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  • il y a 2 heures
DB - 12-11-2025

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00:00:00Musique
00:00:01Alors ?
00:00:12Non, c'est rien.
00:00:13Rien ?
00:00:14Rien. J'ai envoyé Petrilo aux nouvelles. Voilà une heure.
00:00:17Ils ont peut-être pris la direction de ces rentes-elles.
00:00:19Non, non, je ne crois pas. Enfin, c'est inscrit là, noir sur blanc,
00:00:22un régiment appartenant aux gardes françaises,
00:00:25se dirige, surmisable, se dirige, c'est clair, non ?
00:00:28Allons, allons, ne t'énerve pas, tu vas encore te rendre malade.
00:00:33As-tu mis ta flanelle ?
00:00:34Mais oui, j'ai mis ta flanelle, mes caleçons longs,
00:00:37et mon plus bel habit, mon habit des cérémonies.
00:00:40Ben, à quoi bon ? Pour ce qu'il changera l'affaire.
00:00:44Excellence, signant Petrilo.
00:00:46Ah, Petrilo, entre alors.
00:00:49C'est la guerre.
00:00:50Quoi ? La guerre ?
00:00:52Mais, tu as vu l'ennemi ?
00:00:53Je l'ai vu, excellence, de mes propres yeux, comme je vous vois.
00:00:56Horrible, excellence, horrible.
00:00:58Comment sont-ils ?
00:00:59Ils sont maigres, comme sortir d'un carême.
00:01:01Ils sont peut-être 2000 et décidés à tout pour manger.
00:01:04Ah, ben alors, tout n'est peut-être pas perdu.
00:01:06Si ces gens sont tous nuls frais-tons,
00:01:08c'est que les marches et les privations les auront affaiblis.
00:01:10Ah, ah, ah, c'est peut-être du bon pour nos détruisants.
00:01:12Ou du mauvais, excellent.
00:01:13On sent votre plan n'est vraiment dangereux qu'avant, les repas.
00:01:15Mais on marcherait sur les cadavres pour se remplir.
00:01:18Bien, as-tu vu leur chef ?
00:01:19Je l'ai vu, un grand rouquin, tout en longueur.
00:01:22Général, à ce qu'il paraît.
00:01:23Et où sont-ils ?
00:01:24Ils ont installé leur camp, la ville.
00:01:26Au port de la ville, bien, elles sont fermées, j'espère.
00:01:29À double tour, j'ai vérifié moi-même.
00:01:31Bien, où est Mercurio, le capitaine de mes gardes ?
00:01:33Il me suit, excepté.
00:01:34Salvatore, et tu ne vas pas combattre ?
00:01:37Et pourquoi non ?
00:01:38Hein ?
00:01:39Pourquoi ma garde s'imagine-t-elle que je la paye ?
00:01:42Pour parager ?
00:01:43Dans les tripots de Mijano ?
00:01:45Ou chasser les filles jusque sous les balcons ?
00:01:47Dégainer les pés contre des barbons qui ressignent à se laisser coiffer ?
00:01:50Moi, gouverneur, cette ville ne succombera pas.
00:01:53Et par tous les moyens, devrais-je...
00:01:56me battre moi-même.
00:02:00Pepo !
00:02:00Excellence !
00:02:01C'est fait ?
00:02:02Vous avez raison, parce que quelques centaines de drôles se sont mis dans la tête de vivre à mes dépens,
00:02:06que je vais me plier à leurs exigences, pour qu'ils me prenaient vaut.
00:02:09Non, mais pour qu'ils me prenaient vaut !
00:02:11Je paye ma garde pour qu'elle fasse la guerre,
00:02:14et j'entends qu'elle la fasse jusqu'au dernier homme,
00:02:16jusqu'à la dernière goutte de sang.
00:02:18D'où j'y suis ?
00:02:19Je le sens déjà qui coule goutte à goutte sur ces jolies dalles de marbre blanc.
00:02:22C'est fait, Petrello, un peu de dignité, s'il te plaît.
00:02:26Mais j'ai vu le général parler à ses hommes, il y a un instant.
00:02:29Et que leur disait-il ?
00:02:30Il leur a promis la victoire, la bombance,
00:02:32et jurer qu'avant huit jours, il coucherait au palazzo avec chacun.
00:02:37Quoi ? Avec chacun à quoi ?
00:02:38Que c'est délicat.
00:02:39Ah oui, mais la délicatrice n'a rien à voir dans cette histoire, avec chacun ?
00:02:43Quoi ?
00:02:43Avec chacun, une femme pour récompense.
00:02:46Vraiment ?
00:02:48Ah, vraiment ?
00:02:49Avec chacun, une femme ?
00:02:51Y compris la mienne, peut-être ?
00:02:53Oh, ça m'a tort, oui.
00:02:54Combien sont-ils, dis-tu ?
00:02:56Environ deux mille, Excellence.
00:02:58Deux mille hommes, avec chacun une femme, ça fait deux mille cocus.
00:03:06Au bas mot.
00:03:07Car il faut qu'on sait avec les exigeants qui sans doute prendront des suppléments, c'est trop.
00:03:11C'est trop, en tout cas, pour une si petite ville.
00:03:14Et naturellement, les femmes sont déjà au courant de cette gageule.
00:03:18J'en ai peur.
00:03:19Et qu'en pensent-elles ?
00:03:20Rien pour l'instant.
00:03:21Leurs maris sont encore trop près d'elles.
00:03:24Carméline, sont-elles vertueuses, les femmes demi-jeunes ?
00:03:27Les plus vertueuses du monde, seulement.
00:03:30Seulement ?
00:03:31Seulement, comme toutes les femmes, elles sont sensibles à l'uniforme.
00:03:35Mais Francesca !
00:03:35La quoi, ta Francesca ?
00:03:37Mais j'ai vu les uniformes français.
00:03:39On les dirait copiés sur le soleil, des dorures partout.
00:03:42Ah, Mastol, ils ont mis tous les atouts dans leur jeu.
00:03:45Excellence, capitaine Mercurio.
00:03:47Ah, Mercurio.
00:03:51Alors ?
00:03:51Je viens prendre les ordres, Excellence.
00:03:54Que pensez-vous de la situation, capitaine ?
00:03:56Il n'y a pas grand-chose à espérer.
00:03:57Ils sont nombreux, bien entraînés, savent que la ville regorge de vivre.
00:04:01Mais pouvons-nous leur résister, Mercurio ?
00:04:03Oh, certainement, Excellence.
00:04:05Enfin, un jour ou deux, en mettant les choses au mieux.
00:04:07D'où Jésus, nous sommes bons.
00:04:08Écoute, va retourner sa franche, est-ce que...
00:04:10Et débarrasse-moi de ta présence.
00:04:13Dis-moi, Mercurio, as-tu connaissance d'une certaine promesse ?
00:04:19Si vous voulez parler de cette histoire de femme, oui, j'ai connaissance.
00:04:23Et croyez-vous que ce genre de promesse puisse être un stimulant pour de vrais soldats ?
00:04:28Sans doute, Signora, surtout pour des soldats français.
00:04:31Ah oui, on les dit très sensibles, est-ce vrai ?
00:04:34Je souhaite de tout mon cœur que les femmes de Mijano n'aient pas comparé leur sensibilité avec la nôtre.
00:04:38Pourquoi ? Vous craignez la comparaison, capitaine.
00:04:41Mais non, mais non, mais non, il ne s'agit pas de ça, il ne s'agit pas de ça.
00:04:44Il s'agit d'empêcher les français de s'abattre sur cette ville comme des sauterelles sur un champ de maïs.
00:04:49Non, il faut à tout prix connaître leurs intentions.
00:04:58Petrion.
00:05:00Excellence.
00:05:00Au nouvel.
00:05:01Au nouvel, Excellence.
00:05:02Et cesse, j'ai ergote et obéi lorsque je commande.
00:05:05Mercurio ?
00:05:06Excellence.
00:05:08As-tu un plan à me suggérer ?
00:05:10J'en ai deux, Excellence.
00:05:11Ou négocier ?
00:05:12Je m'y refuse.
00:05:13Ou accepter le combat ?
00:05:14Moi, je m'y oppose.
00:05:16Entre ces deux parties, il n'y a pas de salut.
00:05:19Eh ben, c'est bien.
00:05:22Oh, ce salvator est ouvertu.
00:05:25Réfléchir au moyen de nous en tirer avec honneur, carissima.
00:05:30Et changer de flanelle aussi.
00:05:37Capitaine, capitaine Mercurio, vous êtes un brave.
00:05:40Est-ce un compliment, Signora, ou une provocation ?
00:05:42C'est une évidence.
00:05:43Vous ne craignez rien, n'est-ce pas ?
00:05:45Je suis célibataire, Signora.
00:05:46Ceux qui arriveront femme de cette ville me laissent indifférent.
00:05:50Oh, Mercurio, tu ne sais pas comme tu es beau en uniforme de soldat.
00:05:54Justement, si, je le sais.
00:05:56C'est pourquoi je ne me la quitte jamais.
00:05:57Même la nuit ?
00:05:59Que voie de le quitter, mais pour le reprendre aussitôt avec un galon de plus ?
00:06:02Quand on est soldat en temps de paix, c'est le lit des femmes, des supérieurs,
00:06:06qui nous sert de champ de bataille.
00:06:08Enfin, es-tu content ? Tu vas la voir, ta petite guerre.
00:06:10Là, tu es assez réclamée, assez attendue.
00:06:13À un contre mille, je parie que ce cher Salvatore y renoncera.
00:06:16Alors, il faudra encore te résigner.
00:06:20Je t'ai connue, caporal.
00:06:22Te voilà, capitaine.
00:06:24Je ne suis plus toute jeune, Mercurio.
00:06:27Mais ne t'inquiète pas.
00:06:28J'aurai encore assez de tempéraments pour t'obtenir tes galons de colonel.
00:06:35Sais-tu ce que je suis ?
00:06:37Un soldat de garnison.
00:06:39J'envie ces Français contre lesquels il ne me sera même pas permis de me battre.
00:06:43Je donnerai cent fois mes galons pour rentrer dans leur rang comme simples soldats
00:06:46plutôt que d'assister en témoin au festival qui se prépare.
00:06:48Même si je suis de la fête ?
00:06:50Surtout si tu es de la fête, Carmelina, chérie.
00:07:01Parfois, je me méprise à rester là sans rien faire,
00:07:04tandis que les armées autrichiennes prennent volé-sur-volé
00:07:07par une bande de va-de-la-gueule conduite par un petit pruneau.
00:07:10De quel petit pruneau veux-tu parler, Mercurio ?
00:07:13De leur général en chef, leur Bonaparte.
00:07:16Rien que d'entendre prononcer son nom,
00:07:18ils ont des culottes qui rétrécissent.
00:07:20Ils vont voir ça, ils ne pouvaient rien faire, ils ne peuvent pas crever de honte.
00:07:22Après tout, les victimes, ce sont les femmes.
00:07:25Oui, si on veut.
00:07:28Sur les 2000, il y en aura bien quelques-unes à remercier Saint-Joseph
00:07:32de leur avoir fourni un pareil à Libye.
00:07:34Oh !
00:07:34Carmelina, en dépit de mes galons, je t'aime beaucoup.
00:07:40Moi, c'est surtout à cause de tes galons que je t'aime, Mercurio.
00:07:44En somme, on finit toujours par se retrouver.
00:07:47Oui, toujours.
00:07:50Signora, son excellence...
00:07:51Bonjour, capitaine.
00:07:53Bonjour, Tanina.
00:07:54Eh bien, quoi, son excellence ?
00:07:56C'est en difficulté, signora, elle vous réclame.
00:07:58Vous m'excusez, n'est-ce pas ?
00:08:00Mais comment donc, signora ?
00:08:01Le devoir avant tout.
00:08:02Oui.
00:08:10Cette fois, tu dis que la signora est ta maîtresse.
00:08:12J'ai tout entendu derrière la porte.
00:08:14Tu écoutes aux portes, maintenant ?
00:08:15Je l'ai toujours fait.
00:08:17Ainsi, tu l'aimes.
00:08:18Je n'ai jamais rien dit de pareil.
00:08:19Tu as dit, je t'aime beaucoup.
00:08:21Justement, le beaucoup est de trop.
00:08:22Quand on aime, on aime, tout simplement.
00:08:24Alors, ces galons, comment les expliquer ?
00:08:26Écoute, Tanina.
00:08:27J'étais derrière la porte.
00:08:28Mais, par bleu, je le sais que tu étais derrière la porte.
00:08:29C'est une chose aussi inqualifiable.
00:08:31Mercurio, je suis plus jeune que la signora.
00:08:35Oui, mon oiseau, bien plus jeune.
00:08:38Seulement, tu n'as pas un mari qui est gouverneur.
00:08:39Mais j'aurai un amant qui est général.
00:08:42Parmi les deux mille femmes qui subiront la défaite dans les bras des Français, il y aura Tanina.
00:08:48Pourquoi pleurer, Mercurio ?
00:08:49Alors qu'un général qui ne doit pas ses galons à des champs de bataille capitonnés
00:08:53me donnera tout ce qu'une femme peut espérer d'un vainqueur.
00:08:56Crois-tu que je laisserai cet homme te prendre mon amour ?
00:08:59Est-ce bien vrai que tu m'aimes ?
00:09:00Vois-tu, Tanina, parfois il m'arrive de regarder les fleurs et souvent je les méprise de ne pas avoir ton éclat.
00:09:07Pourquoi ne me dis-tu ces choses-là que lorsque tu es en service ?
00:09:10Parce que quand je suis dans tes bras, je connais un autre langage qui te plaît mieux.
00:09:13Mais comme je l'entends peu, Mercurio.
00:09:15Nous sommes en guerre, ma colombe.
00:09:16Non, seulement depuis ce matin. Et voilà, 14h30, que je brûle des sièges en priant la madone pour que tu franchisses le balcon de ma chambre.
00:09:24Comment peux-tu douter de mon amour ? En veux-tu une preuve ?
00:09:27Oh oui, Mercurio, oui.
00:09:28Eh bien, promets-moi de ne plus écouter aux portes.
00:09:31Ce n'est pas une preuve, ça.
00:09:32Au contraire, c'est la plus belle, la plus grande que je puisse te donner.
00:09:35Sachant que tu n'écouteras plus derrière cette porte quand je serai seul avec la signora,
00:09:39je n'aurai plus besoin de parler d'amour pour te rendre jalouse.
00:09:42Oh, c'était pour me rendre jalouse.
00:09:44Ne l'as-tu pas compris ?
00:09:46Non.
00:09:47Et c'est évident.
00:09:49Les femmes ne croient à l'amour qu'au travers du mensonge.
00:09:51Est-ce que tu dis vrai ?
00:09:52Mais bien entendu.
00:09:55C'était pour te rendre jalouse.
00:09:56Mais pourquoi ?
00:09:57Parce que je pensais que tu m'aimais moins depuis quelques temps.
00:09:59Oh, t'aimais moins alors que je n'aime que toi.
00:10:03Comment as-tu su que j'étais derrière la porte ?
00:10:05Tanina, chérie, un capitaine des gardes sait beaucoup de choses.
00:10:08Ce soir, Mercurio...
00:10:09Tu pourras éteindre tes cierges.
00:10:10C'est promis.
00:10:11C'est juré.
00:10:11Oh, la journée sera longue, capitaine.
00:10:14Oh, Mercurio.
00:10:15Tanina.
00:10:16Tu ne seras jamais colonel.
00:10:17Jamais, ma colon.
00:10:33Si.
00:10:34Les Français sont aux portes de la ville.
00:10:36Vous connaissez Salvatore et c'est un bon gouverneur mais un mauvais soldat.
00:10:39Il cherchera à négocier et à ouvrir sans combattre les portes de la ville.
00:10:42Si vous y pouvez quelque chose, sire, inspirez-lui la honte d'une capitulation.
00:10:48Il faut que nous nous battions, sire, ne serait-ce qu'une heure, une toute petite heure, de quoi mériter un galon qui ne doit rien aux bonnes grâces de la signora.
00:10:58Vous connaissez cette femme ? Si je la laisse faire, je deviendrai général avant d'avoir entendu le bruit d'un coup de canon.
