- il y a 2 jours
Jean-Baptiste Rudelle, président du Blue et propriétaire du Domaine Rocabella, était l'invité de Laure Closier dans Good Morning Business, ce vendredi 26 septembre. Il parle des avantages de la taxe Zucman, sur BFM Business. Retrouvez l'émission du lundi au vendredi et réécoutez la en podcast.
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00:00Notre invité ce matin c'est Jean-Baptiste Rudel, bonjour, vous êtes le cofondateur et l'ancien président de Criteo,
00:06vous êtes aujourd'hui président de Blue, c'est un fonds d'aide au soutien des projets de conservation marine,
00:11vous êtes aussi propriétaire d'un lieu de réception dans le Var, vous êtes le président exécutif de The Galleon Project,
00:17un collectif qui fédère 1000 entrepreneurs dans la tech.
00:21Je vous ai convoqué, invité ce matin, et cette invitation vous a surpris,
00:26parce que vous faites partie des entrepreneurs qui veulent payer plus d'impôts,
00:31vous avez rédigé une tribune la semaine dernière dans la tribune dimanche,
00:34où vous dites, nous entrepreneurs concernés par la taxe Zuckman, nous voulons contribuer,
00:39vous avez écrit ça avec Armand Thiberge de Brevaux et Marc Batti de Data & Coop,
00:43pourquoi vous voulez payer plus d'impôts ?
00:46Alors, exprimer comme ça c'est un peu, je dirais, réducteur,
00:50je pense que vous n'avez pas échappé qu'on est dans une situation budgétaire qui va être compliquée,
00:53qu'il y a un budget qui va être compliqué à faire passer,
00:55qu'il y aura des mesures qui vont être difficiles pour les Français,
00:59et je pense que c'est important que symboliquement,
01:04les plus privilégiés montrent un signal qu'ils sont prêts à contribuer,
01:09et qu'en gros, tout le monde fait des efforts.
01:11Et en fait, ce qui rend fou les gens ou énervés,
01:15c'est quand ils ont l'impression que certains font des efforts et pas d'autres.
01:18Et donc c'est vraiment l'effet signal.
01:19Voilà, c'est évidemment pas cet axe qui va résoudre les problèmes de déficit de la France,
01:24ça restera tout petit par rapport à l'immensité du problème,
01:28mais il y a un effet symbolique.
01:29Et voilà pourquoi je me suis positionné là-dessus.
01:31Mais vous ne dites pas, comme une partie de la French Tech,
01:34ou une partie des patrons qu'on a reçus ces 15 derniers jours,
01:36c'est nocif à la création de valeurs,
01:38ça va abîmer l'innovation,
01:41voire ça va faire fuir certaines boîtes à l'étranger.
01:45Ça, c'est des déclarations qu'on entend depuis 20 ans.
01:49Enfin, je connais bien le refrain,
01:51et j'ai même écrit un livre là-dessus qui s'appelle
01:53« On m'avait dit que c'était impossible ».
01:55Moi, j'ai passé 10 ans en Californie,
01:58où on est plus taxé qu'en France.
02:00La tranche marginale de revenus est supérieure en France.
02:02Et ça n'empêche pas la création de valeurs ?
02:04Il y a une transparence complète sur les holdings,
02:07les holdings personnels.
02:09Et oui, vous savez bien que la Californie,
02:11c'est l'épicentre de l'entrepreneuriat.
02:13Donc, il n'y a pas de lien direct
02:15entre la volonté d'entreprendre
02:17et le niveau des traquesseries fiscales ou administratives.
02:23Donc ça, ça ne tient pas en compte.
02:25Pour vous, l'argument d'illiquidité ne tient pas non plus ?
02:28C'est-à-dire que le fait que les dirigeants
02:29ne pourraient pas payer ne tient pas ?
02:31Alors ça, c'est un cas très particulier,
02:32parce que pour l'immense majorité des gens
02:34qui sont asségetés à cette taxe,
02:36ils ont une partie de leur patrimoine qui est liquide.
02:38Quand vous avez plus de 100 millions d'euros,
02:39en général, vous avez une partie de votre patrimoine liquide.
02:41Là, on parle surtout de la French Tech.
02:42Il y a un cas très particulier,
02:44qui sont les gens qui ont tout leur patrimoine
02:47de manière illiquide.
02:48Je connais bien ce cas, parce que j'en ai fait partie.
