Ce lundi 27 octobre, Pascal Demurger, directeur général de la Maif et co-président d'Impact, était l'invité dans l'émission Good Morning Business sur BFM Business. Retrouvez l'émission du lundi au vendredi et réécoutez la en podcast.
00:03Ce matin avec Pascal Demurgé, directeur général de la MAIF, co-président d'Impact.
00:07Bonjour Pascal.
00:08Bonjour Sandra.
00:09Ravi de vous avoir dans cette chronique, parole de patron.
00:14Le budget est discuté à l'Assemblée avec son lot de propositions, son lot de débats.
00:19Aujourd'hui on va parler de la fiscalité des entreprises.
00:22Quelle est la ligne rouge pour vous à ne pas dépasser dans la fiscalité des entreprises ?
00:27Sur la fiscalité des entreprises, il faut clairement préserver l'outil de travail.
00:35Et en particulier, il y a des ETI et on l'a vu, des start-up qui pourraient être quand même très pénalisées par une taxe qui s'appliquerait à elles.
00:48En revanche, l'autre ligne rouge absolue, c'est qu'il faut effectivement faire un effort sur la fiscalisation des plus hauts patrimoines.
00:57Il faut une répartition plus juste de l'effort.
00:59Il ne peut pas peser simplement sur les classes moyennes.
01:03Et donc moi je suis bien sûr favorable à ce qu'il y ait un peu plus de justice.
01:07La taxe Zuckman light, dans sa version light, qui serait discutée en milieu de semaine.
01:12Vous y seriez favorable ?
01:13J'ai l'impression qu'il y a une voie de passage.
01:16Et telle qu'elle a été formulée, et manifestement plutôt bien accueillie, y compris par Renaissance,
01:25j'ai l'impression qu'il y a une voie de passage qui est positive.
01:29Ce week-end, on a parlé aussi de la suspension de la réforme des retraites.
01:32Et Gérard Larcher qui a dit que le Sénat ne laissera pas passer.
01:35Qu'en pensez-vous ?
01:35Moi je crois que d'abord la réforme des retraites, et je vois que vous avez le livre que j'ai fait paraître
01:42« Gouverner autrement ».
01:44Oui, on va en parler.
01:45Voilà.
01:46Bien sûr.
01:46La réforme des retraites, c'est exactement le contraire d'un exercice adulte du pouvoir.
01:54C'est-à-dire, il y a 18 mois, on passe en force.
01:56Alors qu'il y avait d'évidence un compromis possible, on a vu un certain nombre d'avancées
02:01de propositions, notamment de la CFDT, pour dire les choses.
02:05On passe en force à coup de 49-3, et évidemment dans ces cas-là, au bout d'un moment, il y a
02:12un front qui se lève contre cette réforme et on est obligé de la suspendre.
02:20Il faut vraiment, sur ce genre de réforme, qu'il y ait en amont une discussion approfondie
02:25avec les partenaires sociaux, avec toutes les parties concernées, et que l'on arrive
02:31à élaborer des consensus pour avoir des réformes durables.
02:35Justement, on parle de ce livre « Gouverner autrement », plaidoyer pour un exercice adulte
02:40du pouvoir, aux éditions L'Aube.
02:43Est-ce que le gouvernement Lecornu 2, et 1 aussi, puisqu'il a décidé de ne pas agir
02:48par 49-3, essaye de laisser, d'après vous, assez la place au débat, au dialogue ?
02:54Est-ce que ce que vous voyez depuis quelques jours, c'est déjà un peu plus gouverner en adulte ?
02:59Oui, je trouve, clairement. Gouverner en adulte, c'est à la fois, effectivement, essayer
03:05de trouver des compromis, comprendre qu'on ne peut pas avancer si on ne fait pas des
03:11concessions. Et puis, gouverner en adulte, c'est gouverner de manière beaucoup moins
03:18verticale, de manière beaucoup moins solitaire. J'ai l'impression, en effet, que Sébastien
03:23Lecornu est bien dans cette voie. Ce dont je me réjouis, l'abandon ou le refus
03:29d'utiliser le 49-3, sa présence symbolique, très importante à l'Assemblée nationale,
03:38notamment lors des discussions sur le budget. C'est-à-dire, finalement, une posture de considération
03:45à l'égard des élus. Je trouve que tout ça est très positif.
03:50On est quand même dans une situation incroyable de blocage du Parlement.
03:54Incroyable.