00:11:04Enfin, ce n'est pas qu'elle me déplaise, sire, mais un galon, un seul galon gagné avec honneur peut excuser les autres, n'est-ce pas ?
00:11:16Francesca !
00:11:29Où est Petrillo, mon mari ?
00:11:36Pourquoi t'inquiéter de Petrillo ?
00:11:39Une honnête femme s'inquiète toujours de son mari. Où est-il ?
00:11:42Quelque part dans la ville.
00:11:44Et pourquoi est-il dans la ville ? Alors que le capitaine des gardes de son excellence se pavane dans les jardins du palais.
00:11:49Je ne me pavane pas, j'attends les ordres du gouverneur.
00:11:51Et où est-il, votre gouverneur ?
00:11:53Il change de flanelle.
00:11:54Quand l'ennemi est au port ?
00:11:56Ce n'est pas moi qui change de flanelle, Francesca.
00:11:59Vous feriez tout aussi bien.
00:12:00Comme tu es cruelle.
00:12:02M'avez-vous assez méprisé ?
00:12:04Vous souvenez-vous que pendant trois ans, j'ai attendu sur le pari de San Angelo, à la sortie de la grand-messe, que vous me preniez la main en signe de fiançaille.
00:12:15Mais vous étiez bien trop ambitieux pour vous préoccuper de moi à l'époque.
00:12:18Vos rêves de grandeur vous n'en portez plus loin.
00:12:19Je n'étais que caporal.
00:12:21Je n'étais que Francesca Mazzani.
00:12:23Maintenant, je suis capitaine.
00:12:24Maintenant, je suis la femme de Petrillo, sans pari.
00:12:26Premier conseiller de son excellence, le gouverneur Salvatore.
00:12:31Est-ce pour cela que vous souhaitiez faire de moi votre maîtresse ?
00:12:34Ainsi, un capitaine des gardes n'est plus à la hauteur.
00:12:39Non.
00:12:41À mon tour, j'ai appris à avoir de l'ambition.
00:12:44Et vous n'êtes pas encore colonel.
00:12:46Ce qui veut dire, Francesca, que si je deviens colonel, tu me permettras de coiffer Petrillo.
00:12:51A moins qu'il ne devienne lui-même gouverneur, car alors vous comprendrez qu'il me faudra pour le moins un général.
00:12:58Même s'il est français, je comprends parfaitement.
00:13:00Pourquoi non ? Les français savent faire l'amour et portent de jolis costumes.
00:13:04Alors ils passeront sur mon corps.
00:13:06Mais pour cela, il faudrait d'abord que vous soyez sur les remparts, avec votre garde, prêt à vous sacrifier pour l'honneur des filles de Mijano,
00:13:13au lieu d'attendre tranquillement les ordonnances d'un gouverneur plus préoccupé de tenir sa bedaine au chaud que de défendre sa ville.
00:13:20Mais pour se battre, il faut des ordres. Francesca et des ordres, c'est le gouverneur qui les donne.
00:13:24Pour la madone, Francesca, je ne laisserai pas passer l'occasion si elle se présente.
00:13:30J'en suis sûre, Mercurio.
00:13:33Pourquoi avoir épousé Petrillo ? Il est ridicule. Il l'a toujours été.
00:13:37Ne lui en veuillez pas.
00:13:38Si j'avais été votre femme, vous ne seriez encore qu'un simple caporal.
00:13:42Pourquoi ?
00:13:44Croyez-vous que mes ambitions étaient si grandes qu'elles m'eussent porté à accepter que la signora fassait prise d'armes dans le lit conjugal ?
00:13:51Comment ? Elle te l'a dit ?
00:13:53Vous semblez ignorer que je suis sa confidente.
00:13:55Alors tu sais tout.
00:13:57Tout. Il n'y a que Salvatore qui ne sache rien.
00:14:02Oh, pauvre Salvatore.
00:14:05Mais ce n'est pas à moi de le lui dire.
00:14:08Ferme les yeux, Francesca.
00:14:13Oh non, Mercurio, ce n'est pas possible.
00:14:16Pas maintenant, je t'en prie, pas maintenant.
00:14:19Je voulais simplement t'embrasser.
00:14:21Simplement m'embrasser ?
00:14:23À quoi d'autre pouvais-tu penser, Francesca ?
00:14:25À d'autres choses, Mercurio.
00:14:28À d'autres, Francesca ?
00:14:30Oh non, pas ici. Ce ne serait pas convenable.
00:14:34Tu as raison.
00:14:36Pas convenable du tout.
00:14:42Eh bien, tu ne m'embrasses pas.
00:14:46À vos ordres, signora.
00:14:47Mercurio.
00:15:00Mercurio.
00:15:00Francesca.
00:15:02Tu seras bientôt colonel, n'est-ce pas ?
00:15:04Très bientôt, ma colombe.
00:15:05Alors, es-tu prêt, Mercurio ?
00:15:09Enfin, Excellence, nous allons pouvoir nous battre.
00:15:11Merci.
00:15:12Je vous fais serment que les Français n'entreront pas ici avec des pantoufles.
00:15:15Et du saint-gillais, c'est ma peau, ainsi que toute ma compagnie,
00:15:17je saurais leur montrer que le capitaine Mercurio connaît autre chose que la couche des pucelles
00:15:21et la table des cabarelles.
00:15:22Oh là ! Oh là, capitaine Mercurio ! Mais où allez-vous ?
00:15:27Me battre, Excellence !
00:15:28Mais qui a parlé de ce barbe ?
00:15:29Mais, Excellence, je croyais que...
00:15:31Mais il faut attendre que les Français nous fassent connaître leurs intentions.
00:15:34Si vous aviez vu le nombre de canons qu'ils ont mis en position autour de la ville,
00:15:37vous penseriez comme moi qu'ils ont autre chose dans la tête que de nous donner la sirénade.
00:15:41Mais est-ce que je sais ce qu'ils désirent vraiment ?
00:15:43Mais rappelez-vous la promesse, Excellence, la promesse de leur général.
00:15:45Oh ! La promesse d'un général, Mercurio, est rarement promesse d'évangile.
00:15:51Avec celui-là, il ne t'aidera pas à le devenir.
00:15:53Non, il faut trouver un compromis honorable.
00:15:55Va-t'en me chercher le colonel Tomasini, dis-lui que son clame.
00:16:06Et voilà, Francesca, voilà comment sont les hommes.
00:16:09Ils ne songent qu'à s'entretuer pour avoir le plaisir de mourir en héros.
00:16:14Les armes à la main, c'est ce qu'ils appellent avoir de l'honneur.
00:16:16Mais pourquoi faut-il qu'ils le placent toujours sur la détente d'un fusil ?
00:16:20Et le nôtre ? Notre honneur à nous.
00:16:23L'un de vous y a-t-il songé ?
00:16:24Les femmes de Mijano sont trop jolies pour qu'un simple gouverneur puisse les préserver d'une armée dont elles brûlent de faire la connaissance.
00:16:33Vous avez une bien piètre opinion de notre sexe.
00:16:36Non, Francesca, non.
00:16:37Mais en 40 ans de métier, j'ai appris à connaître les hommes et à deviner les femmes.
00:16:44Enfin, sauf la mienne.
00:16:46Elles ne sont vertueuses que pour autant que leur vertu n'est pas menacée.
00:16:49C'est-à-dire, Excellence, que les femmes de cette ville succomberont sans une plainte, sans un cri ?
00:16:55Ah, elles crieront peut-être.
00:16:58Mais juste ce qu'il faudra pour sauver la décence et prouver à leur mari que la raison du plus fort est quelquefois la meilleure.
00:17:07Mais moi, je me demande si ce général rouquin va vraiment tenir ce qu'il a promis.
00:17:13Sans doute, Signora. Les soldats tiennent toujours leurs promesses.
00:17:16Oh, crois-tu ?
00:17:18Je veux dire, des promesses de ce genre.
00:17:20Oui, tu as peut-être raison.
00:17:22Mais alors, dans ce cas, il va falloir nous résigner à nous battre jusqu'à la mort ou nous résigner à l'abandon.
00:17:29Mais laquelle de ces deux défaites est la plus digne pour une femme ?
00:17:33Sans aucun doute choisir la mort.
00:17:35Oui.
00:17:36Oui, sans aucun doute choisir la mort, mais préférer l'abandon.
00:17:41Alors, Salvatore, as-tu enfin appris quelque chose ?
00:17:45Oui, ah oui, j'ai appris qu'en ce moment de tout n'est qu'vanité.
00:17:48Il est bien temps de jouer les philosophes. Non, non, non, dis-moi plutôt, où est Petrillo ?
00:17:52Petrillo est aux nouvelles.
00:17:53Et Mercurio.
00:17:54Et Mercurio, aux nouvelles.
00:17:56Alors, tout le monde est aux nouvelles et toi, tu ne sais rien.
00:17:58Ah, mais j'ai envoyé chercher le colonel Tomasini.
00:18:01Ah, il faut que tu lui donnes l'ordre de se tenir prêt à riposter à toute attaque,
00:18:06de se faire tuer sur place plutôt que de céder ou de reculer d'un pouce.
00:18:09D'ailleurs, il faut aussi que je te dise que le colonel Tomasini ne m'a jamais inspiré grande confiance.
00:18:15Oh, mais il est cependant homme de bien.
00:18:18Oui, c'est vrai, si l'on considère sa fortune.
00:18:20Mais appeler ça un colonel est une énormité dont je te prie de ne plus me rebattre les oreilles.
00:18:24Si tu as enfin, si je n'ai pas de colonel, comment puis-je me battre ?
00:18:27Mais tu aurais dû penser qu'il était facile d'en faire nommer un autre.
00:18:29Oui, qui serait autre chose qu'un septuagénaire, gâteux, goûteux et perclut.
00:18:32Eh oui.
00:18:33Un colonel jeune.
00:18:34Bon.
00:18:35Distingué.
00:18:35Et courageux.
00:18:36Un colonel qui sache parler aux hommes.
00:18:37Et aux femmes.
00:18:38Et qui leur donne l'exemple qu'une action pour être menée à bien doit être entreprise sur le champ,
00:18:43sans tenir compte de la résistance de l'adversaire.
00:18:45Oh là, oh là, oh là, mais comme vous y allez, jeune, beau, distingué, courageux,
00:18:51voilà pour le moins quatre qualités qu'on ne trouve pas chez un seul homme, sous le pas d'un cheval.
00:18:55Tu ne connais pas un seul de tes capitaines qui réunissent ses vertus ?
00:18:59Mon Dieu, je les connais mal.
00:19:02Il y en a au moins un que tu connais bien.
00:19:05Ah oui, tu veux dire Mercurio ?
00:19:07Pourquoi pas Mercurio ?
00:19:08Mais oui, pourquoi pas Mercurio ? Il est jeune.
00:19:11Distingué.
00:19:11Bon.
00:19:12Et courageux, voilà ton colonel tout désigné.
00:19:15Non, non, non, non, non.
00:19:16Ah, pour être promu, colonel Carméline, il faut avoir fait ses preuves,
00:19:21et sans compter que ça va susciter bien des jalousies, pas mal de commérages,
00:19:25et puis enfin, Thomasine, il sera blessé dans son amour propre.
00:19:28Ah, ah, ta première blessure.
00:19:30Soit tranquille, réflexion faite, il la préférera certainement à celle qu'il aurait pu ramasser dans un champ de bataille.
00:19:35Ah, ah, il faut, excellence, que ce soir, votre résolution soit prise.
00:19:40Oui, oui, j'y songerai.
00:19:41Mais mon Dieu, que la situation est embarrassante.
00:19:44Beaucoup moins que celle dans laquelle tu vas te trouver si les Français décident de passer brusquement à l'action.
00:19:50Venez, Francesca.
00:19:52Son excellence a besoin de repos, je crois.
00:20:00Un régiment appartenant aux gardes françaises.
00:20:07Votre excellence ?
00:20:09Et quoi, Tanine ?
00:20:11Votre excellence a l'air d'être soucieuse.
00:20:12Ah, c'est une heure qui passe.
00:20:15Peut-être a-t-elle des ennuis ?
00:20:16Oui, tu ne crois pas si bien dire, j'ai quelques petits ennuis, Tanine.
00:20:19À cause des Français ?
00:20:21Ah, oui.
00:20:22Si je puis me permettre de donner un conseil à votre excellence, je l'engage à faire confiance au colonel Tomadine.
00:20:28Ah, mais ne penses-tu pas qu'un homme plus jeune, enfin plus enthousiaste...
00:20:34Non, votre excellence devrait se méfier de l'ardeur inconsidérée de la jeunesse.
00:20:37Dans bien les cas, elle a mené au pire catastrophe.
00:20:40Ah, dis-moi Tanine, connais-tu le capitaine Mercurio ?
00:20:44Seulement de réputation, excellence, et...
00:20:47Et là, entre nous, le crois-tu courageux ?
00:20:50Ah, certes. Et votre excellence peut être rassurée sur ce point.
00:20:53Mais on le dit à ses inconséquents.
00:20:55Ah, on dit cela.
00:20:56Peut-être votre excellence a-t-elle eu écho d'une certaine aventure qui s'est produite il y a quelque temps,
00:21:02et dans laquelle le capitaine Mercurio a tenu un rôle difficile d'une assez jolie manière.
00:21:07Non, je ne connais pas cette affaire.
00:21:09Eh bien, sachez donc que lors d'une aventure galante que le capitaine avait su avec la signora Sortelli,
00:21:14des envies avaient conçu quelques dépit,
00:21:16et provoqués de façon grossière le capitaine à une rencontre.
00:21:20Ils étaient quatre ou cinq, je crois, à avoir pris rendez-vous afin de vider cette querelle par les armes.
00:21:25Mais faux !
00:21:25Ah, justement, excellence, où la folie se passe,
00:21:28c'est quand le capitaine Mercurio, par bravo, sans doute,
00:21:31qu'on vint d'un seul assaut qu'il se jura de mener à bien contre tous.
00:21:35Ah, ce fut une triade en règles, dans laquelle le beau capitaine naissa quelques plus vues.
00:21:42Il s'en parlait d'un coup de sabre qui lui démit l'épaule.
00:21:44Ah, mais tu vois, il avait prétendu une chute malencontreuse.
00:21:47Oui, en effet, c'est l'aversion qu'il donna à son entourage.
00:21:50Mais les quelques personnages qui eurent connaissance de l'affaire
00:21:54tombèrent d'accord pour déclarer qu'elle impliquait beaucoup de courage,
00:21:58mais aussi un peu de satise.
00:22:00N'est-ce pas l'avis de votre excellence ?
00:22:02Sans doute, sans doute, Tannine.
00:22:03Et ton histoire sera précieuse à la décision que je vais prendre.
00:22:07Excellence, une délégation française conduite par le grand général Rouquin est arrivée au palais.
00:22:13Eh, ben, voilà une bonne chose, aux Françaises,
00:22:15car nous allons enfin pouvoir connaître leur projet.
00:22:17Mon Dieu, ai-je le temps de changer de toilette ?
00:22:19Non, non, non, je t'en sais, dans des surprenances actuelles,
00:22:21le Tannine à la toilette a peu d'importance.
00:22:24Croyez-vous qu'ils nous violeront tout de suite ?
00:22:25Eh, je ne crois pas qu'ils y soient résolus pour l'instant,
00:22:28puisqu'ils viennent en parlementaire.
00:22:31Les républicains !
00:22:32Je sais, du calme, Petriot-Lucas.
00:22:35Francesca, mon oiseau, ma colombre,
00:22:36retire-toi dans nos appartements et ferme...
00:22:38Les Francesca !
00:22:39Alors, il ne sera pas dit que les Français nous imposeront leurs outrages
00:22:43sans que nous agissions pour nous en défendre.
00:22:45Excellent, je vous en conjure, de la modération,
00:22:48ils sont d'une arrogance de très mauvaise augure.
00:22:51Général, Marco !
00:22:57Citoyens gouverneurs, je vous apporte le sali de la République.
00:23:06Général, je vous retourne les compliments de Sa Majesté le Roi.
00:23:09Citoyens,
00:23:15les armées de la République,
00:23:17sous le commandement du général en chef Bonaparte,
00:23:20repos,
00:23:21sont venus apporter aux peuples imprimés par un despotisme décadent
00:23:24l'espoir d'un renouveau
00:23:25sous le signe de la liberté, de l'égalité et de la fraternité.