02:50Donc, je connais très bien le sujet.
02:52Et là, il y a des solutions
02:53tout à fait pragmatiques qu'on peut mettre en place,
02:55comme un paiement en action,
02:58qui se fait en plus,
03:00en concernant les droits de vote,
03:01donc il n'y a pas de changement dans la gouvernance,
03:03avec la possibilité ensuite de pouvoir les racheter
03:05au moment où on a des liquidités,
03:07donc avec toute la souplesse nécessaire.
03:09Donc, on peut absolument adapter le dispositif
03:12aux très rares cas.
03:13Et entre nous, on parle de
03:15probablement une quinzaine de personnes en France.
03:19Mais forcer Arthur Mensch,
03:20puisque c'est le cas le plus emblématique,
03:22à vendre à l'État des actions de sa boîte,
03:26donc gérées par la BPI,
03:27vous qui avez créé Criteo,
03:29ça vous va complètement ?
03:31On doit tous payer notre impôt,
03:33donc d'une manière ou d'une autre.
03:35Et je trouve que c'est une bonne disposition,
03:37c'est une flexibilité de pouvoir dire
03:39« moi je le paye en actions liquides,
03:43qui aujourd'hui ont la valeur qu'elles ont,
03:44mais au moment où ce sera liquide,
03:47c'est à ce moment-là
03:48qu'on refera le calcul,
03:50et que peut-être que si Mistral
03:52vaut à ce moment-là beaucoup moins d'argent,
03:54en fait, l'impôt va disparaître.
03:57Et sinon, il sera très content,
03:59s'il gagne des milliards,
04:00de payer un peu son impôt, quoi.
04:04C'est la règle du jeu,
04:04on paye son impôt,
04:06et je trouve que de pouvoir le payer en actions,
04:08qu'on a un organisme remarquable,
04:10ça s'appelle la BPI,
04:11qui est capable de gérer ça très facilement,
04:15qui gère déjà des centaines de participations
04:18de manière remarquable,
04:19ils font un super boulot.
04:21Ça peut être son rôle ?
04:23C'est déjà son rôle aujourd'hui,
04:24la BPI est actionnaire de plein,
04:26plein, plein de start-up, quoi.
04:29Sur la question de l'exil fiscal,
04:31là aussi, vous dites qu'il n'y a pas de risque
04:33que les gens s'en aillent.
04:35Encore une fois,
04:36déjà, vous avez l'exil taxe aujourd'hui,
04:39qui fait que c'est quand même compliqué, quoi.
04:43Enfin, le jeu n'en vaut pas la chandelle, quoi.
04:46Et de toute façon, je dirais,
04:49pour moi, je le vois plutôt comme un devoir
04:51un peu moral.
04:55Je veux dire, on a grandi en France,
04:57on a bénéficié de toutes les infrastructures de la France.
05:00Si on a réussi ces entreprises,
05:03c'est en grande partie grâce à l'écosystème français.
05:06Je pense que c'est important
05:07que tout le monde paye sa part, quoi.
05:09Mais c'est-à-dire, pour vous, aujourd'hui,
05:11le symbole est suffisamment important.
05:14C'est-à-dire que peu importe ce que ça coûte
05:15en termes d'impôts,
05:16il faut montrer que les riches participent.
05:19Déjà, ce n'est pas peu importe.
05:20On est en train de demander
05:21un impôt de 2 % uniquement sur la tranche
05:25qui dépasse 100 millions.
05:26Donc, c'est quand même, encore une fois,
05:28c'est des gens qui, de toute façon,
05:31ont un grand patrimoine.
05:33Ça ne changera pas le fait
05:34qu'ils aient un très grand patrimoine.
05:36Et donc, oui, c'est une valeur
05:37essentiellement symbolique.
05:38Et encore une fois,
05:39les économistes se battent
05:40de savoir exactement combien ça va rapporter.
05:43Mais à la limite, ce n'est même pas le sujet.
05:44C'est le sujet symbolique de dire
05:45« Tout le monde prend sa part. »
05:47Et si on veut demander à tous les Français
05:49de faire des efforts,
05:50et il va falloir qu'on en fasse,
05:51il faut que les privilégiés participent
05:54de manière symboliquement
05:55et de manière visible.
05:56Mais quand vous dites
05:56« Combien ça va rapporter ? »
05:57Ce n'est même pas le sujet.
