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  • il y a 3 heures
Son visage est connu de toutes les générations. Certains l’ont découvert sur petit écran, d’autres sur le tableau des salles de classe, les derniers sur leur téléphone. Avec des explications claires et concises, il est parvenu à rendre la culture scientifique accessible à tous, et désormais l’univers peine à garder ses mystères. Ce champion de la vulgarisation a quitté son célèbre camion mais pas sa mission. Il poursuit aujourd’hui l’aventure sur les réseaux sociaux avec un succès incontestable. Comment partager le savoir au plus grand nombre ? Quelles réponses apporter face aux vagues de désinformation scientifique ? Cette semaine, Rebecca Fitoussi reçoit Jamy Gourmaud dit « Jamy » dans l'émission Un monde, un regard.Une collection de grands entretiens inspirante dans un monde en manque de repères et de modèles. Année de Production :

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Transcription
00:00Alors que beaucoup cherchent à se faire un nom dans l'audiovisuel,
00:26lui s'est surtout fait un prénom.
00:28Et d'ailleurs, ils sont rares ceux qui connaissent son patronyme.
00:32Oui, notre invité fait presque partie de la famille.
00:34Il est comme un intime qu'on appelle par son prénom sans même le connaître.
00:38Et cela fait partie de ses grandes forces.
00:41Il est entré dans vos foyers grâce à des émissions de télévision.
00:44Il a appris mille choses à vos enfants grâce à son don de vulgarisation.
00:49Et il a mis du sourire, de l'entrain et de la bonne humeur
00:52dans la transmission des matières redoutées à l'école, les sciences.
00:56Les jeunes l'adorent.
00:58Les enseignants s'en inspirent.
01:00Sa chaîne YouTube cumule plus de 2 millions d'abonnés.
01:03Sa page Instagram, plus d'un million.
01:06Ses documentaires sont vus, revus.
01:08Ses podcasts écoutés en boucle.
01:10Et ses livres s'arrachent.
01:12Dans un monde où la science est contestée par toutes sortes de platistes et autres complotistes,
01:17dans une société où le doute s'installe sur les vérités scientifiques,
01:20n'est-ce pas devenu plus compliqué de jouer le rôle de passeur de savoir ?
01:25N'est-ce vraiment pas sorcier de résister, de transmettre en toute quiétude ?
01:30Posons-lui toutes ces questions.
01:31Bienvenue dans Un Monde, un regard.
01:32Bienvenue à vous, Jamy Gourmeau.
01:34Merci d'avoir accepté notre invitation au Sénat.
01:37Plus connu sous le nom de Jamy tout court.
01:39Il faut dire que vous avez donné votre prénom à beaucoup de vos émissions.
01:42Le Monde de Jamy, c'est Jamy.
01:44Jamy est picurieux.
01:46365 nouveaux jours avec Jamy.
01:48Ça, c'est votre almanac paru chez Nathan Édition.
01:51Et bien sûr, l'émission C'est pas sorcier qui a cartonné pendant plus de 20 ans.
01:54Votre mot d'ordre sur votre chaîne YouTube et votre page Instagram,
01:58c'est le goût du savoir, ça se partage.
02:01Est-ce que ce n'est pas devenu plus compliqué aujourd'hui de partager son savoir ?
02:05Alors non, le partager, ce n'est pas plus compliqué.
02:09En revanche, faire en sorte que certains y trouvent du goût et bon goût,
02:14c'est peut-être un peu plus dur.
02:15Oui, mais le partage d'un savoir scientifique aujourd'hui qui peut être contesté,
02:20ça ne crée pas de polémique, de questions, de réactions même d'un certain public ?
02:24Ah si, bien sûr.
02:25Oui.
02:25Bien sûr, plus que jamais.
02:27Vous avez cité différentes émissions.
02:30Quand je faisais ces émissions, il n'y avait pas de réseau.
02:35Donc, la parole était moins libre, entre guillemets.
02:41Et donc, bien sûr, il nous arrivait de faire des erreurs, bien sûr.
