- il y a 2 jours
Vendredi 21 novembre 2025, retrouvez Guergana Guintcheva (Professeur de marketing, experte des industries culturelles, EDHEC) et Gérard Garouste (Artiste peintre, contact@galerie-dauphine.com) dans ART & MARCHÉ, une émission présentée par Sibylle Aoudjhane.
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00:00Bonjour à toutes et tous, bienvenue dans ce nouvel épisode d'Art et Marché,
00:12l'émission qui vous ouvre les portes du marché de l'art.
00:14Et en première partie d'émission, nous avons rencontré l'artiste majeur de la peinture française,
00:19Gérard Garouste, qui nous présente sa fondation, La Source.
00:23Elle agit depuis plus de 30 ans en faveur de l'inclusion sociale pour l'art
00:27et il nous parle également de son regard sur la nouvelle génération d'artistes.
00:31Et en seconde partie d'émission, nous échangeons avec Gergana Gincheva,
00:35qui est professeure de marketing, experte des industries culturelles à l'école de commerce EDEC.
00:40Elle a co-écrit l'article « Arts et crimes organisés » de la prise de conscience aux moyens d'action.
00:46Nous allons la recevoir dans un instant. C'est parti pour Art et Marché.
00:49Nous avons rencontré l'artiste Gérard Garouste à la Galerie Dauphine,
00:57un lieu et une exposition imaginée par les étudiants du Master Marché de l'Art à l'Université Paris-Dauphine.
01:04Autour de cette exposition consacrée à la nouvelle génération d'artistes,
01:08nous avons échangé avec le peintre sur son association, La Source,
01:11mais aussi sur son regard porté sur les jeunes créateurs d'aujourd'hui.
01:15La Source, c'est avant tout un projet social, mais elle a besoin d'un outil de travail.
01:22L'outil, c'est l'art. Cette association, c'est pour des enfants issus d'un milieu défavorisé,
01:30des enfants qui n'ont aucun sens de ce que c'est l'art, la culture.
01:34Ils ne sont pas là-dedans du tout par leurs parents et ça ne veut rien.
01:38À l'école, j'étais nul et pour moi, dès ma petite enfance,
01:43dessiner, c'était une manière d'étonner mes tresses d'école, les petits copains, etc.
01:50Donc j'ai toujours peint, j'ai raté tous mes examens, sauf l'entrée au Beaux-Arts bien plus tard.
01:57Sinon, j'ai tout foiré, mais j'ai mis huit fois pour avoir mon peintre de conduire.
02:02Enfin, vraiment, c'est la cata.
02:03Enfant, moi-même, j'ai reconnu ce milieu très difficile, très dur.
02:08Donc quand je me suis retrouvé adulte et qu'on est venu me chercher en disant
02:12qu'est-ce qu'on peut faire pour ces enfants qui vont si mal, etc.,
02:16je me suis dit qu'il est temps de faire quelque chose.
02:18Et c'est là où j'ai profité de mes relations professionnelles,
02:22c'est-à-dire des artistes connus à l'époque, pour créer la source.
02:27Moi, j'étais là un peu pour représenter les artistes auprès des ministres, auprès des associations.
02:33Mais voilà, c'est ce que je fais encore maintenant.
02:37C'est-à-dire, vous voyez, je suis là aujourd'hui à soutenir la source et ce projet-là qui est superbe.
02:42On est derrière ces œuvres-là que j'aime beaucoup parce qu'elles rappellent une conception de l'expressionnisme allemand que j'aime beaucoup.
02:52Je suis plutôt porté par la peinture figurative et quand je vois que la peinture figurative persiste et dure,
03:01ça me fait plutôt plaisir parce que j'ai vécu les années 1970 où on pensait que la peinture allait disparaître.
03:09Et là, je dois dire que ça fait plaisir d'être ici, simplement, parce que tout est jeune.
03:15C'est-à-dire, cette galerie, elle est jeune, le propos de ces artistes avec Dauphine qui veulent créer quelque chose de nouveau
03:25en faisant deux jours de présentation des œuvres, en invitant la nouvelle génération, la nouvelle génération de critiques,
03:34la nouvelle génération même des jeunes mécènes, parce qu'après, l'idée, c'est d'inviter des mécènes.
03:40Et d'ailleurs, il y a déjà, je crois, la moitié de l'exposition qui vient d'être achetée par des différents collectionneurs.
03:46Prendre la responsabilité du lieu avec même des choses, pour moi, très modernes, très nouvelles,
03:53comme des influenceurs et des influenceuses, je trouve ça formidable.