00:23:29Ça suffit.
00:23:32Désormais, le peuple est souverain.
00:23:34Tout homme aura le droit de s'exprimer librement.
00:23:36Général, je voudrais vous dire...
00:23:37Oh, nom de Dieu !
00:23:40Qu'il est le foutriquet qui ose m'interrompre.
00:23:42Marshal, découpez-moi cet oiseau.
00:23:44En long ou en large, voyons général.
00:23:46Qu'ils choisissent.
00:23:47Général, grâce, général, pour un pauvre père de famille.
00:23:50Général, il y a pitié de mon mari.
00:23:53C'est ton mari, ce vilain corbeau ?
00:23:54Oui, général.
00:23:55Et tu as eu des enfants de cette triste figure ?
00:23:57Non, général.
00:23:58Alors le droit l'a fait des promennes.
00:24:00Général, je suis pure que l'enfant qui vient de naître.
00:24:03C'est bon.
00:24:04Mais ne t'avise plus de m'interrompre.
00:24:05Non, je...
00:24:06Silence !
00:24:06Le droit, disais-je, de s'exprimer librement.
00:24:15Mon armée est aux portes de la ville.
00:24:18J'exige dans les 24 heures une capitulation sans condition.
00:24:21En août, vous serez chargé de veiller à la sécurité de mes troupes,
00:24:26à son approvisionnement en vivres et en boissons,
00:24:29à son hébergement,
00:24:30à l'entretien de ses logements,
00:24:32de pourvoir à son équipement si besoin est,
00:24:34de vous appliquer à exercer une police efficace,
00:24:38afin de réprimer sévèrement les manifestations éventuelles des civils,
00:24:41de verser une dîme journalière,
00:24:44les galocards du traitement mensuel de mes soldats,
00:24:47de fournir tout matériel qui pourrait être requis,
00:24:50de livrer les armes en jeune guerre ou autre en votre possession,
00:24:52de respecter les engagements pris,
00:24:55l'autorité de l'armée française
00:24:57et l'honneur de notre drapeau.
00:24:59C'est tout.
00:25:00Oui, pour le reste, nous aviserons plus tard.
00:25:03Ah !
00:25:05Autre chose.
00:25:07Donnez l'ordre de faire cesser immédiatement cette sonaille
00:25:09qui me casse les oreilles.
00:25:11Petrillo va prier le belot de San Angelo
00:25:13de faire ce que demande le général.
00:25:15Ah !
00:25:21J'oubliais.
00:25:24Les officiers de votre garde seront autorisés à porter l'épée.
00:25:28Croyez-vous, général, qu'une telle autorisation soit nécessaire ?
00:25:32Courageux, votre capitaine,
00:25:33mais d'une inconscience qui pourrait lui coûter les épaulettes
00:25:36et l'envie de faire le...
00:25:37enfin, le brave dans un salon.
00:25:39Je suis tout disposé à vous croire sur parole,
00:25:41mais j'aimerais en connaître davantage sur vos théories.
00:25:44Mercurio !
00:25:45Il est pour un garçon de votre âge de se croire un foudre de guerre.
00:25:50Mais vous avez raison de protester.
00:25:53J'ai massé des hommes qui ont l'oreille et l'épée sensible.
00:25:56Mais félicitations, capitaine.
00:25:57Je suis à votre disposition, général.
00:25:58Merci.
00:26:00Ce qui ne m'empêchera pas, croyez-le,
00:26:01de vous faire fusiller à la première occasion,
00:26:02car si j'aime les braves,
00:26:04je ne les tolère que de mon côté.
00:26:06Donc, Excellence,
00:26:08je vous accorde jusqu'à demain midi pour réfléchir.
00:26:12C'est à vous de décider
00:26:13si votre ville doit être ou non détruite.
00:26:15Cela vous regarde.
00:26:17Je connais votre force.
00:26:20Vous connaissez les miennes.
00:26:22Le reste se fera ses aimants de commentaire.
00:26:24Allez, en route, marcher.
00:26:25Elle!
00:26:35Comment t'as fait le titre, toi?
00:26:38Excusez-moi, général.
00:26:39Je cherche.
00:26:41Tu cherches?
00:26:42Ce que nous avons pu garder ensemble.
00:26:46Cette leçon vous coûtera cher, citoyenne.
00:26:48Votre présence en est la garantie, général.
00:26:51Je ne m'embarrasse pas de vos vaines politesses
00:26:52et n'a que faire de vos compliments de salon.
00:26:54C'est fort regrettable pour vous.
00:26:56La République m'a appris à dédaigner les féatrices hypocrites.
00:26:58Il est navrant qu'elle ne vous ait pas appris aussi
00:27:00à décrotter vos bottes
00:27:01avant de vous présenter devant une dame.
00:27:04Marshall!
00:27:07Comment se fait-il que mes bottes soient crottées?
00:27:09Votre ordonnance a été tuée ce matin, citoyen général.
00:27:13Eh bien, comment trouver un autre?
00:27:18J'espère que la prochaine fois que nous nous reverrons,
00:27:20vous vous soucierez plus de mes intentions
00:27:22que de l'éclat de mes bottes.
00:27:24Pour la cloche, c'est-tu, général?
00:27:25Eh bien, je te conseille d'en faire autant
00:27:26qu'à le sable en ma démange.
00:27:30Allez, à demain, c'est foyer.
00:27:32Attendez!
00:27:33Pourquoi à demain?
00:27:38Parce que demain à midi,
00:27:40mon armée entrera dans votre ville.
00:27:42Nous pouvons nous défendre.
00:27:44Vous pouvez aussi vous suicider.
00:27:46Avez-vous entendu parler de Jéricho?
00:27:49Oui, j'en ai entendu parler.
00:27:51Eh bien, les murs de cette ville
00:27:52tomberont de la même façon
00:27:53au seul bruit de mes tambours.
00:27:55Vous n'êtes pas jesué, général.
00:27:59Je vous laisse le soin de le décider.
00:28:02À bientôt.
00:28:03Un instant.
00:28:04Désolé, mon service par réclame.
00:28:05Un instant, je vous en prie!
00:28:36Du diable, que signifient ces grimaces?
00:28:41Nous venons d'admettre
00:28:42que la lutte est en effet
00:28:43par trop inégale.
00:28:45Et nous acceptons vos conditions.
00:28:47Sans réserve?
00:28:47Sans aucune réserve.
00:28:50Allons, voilà qui est parlé sagement.
00:28:52Je saurais me souvenir
00:28:53de votre compréhension citoyenne.
00:28:56Qu'est-ce que c'est?
00:28:57C'est le canon du palace.
00:28:59Il est midi.
00:29:01Et vous êtes prisonnier, général.
00:29:06Alors, à ce moment-là,
00:29:13le général en chef se saisit d'un drapeau.
00:29:15Oui, oui.
00:29:16Et il s'élance sur le pont.
00:29:18En plus, les ennemis a reculé.
00:29:20Après?
00:29:21Eh bien, après, toute l'armée a suivi.
00:29:23Oh, c'était beau, c'était...
00:29:24C'était sublime, c'était...
00:29:27Historique.
00:29:29Comment le sais-tu?
00:29:30J'ai entendu cette histoire
00:29:32des centaines de fois.
00:29:33Oh, cette histoire-là?
00:29:34Non, tout juste.
00:29:36Il arrive toujours un moment
00:29:37où un général se saisit d'un drapeau
00:29:38pour faire reculer les ennemis.
00:29:40Et à chaque fois, ça réussit.
00:29:43Ce doit être une dépolitesse de la guerre
00:29:45que de ne pas contrarier un geste historique.
00:29:48Sans ça, je me demande
00:29:49ce que des soldats de son genre
00:29:50pourraient raconter à la femme qu'ils désirent.
00:29:54Alors, ça t'intéresse pas?
00:29:57Non.
00:29:57Bon.
00:30:02Alors, de quoi je parle?
00:30:04De l'amour, plutôt.
00:30:08À Paris, je connaissais une fille.
00:30:12Ouais.
00:30:13Quand mon service était terminé,
00:30:14on allait se promener du côté des Tuileries.
00:30:16Tu l'aimais?
00:30:17Oh, on se plaisait bien.
00:30:19Tu lui faisais souvent l'amour?
00:30:20Tous les trois jours.
00:30:23Rapport au service.
00:30:25Oh, et les sans-culottes?
00:30:27Qu'est-ce qu'ils faisaient, les sans-culottes,
00:30:28pendant les deux jours
00:30:29où tu ne pouvais pas sortir?
00:30:30Les sans-culottes n'existaient plus.
00:30:31Je t'ai déjà dit que c'était
00:30:31pendant la Révolution et qu'il y en avait.
00:30:34D'abord, ça ne veut pas dire
00:30:34qu'ils se promenaient le dernier rouvant.
00:30:36Même pendant la Révolution,
00:30:37tu sais, il y a des choses qui ne se font pas.
00:30:39Alors, ils en avaient une.
00:30:40Une quoi?
00:30:40Une culotte.
00:30:41Mais bien sûr.
00:30:42Somme toute, il n'y a rien eu d'extraordinaire
00:30:44dans votre Révolution.
00:30:45Mais si, si!
00:30:46À partir de ce moment-là,
00:30:48tout a changé.
00:30:49Qu'est-ce qui a changé?
00:30:51Bah, tu comprends.
00:30:51Avant, c'était le despotisme,
00:30:52tu comprends?
00:30:53Qu'est-ce que c'est?
00:30:54Eh bien, c'est l'art
00:30:56de faire danser les imbéciles,
00:30:57comme dit mon capitaine.
00:30:58Maintenant, on est en République,
00:30:59tu comprends?
00:30:59En démocratie.
00:31:01La démocratie, qu'est-ce que c'est?
00:31:02Eh bien, ça doit être...
00:31:03Ça doit être l'art
00:31:04de vous danser avec eux
00:31:05parce que tu comprends maintenant.
00:31:07Tout le monde a son mot à dire.
00:31:09Si tu dis à ton capitaine
00:31:10qu'il a une tête
00:31:11qui ne te revient pas,
00:31:12qu'est-ce qu'il fait?
00:31:12Ah, il me fait fusiller!
00:31:14Oh, ben, elle est jolie,
00:31:15ta République.
00:31:16Ma République, ma République.
00:31:18Si elle me voyait en ce moment,
00:31:19ma République,
00:31:20prisonnier dans ses conditions.
00:31:22Si, on est pas mal ici, hein?
00:31:24Viens t'asseoir près de moi
00:31:25et dis-moi des choses gentilles.
00:31:28Allaudi, tiens.
00:31:29Oui?
00:31:30Allaudi.
00:31:31Quand on s'est battu
00:31:32un contre-sens.
00:31:33Pas des histoires de guerre.
00:31:35Non, des histoires d'amour.
00:31:37Que j'en sais.
00:31:37Ben, alors, avance-les.
00:31:39Si tu crois que c'est facile,
00:31:40tu te connais bien, ton général?
00:31:44Oh, bien, c'est beaucoup dire.
00:31:47On se salue comme ci, comme ça,
00:31:48sans vraiment chercher
00:31:49à sympathiser.
00:31:50Dis-donc,
00:31:50qu'est-ce qu'il vous a promis,
00:31:51votre général?
00:31:52Ben, la victoire.
00:31:54Et après?
00:31:55La bonbonne.
00:31:56Et après?
00:31:57Après?
00:31:58Oui, après.
00:31:58D'autres victoires,
00:31:59d'autres bonbons.
00:32:00C'est tout?
00:32:00Ben, tu sais,
00:32:01pour un républicain,
00:32:02c'est suffisant.
00:32:03Il ne vous a pas parlé des femmes?
00:32:05Ben, peut-être
00:32:05dans la conversation.
00:32:07Et dans cette même conversation?
00:32:08Il ne vous a pas promis
00:32:10qu'avant huit jours,
00:32:10vous coucheriez au palazzo
00:32:12avec chacun une femme dans les bras?
00:32:13Oui, oui.
00:32:14Cochon!
00:32:14C'est pas moi qui l'ai dit.
00:32:15Je ne cherche pas d'excuses.
00:32:16À sa place,
00:32:17on n'aurait promis tout autant.
00:32:18Vous êtes tous pareils.
00:32:19Italiens ou Français,
00:32:20devant la femme,
00:32:20il n'y a plus que des brutes.
00:32:21Et si vous faites la guerre,
00:32:22c'est avec l'arrière-françée
00:32:23de pouvoir tripoter des jupons.
00:32:25Mais qu'est-ce que tu vas chercher?
00:32:26Trop content de pouvoir servir
00:32:27la patrie d'une façon ou d'une autre,
00:32:29surtout d'une autre.
00:32:29Enfin, Italiena,
00:32:30je te jure.
00:32:30Oh, tu me jures, tu me jures.
00:32:33Est-ce que tu peux me jurer
00:32:34si je t'emmenais dans ma chambre,
00:32:37si je me mettais nue devant toi,
00:32:39si je te tombais dans les bras,
00:32:41est-ce que tu peux me jurer
00:32:41que tu aurais la galanterie
00:32:42de ne pas me bien aller?
00:32:44Non.
00:32:46Non, honnêtement,
00:32:47sincèrement,
00:32:49non.
00:32:51Tu vois bien.
00:32:56Quelque chose comme celle-là,
00:32:57tu fais rire?
00:32:58Félicien, tu fais rire.
00:33:00Ce qui me fait rire,
00:33:01c'est que...
00:33:02Quoi?
00:33:02C'est que lorsque j'ai parlé
00:33:03de me mettre nue devant toi,
00:33:05eh bien, tu as rougi.
00:33:06Oui, oh, t'as raison d'en rire.
00:33:09Un conquérant qui rougit devant une femme,
00:33:11c'est risible.
00:33:13Mais à me voir là,
00:33:14sans mon sort,
00:33:15comme ça,
00:33:17sans mon attirail,
00:33:19on pourrait croire
00:33:19que la femme m'intéresse
00:33:21que d'une certaine façon.
00:33:22Quelle façon?
00:33:23La façon de...
00:33:25La façon d'une...
00:33:27Enfin, d'une certaine façon, quoi?
00:33:30Pourtant, non.
00:33:33Non, je...
00:33:34Tu vas peut-être encore rigoler,
00:33:36mais...
00:33:37C'est drôle.
00:33:39Je suis sentimental.
00:33:41Dis-moi, Félicien,
00:33:43quand tu entreras dans la vie
00:33:44derrière toutes ces trompettes
00:33:45et ces tambours,
00:33:46est-ce que tu te jetteras
00:33:47sur les femmes?
00:33:49Non.
00:33:51Sûrement plus maintenant.
00:33:54Parce que tu m'aimes?
00:33:54Ça doit être ça.
00:33:59Embrasse-moi, Félicien.
00:34:05Qu'est-ce que t'en penses?
00:34:06Pour un sentimental,
00:34:08c'est pas mal du tout.
00:34:10Alors, si tu permets,
00:34:10je recommence.
00:34:11Oh oui, Félicien?
00:34:12Jolie, la brigade.
00:34:16Très jolie.
00:34:18On passe à l'ennemi,
00:34:19à ce que je vois.
00:34:19On s'installe.
00:34:21Juste une petite reconnaissance,
00:34:22citoyen capitaine.
00:34:23Une reconnaissance, n'est-ce pas?
00:34:24Ça peut aussi s'appeler
00:34:25une trahison en langage militaire.
00:34:26C'est citoyen capitaine.
00:34:27Je n'ai pas besoin d'explication.
00:34:29Les preuves me suffisent.
00:34:32Alors, on profite d'être prisonnier
00:34:34pour faire ami-ami
00:34:35avec les personnes du sexe?
00:34:37On oublie la République
00:34:38et le drapeau
00:34:38pour se bécoter sans pudeur?
00:34:40Sans pudeur?
00:34:41Vous croyez-vous
00:34:41avec une fille de régiment
00:34:42pour me parler de cette manière?
00:34:44Essayez donc de m'embrasser
00:34:45sans pudeur
00:34:45pour voir un peu
00:34:46comment vous vous sortirez
00:34:47de l'affaire.
00:34:47Essayez donc.