02:44Il nous arrivait d'être remis en question, mais ça se passait par courrier interposé.
02:51Voilà.
02:51Et il est toujours plus difficile d'écrire un courrier à la main ou même un mail
02:56que d'avoir une réaction sur les réseaux.
02:59Quand vous dites plus que jamais, c'est-à-dire que dès que vous publiez une vidéo,
03:03il y a des savoirs contestés ?
03:04Tous les thèmes qui sont le terreau du complotisme sont des thèmes autour desquels on a des réactions.
03:18Dès qu'on parle d'univers, de la Terre, de la conquête de la Lune, dès que l'on parle même d'énergie,
03:29on a tout de suite des réactions très épidermiques et des réactions qui remettent en cause des savoirs plutôt acquis sur les vaccins, notamment.
03:43Il y a une quinzaine de jours, on a publié une vidéo sur Pasteur.
03:52On a eu une remise en question du principe même de la vaccination.
03:57Et quand vous voyez une Amérique qui conteste de plus en plus ces savoirs-là, justement, vous êtes un peu pessimiste, optimiste ?
04:02Alors, moi, je ne suis ni pessimiste ni optimiste.
04:06Je m'attache aux faits, je m'interroge beaucoup.
04:13Et il se trouve que quand je suis sur certains sites où j'observe des choses,
04:21évidemment, ce que j'entends venir depuis l'autre côté de l'Atlantique m'interpelle énormément.
04:29Quand vous êtes au pied de la mer de glace, par exemple, et que vous entendez un jour une déclaration du président américain ou de son entourage
04:42qui remettent en question le réchauffement climatique ou ses effets,
04:47et que depuis 30 ans que je fais ce métier, j'ai dû aller une dizaine de fois sur la mer de glace
04:55et que je l'ai vue reculer d'année en année, que j'ai souvenir en me disant
04:59« Tiens, voilà, la première fois que je suis venu, j'avais descendu tant d'escaliers.
05:03Aujourd'hui, j'en descends 450 de plus pour atteindre la glace. »
05:07Bon, ben, je…
05:09Donc, à tous ces gens qui doutent et qui contestent les vérités scientifiques,
05:13vous vous répondez par des faits, vous les montrez.
05:15C'est ça, votre réponse ?
05:16Oui, c'est d'expliquer.
05:18En fait, moi, ce que j'aime faire, c'est de donner un sens à ce que je vois.
05:23Rentrer un petit peu dans les coulisses de notre monde,
05:28dans les coulisses physiques de notre monde.
05:31Et d'abord parce que moi-même, j'apprends beaucoup.
05:35Je vous ai entendu tout à l'heure quand vous dressiez ce portrait élogieux
05:38de dire que j'avais appris mille choses aux uns et aux autres.
05:43J'ai moi-même appris mille choses et j'en apprends encore beaucoup.
05:49Et je pense que c'est ce qui me motive, ce qui me donne envie de continuer.
05:55J'ai un document à vous proposer, Jamy Gourmeau.
05:58Je vais le mettre entre vos mains et puis je vais le décrire pour les gens qui nous écoutent.
06:02C'est une archive qui peut-être vous parlera.
06:03C'est la couverture d'un ouvrage qui date de 1686 et qui est considéré,
06:08vous le connaissez déjà, mais je vais quand même le dire pour les gens qui nous écoutent,
06:12qui est considéré comme le premier exemple de vulgarisation scientifique.
06:15Il est signé d'un homme considéré donc comme le premier vulgarisateur scientifique
06:19de l'histoire des sciences en Occident.
06:21Il s'agit de Bernard Le Bovier de Fontenelle.
06:24Et ce livre, c'est Entretien sur la pluralité des mondes.
06:27Livre qui a connu un très grand succès parce que Fontenelle traitait de sujets difficiles
06:32dans un style lumineux et enjoué.
06:34Tiens, tiens, il est un peu le Jamy du XVIIe.
06:37Oui, je crois qu'il associait souvent les mots de savoir à plaisir, émerveillement, vous l'avez dit.