03:58C'est la génération, je n'ai de génération, ils communiquent à travers les processus nouveaux que moi.
04:05Ce n'est pas ma génération, vous voyez, mais c'est la leur, c'est ça qui est bien.
04:10La journée internationale de lutte contre le trafic illicite de biens culturels est organisée chaque année par l'UNESCO le 14 novembre.
04:21Et donc, lié à cette actualité, je suis ravie d'accueillir aujourd'hui Gergana Gincheva,
04:26qui est professeure de marketing, experte des industries culturelles à l'EDEC, l'école économique.
04:32Et vous êtes co-autrice de l'article « Arts et crimes organisés » de la prise de conscience aux moyens d'action,
04:39avec également professeur à l'EDEC, Bertrand Monnet.
04:42Merci beaucoup d'être avec nous.
04:44Enchantée, merci de m'avoir invitée.
04:46On entend souvent dire que l'art est l'un des terrains de jeux de trafic illicites les plus importants.
04:52Est-ce que c'est toujours le cas ?
04:54Comment est-ce que le marché de l'art se situe par rapport au taux de marché ?
04:59Oui, c'est le cas, dans le sens où déjà l'art et l'investissement financier sont très liés,
05:06parce que d'après Art Basel, 60 milliards de dollars annuellement sont investis dans l'art.
05:17Ensuite, un autre chiffre important, c'est que d'après Europol, après la drogue et les armes,
05:27c'est l'art qui vient comme une source de blanchiment.
05:33Pourquoi ? J'imagine que c'est important d'expliquer.
05:37D'abord parce que l'art, le prix d'une œuvre d'art est assez subjectif.
05:46Ça dépend de l'évaluation.
05:48Il peut être aussi spéculatif.
05:49Pour vous donner un exemple concret, par exemple, en 2007,
05:53une œuvre de Basquiat a traversé la frontière avec un bordereau
05:58justifiant une valeur de 100 dollars, alors qu'elle valait 8 millions.
06:04Et cette mauvaise évaluation faisait partie d'une opération de blanchiment d'argent, justement.
06:13Et c'est parce que la douane n'était pas forcément au courant qu'en Basquiat, ça n'a pas cette valeur-là.
06:18Alors que c'est vrai que des lingots d'or ou quelque chose comme ça,
06:20on peut plus facilement se dire que ça vaut plus.
06:23D'accord.
06:23Et après, le marché de l'art manque de transparence.
06:28Parce que notamment avec les ventes aux enchères, par exemple,
06:31gré à gré, vous n'êtes pas obligé de dire qui est l'acheteur.
06:36Il peut y avoir des services qui proposent un achat sans dévoiler.
06:44On va revenir justement sur toute cette réglementation qui a évolué.
06:47Mais est-ce que tout d'abord, vous pouvez nous expliquer comment fonctionne le blanchiment à travers l'art ?
06:52Est-ce que peut-être vous avez un exemple pour comprendre quels sont les réseaux,
06:56les circuits qui permettent de blanchir de l'argent via l'achat d'œuvres d'art ?
07:02C'est une très bonne question.
07:03C'est le premier résultat de notre étude, le mode opératoire.
07:07Parce que vous avez raison, peut-être le grand public ne s'imagine pas
07:11comment on peut lier une œuvre d'art à un blanchiment d'argent.
07:16Donc, c'est assez simple.
07:19Et ça s'inscrit dans les trois phases du blanchiment d'argent, je dirais traditionnel,
07:27qui sont d'abord le placement, ensuite l'empilement et l'intégration.
07:33Donc, d'abord le placement.
07:35Je prends un exemple très concret.
07:37Imaginons un groupe de crimes organisés de l'Amérique du Sud, par exemple,
07:45qui a fourni de la drogue à un autre groupe de crimes organisés en Europe, France ou Belgique.
07:55Donc, il va demander à ce que ce groupe en Europe garde, par exemple, 5% en cash de la transaction.
08:08Et ce groupe-là va se mettre en lien.
08:12Donc, ça, c'est la phase de placement.
08:14Il va se mettre en lien avec, par exemple, un agent corrompu sur un port franc.
08:19Imaginons, il y en a beaucoup, Genève, Luxembourg.
08:22Et il va demander à cet agent corrompu, à des intervalles réguliers, imaginons, tous les six mois,
08:32d'acheter une œuvre à d'art entre 3 ou 10 millions d'euros.
08:39Et en contrepartie, l'agent, il va recevoir une commission.
