avons le même nombre de matériel majeur qu'en 2017.
04:04Nous avons 200 chars, 200 avions de combat, 15 frégates de premier rang,
04:07c'était la même chose en 2017.
04:09Nous avons bouché les trous avec l'augmentation de crédit qu'il y a eu.
04:12Mais il faut passer la surmultiplier.
04:15Beaucoup plus que ça.
04:16Et notamment pour la technologie, par exemple.
04:18On a vu cette semaine cette histoire de drones.
04:21On est sur les drones.
04:22C'est une inquiétude pour vous ?
04:24Bien sûr.
04:24Nous ne sommes pas au rendez-vous.
04:26Nous, la France, mais aussi les pays européens,
04:28notre outil industriel n'est pas adapté pour mener une guerre.
04:32Il faut monter en puissance.
04:33Et le trinôme entre la délégation générale pour l'armement,
04:37qui est au milieu de l'état-major qui exprime ses besoins,
04:40et de l'industrie qui fabrique,
04:41fonctionne comme il y a encore des dizaines d'années.
04:44Il faut changer les procédures.
04:46Vous voulez dire, en clair, il faut qu'on passe en économie de guerre.
04:48C'est ça que vous nous dites là.
04:49Exactement.
04:49Vous nous dites ce matin, il faut qu'on passe en économie de guerre.
04:51Il faut arrêter d'en parler, il faut le faire.
04:53Mais pour ça, il faut que Bercy accède aux demandes.
04:56Dans le livre, vous êtes très critique contre l'administration.
04:58Puisqu'en gros, on vote des budgets,
04:59mais derrière, ça se perd, c'est ce que vous dites.
05:01Bien sûr.
05:02Oui, parce qu'on est à 50 milliards aujourd'hui,
05:04mais quand vous enlevez l'inflation,
05:06et puis les 8 milliards de report de charges,
05:08c'est-à-dire les crédits qui sont passés à autre chose
05:10que ce qu'ils étaient prévus dans la LPM,
05:11nous ne sommes pas dans cette augmentation majeure qu'il faudrait faire.
05:16Je me réjouis sur ce plan du budget de l'année prochaine,
05:186,7 milliards, mais vous voyez dans quel état nous sommes
05:20pour ce budget de l'année prochaine.
05:21Justement, ces états budgés, voilà, on fait d'énormes efforts.
05:24D'ailleurs, c'est aujourd'hui même que le budget commence en discussion.
05:27On a entendu Roland Lescure avec Thomas tout à l'heure.
05:29Et ça commence par la défense.
05:30On voit bien que c'est une priorité.
05:31Vous pouvez reconnaître ça, malgré tout, à Emmanuel Macron.
05:34Alors, je m'en réjouis, précisément,
05:35parce que l'objet de mon livre, c'est de mettre nos gouvernants
05:38et surtout nos futurs dirigeants,
05:40parce qu'il va y avoir des élections dans les mois qui viennent,
05:43nos futurs dirigeants devant leur responsabilité.
05:45Il faudra se positionner par rapport à ce que j'écris comme modèle d'armée.
05:48Mais ce dirigeant-là, vous êtes parti quasiment en claquant la porte.
05:52Vous lui reconnaissez quand même, malgré tout,
05:53un changement depuis ces 10 ans.
05:55Vous, quand vous étiez quand même chef d'état-major des armées,
05:59le budget de l'armée, il était rabioté par tous les gens que vous avez servis.
06:02Lui, au moins, il l'a développé finalement.
06:04C'est un changement sous pression.
06:06Mais ce n'est pas un changement en anticipation, comme je l'appelais de mes voeux.
06:11L'art de gouverner, ce n'est pas gérer.
06:13C'est prévoir.
06:15C'est avoir une vision stratégique.
06:16Pour vous, Emmanuel Macron n'en a pas.
06:18C'est pour ça qu'aujourd'hui, il faut aller vers 2035.
06:21Nous avons perdu beaucoup de temps.
06:22En général, pour vous, Emmanuel Macron n'en a pas de vision.
06:25Je crois qu'aujourd'hui, nos gouvernants, français et européens,
06:28sont trop dans le présentiel, la surface des choses du moment,
06:33la dépêche d'agence de l'après-midi.
06:35Et quand vous voyez les candidats à la présidentielle déclarer,
06:38par exemple, le RN, pour vous, il a cette vision ?
06:42Alors, moi, j'ai écrit mon bouquin précisément pour que chaque responsable actuel,
06:48et surtout futur, parce que c'est ça qui m'intéresse, puisse se positionner.
06:52Vous savez, dans les élections présidentielles, jusqu'à présent, ces dernières décennies,
06:56le sujet défense n'a jamais été un des sujets majeurs.
06:59Aujourd'hui, l'instabilité du monde l'exige.
07:02Pour vous, il n'y a plus d'autorité, plus de respect, plus de mérite, plus d'obéissance,
07:06pas assez de politique familiale, alors qu'il y a une demande, dans ce sens,
07:08des gens que vous rapportez.