06:45Mais il considérait qu'il ne pouvait pas y avoir de transmission de connaissances
06:50sans plaisir à la connaissance.
06:53Et tout à l'heure, on parlait du goût du savoir.
06:56Il est là, tout simplement.
06:57C'est de trouver du merveilleux dans ce que l'on va raconter, dans ce que l'on va expliquer.
07:04Et je pense que c'est un excellent moyen pour transmettre le savoir,
07:09mais aussi pour l'ancrer, pour faire en sorte qu'il reste.
07:13Alors, parfois, on oublie un peu, mais bon, il faut recreuser un petit peu le sillon.
07:17Mais effectivement…
07:20Vous le connaissiez, de toute façon, je ne peux rien vous apprendre.
07:22Si, si, vous pouvez me l'apprendre.
07:23Mais Bernard de Fontenelle est quelqu'un que je cite très, très souvent
07:26quand je parle de transmission des savoirs.
07:29Il faut y trouver du merveilleux et puis savoir le transmettre
07:31dans un style lumineux et enjoué.
07:33Vous vous reconnaissez dans cette manière de transmettre, c'est la clé.
07:36Oui, parce que ce n'est pas une obligation.
07:41C'est-à-dire que quand je transmets quelque chose,
07:45j'y prends du plaisir parce que j'ai pris du plaisir à apprendre.
07:49Et effectivement, quand je m'intéresse à un phénomène,
07:53ce que je vais lire n'est pas forcément hilarant à toutes les lignes.
07:57Bien sûr.
07:58Mais au bout du compte, il y a une sorte d'émerveillement,
08:02d'épanouissement qui jaillit.
08:04Et il faut trouver le moyen de rendre cette explication aussi épanouissante.
08:12Moi, j'aime voir les yeux scintillés quand je raconte quelque chose.
08:18Et à partir de là, on commence à bâtir son explication,
08:22les mots que l'on va choisir, la manière dont on raconte l'histoire.
08:28J'ai souvent dit que j'adorais expliquer la chimie
08:32parce que la chimie, c'est un théâtre permanent.
08:36Une réaction chimique, c'est une scène de théâtre.
08:40Vous avez des protagonistes au départ.
08:44Et puis, il y a un événement qui se produit.
08:47Du chaud, du froid, on ajoute quelque chose.
08:51Et puis, un dénouement.
08:54Quelque chose qui est très différent de ce qui s'est passé,
08:58de ce qu'il y avait au départ.
09:00Est-ce que ce n'est pas cela qui manque à l'école,
09:02pour passionner nos enfants,
09:03pour qu'ils prennent le même plaisir dans un cours de chimie
09:06que vous décrivez, mais qui n'est pas enseigné de façon enjouée
09:09et émerveillée, comme on le dit depuis tout à l'heure ?
09:11Alors, moi, je n'ai jamais comparé ce que je faisais avec l'école.
09:16Moi, je suis un saltimbanque.
09:18Le métier d'enseignant est très différent.
09:23J'en sais quelque chose.
09:24J'ai un fils qui est enseignant.
09:25Oui.
09:26Voilà.
09:26Et qui enseigne ses disciplines.
09:28La chimie.
09:29Physique-chimie.
09:29La physique-chimie.
09:30Voilà.
09:31Ah, intéressant.
09:32Alors, comment il s'y prend, lui ?
09:33Est-ce qu'il essaie de mettre un ton enjoué et émerveillé ?
09:35Non, je crois qu'il est, comme moi, passionné,
09:37mais il aurait fallu l'inviter.
09:39Il en aurait parlé aussi bien que moi.
09:40Vous avez dû en parler.
09:41Mais on en parle très souvent.
09:42On en a encore parlé hier.
09:45Voilà.
09:47À partir de l'instant où on aime une discipline,
09:51on va prendre du plaisir à transmettre.
09:57quand je vous disais que mon métier n'était pas celui d'enseignant,
10:02parce que moi, je n'ai pas d'élève devant moi.