00:34:49Mais qu'est-ce que c'est que ces façons?
00:34:50C'est justement ce que je vous demande.
00:34:51Où vous croyez-vous?
00:34:52Et puis d'abord,
00:34:53qui vous a permis d'entrer
00:34:54sans frapper?
00:34:54Ce salon-là n'est pas une écurie.
00:34:57Il n'y a que la paille
00:34:58qui sort de vos chaussures
00:34:59permet d'y faire penser.
00:35:00La paille?
00:35:01Quelle paille?
00:35:02C'est une image.
00:35:05Qui commande ici?
00:35:06Mais c'est vous,
00:35:06citoyen capitaine.
00:35:07Non, ce n'est pas lui.
00:35:10Ce n'est pas moi.
00:35:10Non, vous êtes mes prisonniers.
00:35:11Alors ça, c'est juste.
00:35:13Ah, c'est comme ça.
00:35:14Eh bien, nous allons rire.
00:35:15C'est ça, rions.
00:35:16Ça nous changera les idées.
00:35:17Je suis capitaine.
00:35:18Garde à vous la brigade.
00:35:19Vous êtes prisonniers.
00:35:20Repos la brigade.
00:35:21La brigade, garde à vous.
00:35:22La brigade, repos.
00:35:22Ne croyez surtout pas me fatiguer.
00:35:25Je suis resté trois nuits
00:35:26sans dormir.
00:35:26Je n'espérais pas me voir céder.
00:35:28Je peux rester huit jours
00:35:28sans fermer l'œil.
00:35:29Vous dites ça pour plaisanter,
00:35:30j'espère, non?
00:35:31Garde à vous.
00:35:31Repos.
00:35:35Bien.
00:35:37Bien.
00:35:37J'enregistre.
00:35:38Eh bien, c'est ça, enregistrez.
00:35:39Dites-donc, vous m'en pardon,
00:35:41si ça ne vous ennuie pas,
00:35:42je pourrais peut-être
00:35:42aller prendre un peu l'air.
00:35:44Allez.
00:35:45Va.
00:35:51Merci.
00:35:51Il est gentil, garçon, n'est-ce pas?
00:36:05Bon, soldat,
00:36:06bien noté de la chef.
00:36:09Sergent capable?
00:36:10Très capable.
00:36:13Un peu influençable, peut-être.
00:36:14Oui, peut-être,
00:36:16mais toujours sous le nerf du drapeau.
00:36:18Pourquoi dites-vous ça?
00:36:19Pendant que j'étais dans ses bras
00:36:20à deux doigts de l'abandon,
00:36:22il m'expliquait la République française.
00:36:24Ah.
00:36:26Ah, c'est un patriote,
00:36:28un enfant de la Révolution,
00:36:30comme moi.
00:36:31Voyez-vous être auprès
00:36:32d'une jolie femme attentive
00:36:33et parler de ces choses-là?
00:36:36Certainement.
00:36:38Eh bien, allez-y,
00:36:39je vous écoute.
00:36:39Non, attendez.
00:36:42Ne vous asseoir pas de moi.
00:36:45Et maintenant,
00:36:47expliquez-le à moi
00:36:47votre fameuse République.
00:36:52Tout a commencé
00:36:53le 5 mai 1789
00:36:55par la séance d'ouverture
00:36:57des états généraux.
00:36:58Toujours des militaires.
00:37:00Nous attendions une constitution.
00:37:01Oh oui, c'est ça.
00:37:02Parlez-moi de votre constitution.
00:37:04Tout d'abord,
00:37:05le roi se mit
00:37:06à réclamer de l'argent.
00:37:06L'argent, l'argent,
00:37:07toujours l'argent.
00:37:08Il n'y a pas que ça au monde.
00:37:09Ah, justement.
00:37:09Non, il y a l'amour aussi.
00:37:11Oui, peut-être.
00:37:13Mais le roi
00:37:13n'a parlé que d'argent.
00:37:15Ce que nous désirions,
00:37:17nous,
00:37:17c'était une assemblée nationale.
00:37:19Comme tout cela
00:37:20est passionnant.
00:37:21Le 17 juin,
00:37:22nous formâmes
00:37:23cette fameuse assemblée
00:37:24au cours
00:37:25d'une séance mémorable
00:37:26qui...
00:37:26Ça, les serments,
00:37:27on sait ce qu'ils valent
00:37:27quelquefois.
00:37:28L'assemblée constituante
00:37:30n'a qui le 9 juillet.
00:37:31Oh, cher petit poufot.
00:37:33Le 11 de ce mois...
00:37:34Comment trouvez-vous
00:37:34la couleur de mes yeux, capitaine ?
00:37:36Bleu.
00:37:38Le ministre Necker...
00:37:39Mon teint.
00:37:40Comment trouvez-vous mon teint ?
00:37:41Blanc.
00:37:43Furent envoyés.
00:37:44Et les troupes royales...
00:37:45Mes lèvres.
00:37:45Comment trouvez-vous mes lèvres ?
00:37:47Rouge.
00:37:49Sur un ordre du roi,
00:37:50se rassemblaient
00:37:51autour de Paris
00:37:51et de Versailles.
00:37:52Capitaine, capitaine,
00:37:54je sens que vous allez m'apprendre
00:37:55des choses merveilleuses.
00:37:57Elles avaient pour mission
00:37:58de dissoudre l'assemblée
00:37:59qui fut sauvée
00:38:00par le peuple de Paris.
00:38:01De Paris ?
00:38:02Soulevées en particulier
00:38:04à l'appel de Camille
00:38:06des Moulins.
00:38:07Des Moulins,
00:38:07comme c'est romantique.
00:38:09Et le 14 juillet...
00:38:10Vous preniez la Bastille.
00:38:12Symbole du despotisme.
00:38:16Tanina, peux-tu m'expliquer ?
00:38:19Ma conduite ?
00:38:20Et de quel droit
00:38:21me demandes-tu une explication ?
00:38:23Suis-je ta fille ?
00:38:25Ta femme ?
00:38:26Il se trouve que les Français
00:38:27me plaisent infiniment.
00:38:28Est-ce une raison
00:38:29pour leur tomber dans les bras ?
00:38:31Oh, une excellente raison.
00:38:32La meilleure, sans doute,
00:38:33qu'une femme puisse trouver.
00:38:34Parfait, parfait, parfait.
00:38:36Je vois que ton éducation est faite.
00:38:38Les Français connaîtront bientôt
00:38:39toute l'Italie,
00:38:39car je suppose que tu auras
00:38:40à cœur de leur apprendre
00:38:41à ton tour notre histoire
00:38:42avant de les suivre
00:38:43dans leur République.
00:38:44Et après,
00:38:45si elle me plaît à moi,
00:38:46leur République,
00:38:48s'ils me plaisent
00:38:48leur Moulin,
00:38:49leur Massie,
00:38:50s'il me plaît
00:38:50de me coiffer
00:38:51d'un bonnet frégien,
00:38:52de danser la carmagnole
00:38:53et de me promener
00:38:54sans pilote...
00:38:54Oh, Tanina !
00:38:55Quoi, Tanina ?
00:38:56Messieurs,
00:38:57je suis en tête un mercurio.
00:39:01Quelle femme !
00:39:06S'il me plaît à moi
00:39:07de me promener sans culotte.
00:39:09Mais c'est qu'elle le ferait,
00:39:09la coquine.
00:39:11Vous l'avez entendu ?
00:39:13Mes cierges sont éteints
00:39:14et je ne t'attends plus.
00:39:16Mais de quelles cierges
00:39:17vous l'avez parlé ?
00:39:18De ceux qu'elles brûlaient
00:39:19chaque nuit
00:39:19en priant la madame
00:39:20que je franchisse
00:39:21le balcon de sa chambre.
00:39:22Chaque nuit ?
00:39:22Chaque nuit.
00:39:24Mais pourquoi le balcon ?
00:39:26C'était plus romantique
00:39:27à son goût.
00:39:28Ah.
00:39:29Vous la délaissiez à ce point ?
00:39:30Oh, d'un côté,
00:39:31il y avait la signora,
00:39:32de l'autre côté,
00:39:32le service.
00:39:34Signora ?
00:39:34La femme du gouverneur.
00:39:36Ah, bien...
00:39:37Elle m'a trouvé
00:39:38à son goût
00:39:38comme caporal
00:39:39et m'a fait nommée capitaine
00:39:40par la grâce de l'amour.
00:39:42Elle a été à la fois
00:39:42mon instructeur
00:39:43et mon école de guerre.
00:39:45Il faut vous dire
00:39:45que j'étais caporal,
00:39:47mais puceau.
00:39:48Ça l'a intriguée,
00:39:49elle m'a fait une déclaration,
00:39:50il m'a fallu choisir
00:39:51mes galons,
00:39:51mon pucelage.
00:39:54Et alors ?
00:39:54Eh bien, voilà,
00:39:55je suis capitaine.
00:39:56Ne vous en plaignez pas.
00:39:58Je n'en connais plus l'un
00:39:58qui a cette guerre-là
00:39:59qu'on boiterait
00:39:59le bâton de maréchal.
00:40:00Jusqu'au graphe de sergent,
00:40:01je vous avoue
00:40:01y avoir pris du plaisir.
00:40:03De sergent à sous-lieutenant,
00:40:04je me suis fait une raison.
00:40:05De sous-lieutenant
00:40:05à lieutenant,
00:40:07j'ai pensé à la patrie.
00:40:08De lieutenant à capitaine,
00:40:09à ma vieille mère.
00:40:11Mais comme je n'ai pas
00:40:12connu mon père,
00:40:13je me demande
00:40:13à qui je pourrais bien penser
00:40:14pour obtenir mes galons
00:40:15de colonel.
00:40:17Ah, oui.
00:40:18Soyez un peu égoïste,
00:40:19pensez à vous.
00:40:19Cette situation est ridicule.
00:40:21On est-vous sûr ?
00:40:23La signora vous a tout simplement
00:40:24prouvé que l'héroïsme
00:40:26avait moins d'attrait
00:40:26que le savoir-faire.
00:40:28Les champs de bataille,
00:40:30un peu particuliers,
00:40:30je vous l'accorde,
00:40:31où vous avez fait
00:40:32vos premières armes,
00:40:33ne manquaient pas non plus
00:40:34de grandeur.
00:40:35Un soldat peut connaître
00:40:37la défaite
00:40:37sans être pour autant déshonoré,
00:40:40mais décevoir une femme
00:40:41dans une rencontre
00:40:42où bien souvent
00:40:42elle domine la situation
00:40:44et d'un mauvais goût
00:40:45dont un honneur
00:40:46ne se relève pas.
00:40:48Quand on se bat,
00:40:49on peut quelquefois
00:40:50compter sur les autres,
00:40:51mais quand on...
00:40:52Non, jamais.
00:40:55À vous entendre,
00:40:56on croirait que je suis un héros.
00:40:58Ah, un héros,
00:40:58peut-être pas,
00:40:59mais une femme,
00:41:01c'est autrement plus subtil
00:41:01qu'un général,
00:41:02fut-il républicain.
00:41:04Vous avez pris des risques,
00:41:05vous aussi.
00:41:05La moindre fausse manœuvre
00:41:06pouvait briser votre carrière
00:41:08et à chaque parole,
00:41:09chaque baiser,
00:41:10chaque regard,
00:41:10chaque caresse,
00:41:11vous jouiez votre galon.
00:41:12Oui, oui, oui,
00:41:13je jouais mon galon,
00:41:14mais bien au chaud,
00:41:15le ventre plein,
00:41:16portant beau,
00:41:17le sabre pudiquement
00:41:18tendoyé dans son fourreau.
00:41:19Le seul danger,
00:41:21le seul risque,
00:41:22la seule excitation
00:41:23de ces rencontres
00:41:23était la porte
00:41:24qui pouvait s'ouvrir
00:41:25sur l'omnipotence
00:41:26du gouverneur.
00:41:27Mais les portes en Italie
00:41:28ne s'ouvrent jamais
00:41:29sur les maricocules.
00:41:31Non, vous êtes ici
00:41:31parce que vous avez su
00:41:32être le serviteur d'un drapeau
00:41:33et non pas le domestique
00:41:34d'un drapeau.
00:41:35Ah non,
00:41:36non, surtout parce que
00:41:37nos chefs nous en ont donné
00:41:38l'ordre.
00:41:40Si le général en chef
00:41:41nous donnait l'ordre
00:41:41de faire la cour aux jolies filles
00:41:44pour prouver notre attachement
00:41:45à la République,
00:41:46je suis persuadé
00:41:46que pas un de ces ventres creux
00:41:47qui font notre grandeur
00:41:48n'hésiterait qu'une seconde
00:41:49à se mettre à l'aise
00:41:50pour remplir son devoir
00:41:51de bons citoyens.
00:41:53Seulement,
00:41:53le général ne nous donne
00:41:54jamais de tels ordres.
00:41:56Ce n'est pas dans son programme
00:41:57militaire,
00:41:58ce qu'il parait.
00:41:59Vous paraissez le regretter.
00:42:02Écoutez-moi, capitaine,
00:42:04j'aime mon métier,
00:42:05mes hommes
00:42:06et ma condition de soldat.
00:42:08Mais devant une fille
00:42:09comme Tanina,
00:42:10la République,
00:42:11a beau vous avoir enfantée,
00:42:12on sent bien que jusqu'à ce jour,
00:42:14il vous manquait quelque chose.
00:42:15Vous l'aimez ?
00:42:16Je pourrais t'en pas l'aimer,
00:42:17mais elle a une façon
00:42:19de comprendre
00:42:19l'histoire de la France.
00:42:21Comment trouvez-vous
00:42:22la situation, capitaine ?
00:42:24Mauvaise, excellence,
00:42:26très mauvaise.
00:42:26Ah, pour vous ?
00:42:27Non, pour vous.
00:42:29Vous avez réussi
00:42:29un assez joli coup de maître,
00:42:31mais je crains fort
00:42:31que nous n'ayons
00:42:32vous et moi
00:42:32à le regretter bientôt.
00:42:33Vous et nous ?
00:42:35Écoutez-moi bien.
00:42:36Le général
00:42:37est votre prisonnier,
00:42:38Swap.
00:42:38Mais lorsque ces hommes
00:42:40apprendront la nouvelle,
00:42:41croyez-vous
00:42:42qu'ils lèveront
00:42:42tout simplement le camp
00:42:43dans l'espoir
00:42:43d'aller faire
00:42:44meilleure fortune ailleurs ?
00:42:45Dans l'armée française,
00:42:46comme dans toutes les armées
00:42:47du monde d'ailleurs,
00:42:48il y a des subalternes
00:42:49ambitieux qui saisiront
00:42:50le prétexte par la bride
00:42:51pour se faire valoir
00:42:52en haut-lieu.
00:42:53Quelle belle occasion
00:42:54pour un colonel
00:42:55que de raser une ville
00:42:56pour en délivrer son général.
00:42:58Et quelle belle excuse, surtout.
00:43:00Eh oui,
00:43:00mais j'avais prévu
00:43:01l'éventualité.
00:43:02Dès ce matin,
00:43:03je lui ai ordonné
00:43:03une délégation
00:43:04qui est allée rassurer
00:43:05l'état-major du général
00:43:07en lui expliquant
00:43:08que celui-ci était au palazzo
00:43:09à débattre
00:43:10à les termes
00:43:10d'une négociation.
00:43:13Ah.
00:43:16Jusqu'à quand comptez-vous
00:43:17exploiter cette petite histoire ?
00:43:19Eh ben,
00:43:19je n'en sais rien précisément.
00:43:21C'est bien ce qui m'ennuie.
00:43:22Bon,
00:43:23un jour ou deux tout au plus.
00:43:24Après,
00:43:24il faudra bien
00:43:24leur découvrir la vérité.
00:43:26Dites-moi, capitaine,
00:43:27que se passera-t-il alors ?
00:43:29Ce qui se passera
00:43:30dépasse votre imagination,
00:43:33signore Petrino.
00:43:34Je vous vois, vous,
00:43:36pendu par les pieds
00:43:37à la fontaine
00:43:38de la cour d'honneur.
00:43:39Oui, vous !
00:43:41La langue tirée par la soif
00:43:42et la tête vide
00:43:43de tout raisonnement.