07:10En gros, il faut un militaire à la tête du pays, non ?
07:12Quand vous lis.
07:13Ce n'est pas exactement ce que j'écris.
07:15Mais ce n'est pas loin.
07:17Je dis qu'il faut restaurer l'autorité,
07:20parce qu'il y a une vraie crise de l'autorité.
07:21Et il y a un fossé qui s'est creusé entre ceux qui décident et ceux qui exécutent.
07:27Je le mesure, chacun de mes déplacements, chaque semaine.
07:29Mais donc, un militaire à la tête du pays ?
07:32Je crois que ce n'est pas exactement la problématique que je pose dans mon livre.
07:37Il y a un candidat idéal pour vous ?
07:40Ce n'est pas l'objet de mon livre.
07:42Non, mais c'est l'objet de ma question.
07:43Ce n'est pas du tout.
07:44C'est l'objet de ma question.
07:45Finalement, le livre, vous faites un constat, vous avez un visant à 10 ans,
07:49et vous êtes parti en 2017 avec un président qui n'incarnait pas ce que vous préconisiez.
07:53Est-ce qu'il y en a un aujourd'hui qui incarne ce que vous préconisez ?
07:56C'est assez simple comme question.
07:56Eh bien, aujourd'hui, ce que je voudrais qu'il soit incarné, c'est une ligne stratégique, avec une vision.
08:05Et pour moi, c'est 2035.
08:06Et il n'y a personne qui incarne ça dans le débat public ?
08:08Aujourd'hui, nous sommes trop dans l'urgence du moment.
08:10Quand vous voyez les thèmes d'actualité du moment par rapport à ce décalage,
08:14par rapport à la situation internationale qui est grave,
08:17je suis un peu, effectivement, surpris.
08:20Dans le débat du moment, peut-être très factuel,
08:23mais il y a quand même ce service militaire sur la base du volontariat.
08:25Ça, ça va dans le bon sens, finalement, puisque dans le livre, vous parlez de la guerre.
08:29C'est aussi un état d'esprit.
08:30Fédérer une nation qui se discloque, à vous écouter.
08:33Cet service militaire sur la base du volontariat, ça va dans le sens que vous décrivez, finalement ?
08:37Bien sûr, c'est le réarmement des forces morales.
08:40Vous savez, les forces morales au combat, c'est capital.
08:42Nos 25 000 jeunes qui rentrent dans l'armée chaque année,
08:45ils ne reculent pas au combat et ils vont jusqu'au sacrifice suprême si nécessaire.
08:49Je l'ai vécu.
08:49Accepter de perdre ses enfants, on y revient.
08:51Ça se prépare.
08:53Et l'annonce du service militaire est une bonne nouvelle.
08:56Mais nous avons eu le service national universel pendant 8 ans,
09:01qu'on a réformé, qu'on a remis à chaque fois en première ligne.
09:05C'était une fausse bonne idée.
09:07Une bonne idée parce que la cohésion nationale,
09:09effectivement, il va falloir s'en occuper sérieusement.
09:12Mais une mauvaise idée parce que ce sont des jeunes qui n'étaient pas majeurs.
09:17Et pendant quelques semaines, c'est les collines de vacances.
09:21Mais ce service militaire sur la base du volontariat,
09:22vous voudriez qu'il soit en fait obligatoire ?
09:25Alors, c'est un système par volontariat.
09:28Moi, je prends acte de ce qui nous a été expliqué.
09:31J'attends qu'il soit réalisé.
09:32On va commencer par 3 000 l'année prochaine et 50 000 en 2035.
09:36C'est un bon système.
09:38Mais il y a beaucoup de déclarations depuis ces dernières années.
09:43Moi, je juge sur les faits.
09:45Il y aura trois problèmes.
09:46Un, budgétaire.
09:47Il ne faudra pas amputer le budget des armées.
09:50Deux, la difficulté de l'infrastructure.
09:54Nous n'avons pas d'infrastructure disponible.
09:56Il va falloir les construire.
09:57C'est long.
09:57Et trois, l'encadrement.
09:58Général d'Armée, Pierre de Villiers, pour le succès des armes de la France.
10:02Même succès que pour votre frère, on vous le souhaite.
10:03Les livres de votre frère, c'est un carton, non ?
10:06Écoutez, je m'en réjouis.
10:08Moi, j'écris mon livre.
10:10Et vous faites le même constat, finalement.
10:11Une dislocation de la société.
10:13Je fais un constat qui est que nous devons passer la surmultipliée pour protéger la France et les Français.
10:21C'est clair.
10:21Merci d'être venu ce matin sur RTL, mon général.
10:23Merci à vous.
10:23Merci, général Pierre de Villiers.
10:24Merci.
10:25Il répond à toutes les questions, général.
10:25Sauf qu'il y en a une, il n'y avait pas de réseau sur le candidat.
10:29Il n'a pas répondu.
10:30J'hésite, Thomas.
10:30Non, non.
10:32Vous avez un truc à ajouter, mon général ?
10:34Est-ce que vous avez un truc à ajouter, mon général ?
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