10:07Un enseignant, je l'ai toujours dit, il monte sur scène plusieurs fois par jour.
10:11Et puis, devant lui, il n'a pas un public...
10:15Qui a choisi d'être là.
10:16Qui a choisi d'être là.
10:17C'est vrai.
10:17Voilà.
10:17Et qui a envie de l'écouter.
10:18Voilà.
10:19Donc, c'est très, très différent.
10:22Voilà.
10:22Le processus de séduction est un peu plus complexe.
10:26Il s'inspire de vous et de ce que vous faites.
10:29Je ne sais pas.
10:29Il se sert de...
10:30Je ne sais pas.
10:30Vous n'êtes pas en contact avec eux ?
10:31Pas du tout avec les enseignants ?
10:33Pas du tout avec l'éducation nationale ?
10:35Non, non.
10:35J'en rencontre, j'ai des amis qui sont enseignants.
10:38Je sais qu'ils utilisent tant mieux les émissions
10:41pour susciter l'intérêt autour d'un sujet.
10:47Soit avant, soit après.
10:49Et puis, il ne faut jamais oublier que...
10:52Eux font des sciences avec des formules.
10:57Moi, je raconte les sciences avec des mots.
11:00C'est très différent.
11:01C'est toute la différence.
11:02Dans le classement PISA, qui évalue chaque année
11:04le niveau des élèves des pays de l'OCDE,
11:06la France se classe 23e en mathématiques,
11:0828e en lecture, 26e en sciences
11:11sur les 85 pays participants.
11:14Chute historique depuis 2006,
11:15avec quand même une légère amélioration depuis 2024.
11:19Qu'est-ce que vous inspirent ces résultats ?
11:21Ça vous inquiète, ça vous choque, ça ne vous étonne pas ?
11:23Vous qui voyez le verre à moitié plein,
11:25est-ce que quand même vous avez envie de voir ?
11:26Je trouve ça très dommage, en fait.
11:30Je trouve ça très dommage parce que
11:32ces disciplines sont tellement épanouissantes
11:36qu'on passe à côté de quelque chose.
11:40Tout à l'heure, vous me demandiez comment je m'y prenais.
11:43Je crois que ce qui me motive surtout,
11:44c'est de me dire,
11:46j'ai appris tel truc, je sais comment ça marche.
11:47J'ai envie que tout le monde le sache.
11:52J'ai envie que tout le monde le sache
11:53parce que je sais qu'en ayant appris ça, ça, ça et ça,
11:59eh bien, ça m'a permis de me construire.
12:02Et si moi, ça m'a permis de me construire,
12:05ça doit permettre aux autres de se construire également.
12:09Donc c'est un grand gâchis.
12:10Je trouve que c'est extrêmement dommage
12:12parce que c'est tellement, je vous promets,
12:14c'est tellement réjouissant, épanouissant
12:17de comprendre comment les plaques tectoniques se déplacent,
12:25de comprendre comment ce tapis roulant sous nos pieds
12:32provoque ces déplacements.
12:33Là, on parle de géologie,
12:35mais je suis devenu un passionné de géologie
12:40et de volcanologie,
12:40mais comprendre ce qui se passe
12:42dans n'importe quelle feuille d'un arbre,
12:46comprendre ce processus de la photosynthèse
12:49qui se déroule tous les jours,
12:51sous nos yeux, à chaque seconde,
12:54et s'arrêter un instant sur une feuille
12:56et se dire, à l'instant où je suis en train de parler,
12:58il y a une usine chimique qui fonctionne.
13:04C'est merveilleux,
13:05comprendre que la lumière va mettre 8 minutes
13:08depuis le soleil pour arriver jusqu'à nous,
13:10ça et bien d'autres choses.
13:12Comprendre pourquoi l'or ne s'oxyde pas
13:15parce qu'entre la molécule d'oxygène et l'or,
13:19il n'y a pas de combinaison possible.
13:21Mais toutes ces choses-là,
13:23alors, encore une fois, je vous dis,
13:25je le raconte avec des mots,
13:27ensuite derrière, il y a des formules,
13:28mais se priver de ce savoir,
13:31je trouve ça extrêmement dommage.