00:43:45Je vois son excellence
00:43:46encadrée par quatre chevaux légers
00:43:48conduits dans une pièce obscure
00:43:49et livrée à elle-même
00:43:50au remords
00:43:50de cet instant de gloire.
00:43:52Je vois le capitaine Mercurio
00:43:54entouré de quelques rescapés
00:43:55affolés
00:43:56et défendant chèrement sa vie
00:43:57contre une meute de loups excitées.
00:43:59Ma Francesca, capitaine,
00:44:00ma Francesca,
00:44:01la voyez-vous ?
00:44:03Oui,
00:44:05mais je la vois mal.
00:44:06Pelqué ?
00:44:07Il y a un soldat
00:44:08qui la cache à ma vue.
00:44:09Un soldat ?
00:44:10Un soldat français
00:44:12avec un énorme bonnet à poil.
00:44:14À poil ?
00:44:15Et ce soldat,
00:44:15signore Petrino,
00:44:16lui raconte par le détail
00:44:18la révolution française.
00:44:19Oh, mais c'est horrible !
00:44:21Possible,
00:44:21mais il paraît
00:44:22que l'histoire de France
00:44:23intéresse votre Francesca
00:44:24car je la vois qui danse,
00:44:26qui danse !
00:44:27La parentelle ?
00:44:28Oh non,
00:44:28signore Petrino,
00:44:29non,
00:44:30la carmagnole.
00:44:31Oh,
00:44:31madonna,
00:44:32ma Francesca,
00:44:33elle qui adore danser.
00:44:34Hé, hé, hé, hé, hé !
00:44:37Que pensez-vous
00:44:37de cette évocation,
00:44:38excellent ?
00:44:38Ah, persuasive,
00:44:40si j'en crois
00:44:40la figure
00:44:41de mon premier conseiller,
00:44:42mais enfin,
00:44:43ce n'est qu'une évocation,
00:44:44n'est-ce pas ?
00:44:45Ah,
00:44:46c'est-on jamais ?
00:44:47Parlez-vous sérieusement ?
00:44:50Plus que je ne souhaiterais.
00:44:52Demain,
00:44:52l'état-major du général
00:44:53sera que son chef
00:44:54est votre prisonnier.
00:44:56Quelques paroles bien senties
00:44:57et tous ces gens
00:44:58qui déjà ne rêvent que ripaille
00:44:59se découvriront
00:45:00par-dessus le marché
00:45:01une âme de héros
00:45:02pour voler au secours
00:45:03de leurs citoyens bien-aimés.
00:45:05Sincèrement,
00:45:06je ne peux prévoir
00:45:06quelle sera alors
00:45:07leur réaction.
00:45:08Et crois-tu
00:45:08que le capitaine
00:45:09dit vrai,
00:45:10Mercurion ?
00:45:11Oui,
00:45:11excellence,
00:45:12je le crois.
00:45:12Ah,
00:45:13et selon toi,
00:45:14je dois rendre
00:45:15la liberté au général ?
00:45:16Peut-être,
00:45:17excellence.
00:45:17Mais pourquoi peut-être ?
00:45:19Certaines conditions
00:45:20demandent à être révisées,
00:45:21n'est-ce pas votre avis,
00:45:21capitaine ?
00:45:22Bon,
00:45:23j'ai peur que le général
00:45:24ne fasse la sourde oreille
00:45:25à vos propositions.
00:45:26Et peut-on savoir pourquoi ?
00:45:28Il est natif de Kirvideck
00:45:30dans le Finistère,
00:45:31Bretagne.
00:45:32Et alors ?
00:45:33Et alors ?
00:45:34Entre un breton
00:45:35et un mulet,
00:45:36celui qui cède,
00:45:37c'est le mulet.
00:45:38Bon,
00:45:38eh bien,
00:45:39moi,
00:45:39je n'accepterai jamais
00:45:40ces conditions.
00:45:41Ah,
00:45:42alors,
00:45:43attendons.
00:45:44C'est ça.
00:45:45Attendons.
00:45:51Capitaine,
00:45:51dans ce Finistère
00:45:52dont vous parlez,
00:45:53il n'y a pas que des mulets,
00:45:53je suppose.
00:45:55Bon,
00:45:55à part quelques exceptions,
00:45:57je ne vois pas, non.
00:45:58Est-ce qu'il y a aussi
00:45:59de jolies femmes ?
00:46:00Ah,
00:46:00très jolies femmes.
00:46:01Ont-elles renoncé
00:46:02à faire entendre raison
00:46:03aux hommes qui leur plaisent ?
00:46:04Ah,
00:46:04c'est selon.
00:46:05Alors,
00:46:06je crois que j'ai trouvé
00:46:06la solution.
00:46:07Vous croyez ?
00:46:08Dans mon pays,
00:46:09on dit
00:46:10ce qu'on ne peut obtenir
00:46:11d'un mulet
00:46:11avec une botte de foin,
00:46:13une femme peut l'obtenir
00:46:14d'un homme
00:46:14avec un brin de paille.
00:46:16Et croyez-moi,
00:46:16il y a cette femme
00:46:17dans toute la ville
00:46:18pour tous les généraux
00:46:19de votre république,
00:46:20même s'ils étaient tous
00:46:21natifs de Finistère.
00:46:23À très bientôt,
00:46:23capitaine.
00:46:28Avec un brin de paille,
00:46:30c'est assez joli.
00:46:34C'est peut-être vrai.
00:46:42Se faire prendre
00:46:43comme un idiot
00:46:45par un gouverneur
00:46:46de promesse ventreux
00:46:47aussi inoffensive
00:46:47qu'une dame patronesse,
00:46:49c'est incombe
00:46:49que le général en chef
00:46:51ne me pardonnera jamais
00:46:51et tu m'entends,
00:46:52marchal,
00:46:52jamais !
00:46:53Je le connais,
00:46:56il me cassera.
00:46:57Il aura raison.
00:46:59Il me cassera
00:47:00malgré mes états de service,
00:47:01mes trois blessures
00:47:02à Arcole,
00:47:02mes deux blessures
00:47:03à Lodi
00:47:03et ma blessure
00:47:04à la fesse droite
00:47:05qui me fait souffrir
00:47:06quand je suis à cheval
00:47:07et que le temps
00:47:07est à la pluie.
00:47:08Ne me dis rien !
00:47:10Je sais ce que tu penses.
00:47:12Et bien que ce ne soit
00:47:13pas mon avantage,
00:47:14je le pense aussi.
00:47:15Mais il y a peut-être
00:47:16un moyen de nous en sortir
00:47:17si vous accordiez
00:47:17quelques petites garanties
00:47:18au gouverneur.
00:47:18Mais pourquoi pas,
00:47:19excusez-moi votre excellence,
00:47:21notre présence ici
00:47:21est tout à fait accidentelle.
00:47:23Après quoi,
00:47:24nous irons expliquer
00:47:25au général Bonaparte
00:47:26que le gouverneur Salvatore
00:47:28ne nous a pas permis
00:47:29de visiter ses propriétés
00:47:30et pour clore l'affaire,
00:47:32chanter notre dernier saillera
00:47:34devant un peloton
00:47:35de braves pétnots
00:47:36qui nous expédieront
00:47:37dans notre monde
00:47:38le temps d'appuyer
00:47:39sur la détente.
00:47:40Oh, charme en programme !
00:47:42Vous n'avez pas besoin
00:47:42de quitter la Bretagne
00:47:43pour trouver en Italie
00:47:44le moyen de mourir
00:47:45aussi pétnots.
00:47:48Ma carrière est bien finie,
00:47:53Marshal.
00:47:55J'imagine qu'elle a dû être
00:47:56la réaction de mes hommes
00:47:57à l'annonce de cette nouvelle.
00:47:58Ah, on doit y aujourd'hui
00:47:59aux portes de Mijanot !
00:48:00Mais tout n'est pas perdu,
00:48:01citoyen général,
00:48:01le gouverneur...
00:48:02Le gouverneur espère
00:48:03que votre séjour
00:48:04dans notre ville
00:48:05ne vous sera pas
00:48:05trop désagréable.
00:48:06Vous ?
00:48:07Moi.
00:48:08Ravi de vous retrouver
00:48:09dans de si bonnes dispositions.
00:48:11Ne croyez surtout pas
00:48:12m'avoir réduit
00:48:12à votre merci
00:48:13par ce coup d'éclat
00:48:14qui a pu vous éblouir,
00:48:15mais qui reste ce qu'il est,
00:48:17un simple fait divers.
00:48:17Mais je ne crois rien,
00:48:19rien de ce que vous me dites
00:48:20en tous les cas.
00:48:21Capitaine,
00:48:22j'aimerais rester seule
00:48:23avec ce général.
00:48:27À vos ordres, signora.
00:48:33Vous paraissez fort,
00:48:34mon collègue.
00:48:35Je ne suis aucunement colère.
00:48:37J'ai simple mœurs
00:48:37qui ne s'accommènent pas
00:48:38d'un climat sec et chaud.
00:48:39Pourquoi vous efforcez-vous
00:48:41de prononcer
00:48:41comme si vous vouliez mordre ?
00:48:43Est-ce un genre
00:48:44que vous vous donnez ?
00:48:45Ou cherchez-vous
00:48:45à dissimuler
00:48:46un défaut de prononciation ?
00:48:48Je ne suis pas ici
00:48:49pour discuter de mon langage
00:48:50ni du ton
00:48:50qu'il me plaît d'user.
00:48:52C'est beaucoup plus simple.
00:48:52Vous êtes ici
00:48:53parce que vous êtes
00:48:54mon prisonnier.
00:48:55Oh, votre prisonnier !
00:48:56Le mien.
00:48:57Le seul qu'il m'ait été donné
00:48:58de faire jusqu'à présent,
00:48:59le seul mais de grade.
00:49:02Je suppose que
00:49:03dans la hiérarchie militaire,
00:49:04un général vaut bien
00:49:06deux deuxièmes classes.
00:49:07Bon, c'est environ.
00:49:10C'est plus
00:49:10que d'en pouvoir
00:49:11espérer une simple femme.
00:49:17Vous m'en voulez ?
00:49:19Non.
00:49:20J'en suis presque déçue.
00:49:22Jusqu'à maintenant,
00:49:23j'essayais d'imaginer
00:49:24ce que pouvait être
00:49:24un général vrai.
00:49:26Maintenant,
00:49:27vous êtes là devant moi
00:49:28et je n'ai presque plus peur.
00:49:31J'essaye de penser
00:49:32à ce que vous étiez
00:49:33quand vous n'étiez encore
00:49:34qu'un tout petit garçon.
00:49:37Que faisiez-vous
00:49:37quand vous aviez trois ans ?
00:49:41Il m'arrivait de recevoir
00:49:42des fessées
00:49:42quand je pissais
00:49:43dans mes culottes,
00:49:43par exemple.
00:49:44Ah, parce qu'un général...
00:49:44Oui, il peut pisser
00:49:45dans sa culotte
00:49:46à l'âge de trois ans.
00:49:47C'est une faiblesse
00:49:47que beaucoup d'hommes
00:49:48illustres ont connus.
00:49:50Comment vous appelez-vous ?
00:49:51Marcoux.
00:49:53Citoyen général Marcoux.
00:49:54Non, mais votre prénom.
00:49:55Vous en avez bien un,
00:49:56je suppose ?
00:49:58Philemon.
00:50:00Philemon.
00:50:01Oui, Philemon, Philemon.
00:50:01Et vous avez raison
00:50:02de le trouver ridicule.
00:50:03Un prénom n'est jamais ridicule
00:50:06aux yeux de celle
00:50:07qui aime celui
00:50:08qui le porte.
00:50:12Dois-je comprendre que...
00:50:14Pourquoi me posez-vous
00:50:15cette question ?
00:50:15Vous avez déjà compris.
00:50:18C'est vrai, j'ai compris.
00:50:19Alors, vous voyez bien ?
00:50:22Oui, je vois.
00:50:23Je vois que vous essayez
00:50:24de m'entortiller,
00:50:25mais ça ne prend pas
00:50:26qu'on entortille
00:50:27un caporal,
00:50:28un sergent,
00:50:29un lieuton,
00:50:30à la rigueur un capitaine,
00:50:31mais pas un général.
00:50:32Ça ne s'est jamais vu.
00:50:33Je ne suis pas un ramolli,
00:50:34moi, madame.
00:50:35La République m'a enfantée.
00:50:38Qu'est-ce que vous avez ?
00:50:39Rien.
00:50:40Je pense à elle.
00:50:41À qui ?
00:50:42À la République,
00:50:43comme elle a dû souffrir.
00:50:45Peut-être.
00:50:46Mais dans la joie.
00:50:49Elle en avait assez,
00:50:49la République.
00:50:50Des petites saletés,
00:50:51des petites facilités,
00:50:52celles de tous les jours
00:50:53qu'on économise
00:50:53pour se faire un nom,
00:50:54un titre ou une réputation.
00:50:55Elle en avait assez,
00:50:56la République assez,
00:50:57assez, assez.
00:50:58Alors elle a poussé
00:50:58son lardent.
00:50:59Vous vous énervez.
00:51:02Oui, oui,
00:51:03je m'énerve.
00:51:04Et avouez qu'il y a de quoi.
00:51:05Peut-être, oui.
00:51:08Général,
00:51:09êtes-vous l'ennemi
00:51:10de toutes les facilités ?
00:51:13De toutes.
00:51:13Toutes,
00:51:14sans aucune exception ?
00:51:15Aucune.
00:51:16Et la femme,
00:51:17Général,
00:51:18y avez-vous pensé ?
00:51:19Souvent.
00:51:21Une petite bête
00:51:22insignifiante
00:51:23qui grignote
00:51:24la solde de son mari,
00:51:25ou le cœur de son amant,
00:51:26aucun intérêt.
00:51:27La croyez-vous
00:51:28cependant capable
00:51:29d'un geste désintéressé ?
00:51:31Non.
00:51:32Qu'en savez-vous ?
00:51:33Il y a des choses
00:51:33qu'on peut deviner d'instinct.
00:51:36Général,
00:51:36vous êtes désespéré.
00:51:39Mais oui,
00:51:39un républicain
00:51:40a le droit de vivre
00:51:41et même celui de mourir,
00:51:42mais pas celui
00:51:43de se faire faire prisonnier
00:51:44lors de telles conditions.
00:51:45J'ai deviné juste.
00:51:46Très juste.
00:51:48À qui la faute ?
00:51:48Oh, je peux être coupable.
00:51:49Général,
00:51:51vous n'êtes pas
00:51:51tout à fait déshonoré.
00:51:53Non.
00:51:54Puisque l'honneur
00:51:55vous colle à la peau
00:51:55et que vous cultivez
00:51:57la vertu militaire
00:51:57comme une fleur fragile,
00:51:59apprenez que votre état-major
00:52:00est persuadé
00:52:01que vous êtes ici
00:52:02afin de discuter
00:52:03les termes
00:52:04d'une capitulation.
00:52:05Le mot est choisi
00:52:05et ne peut vous laisser
00:52:07aucune amertume.
00:52:11Qu'est-ce que vous m'offrez ?
00:52:12La liberté
00:52:13et vous l'acceptez.
00:52:16Je la refuse.
00:52:16Ah, vous êtes trop bête
00:52:17à la fin.
00:52:18Je suis prisonnier
00:52:19de mon imbécilité.
00:52:20Que ça vous plaise ou non,
00:52:20je resterai prisonnier.
00:52:21Général,
00:52:22je vous en supplie,
00:52:23évadez-vous.
00:52:24Vous en avez le droit
00:52:25et même le gouverneur
00:52:26ne pourra pas vous en vouloir.
00:52:28Non.
00:52:29Si.
00:52:29Non.
00:52:29Non, vous êtes un muf.
00:52:31Mais pas un idiot.
00:52:32Que me demandez-vous
00:52:33en échange de cette liberté
00:52:34promise comme la lune
00:52:36à un Pierrot extasié ?
00:52:37Rien.
00:52:38Toutes vos conditions
00:52:39seront acceptées.
00:52:40Vous voulez la ville,
00:52:41ses maisons,
00:52:42ses hommes,
00:52:43ses femmes,
00:52:44ses bêtes,
00:52:44tout.