05:59C'est-à-dire qu'effectivement,
06:00vous qui avez monté une boîte,
06:01vous étiez dans l'efficacité économique.
06:03Là, ce n'est pas le sujet.
06:04Et vous dites « Ce n'est pas grave,
06:06c'est suffisamment important
06:07pour l'équilibre sociétal. »
06:09Il y a un danger de basculement
06:10qui vous fait peur ?
06:12Non, mais c'est un sujet politique.
06:14C'est que vous avez des mesures
06:16qui sont très difficiles à faire passer.
06:18Il y a les gouvernements qui tombent.
06:19Tout le monde est clivé
06:20et personne ne veut faire des compromis.
06:22Il y a un moment,
06:22il faut faire un premier pas
06:23et dire « Oui, ok,
06:25on est prêt à faire un pas en avant »
06:26pour créer plus une culture
06:29de compromis en France
06:30et pas une culture juste clivage
06:32où on se dit « Non, non, non,
06:33je campe sur mes positions
06:34et je fais un non de principe. »
06:36Et moi, je trouve ce qui est intéressant
06:37sur cette taxe,
06:38c'est d'en discuter
06:40les aspects techniques
06:41que faire que techniquement,
06:42effectivement,
06:43tout le monde puisse la payer
06:44d'une bonne façon
06:44et que personne ne soit
06:46dans une situation absurde
06:47où ils ne puissent pas la payer.
06:48Donc ça, c'est important.
06:50Mais en faire une question de principe,
06:51là, on est dans la posture
06:52et c'est ça qu'on a envie de sortir.
06:54Les Français en ont marre
06:55de ce truc
06:55où chacun est dans la posture
06:57et on est bloqué
06:58et personne n'a envie
07:00de faire un premier pas.
07:01Alors, vous parlez de posture.
07:02Le MEDEF a fait un kit de mobilisation.
07:04Il prévoit un grand raout.
07:05Ça vous fait rire,
07:06le kit de mobilisation
07:07pour répondre aux propositions
07:09du Parti Socialiste.
07:11Il y aura un grand raout
07:11qui s'est prévu
07:12le 13 octobre prochain.
07:14Alors, j'imagine
07:14que vous n'allez pas y aller
07:15à ce grand raout du MEDEF.
07:17Mais qu'est-ce que vous pensez
07:18du positionnement
07:19qui est un petit peu plus offensif
07:21ces derniers temps ?
07:23Moi, je trouve que c'est très bien
07:23qu'il y ait un débat.
07:24Le mieux de tout ça,
07:25c'est de mettre un débat sur la table.
07:27Et je pense que, voilà,
07:29vu la dynamique,
07:31il va se passer quelque chose.
07:32Et ce que j'espère,
07:33c'est qu'à la fin,
07:33on va arriver à un compromis intelligent
07:34et que des gens font des propositions.
07:37C'est normal que tout le monde
07:38ne soit pas d'accord.
07:39Mais ce qui est important,
07:40c'est d'arriver à en faire un débat
07:42aussi peu émotionnel que possible
07:45et sortir des effets de posture.
07:48Et plutôt dire,
07:48voilà, de manière intelligente,
07:49si on veut que tout le monde
07:50contribue de manière proportionnelle
07:53à ses moyens,
07:55voilà, qu'est-ce qu'on fait ?
07:56Ça vous a étonné
07:57qu'on vous invite
07:58sur BFM Business ce matin
08:00parce que vous considérez
08:01qu'on donne plus la parole
08:02à ceux qui sont contre la taxe Ducman,
08:04mais ils ne sont pas nombreux
08:04à vouloir s'exprimer
08:06en disant
08:06« je suis d'accord ».
08:07Pourquoi ?
08:08Eh bien, écoutez,
08:08j'ai été très agréablement surpris
08:11que BFM Business me reçoit,
08:13alors que peut-être
08:14que vous avez un tropisme,
08:15plutôt d'être contre cette taxe,
08:17parce que pour la petite histoire,
08:19donc on a publié cette tribune
08:20dans la tribune du dimanche,
08:22elle a été censurée
08:23sur l'édition papier,
08:24on n'a pu la publier
08:25que sur la partie en ligne.
08:27Vous vous rendez compte que,
08:28bon,
08:28je n'ai pas l'impression
08:29d'émettre quelque chose
08:30de très révolutionnaire,
08:31et pourtant,
08:32il y a des gens qui ne veulent pas,
08:34il y a des médias qui considèrent...