13:33– Je me suis promenée sur votre page Instagram
13:35et on y trouve vraiment des thèmes extrêmement variés,
13:38ça va de comment reconnaître un frelon asiatique,
13:40comment calculer l'âge d'un dinosaure,
13:42pourquoi la mer est-elle salée,
13:44j'ai fait pareil sur votre page YouTube,
13:45Big One, le super séisme qui va détruire les États-Unis,
13:48le jour où un avion passa sous l'arc de triomphe,
13:51est-ce que tout peut être vulgarisé ?
13:54Où est-ce qu'il vous est arrivé de buter sur certains sujets,
13:57de vous dire, celui-là, je n'y arriverai pas,
13:58je n'y arriverai pas à le faire comprendre ?
14:00– Alors, je ne me dis jamais, je n'y arriverai pas,
14:02je me dis, pour le moment, je n'y arrive pas.
14:04– Ah d'accord.
14:05– Voilà, mais je ne désespère pas,
14:07il y a des sujets qui sont beaucoup plus complexes.
14:11Expliquer la physique quantique,
14:12c'est pas simple.
14:16Voilà, donc, et puis après,
14:18tout dépend le temps que nous avons pour expliquer les choses.
14:21on n'explique pas un phénomène avec justesse
14:27si on n'a que 30 secondes à sa disposition.
14:32Donc, voilà, il faut savoir aussi à qui je m'adresse,
14:36combien j'ai de temps pour le faire,
14:38et quel est mon niveau aussi d'expertise.
14:42Très souvent, on me sollicite pour aller parler de tel ou tel thème.
14:48– Et vous ne vous sentez pas légitime ?
14:49– Non, je le réponds, je ne suis pas expert de la question.
14:53Oui, j'ai traité ce sujet, mais je ne suis pas un expert.
14:56Moi, je reste un passeur, un trait d'union
15:00entre ceux qui savent et ceux qui ont envie de savoir.
15:02– C'est en 2020 que vous avez commencé à investir les réseaux sociaux.
15:06Lorsque vous avez passé votre premier million d'abonnés sur YouTube,
15:09vous avez dit ceci,
15:10quand j'écris des sujets et que je tourne des vidéos,
15:12je le fais vraiment dans l'esprit YouTube.
15:14mais si je suis amenée à faire le même sujet pour la télévision,
15:18je ne le traiterai pas de la même manière.
15:20Quelle est la différence ?
15:21Pour les réseaux, il faut…
15:22Justement, vous parliez du temps, peut-être que c'est ça la différence.
15:25– Il y a le temps, c'est très subtil.
15:28Quand vous êtes sur les réseaux,
15:32celui ou celle qui vous regarde a choisi d'aller vous regarder.
15:38– D'accord.
15:39– Donc, vous entrez plus directement dans le sujet.
15:46À la télévision, on ne choisit pas de la même manière d'aller vers un programme.
15:53C'est-à-dire qu'on y va, mais on peut basculer sur le monde.
15:57Donc, il y a…
15:58– On subit davantage, vous voulez dire ?
16:00– Peut-être, peut-être.
16:02Mais l'entrée en matière sera différente.
16:05On va aller chercher le public et…
16:10– C'est plus exigeant, du coup ?
16:11– Non, ce sont deux formes d'exigences différentes.
16:14– D'accord.
16:15– Parce que, quand j'ai commencé sur les réseaux,
16:18j'écrivais un petit peu comme j'écris en télévision.
16:21– Eh oui.
16:22– Il faut savoir se remettre en question
16:24et s'entourer de gens qui savent faire.
16:26Ça, c'est très important.
16:28Et donc, aussi, savoir entendre
16:33qu'on ne fait pas bien et qu'il faut se corriger.
16:37Et donc, moi, à plus de 50 ans,
16:40j'ai laissé des personnes qui en avaient 30 me dire
16:44« C'est pas comme ça qu'il faut faire.