00:52:44Vous avez tout,
00:52:45tout, général, tout.
00:52:48Et s'il vous plaît
00:52:49de commencer par la signora,
00:52:51prenez-la.
00:52:52Elle est à vous.
00:52:54Mais que le gouverneur
00:52:55n'en sache rien,
00:52:56il en serait encore plus
00:52:56chagriné que de votre évasion.
00:52:59Citoyenne, regardez-moi.
00:53:00Je vous regarde.
00:53:01Ai-je dans mon regard,
00:53:02dans ma tenue,
00:53:03dans mon comportement,
00:53:04quelque chose
00:53:05qui m'apparente
00:53:06à un enfant de trop ?
00:53:06Oh, non.
00:53:07Bon.
00:53:08On me fait prisonnier.
00:53:10On me menace du cachot,
00:53:11de l'écartèlement,
00:53:12de la pendaison.
00:53:12J'en passe et des meilleurs.
00:53:14On revient sur ses pas,
00:53:15on tourne,
00:53:16on virevolte,
00:53:16on flatte,
00:53:17on s'attendrit
00:53:17et brusquement,
00:53:20on ouvre les grilles
00:53:21en me disant
00:53:22vous êtes libre.
00:53:24Alors,
00:53:24je pose la question
00:53:25pourquoi.
00:53:25parce qu'on vous aime,
00:53:42Philemon.
00:53:47Et vous m'appelez Philemon ?
00:53:49Ah, non.
00:53:51Ah, non.
00:53:52Ah, non,
00:53:52c'est trop facile,
00:53:53madame.
00:53:55Si vous êtes fait
00:53:55reprisonner
00:53:56tous les généraux
00:53:56de la République
00:53:57et de les appeler
00:54:00ensuite Philemon
00:54:00en leur ouvrant
00:54:01les grilles,
00:54:02mais le bon sens
00:54:04irait dans les rues
00:54:04par-dessus,
00:54:05t'es-elle,
00:54:05il y aurait pu dire
00:54:05possible.
00:54:07Vous rendez-vous compte
00:54:08de ce que vous avez fait ?
00:54:09J'en suis bien punie.
00:54:13Et la sagesse d'une femme
00:54:15est diamétralement
00:54:16opposée à celle de l'homme.
00:54:17Elle tourne autour
00:54:18de la raison
00:54:19comme un hanneton
00:54:19autour d'une lampe,
00:54:21sans but précis
00:54:21et sans espoir possible.
00:54:24Cependant,
00:54:26pour venir en aide
00:54:27au hanneton,
00:54:28pour le sauver
00:54:29de sa propre stupidité,
00:54:31il suffit
00:54:32d'un geste simple,
00:54:34celui d'éteindre
00:54:35la lumière.
00:54:37Alors,
00:54:38tout devient facile.
00:54:40Le miroir aux alouettes
00:54:41s'éternit
00:54:42et dans la ville
00:54:43qui s'endort,
00:54:46il n'y a plus
00:54:46qu'une femme
00:54:47qui attend
00:54:47et un général
00:54:50à qui tout est permis.
00:54:55Mais encore une fois,
00:54:56vous seriez déçus.
00:54:58Un soldat n'a pas
00:54:59de mémoire
00:55:00quand il s'agit
00:55:00de retourner
00:55:01un bienfait
00:55:02qui lui a été imposé
00:55:04par la force des armes.
00:55:06Je n'attendais
00:55:07rien de vous,
00:55:08n'attendez rien
00:55:10de moi.
00:55:21Le capitaine Mercurio
00:55:23vous conduira
00:55:23jusqu'aux portes
00:55:24de la ville.
00:55:25Êtes-vous sûr
00:55:30de ne rien regretter?
00:55:33J'ai essayé
00:55:34avec mon instinct
00:55:35de hanneton
00:55:36de sauver
00:55:37ce qui pouvait être
00:55:38sauvé.
00:55:40Je ne regrette rien.
00:55:42La sagesse
00:55:43d'une femme
00:55:43est aussi
00:55:45de savoir perdre
00:55:45sans rien attendre
00:55:47de son vainqueur.
00:55:48Demain,
00:55:51donc,
00:55:52à midi,
00:55:53j'entrerai
00:55:54dans votre ville
00:55:54en vainqueur.
00:55:56Ce que ce mot
00:55:57peut parfois
00:55:57comporter d'ironie
00:55:59prend alors
00:56:00ce soir
00:56:00tout son sens.
00:56:02Oui,
00:56:02le dîme que j'exigeais
00:56:03est en effet
00:56:03un peu forte.
00:56:06Je la réduis
00:56:06de moitié.
00:56:08L'approvisionnement
00:56:09et le logement
00:56:10d'une troupe
00:56:11de soldats
00:56:11à un combat
00:56:12celui qui la dirige.
00:56:13J'y pourvois
00:56:14à mes frais.
00:56:16Le respect
00:56:16d'un drapeau
00:56:17est sacré,
00:56:17j'essaierai
00:56:18de m'en souvenir.
00:56:19Une femme
00:56:20a l'honneur
00:56:22de se donner
00:56:23à celui
00:56:24qui la conquise
00:56:24par l'amour
00:56:25plutôt que
00:56:27par la force.
00:56:30Mes soldats
00:56:30comprendront
00:56:31tes aimances principes,
00:56:32tous les espoirs
00:56:32leur étant d'ailleurs permis.
00:56:34Une ville
00:56:35doit être gouvernée
00:56:36par celui
00:56:37qu'elle a choisi.
00:56:39Le gouverneur
00:56:40connaît mieux sa ville
00:56:41que je ne la connaîtrai jamais.
00:56:43Êtes-vous satisfaite
00:56:47de votre victoire,
00:56:48signora?
00:56:50Je m'appelle aussi
00:56:51Carmelina.
00:56:55Carmelina,
00:56:57c'est un nom
00:56:58que je retiens
00:56:58pour demain.
00:57:04Excusez-moi
00:57:04auprès de Marshall.
00:57:06Il continuait
00:57:07pour parler.
00:57:09Je l'en délivrerai
00:57:09bientôt.
00:57:10Oh,
00:57:11un instant encore.
00:57:12il vous serait
00:57:13évidemment très facile
00:57:14d'entrer dans la ville
00:57:14au seul bruit
00:57:15de vos tambours.
00:57:17Je vais cependant
00:57:17vous demander
00:57:18de faire un peu
00:57:20donner de vos canons.
00:57:22Oui,
00:57:22au très peu,
00:57:22pas pour détruire
00:57:23ni tuer,
00:57:24non,
00:57:24juste un peu
00:57:25sur les murailles
00:57:27afin de donner
00:57:28au gouverneur
00:57:29l'illusion
00:57:30d'une bataille
00:57:30quelques heures
00:57:31avant votre entrée.
00:57:33Les tambours
00:57:34seront pour votre gloire,
00:57:35les canons
00:57:36pour notre honneur.
00:57:39Promis.
00:57:39Et prenez garde
00:57:41de ne pas atteindre
00:57:42le capitaine Mercurio.
00:57:43Vous l'aimez donc?
00:57:46C'est mon avant-dernier
00:57:48amour,
00:57:49général.
00:57:51On vieillit très vite
00:57:52en Italie
00:57:53quand un capitaine
00:57:55devient un colonel,
00:57:56un gouverneur
00:57:57devient un vieil homme
00:57:58et qu'un général
00:58:00repart
00:58:01pour faire sa cour
00:58:02à une jolie dame
00:58:02qu'il appelle
00:58:03avec tendresse
00:58:04la république.
00:58:09À demain,
00:58:09signora.
00:58:16Prenez soin
00:58:17de mes hommes.
00:58:19J'y veillerai,
00:58:20général.
00:58:20La nuit sera
00:58:31fraîche.
00:58:35Vos couvertures
00:58:36vous paraîtront
00:58:37plus chaudes
00:58:38et demain,
00:58:40je vous promets
00:58:41qu'il y aura
00:58:42du soleil.
00:58:42Qu'est-ce que t'en penses,
00:58:53toi, la brigade?
00:58:54Un peu comme vous,
00:58:55citoyen capitaine.
00:58:57Ça te paraît pas bizarre,
00:58:59cette évasion?
00:59:00Ça me paraît réussi,
00:59:01en tout cas.
00:59:02Curieux.
00:59:04Moi, je trouve ça curieux.
00:59:06J'ai beau connaître
00:59:07le général
00:59:07sous toutes les coutures
00:59:08et l'avoir observé
00:59:09des centaines de fois,
00:59:11je me rappelle pas
00:59:12lui avoir jamais vu
00:59:13des petites ailes
00:59:13dans le dos.
00:59:15Des petites ailes?
00:59:16Bah, il en faut
00:59:17pour descendre ça.
00:59:18Ah, parce que
00:59:19vous croyez
00:59:19que c'est pareil?
00:59:20Bah, tu voudrais pas
00:59:20qu'il ait pris
00:59:20l'escalier d'honneur,
00:59:21non?
00:59:24Avec une échelle,
00:59:25c'est faisable.
00:59:27Faut donc admettre
00:59:28qu'il y avait
00:59:29dans cette maison
00:59:30une personne
00:59:30de bonne volonté,
00:59:32une âme sensible
00:59:33ou intéressée.
00:59:35Ça m'intrigue.
00:59:36Ouais, c'est intriguant.
00:59:38En attendant,
00:59:38le général
00:59:39nous a tout-même plaqué
00:59:39et nous allons faire
00:59:40figure de cornois
00:59:41en peu de temps.
00:59:42Vous croyez?
00:59:43T'en suis sûr?
00:59:43On va plus
00:59:44que nous pourparlons.
00:59:45Pour parler n'est pas
00:59:45tout.
00:59:46Il y a aussi
00:59:46de l'honneur
00:59:46à la brigade.
00:59:48Alors, il faut
00:59:48nous évader
00:59:48à notre tour.
00:59:50C'est ça.
00:59:50À l'occasion,
00:59:51j'en parlerai
00:59:51au gouverneur.
00:59:53Dis donc,
00:59:54si on en parlait
00:59:54à Tanina?
00:59:55Tanina,
00:59:56avec son sourire
00:59:57de vierge
00:59:57prête à succomber.
01:00:02Entre militaires,
01:00:02la brigade,
01:00:04tu l'aimes
01:00:04cette fille?
01:00:04Si j'étais sûr
01:00:07que c'est pas
01:00:07contraire à l'esprit
01:00:08républicain.
01:00:08Ah, ne mélange pas
01:00:08amour et tambour,
01:00:09ce sont deux choses
01:00:10qui se sont toujours
01:00:10ignorées,
01:00:11il faut de pouvoir
01:00:11se comprendre.
01:00:12Alors, oui,
01:00:13je sens un petit
01:00:14quelque chose
01:00:15qui me brûle
01:00:18la 20 centimètres
01:00:19au-dessous
01:00:19de l'épaulette
01:00:20quand je pense à elle.
01:00:21Ça brûle,
01:00:21ça mordit,
01:00:22franchement?
01:00:24Franchement,
01:00:25ça mordit.
01:00:26Alors,
01:00:27c'est l'amour.
01:00:28Puisque c'est vous
01:00:28qui le dites.
01:00:29Oui, par bleu,
01:00:29c'est moi qui le dis.
01:00:30J'ai connu ça aussi.
01:00:32Ma morsure à moi,
01:00:33elle est autrichienne,
01:00:34avec des yeux bleus,
01:00:35des cheveux blonds
01:00:36et un accent
01:00:36à couper au couteau.
01:00:38C'est à l'amour.
01:00:39Mais en même temps,
01:00:40il m'est arrivé
01:00:40mon galon
01:00:41de sous-lieutenant,
01:00:42alors je n'ai pas
01:00:42hésité une seconde.
01:00:43La France m'appelait,
01:00:44je suis allé la rejoindre.
01:00:45Et l'autrichienne?
01:00:46Ah, ben,
01:00:46elle est restée,
01:00:47avec son accent
01:00:48et une grande douleur muette,
01:00:49qui n'a retrouvé la parole
01:00:50que dans les bras
01:00:51d'un garde suisse rouge
01:00:51comme un soleil couchant
01:00:52et bête comme une oie.
01:00:54C'est la vie.
01:00:55Comme c'est triste.
01:00:57Mais non, c'est gai.
01:00:58Puisque le Suisse
01:00:59en est mort.
01:01:02Bon, maintenant,
01:01:04si tu crois pouvoir
01:01:05obtenir de Tanina
01:01:06une aide efficace,
01:01:07songe qu'avant d'être amoureux,
01:01:09il est surtout soldat.
01:01:10Et que pour un soldat,
01:01:12la plus jolie fille du monde
01:01:13peut tout donner
01:01:14en plus de ce qu'elle a.
01:01:17T'as compris?
01:01:18Je vais y réfléchir.
01:01:21Je vais y réfléchir,
01:01:22mais il y a une chose
01:01:23qui m'embête.
01:01:24Bon, vraiment,
01:01:25alors, c'est la façon
01:01:26d'opérer.
01:01:28Parce que devant un ennemi,
01:01:29j'avance parce qu'il y a
01:01:29le drapeau, l'honneur,
01:01:31et puis le sergent-chef
01:01:31Pécarie.
01:01:33Je connaissais.
01:01:35Ce pauvre vache,
01:01:36il m'observe toujours
01:01:37avec l'espoir
01:01:37de me foutre mes galops.
01:01:39T'as vu que dans la...
01:01:40Moi devant la femme,
01:01:40voyez-vous?
01:01:42Je sais pas,
01:01:43j'ai l'impression
01:01:43d'avancer en terrain mou.
01:01:46Oui, je...
01:01:47j'hésite,
01:01:48je m'embrouille,
01:01:50je recule.
01:01:51Erreur tactique
01:01:53qu'il est très facile
01:01:54de corriger.
01:01:57Euh...
01:01:58Tu es beau,
01:01:58la brigade.
01:01:59Hein?
01:02:00Beau comme 50 000 dieux.
01:02:01Moi?
01:02:02Beau comme il devrait
01:02:02être interdit de l'être.
01:02:06T'as le profil grec,
01:02:08la toison d'un viking
01:02:09et le port d'un César.
01:02:12Avec tout ça,
01:02:12la femme est une proie
01:02:13que tu peux
01:02:14et que tu dois gober.
01:02:15Oui, mais alors,
01:02:15comment je m'y prends?
01:02:17Euh...
01:02:17De la façon que tu vas voir.
01:02:21D'abord,
01:02:22elle entre par là.
01:02:23Ouais.
01:02:24Toi, tu es là,
01:02:25le dos tourné.
01:02:26Très important,
01:02:26ça reste le dos tourné
01:02:27parce que ça te permet
01:02:27de te concentrer
01:02:28en attendant l'attaque.
01:02:29Alors, si tu tournes le dos,
01:02:30comment je la vois?
01:02:31Bah, mais...
01:02:32Tu la devines,
01:02:33tu la pressens,
01:02:34mais...
01:02:34Puis tu l'entends aussi,
01:02:35une porte qu'on ouvre
01:02:36et qu'on ferme,
01:02:36ça s'entend, non?
01:02:37Ça s'entend, ça s'entend.
01:02:38Bon, bon.
01:02:39Alors, elle approche
01:02:40et vient derrière toi.
01:02:41Je me retourne.
01:02:42Tu ne bouges pas.
01:02:43Ah, bon.
01:02:45Tu fixes l'horizon,
01:02:46l'œil vague,
01:02:47le masque triste.
01:02:48Ouais.
01:02:49Désespéré même
01:02:49si t'en as le talent.
01:02:50Ouais.
01:02:50L'œil tombeante.
01:02:51Ouais, comme ça, là.
01:02:52Ouais, comme ça, là.
01:02:54Alors, elle te pose
01:02:55sa première question.
01:02:56Pourquoi êtes-vous si triste?
01:02:57Je ne réponds pas.
01:02:58Tu réponds
01:02:59que tu es désespéré.
01:03:01Alors, elle te demande pourquoi.
01:03:04Hein?
01:03:05Et tu déploies
01:03:06le premier volet du triptyque.
01:03:08Un triptyque,
01:03:09qu'est-ce que c'est?
01:03:10Euh, bon,
01:03:10je t'occupe.