03:55L'année dernière, quelles solutions se présentent à partir du moment où les extrêmes ne jouent
03:59pas le jeu ? On l'a encore vu ces derniers jours. Est-ce qu'il y a réellement une solution ?
04:04Est-ce qu'on va parvenir à un budget, d'après vous, avant la fin de l'année ?
04:07Moi, je pense qu'il y a vraiment une voie de passage. Vous l'avez dit, les extrêmes
04:13ne jouent pas le jeu. Je crois que c'est un constat que l'on peut poser. Entre les deux,
04:19il y a une majorité. Il y a une majorité raisonnable, une majorité responsable. Et je pense
04:24qu'il y a un accord possible entre les différentes composantes de cet entre-deux.
04:32Dans votre livre, vous parlez de se remettre collectivement en mouvement. Donnez-moi des
04:36exemples de comment on fait dans cette situation, par exemple, pour se remettre collectivement
04:42en mouvement.
04:44Il y a vraiment plusieurs choses. Je commence dans ce livre en parlant de la manière dont
04:48on parle généralement de la France et des Français. C'est-à-dire de façon extrêmement
04:52négative, avec une France en déclin, une France archipélisée. C'est le grand thème
04:57de ces derniers mois et même un petit peu plus. Et même le thème de la décivilisation.
05:03C'est-à-dire qu'on serait dans un pays dont la civilisation reculerait parce que des
05:08violences, etc. Moi, je crois qu'on ne peut rien construire sur la base de récits négatifs
05:14qui, par ailleurs, ne décrivent qu'une petite partie de la réalité et pas la totalité.
05:19Loin de là. Moi, je n'imagine pas dans mon entreprise, chaque matin, expliquer qu'on est
05:25plus mauvais que les autres, que nos concurrents sont plus forts, etc.
05:30Évidemment, on n'avancerait pas beaucoup. Donc déjà, il est temps de retrouver des
05:36récits positifs, des récits qui, à la fois, décrivent bien sûr la réalité. Il ne s'agit
05:40pas de raconter des histoires, mais qui décrivent une réalité d'une France qui ne fonctionne
05:48pas si mal que ça.
05:49Il faudrait qu'on s'aime davantage ?
05:51En tout cas, qu'on ait davantage un sentiment d'appartenance et, pourquoi pas, une fierté
05:57d'appartenance.
05:59Est-ce que les Français sont trop individualistes ? Est-ce que la France est encore un pays où
06:07on peut entreprendre ? Vous, vous qui voyez ça de votre poste de directeur général de
06:12la Maïf.
06:12Alors non, je ne crois pas que les Français soient trop individualistes. Les Français,
06:16quand on leur propose un projet positif, ils sont capables de se retrouver et ils sont
06:23heureux de se retrouver. Moi, je crois qu'il y a une envie d'unité, il y a une envie d'appartenance.
06:31On l'a vu, alors c'est un exemple ponctuel, mais qui est quand même relativement parlant,
06:35on l'a vu au moment des JO. Pourquoi c'est une grande réussite ? Non pas parce qu'on a glané
06:39des médailles ou que l'organisation était parfaite, mais surtout parce que ça a été
06:44un moment de communion nationale. Donc oui, je crois qu'on peut retrouver, régénérer
06:49ce sens du collectif. Et les Français ne sont individualistes que si on n'a rien
06:55de collectif de positif à leur proposer. Alors oui, évidemment, ils se replient.
07:01Toute dernière question en tant que coprésident d'Impact. Est-ce que vous redoutez que la
07:06sobriété, la sobriété énergétique, mais la sobriété dans son ensemble soit la grande
07:11oubliée des débats qui ont lieu en ce moment ?
07:14C'est la grande oubliée déjà depuis plusieurs mois et notamment depuis le début de l'année
07:19avec un certain nombre de reculs au niveau français, au niveau européen. Et en ce moment
07:25même, il y a encore des discussions sur les grands textes du Green Deal, CSRD, devoirs de
07:32vigilance, etc. Avec la possibilité d'un compromis, mais qui aujourd'hui n'est pas
07:39du tout certain, qui est même un petit peu remis en cause par un vote la semaine
07:43dernière du Parlement européen. Donc oui, je trouve qu'il y a un vrai risque, une fois
07:49de plus, de sacrifier le long terme sur l'autel du court terme.
07:54Merci beaucoup Pascal Demurgay d'être venu ce matin dans notre émission.
07:58Directeur général de la Maïf, coprésident d'Impact et auteur de Gouverner Autrement
08:01plaidoyer pour un exercice adulte du pouvoir.
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