16:46Il faut faire comme ça. »
16:47Voilà, donc…
16:49– Et la remise en question n'a pas été trop difficile ?
16:51– Non, du tout.
16:52Du tout, du tout.
16:53Parce que…
16:55Alors, parfois, on se dit « Attends, non, quand même pas. »
16:57– Eh oui, il faut qu'on équilibre, quand même.
16:59Ce que vous savez déjà, il y a une expérience.
17:00– C'est ce dialogue qui est enrichissant pour tout le monde.
17:03– Jeannie Gourmeau, c'est l'un de vos grands paradoxes.
17:07Tout le monde vous appelle par votre prénom.
17:09Vous faites presque partie de la famille
17:11dans de nombreux foyers français,
17:12mais personne ne vous connaît vraiment.
17:14Moi, j'ai un petit peu creusé.
17:16Vous êtes née et vous avez grandi en Vendée.
17:19Des souvenirs d'enfance, j'en ai des tonnes, dites-vous.
17:22On habitait dans un endroit au nom rigolo,
17:24la petite salade.
17:25En Vendée, dans les années 70, vous continuez,
17:29on était loin de tout, c'était rural.
17:30J'avais le sentiment que Paris était très loin,
17:32presque inaccessible.
17:34Est-ce que ça a été un moteur, justement, d'être isolé,
17:37d'avoir envie d'aller chercher cette société inaccessible,
17:40ce monde inaccessible, peut-être le petit milieu parisien,
17:43la frénésie parisienne, le monde médiatique ?
17:46Complètement, complètement.
17:49Moi, j'ouvrais, je regardais ce monde avec de grands yeux
17:56et j'avais très, très envie de venir à Paris faire mes études
18:04et pourquoi pas travailler, faire ce métier de journaliste
18:08que j'ai envie de faire très, très tôt,
18:11dès l'âge de 12 ans.
18:13Donc, oui, ça...
18:16Est-ce que...
18:17Ça, incontestablement, je pense que ça a joué un rôle
18:20parce que j'avais très, très envie.
18:24Donc, en même temps,
18:26en même temps, j'aimais beaucoup aussi
18:29ce milieu dans lequel je vivais.
18:34Mais j'ai toujours aimé,
18:36mais je parle de milieu géographique,
18:40j'ai toujours aimé les extrêmes.
18:42Donc, mais je parle bien de milieu géographique.
18:45– D'accord.
18:45– Voilà.
18:47Et donc, voilà, je trouve qu'il y a les deux faces
18:52d'une même pièce qui sont intéressantes, là.
18:55Je peux m'enthousiasmer dans les rues
19:02de n'importe quelle grande ville du monde
19:03parce que cette ville a une histoire,
19:06parce que, voilà, il y a là aussi plein de choses à expliquer.
19:10Mais dans l'endroit le plus désert du monde,
19:13je vais avoir le même enthousiasme.
19:16Donc, voilà, j'avais envie de cette rupture.
19:22– Et alors, c'est intéressant, vous l'avez dit,
19:23effectivement, le journalisme arrive assez vite
19:26dans vos envies d'adolescents, 12, 13 ans.
19:29Je crois que vous étiez plus étirée par le journalisme
19:31que par les sciences, d'ailleurs.
19:32Et vous avez même passé un bac littéraire.
19:33– Oui, tout à fait.
19:34– Et vous dites, j'aimais raconter des histoires et écrire.
19:37Vous aimiez beaucoup la lecture.
19:39Et finalement, c'est peut-être ce qui fait le sel
19:41et l'originalité aussi de votre façon de donner,
19:44de passer, de transmettre le savoir,
19:46c'est que vous racontez des histoires.
19:48– Oui, parce que j'ai eu envie de raconter la science
19:51comme on raconte autre chose.
19:52– Je vous parlais de chimie et de théâtre tout à l'heure.
19:54– Oui.
19:55– Je crois que ça illustre très, très bien
19:59ce que j'ai eu envie de faire.