01:03:11Tu es désespéré
01:03:12lorsque tu ne crois plus
01:03:14en son amour.
01:03:14Oui.
01:03:15Elle proteste,
01:03:16tu hoches la tête.
01:03:17C'est ça.
01:03:18Non, comme ça.
01:03:19Ah, bon, comme ça.
01:03:20Tu as tout compris.
01:03:21Son amour
01:03:22n'est qu'une comédie,
01:03:23un passe-temps.
01:03:24Elle se joue de toi
01:03:25et tu refuses.
01:03:26Toi, la brigade,
01:03:26ce jeu cruel.
01:03:27Très bien.
01:03:27Hein?
01:03:28Là, elle s'amolit.
01:03:30Elle se fait tendre.
01:03:31C'est un lit.
01:03:32Hop.
01:03:33Tu restes glace.
01:03:35Bientôt,
01:03:36elle renifle
01:03:37la petit coup.
01:03:38Par galanterie,
01:03:39tu lui passes ton mouchoir.
01:03:40Ah, dis-donc,
01:03:40j'en ai pas, hein.
01:03:41Ah, tiens,
01:03:42je t'en prétends.
01:03:45À la vue de ses larmes,
01:03:47tu dégèles.
01:03:48Hop.
01:03:49Doucement d'abord.
01:03:51Ensuite,
01:03:51tu accélères le mouvement.
01:03:53Deuxième volet.
01:03:54Tu la prends dans tes bras,
01:03:55tu l'embrasses,
01:03:56tu lui jures
01:03:57un amour éternel.
01:03:58Et avec un grand soupir,
01:03:59mais seulement
01:04:00après qu'elle t'ait juré
01:04:01vingt fois qu'elle t'adore,
01:04:03tu lui déclare
01:04:04que tu es tout disposé
01:04:05à la croire sur parole,
01:04:06mais que ton amour
01:04:07exige une preuve du sien.
01:04:09Oui.
01:04:09Et je lui demande
01:04:10de nous faire errader.
01:04:10Mais pas tout de suite,
01:04:11ça foutrait plus tout par terre.
01:04:12Ah, bon.
01:04:13Tu ajoutes
01:04:14que l'esclavage en amour
01:04:16fait sublime,
01:04:17mais qu'un amour en esclavage,
01:04:20c'est intenable.
01:04:21Des dons, c'est profond, hein.
01:04:22Comme un puits,
01:04:23elle y saute.
01:04:23Troisième volet.
01:04:24L'amour est avant tout
01:04:28l'expression de la liberté, hein.
01:04:29Oui.
01:04:30Sans liberté,
01:04:31pas de plénitude.
01:04:32Sans liberté,
01:04:32pas de plénitude.
01:04:33Sans liberté,
01:04:33pas de plénitude.
01:04:34Et à toi,
01:04:35pour cette liberté,
01:04:35c'est la forme
01:04:36d'un tapis volant.
01:04:37Et nous sommes saurés.
01:04:38Et nous sommes foutus.
01:04:39Pourquoi ?
01:04:40Parce qu'il fait grand jour,
01:04:41qu'il est dix heures,
01:04:42qu'à midi,
01:04:43le général entrera dans la ville
01:04:44et qu'il n'aura jamais
01:04:45que en deux heures
01:04:45de passer de l'état
01:04:46de corneau
01:04:47à l'état de fatigue.
01:04:48Encore une,
01:04:53qu'elle prend plus de grecques.
01:04:55Hein ?
01:04:56La toison d'un viking.
01:04:59Le porc,
01:05:00c'est bien.
01:05:16Tu es triste,
01:05:17félicien ?
01:05:18Oh, pas triste.
01:05:21Désespéré.
01:05:22Parce que ton général
01:05:23s'est évadé ?
01:05:24C'était qu'il n'y a rien
01:05:25de plus dangereux
01:05:26pour un soldat prisonnier
01:05:27qu'un général en liberté.
01:05:28Et c'est ça
01:05:29qui te désespère ?
01:05:30Oh, et aussi de penser
01:05:31que dans quelques heures,
01:05:33les Français
01:05:33entreront dans la ville.
01:05:36Une femme comme toi
01:05:37peut résister à un geste,
01:05:38un regard,
01:05:39une déclaration.
01:05:40Elle ne résistera pas
01:05:41à une tunique
01:05:42ou une épaulette
01:05:43où il y a deux fois plus d'or
01:05:44et trois fois plus de broderie.
01:05:45Qu'en sais-tu ?
01:05:46Je connais les femmes.
01:05:47Me connais-tu,
01:05:48ou crois-tu me connaître ?
01:05:49Je te connais bien.
01:05:50Je sais que tu m'aimes,
01:05:51que tu me donnerais
01:05:52ton cœur,
01:05:54tout le reste,
01:05:55en plus de ce que tu possèdes.
01:05:58Mais l'amour dans l'esclavage,
01:05:59ce n'est pas la plénitude.
01:06:01Dis.
01:06:03Oui ?
01:06:03Si tu pleures,
01:06:04je te donne mon mouchoir.
01:06:05Mais je ne pleure pas.
01:06:10Premier volet.
01:06:12Seulement,
01:06:12l'amour,
01:06:13ce n'est pas tout.
01:06:14Ce n'est pas tout,
01:06:15l'amour.
01:06:16Il y a aussi la liberté.
01:06:17Mais bientôt,
01:06:18tu seras libre.
01:06:19Grâce à toi.
01:06:21Oui, Félicien,
01:06:22grâce à moi.
01:06:28Deuxième volet.
01:06:28Alors,
01:06:30tu peux m'aider.
01:06:31À quoi faire ?
01:06:32À me faire évader.
01:06:33Bouge pas où j'appelle la garde.
01:06:35Je te fais fusiller
01:06:36dans les 40 minutes réglementaires.
01:06:37Et c'est comme ça
01:06:38que tu prétends m'aimé ?
01:06:40Oh !
01:06:41La cloison d'un Jules César,
01:06:44le profil d'un viking,
01:06:46le porc d'un grec.
01:06:48Et tout ça,
01:06:48pourquoi ?
01:06:49Il ne faut pas être seulement foutu
01:06:50de s'évader.
01:06:51Désespérer,
01:06:51je te dis.
01:06:52Si tu veux t'évader,
01:06:53ce n'est pas moi
01:06:54qui te retiendrai.
01:06:55Ah non ?
01:06:58Alors là,
01:06:58je ne comprends plus.
01:06:59Je ne ferai rien
01:07:00pour t'en empêcher,
01:07:01mais pas davantage
01:07:02pour t'y aider.
01:07:04Tu me vois te conduisant
01:07:05jusqu'au port
01:07:05pour que tu ailles rejoindre
01:07:06ton armée ?
01:07:07Justement.
01:07:09Dans mon triptyque,
01:07:10je te voyais très bien.
01:07:11Dans ton quoi ?
01:07:12Dans mon...
01:07:13Oh,
01:07:13tu n'y mets pas.
01:07:14Crois-tu que je pourrais
01:07:15te regarder sans rougir de honte
01:07:16lorsque tu reviendrais ?
01:07:17Mais à cause ?
01:07:18À cause de mon honneur
01:07:19qui partirait en même temps
01:07:20que toi.
01:07:20Si tu mélanges
01:07:21tambour et amour,
01:07:23maintenant ?
01:07:23Mais je ne mélange rien
01:07:24du tout.
01:07:25Mais toi,
01:07:26pourrais-tu me regarder
01:07:27de la même façon après ?
01:07:29Pourrais-tu me voir
01:07:29comme je suis en ce moment ?
01:07:31Mais pourquoi pas ?
01:07:32Comment pourrais-tu
01:07:33faire confiance
01:07:34à une femme
01:07:34qui aurait,
01:07:35même au nom de l'amour,
01:07:36trahi son roi
01:07:37et sa patrie
01:07:38pour une évasion
01:07:40de quelques-uns ?
01:07:42Pour l'illusion
01:07:43d'une liberté
01:07:44qui t'est déjà acquise ?
01:07:46Faudrais-tu briser
01:07:46tout ce qu'il y a
01:07:47entre nous ?
01:07:49T'as raison,
01:07:49Tadina.
01:07:50Je te dégoûte.
01:07:53Je le sais,
01:07:54est-ce que je mérite
01:07:56encore mes galots ?
01:07:57Mais oui,
01:07:58Félicia,
01:07:58tu les mérites encore.
01:07:59Une chance,
01:08:00parce que tu sais,
01:08:00quand je me connais,
01:08:01je me dégrade sur le champ.
01:08:03À la gueule de Pécari,
01:08:04on va être plus
01:08:05en deuxième classe.
01:08:06Pécari ?
01:08:07C'est mon sergent-chef,
01:08:08il ne peut pas me sentir.
01:08:08Est-ce que tu accepterais
01:08:12de venir avec moi
01:08:13en France ?
01:08:13Tu sais,
01:08:14avec un peu de chance,
01:08:15je peux facilement
01:08:16avoir de l'avancement.
01:08:17Je peux être lieutenant
01:08:17et même capitaine.
01:08:18Alors,
01:08:19tu seras le plus beau capitaine
01:08:20de l'armée française.
01:08:21Et toi,
01:08:21tu seras la plus belle femme
01:08:24qu'un capitaine
01:08:24ait jamais ramené
01:08:25dans le champ de bataille.
01:08:25Oh,
01:08:26Félicia,
01:08:26embrasse-moi.
01:08:27Pour me bien pardonner ?
01:08:28Pour te faire oublier
01:08:29toutes celles
01:08:29qui ont existé avant moi.
01:08:32Surtout,
01:08:33ne vous dérangez pas,
01:08:34je ne fais que passer.
01:08:35Tanina,
01:08:37je suis venue
01:08:38vous dire adieu.
01:08:39Vous partez ?
01:08:40Dans dix minutes,
01:08:41le général Marcoux
01:08:42va attaquer.
01:08:42Je vais rejoindre mon poste,
01:08:44prêt à me faire tuer
01:08:44plutôt que de reculer.
01:08:46Vous voulez vous dire
01:08:46que vous empêcherez
01:08:47les Français
01:08:47d'entrer dans la ville ?
01:08:48Non,
01:08:49ils y entreront à midi
01:08:50d'après le programme.
01:08:51Aucune importance.
01:08:52À midi,
01:08:53je serai mort.
01:08:54Oh,
01:08:54mon Dieu.
01:08:55Ou agonisant,
01:08:56ce qui revient au même.
01:08:58Enfin,
01:08:59enfin,
01:09:00enfin,
01:09:01enfin,
01:09:02je vais pouvoir me battre.
01:09:03Voilà deux ans
01:09:04que j'attends ce moment,
01:09:05sergent.
01:09:05Deux ans,
01:09:06c'est long,
01:09:07long comme une journée de noces.
01:09:09Mais aujourd'hui,
01:09:10j'ai rendez-vous
01:09:11avec la gloire.
01:09:12Je vous promets
01:09:12d'enfermer ma maîtresse
01:09:13avant que les cloches
01:09:14de San Angelo
01:09:14aient sonné midi.
01:09:17Adieu.
01:09:19Adieu.
01:09:20Adieu.
01:09:22Je mourrai peut-être
01:09:23sans gloire,
01:09:24mais non pas
01:09:25sans noblesse.
01:09:26Il est optimiste,
01:09:30hein?
01:09:31Crois-tu qu'il va mourir
01:09:32comme il le prétend?
01:09:33Tu sais,
01:09:34ce sont des choses
01:09:34qui arrivent,
01:09:35surtout sur un champ de bataille.
01:09:36Moi,
01:09:36je m'imagine déjà
01:09:37comment il va mourir.
01:09:38Ce sera sûrement
01:09:39quelque chose
01:09:40de très beau
01:09:41et de très grand.
01:09:42C'est ce que les autres pensent,
01:09:44parce que
01:09:44l'intéressé,
01:09:45lui,
01:09:46il a toujours tendance
01:09:47à trouver ça ridicule.
01:09:49Tiens,
01:09:50quand le général
01:09:51Bourringard est mort,
01:09:52c'est un brave,
01:09:54Bourringard.
01:09:55Un de ces girlus
01:09:56bien-huit
01:09:56qui ne peuvent s'empêcher
01:09:57de galer en avant
01:09:57dès qu'ils ont un morceau
01:09:58de cheval
01:09:58entre les jambes.
01:10:01Un maniaque
01:10:01du fait d'âme,
01:10:02Bourringard,
01:10:03qui travaillait
01:10:04dans le coup d'éclat
01:10:04comme d'autres
01:10:05dans l'agriculture.
01:10:07Eh bien,
01:10:08il est mort,
01:10:08Bourringard.
01:10:09Oui,
01:10:10à la tête
01:10:11de ses cuirassiers,
01:10:13d'un boulet autrichien
01:10:14qui lui a mis
01:10:15la calabasse
01:10:15en trois morceaux.
01:10:16Et tout le monde
01:10:17a trouvé ça sublime.
01:10:18Eh bien,
01:10:18je suis sûr
01:10:19que si après coup,
01:10:19il avait pu en dire
01:10:20deux mots,
01:10:20le Bourringard,
01:10:21il aurait trouvé
01:10:21sa minable
01:10:22et il aurait eu raison.
01:10:24Seulement,
01:10:25ce qui fait
01:10:25qu'un soldat
01:10:26devient brusque
01:10:27comme un héros,
01:10:29c'est le soin
01:10:29qu'il prend
01:10:30à se laisser
01:10:31mettre en l'air
01:10:32gentiment,
01:10:33tu vois,
01:10:33sans rien dire,
01:10:35afin que les autres
01:10:35puissent en parler.
01:10:37Je ne vous dérange
01:10:37pas,
01:10:38le fait.
01:10:39Du tout,
01:10:39signora,
01:10:40je venais juste
01:10:40de terminer
01:10:41mon exposé.
01:10:46C'est très bien,
01:10:47car ça.
01:10:48Il m'a demandé
01:10:49si j'accepterais
01:10:49de le suivre en France.
01:10:50Il veut t'épouser,
01:10:51Tanina.
01:10:52Oui, signora.
01:10:53Ah,
01:10:54mais ils vont tout
01:10:54me prendre,
01:10:55ces Français.
01:10:57Non,
01:10:57tu as raison
01:10:58de l'épouser.
01:10:59Je crois bien
01:10:59que si j'avais ton âge,
01:11:01si je m'appelais Tanina
01:11:02et si j'avais
01:11:03dans le cœur
01:11:04de l'amour
01:11:04pour un sergent français,
01:11:06oui,
01:11:07je crois bien
01:11:07que moi aussi
01:11:07je deviendrai républicaine.
01:11:09Mais je crois aussi
01:11:10que tous les soirs,
01:11:12avant de m'endormir,
01:11:13je prierai pour mon roi
01:11:14et pour l'Italie.
01:11:16Tu t'en souviendras ?
01:11:17Oui, signora,
01:11:18jusqu'à mon dernier jour.
01:11:20Je n'ai pas besoin
01:11:20de te demander
01:11:21si tu es heureuse,
01:11:22je vois déjà
01:11:22dans tes yeux
01:11:23que tu l'es.
01:11:24Allez,
01:11:24va rejoindre ton beau sergent
01:11:25et dis-lui
01:11:26que la signora
01:11:27lui donne
01:11:27la plus belle perle
01:11:28qui puisse se faire
01:11:29de Florence à Milan.
01:11:31Dis-lui cela
01:11:31afin qu'il se le rappelle
01:11:33toujours.
01:11:34Oui, signora.
01:11:35Seule, signora.
01:12:01Redoutez-vous la compagnie
01:12:05que vous la délaissiez
01:12:06pour ce patio
01:12:07trop lumineux
01:12:07en un jour aussi sombre ?
01:12:09La solitude n'est pas
01:12:10à tout prendre
01:12:11une si mauvaise chose,
01:12:12général.
01:12:14Capitaine, pardon.
01:12:16Serait-ce un beau jour
01:12:18pour vous ?
01:12:19Une belle journée,
01:12:20c'est en plus.
01:12:23Tiens,
01:12:24vous entendez ?
01:12:25Le signal des festivités.
01:12:31Tiens,
01:12:31on dirait que ce bruit
01:12:33de mitraille
01:12:34n'est que comédie.