08:35Alors, je sais pas si c'est une question
08:36de censure,
08:36on fait des choix éditoriaux aussi,
08:38sur des canaux plutôt que d'autres,
08:39ça arrive tous les jours.
08:40Voilà,
08:40mais en tout cas,
08:41bravo pour BFM Business
08:42de nous avoir...
08:44Mais vous pensez
08:44qu'on ne veut pas entendre
08:45les patrons pro
08:47d'Ax Zucman,
08:48qu'on préfère
08:48ne pas les entendre ?
08:50Je veux dire qu'aujourd'hui,
08:52je constate
08:53qu'il y a un débat
08:54qui est très émotionnel
08:54et très clivant,
08:55et qu'il y a des points de vue
08:59qui ne sont pas forcément
09:00faciles à exprimer.
09:02Dans les mesures,
09:03donc l'Ax Zucman,
09:04par exemple,
09:04toucher au pacte d'Utrecht,
09:05moi j'entends beaucoup,
09:06pas la French Tech,
09:07mais les patrons de TI dire
09:08que c'est nécessaire
09:09pour la transmission d'entreprise.
09:10Là aussi,
09:11on dit qu'il faut faire un effort.
09:12Est-ce que vous pensez
09:13que c'est une bonne solution ?
09:15Alors,
09:15si on ouvre le couvercle,
09:17toutes les mesures fiscales,
09:18il y a beaucoup de choses.
09:19On peut en passer une heure
09:20à en discuter.
09:23Mais globalement,
09:24je pense qu'il y a matière
09:27à faire des mesures
09:29où il y a un sentiment
09:31où on réduit
09:32un sentiment d'iniquité
09:36où certains ont l'air d'échapper.
09:39Et forcément,
09:39quand vous avez
09:40un très gros patrimoine,
09:41c'est très facile
09:42de minimiser vos revenus.
09:44Et il y a plein
09:45de méthodes différentes.
09:47La France,
09:48c'est un gruyère fiscal
09:50avec des niches partout
09:51et on dit toujours
09:52avec un chien dans chaque niche.
09:53L'optimisation fiscale
09:54est facile en France ?
09:55Oui,
09:55mais vous prenez
09:56un truc aussi simple
09:57que l'insurance vie,
09:59qui est quand même
09:59le produit que les Français
10:00ont tout le monde.
10:01Tant que vous laissez
10:02votre argent dans l'insurance vie,
10:03il n'est pas taxé.
10:04C'est quand même dingue,
10:05c'est super.
10:06Donc,
10:07on nous parle toujours
10:08de la France
10:08de l'enfer fiscal.
10:10Mais en fait,
10:11il y a énormément
10:11de dispositifs,
10:13je dirais,
10:13pour adoucir,
10:15échapper,
10:16en grande partie,
10:16à l'impôt.
10:17Et vous,
10:18vous faites le choix
10:18de ne pas les utiliser ?
10:20Moi,
10:20je suis comme tout le monde.
10:22Je constate le système
10:24comme il est
10:25et je constate
10:27qu'aujourd'hui,
10:27effectivement,
10:28il y a une colère
10:31agrandissante
10:31dans la population
10:33qui ont l'impression
10:33que le système fiscal
10:37actuel
10:37est trop favorable
10:39aux gens
10:40qui ont les moyens
10:41de pouvoir jouer avec,
10:43même s'ils jouent avec
10:44en toute légalité.
10:45et donc,
10:48il faut
10:48une mesure
10:49symbolique
10:50forte
10:50pour,
10:52encore une fois,
10:53le vrai débat
10:54aujourd'hui,
10:54c'est qu'on va avoir
10:55des mesures
10:56qui vont être difficiles
10:57à prendre
10:58pour le budget
10:59et il faut créer
11:00un minimum
11:00de consensus social
11:02au sein de la population
11:02pour que,
11:06entre guillemets,
11:07ça ne finisse pas
11:08dans la violence
11:09parce que
11:09si jamais
11:11vous donnez raison
11:12aux gens,
11:13il y a un moment
11:13ils descendent dans la rue,
11:14ils deviennent violents
11:14et il faut vraiment
11:16qu'on évite ça.
11:17Merci beaucoup
11:17Jean-Baptiste Rudel
11:18d'être venu ce matin
11:18dans la matinale
11:19de l'économie.
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