20:02Et quand j'ai commencé à m'intéresser
20:05au sujet scientifique,
20:09j'ai tout de suite eu envie
20:10de les raconter de cette manière.
20:13d'en faire une matière attrayante,
20:20quelque chose de chaud et non pas de froid.
20:23Mais c'est une époque aussi.
20:24Parce que moi, j'ai commencé à faire des sujets de science
20:28à une époque où il était encore bienvenu
20:33d'utiliser les termes les plus abscons
20:36pour parler de science.
20:38Moi, j'ai le sentiment que lorsque ma grand-mère
20:41regardait la télévision, plus c'était compliqué,
20:44plus elle avait l'impression que le scientifique était compétent.
20:46– Ah oui, bien sûr.
20:47– Et pendant très, très longtemps,
20:49cette image est restée.
20:53Et on a eu la chance avec Fred,
20:56quand on a commencé, c'est pas sorcier,
20:58d'arriver à une période charnière
21:01où il fallait dépoussiérer tout cela
21:03et où on nous autorisait à le faire différemment.
21:09– Il y a aussi un élément de votre enfance
21:10que vous avez confié récemment à la télévision
21:12et que je trouve intéressant pour comprendre votre chemin.
21:15Vous avez eu un accident très grave à l'âge de 3 ans
21:17et vous avez été trépané,
21:18c'est-à-dire qu'on vous a ouvert le crâne
21:20et vous avez déclaré ceci,
21:21« Pendant très longtemps, ma maman me demandait
21:23de faire attention à ma tête.
21:25Si je prenais le moindre coup dans la tête,
21:27j'avais des douleurs terribles.
21:28Faire attention à sa tête.
21:31Finalement, est-ce que ce n'est pas aussi
21:32ce que vous faites en vous cultivant comme ça,
21:35en vous abreuvant de savoir
21:36et en enseignant, en transmettant le savoir aux autres,
21:39une tête bien faite pour tout le monde ?
21:42– Oui, alors, ça a probablement joué un rôle important.
21:49Quand j'étais enfant, ça m'a probablement
21:52écarté de jeux peut-être un peu violents
21:55et ça m'a peut-être amené à passer plus de temps
22:01sur des activités, on va dire,
22:05entre guillemets, studieuses.
22:07J'ai peut-être passé plus de temps dans tout l'univers
22:10qui a construit des cabanes ou autres,
22:13à regret, probablement, à cette époque.
22:15Et peut-être aussi que mon engouement pour la ville
22:20dont je vous parlais tout à l'heure,
22:22tout cela est peut-être lié.
22:23Je n'ai pas fait de psychanalyse,
22:24je n'ai pas envie d'en faire,
22:25mais peut-être que tout cela est lié.
22:28– À la lueur de celui…
22:28– Mais je me suis bien rattrapé depuis,
22:30sur les activités casse-cou.
22:31– C'est vrai ?
22:32– Oui, oui.
22:32– Et à la lueur de celui que vous êtes aujourd'hui,
22:34quel conseil donneriez-vous au petit garçon que vous étiez ?
22:37Qu'est-ce que vous lui diriez
22:37avant qu'il ne se lance dans la vie ?
22:40– Ben, écoute-toi.
22:45Je me suis écouté.
22:46Donc, je ne lui donnerai pas plus de conseils.
22:49Peut-être même, n'hésite pas à t'écouter.
22:55Peut-être que parfois, j'ai hésité à m'écouter,
22:57mais voilà, écoute-toi, va vers…
23:01Et c'est souvent ce que je dis aux jeunes qui me posent la question,
23:07les filles ou les garçons qui cherchent à s'orienter.
23:10« Fais quelque chose que tu aimes ».
23:16– J'ai des photos à vous proposer.
23:19Vous connaissez l'émission, alors vous connaissez le rituel.
23:23Il s'agit de Michel Devoret, prix Nobel de physique 2025,
23:27on en a moins parlé que l'autre,
23:30pour ses recherches et ses découvertes autour de, je cite,
23:32« L'effet tunnel quantique macroscopique
23:35et la quantification de l'énergie dans un circuit électrique ».