08:42Et donc, pendant cette phase-là, qui est la phase de placement, l'argent sale du transit de la drogue va être investi dans des œuvres d'art
08:53qui sont sur des ports francs.
08:56La spécificité des ports francs, c'est que c'est en dehors de toute douane, en dehors de toute législation.
09:03Donc, des transactions peuvent se passer tant que l'œuvre ne sort pas du port franc, on ne sait pas qui est l'acheteur où elle va.
09:15Et donc, ensuite, on va passer à la partie empilement, où toujours des agents corrompus dans les galeries ou des salles de vente
09:28vont revendre les œuvres et là, on perd la trace de l'argent.
09:37Et la dernière phase, c'est l'intégration, l'intégration dans l'économie légale.
09:43Souvent, c'est des sociétés d'écran qui sont liées à la première organisation de crimes organisés,
09:50mais qui sont complètement légales, qui vont récupérer l'argent.
09:53Mais après plein de phases où on perd la trace.
09:56C'est-à-dire que du coup, l'œuvre qui a été revendue va être achée par ces sociétés d'écran, puis revendue, et donc l'argent...
10:05C'est l'argent juste qui est récupéré, qui ne sont complètement pas du tout dans l'art, ça peut être...
10:09Oui, c'est ça.
10:10Est-ce qu'on a une idée des montants, des échelles, etc.?
10:14J'imagine qu'il n'y a pas beaucoup d'études sur...
10:16Entre 2 et 5% du PIB mondial est blanchi.
10:25Pas seulement par l'art, mais encore une fois, le blanchiment par des œuvres d'art arrive, c'est en 3e position en termes de source.
10:33D'accord, donc ça peut être des montants énormes.
10:36Plus récemment, je dirais des 5 dernières années, il y a eu quand même pas mal de réglementations au niveau européen qui ont évolué avec des demandes d'exigence plus élevées auprès des marchands, etc.
10:51Est-ce que ça, vous constatez que ça a un effet positif sur le marché ?
10:56Est-ce que c'est effectif ? Est-ce qu'on remarque moins de blanchiment ?
11:00Tout à fait. La réglementation est très importante sur le crime organisé.
11:07Et en effet, le marché de l'art manquait de régulation, ce qui permettait aussi qu'il était attractif pour ce type d'opération de blanchiment.
11:17Et en effet, comme vous l'avez dit, on est à la 6e directive du côté européen qui stipule que toute transaction qui, à partir de 10 000 euros, doit être déclarée très transparente avec les acheteurs, leur nom, etc.
11:36Et ce qui est très important, c'est que suite à ces directives européennes, d'autres États ont fait la même chose, notamment les États-Unis.
11:47Et c'est très important que les États-Unis l'ont fait parce qu'au niveau du marché de l'art, 43% des transactions sont faites sur ce marché-là.
11:58Les États-Unis ?
11:59Oui.
12:00Oui, c'est une place forte.
12:01Et j'imagine aussi que, vu que c'est un marché qui est mondialisé, plus il y a de pays qui se mettent à la même page de réglementation, plus ça favorisera quand même une baisse du blanchiment.
12:11Parce que c'est ça aussi le problème.
12:12Si seulement, par exemple, l'Union européenne se met à ces réglementations-là et d'autres pays non, ça créera un décalage qui ne changera pas forcément grand-chose à l'échelle internationale.
12:22Exactement.
12:23Oui.
12:24Et ce qui est important aussi, c'est que les ports francs ont été aussi très réglementés.
12:28D'ailleurs, dans notre méthodologie, on a analysé la presse sur 23 années et comment la presse sensibilise le grand public sur ces sujets.
12:39Et pour prendre l'exemple juste des ports francs, dans les années 2000 jusqu'à 2010, il y avait énormément d'articles qui montraient des problèmes de corruption ou des problèmes de blanchiment qui se passaient sur ces lieux.
12:55Alors qu'actuellement, grâce à la réglementation des ports francs, on a de moins en moins d'articles qui montrent que la réglementation a fonctionné et le public a été sensibilisé.
13:06D'accord. Ok, donc un sujet encore à suivre. Merci beaucoup Gergana Gincheva. Je rappelle que vous êtes professeure de marketing experte des industries culturelles à l'EDEC et co-autrice de l'article « Arts et crimes organisés » de la prise de conscience aux moyens d'action, co-écrit avec Bertrand Monnet.
13:23Merci beaucoup d'avoir été avec nous et merci à vous toutes et tous de nous avoir suivis. C'était Arrêt Marché.
13:27Merci à vous.
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