01:12:37Nos canons vont peut-être
01:12:39donner contre vos murs
01:12:40et vos canons tirés
01:12:41au-dessus de nos têtes
01:12:42en toute politesse,
01:12:43n'est-ce pas ?
01:12:45Comment t'appelez-vous,
01:12:48signora,
01:12:48une femme qui facilite
01:12:50la fuite d'un ennemi ?
01:12:53Et vous, capitaine ?
01:12:54Oui, c'est selon...
01:12:56Ah, selon quoi ?
01:12:58Selon qu'elle est amoureuse
01:13:00ou qu'elle ne l'est pas.
01:13:04Croyez-vous, capitaine,
01:13:06qu'un homme, un vrai,
01:13:07qui peut se souvenir
01:13:08des fessées
01:13:09qu'il a reçues
01:13:10à l'âge de trois ans
01:13:11pour avoir mouillé
01:13:12sa culotte,
01:13:13soit irrémédiablement
01:13:14perdu pour l'amour ?
01:13:15Ah, votre question
01:13:16est immense, signora.
01:13:18Immense comme la mère,
01:13:19comme la finie.
01:13:21Ah, j'y avais jamais pensé.
01:13:22Comme ça, vous avez raison.
01:13:23Un homme qui est capable
01:13:25de se souvenir
01:13:26de choses pareilles
01:13:27a tout à gagner
01:13:28dans le cœur d'une femme.
01:13:31Et je peux aisément
01:13:32imaginer la suite.
01:13:34Marcoux entrera
01:13:34à l'heure dite
01:13:35dans la ville
01:13:35en laissant derrière lui
01:13:37son intransigeance
01:13:38et sa fameuse rigueur militaire.
01:13:41Tout de même,
01:13:42je suis surpris
01:13:44d'une pareille débandade
01:13:45dans l'âme
01:13:45d'un vrai républicain.
01:13:48Je connais bien Marcoux.
01:13:49Il est de cette espèce
01:13:51d'homme
01:13:51qui tient le devoir
01:13:52à bout de bras
01:13:52comme un étendard.
01:13:54Et il a raison
01:13:55de la femme
01:13:56comme un hanneton
01:13:58volant autour d'une lampe.
01:14:00L'image est de lui.
01:14:01Oui, mais
01:14:01lorsque la lampe
01:14:03s'éteint,
01:14:04le hanneton
01:14:05s'arrête
01:14:05de tourner stupidement
01:14:06et préfère parfois
01:14:08vivre une petite défaite
01:14:09dans l'amour
01:14:10qu'une grande victoire
01:14:12dans la haine.
01:14:13Et le hanneton
01:14:14qui sait se faire aimer
01:14:15de la lumière
01:14:16qu'il fascine
01:14:16mérite bien d'être
01:14:18pour un moment
01:14:18le plus joli
01:14:19des papillons.
01:14:21Maintenant,
01:14:22Pétril,
01:14:23je te l'ai dit
01:14:23cent fois
01:14:24que tu ne comprends rien
01:14:25ni à la politique
01:14:26ni à la guerre
01:14:27ni même aux femmes.
01:14:28Oh, mais, mais...
01:14:30Je me demande même
01:14:31si tu arrives à comprendre
01:14:32quoi que ce soit
01:14:33aux choses qui t'entourent.
01:14:34Enfin,
01:14:35puisque tu es
01:14:35mon premier conseiller
01:14:36que je te paye
01:14:38pour t'entendre
01:14:38me débiter
01:14:39des tas de bêtises,
01:14:40il faut bien
01:14:41que je t'écoute
01:14:41de temps en temps.
01:14:42Mais, excellence...
01:14:43Mais il n'y a pas
01:14:43d'excellence.
01:14:44Il y en aura bientôt plus
01:14:45qui revient tout même.
01:14:47Ah !
01:14:48Alors, capitaine,
01:14:49bonne journée, hein ?
01:14:50La cage est vide,
01:14:51l'oiseau s'est envolé.
01:14:52Qu'est-ce que vous dites
01:14:53de ce petit tour
01:14:53de passe-passe ?
01:14:54Ah, ben,
01:14:55comme vous, excellence,
01:14:56il déborde
01:14:57un tout petit peu
01:14:58mon imagination.
01:14:59J'ai fait procéder
01:15:00à une rapide enquête
01:15:01par mon capitaine des gardes,
01:15:03mais comme de juste,
01:15:04elle s'est révélée inutile.
01:15:05Qu'est-ce que vous pensez
01:15:06de l'aventure ?
01:15:07Ben,
01:15:09quelle est romanesque
01:15:10à ce soit, excellence ?
01:15:11Ouais, un peu trop,
01:15:12même pour mon goût.
01:15:14Ah, soupçonneriez-vous,
01:15:15excellence,
01:15:15qu'une main partisane ?
01:15:17Mais ça soupçonne tout le monde,
01:15:18alors, acceptez-vous,
01:15:19bien sûr.
01:15:20Ne pense pas trop,
01:15:22Salvatore,
01:15:23tu vas encore
01:15:23te rendre malade.
01:15:25Mais toi,
01:15:26Carmelina,
01:15:27toi qui peux penser
01:15:29sans te rendre malade,
01:15:30tu n'as pas
01:15:31une idée
01:15:32de la façon
01:15:33dont le général
01:15:33nous a brûlé
01:15:35la politesse ?
01:15:36Non,
01:15:36non,
01:15:37aucune,
01:15:38Salvatore.
01:15:38Non,
01:15:39il faudra mettre ça
01:15:40sur le compte
01:15:41des mystères,
01:15:43à moins que ce ne soit
01:15:44un nouveau miracle,
01:15:45mais je n'aime pas beaucoup
01:15:47les miracles,
01:15:48tant qu'une taine
01:15:49derrière eux
01:15:50un reste de curiosité
01:15:51qui risque de gâcher
01:15:52à tout jamais
01:15:53les nuits
01:15:53d'un honnête homme.
01:15:55Le plus simple
01:15:55serait d'imaginer
01:15:56que le général
01:15:57ne s'est jamais évadé
01:15:58et même
01:15:59qu'il n'a jamais été
01:15:59votre prisonnier
01:16:00et que sa présence
01:16:02en cette demeure
01:16:02n'était due
01:16:03qu'à votre fantaisie
01:16:04ou à votre imagination.
01:16:05Non,
01:16:05ma fantaisie,
01:16:06je préfère
01:16:07parce qu'un rouquin
01:16:08de cette couleur-là
01:16:09ça ne s'invente pas.
01:16:11Oh, signora,
01:16:12ce bruit des canons
01:16:13va me faire devenir folle.
01:16:14Calme-toi,
01:16:15Francesca,
01:16:15je n'ai rien de grave.
01:16:17Rien de grave,
01:16:18seule une petite rencontre
01:16:19dans la ville de Mijan
01:16:20n'en est l'enjeu.
01:16:21Et la ville
01:16:22et aussi ses femmes.
01:16:23Pour les femmes,
01:16:24soyez rassurés,
01:16:24aucune d'entre elles
01:16:25ne perdra son honneur
01:16:26à moins qu'elle ne l'ait désirée.
01:16:28Oh, madonna,
01:16:29si vous êtes vrais, capitaine.
01:16:30Je puis presque
01:16:30que vous en donnez
01:16:31ma parole d'honneur.
01:16:31Et à qui doit-on cela, capitaine ?
01:16:33À vous ?
01:16:34Oh non, signora Francesca,
01:16:36non pas à moi.
01:16:37À...
01:16:37à Hinton.
01:16:38Euh, Hinton ?
01:16:39Cette petite bête qui vole ?
01:16:41Exactement, signor Petrillo.
01:16:43Mais si les Français
01:16:44ont renoncé.
01:16:45Ah, renoncer peut-être pas,
01:16:46mais ils y mettront
01:16:46les formes
01:16:46qu'impose une parfaite éducation
01:16:48et le souci d'une galanterie
01:16:49que vous accorderez,
01:16:50j'en suis sûr,
01:16:51à reconnaître
01:16:51comme étant bien française.
01:16:52Moi qui avais mis
01:16:53une si jolie robe.
01:16:54Une jolie robe
01:16:55n'est jamais tout à fait perdue
01:16:56sur une jolie femme.
01:16:58Excellent.
01:16:59J'ai pensé que si les Français
01:17:00devaient venir à midi au palazzo,
01:17:02il fallait songer
01:17:03à leur préparer un déjeuner.
01:17:05J'ai donné des ordres.
01:17:06Ai-je bien fait, excellent ?
01:17:06Ben oui, peut-être oui,
01:17:07peut-être non,
01:17:08je ne sais pas, moi.
01:17:09Et qui vous permet de croire,
01:17:10Tannina,
01:17:11que les Français
01:17:11entreront à midi au palazzo ?
01:17:13Oh, mais un tas de choses,
01:17:14signor Petrillo.
01:17:15Ne serait-ce que votre
01:17:16belle habit de velours
01:17:17que vous ne mettez
01:17:17que dans les grandes occasions ?
01:17:18Justement,
01:17:19si le général est vainqueur,
01:17:21ce sera pour moi
01:17:21une grande occasion.
01:17:23Oh, oh, oh, oh,
01:17:24vous êtes incorrigible,
01:17:25signor Petrillo.
01:17:26Je ne suis pas incorrigible,
01:17:30votre armée serait une victoire
01:17:32pour la nôtre.
01:17:32Et j'aurai eu raison
01:17:33de mettre mon bel habit de velours.
01:17:34Eh bien, moi,
01:17:35je pense qu'un miracle
01:17:35est toujours possible.
01:17:37Enfin, supposons que Mercurio,
01:17:39oui, je veux dire,
01:17:40le capitaine Mercurio,
01:17:42réussisse ce tour de force
01:17:44qui consisterait
01:17:44à mettre votre armée
01:17:45en déroute.
01:17:46Après tout,
01:17:47c'est faisable ?
01:17:48Vous avez dit le mot,
01:17:49signora, après tout.
01:17:51Mais soyez persuadés
01:17:51qu'il n'aura pas le temps
01:17:52d'épuiser toutes ses connaissances militaires
01:17:53avant d'en arriver là.
01:17:54C'est-à-dire ?
01:17:55Que je suis certain
01:17:56de l'issue de la rencontre
01:17:57et que la partie était jouée
01:17:58dès le premier coup de feu.
01:17:59Et moi, capitaine Marchal,
01:18:00je suis certain
01:18:01que votre général
01:18:02ne pourra réussir
01:18:02à tenir sa promesse.
01:18:04Quelle promesse,
01:18:04signor Petrilo ?
01:18:05Celle qu'il a faite d'entrer
01:18:06à midi dans la ville
01:18:07à la tête de son régiment.
01:18:09Accepteriez-vous un pari ?
01:18:10Oh, oui,
01:18:11accepte Petrilo.
01:18:13Comme si cela va être amusant.
01:18:15La Francheuse,
01:18:15ce cas.
01:18:16Oui, enfin,
01:18:17je veux dire bien triste
01:18:18pour nous tous.
01:18:20Eh bien,
01:18:21j'accepte, capitaine.
01:18:22Mille lire.
01:18:22Que dites-vous de la somme ?
01:18:24Ah, qu'elle est très bonne
01:18:25à prendre pour un simple
01:18:25capitaine des gardes françaises
01:18:26et que si son excellence
01:18:27daignait doublé la mise,
01:18:28c'est une petite somme
01:18:29que j'empocherais
01:18:30sur le vous écoute bidi, non ?
01:18:31Vous êtes donc bien sûr
01:18:32de vous, capitaine.
01:18:34Ah, non, pas de moi.
01:18:36Du général Marcoux.
01:18:38Qu'en pensez-vous, signora ?
01:18:40Croyez-vous que le général
01:18:41soit homme
01:18:41a manqué un rendez-vous ?
01:18:42Un rendez-vous ?
01:18:44Qu'il a convenu ici même
01:18:45il y a quelques heures
01:18:46avec une dame
01:18:47dont les attraits
01:18:49au cœur d'un militaire
01:18:50lui dicteront tout naturellement
01:18:51sa conduite
01:18:51et sa ponctualité.
01:18:53De quelle dame s'agit-il ?
01:18:54Euh, d'une certaine dame,
01:18:56signor Petrilo.
01:18:57Disons que pour vous
01:18:58elle s'appelle Lac-Doire.
01:18:59Vous connaissez ?
01:19:00Ah, mais vous comptez
01:19:01sur le capitaine Mercurio.
01:19:02Ah, j'y ai compté
01:19:03jusqu'à midi sonnant.
01:19:04Cependant, je persiste à quoi ?
01:19:05Ne persiste pas, Petrilo.
01:19:07Alors paris.
01:19:08Paris, paris, ton traitement,
01:19:09paris, ton logement,
01:19:10paris, ton beau costume
01:19:11de velours.
01:19:12Vous croyez ?
01:19:13Vous croyez, excellent ?
01:19:14Mais moi, je ne crois rien.
01:19:15Moi, j'attends.
01:19:16Hé, ça continue, hein ?
01:19:18Ah, je défends,
01:19:19le joli capitaine.
01:19:19Eh oui, je défends,
01:19:20malheureusement,
01:19:20c'est vous qui attaquez.
01:19:22Non, mais vous voyez d'ici
01:19:22que le général en chef
01:19:23soit obligé de lever le camp.
01:19:24Ah, ben, ça serait le coup dur.
01:19:25Eh, vous êtes pessimiste, sergent.
01:19:27Tenez, je vous parie
01:19:28mille lire
01:19:29que votre général
01:19:30en aura à l'ordite.
01:19:31Ah, mille lire ?
01:19:35Ah, il parle bleu,
01:19:37je les parierais bien
01:19:38si je passais
01:19:39d'une pareille fortune.
01:19:40Midi moins deux minutes
01:19:42et la canonnade
01:19:42dure toujours.
01:19:43Je crois, capitaine,
01:19:44que vous allez perdre
01:19:44votre pari.
01:19:45Ah, j'ai parié pour midi,
01:19:46signor Petrilo.
01:19:47Mais il est midi.
01:19:49Midi moins une minute
01:19:50et quelques secondes.
01:19:51Vous êtes précis, capitaine.
01:19:53C'est une vertu militaire.
01:19:55Tu n'espère plus
01:19:55de miracle, Salvatore ?
01:19:57Ah non, plus maintenant.
01:19:59Ne t'inquiète pas,
01:20:00tout se passera très bien.
01:20:02Il est midi ?
01:20:03Pas encore.
01:20:04Les cloches de San Angelo
01:20:05sont très scrupuleuses
01:20:07et elles n'ont pas encore sonné.
01:20:08Mais on n'entend pas
01:20:09les clés rondes
01:20:09et les tambours.
01:20:10Ah, je crois qu'il est midi.
01:20:20Quel soleil magnifique.
01:20:23Oui, comme un 14 juillet, capitaine.
01:20:25Cela dit la brigade.
01:20:26Je n'ai pas là.
01:20:29Et à côté du général Marcoux,
01:20:30le capitaine Mercurio.
01:20:32Le colonel Mercurio.
01:20:34Le gouverneur
01:20:34l'a donné colonel.
01:20:35Nous l'avons nommé colonel.
01:20:37Nous avons gagné.
01:20:38Qui sait ?
01:20:40Dans le fond, excellence,
01:20:42ce n'est pas une catastrophe.
01:20:43Eh non, pas une catastrophe,
01:20:45Petrilo.
01:20:46Ce n'est que de l'histoire.
01:20:47Je pense qu'il est préférable
01:20:49de faire contre
01:20:49mauvaise fortune bon cœur.
01:20:51Ne croyez-vous pas, excellence ?
01:20:52Eh oui, je crois, Petrilo.
01:20:54Je le crois.
01:20:54Alors, il serait
01:20:55de bonnes politiques
01:20:56que nous.
01:20:58Eh oui, de bonnes politiques.
01:21:00Va les rejoindre.
01:21:01Tu en as tellement envie.
01:21:03Il faut préparer l'avenir, excellence.
01:21:08Et viva les franceses !
01:21:10Et viva les franceses !
01:21:12Sous-titrage Société Radio-Canada
01:21:17Et viva les franceses !
01:21:47Sous-titrage Société Radio-Canada
01:21:49Et viva les franceses !
01:21:51Sous-titrage Société Radio-Canada
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