23:40Vous nous expliquez ?
23:41– Non, je ne peux pas vous expliquer,
23:43ça fait justement partie des choses
23:46qui sont extrêmement complexes en physique quantique.
23:51Alors, c'est marrant parce que l'autre jour,
23:54j'ai noté ça, mais il faudrait que je le retrouve,
23:57parce que j'avais trouvé une forme…
24:01Ça va peut-être me revenir,
24:03parce que je l'écoutais et je l'ai écouté
24:05dans un entretien avec Alain Aspect,
24:08et en les écoutant, je me suis dit,
24:11mais oui, c'est comme ça qu'on pourrait expliquer l'effet tunnel.
24:14Ça ne me revient pas,
24:15mais si ça me revient avant la fin de l'émission…
24:17– D'accord, vous me le dites.
24:19– Je vous le dis.
24:20– En tout cas, ça rend fière, cette excellence française.
24:22On voit qu'on a d'excellents…
24:24– Vous voyez que c'est assez paradoxal,
24:26parce que Gilles De Gênes, Alain Aspect…
24:34– Michel De Voreille.
24:34– Michel De Voreille, voilà.
24:37Voilà, on est dans l'excellence,
24:39et paradoxalement, le niveau de l'enseignement…
24:45– Non, c'est le niveau des élèves, en tout cas.
24:47– Le niveau des élèves a considérablement baissé.
24:51Donc, voilà, c'est là où il y a…
24:55Je vous dis, je trouve ça dommage.
24:59J'ai du mal à comprendre, et je trouve ça dommage.
25:01– Une deuxième photo, il s'agit de Françoise Combe,
25:04astrophysicienne, nouvelle présidente de l'Académie des sciences,
25:07très engagée pour les femmes dans la science.
25:08Elle déplore le nombre encore insuffisant de femmes
25:11dans la recherche scientifique.
25:12Quand elle y est entrée en 2004, il y avait seulement 6% de femmes.
25:15Aujourd'hui, on est à 20%.
25:16C'est un vrai sujet, ça, les féminations.
25:19C'est difficile de féminiser cet univers.
25:21– On en parle très, très souvent.
25:24Mais alors, il faut le féminiser dès le départ.
25:28C'est-à-dire qu'il faut féminiser toutes les professions
25:34qui sont liées à la science,
25:37mais dès les postes de technicienne, ingénieure.
25:41Et ça commence déjà là.
25:46– J'ai une dernière question qui est en lien avec le décor qui nous entoure.
25:50Nous sommes entourés de 4 statues qui représentent chacune une vertu.
25:53Il y a la sagesse, la prudence, la justice et l'éloquence.
25:57Est-ce qu'il y a une de ces vertus qui vous parle particulièrement ?
26:00– Il y en a plusieurs.
26:02– Alors, celle qui…
26:03– L'éloquence.
26:04– Ah, c'est l'éloquence que vous avez envie de choisir ?
26:06– La première, la première qui me vient.
26:08– Oui, parce qu'on a besoin des mots pour échanger,
26:17et des mots justes.
26:20On parle d'éloquence, on arrive à la justice.
26:24Les mots sont la traduction de notre pensée.
26:29Les mots sont au cœur de ma vie.
26:33Je passe mon temps à choisir le mot qui correspond à ce que je veux dire.
26:42– Et au plus près de la réalité.
26:43– Et au plus près de la réalité.
26:44– Merci, J'aime et Guamot.
26:45Ce sera l'éloquence, alors, votre mot.
26:46Merci d'avoir été notre invité.
26:48Merci à vous de nous avoir suivis, comme chaque semaine,
26:50dans Un monde, un regard, émission à retrouver,
26:52en replay sur publicsena.fr et en podcast.
26:55À très vite, merci beaucoup.
26:56– Salut !
27:08– crest de la vie.
27:13– Sous-titrage ST' 501
27:14C'est parti !
27:21– À très vite !
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0:21
Rayalix
il y a 1 semaine