- il y a 2 mois
3400 milliards d'euros de dette publique, un déficit public parmi les plus élevés d'Europe : la France s'endette désormais plus cher que l'Italie, considéré pendant longtemps comme le vilain petit canard des finances publiques européennes. Une situation qui commence à inquiéter les créanciers de la France, dont plus de la moitié sont des investisseurs étrangers. Sommes-nous collectivement en surendettement, comme l'a affirmé François Bayrou ? Une crise financière nous menace-t-elle ? Comment reprendre le contrôle de notre destin financier ? Faut-il augmenter les impôts des plus fortunés? Quelles dépenses publiques doivent être freinées ou réduites? Les Français ont-ils conscience de la détérioration de nos comptes publics ? Réponse avec notre invité spécial, Pierre Moscovici, le Président de la Cour des Comptes Année de Production :
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00:00Pourvu que ça dure, l'émission qui rend l'éco-responsable avec Arkema, matériaux innovants pour un monde plus durable.
00:30Bonjour, nouveau numéro de Pourvu que ça dure, l'émission qui rend l'éco-responsable sur Public Sénat.
00:46Aujourd'hui, on vous parle d'un sujet qui nous concerne tous, puisqu'il s'agit de l'argent de tous les Français.
00:50Et là, les chiffres sont assez têtus et formels.
00:53Nos comptes publics sont nettement dégradés et la dette de la France a atteint des proportions, il faut le dire, qui inquiètent.
00:58Alors, sommes-nous collectivement en sur-endettement ? Une crise financière nous menace-t-elle ?
01:03Comment reprendre le contrôle de notre destin financier ? Réponse avec notre invité spécial, le président de la Cour des comptes.
01:10Bonjour, Pierre Moscovici.
01:11Bonjour.
01:11Merci d'être avec nous sur Public Sénat.
01:13Alors, sans vouloir évidemment dramatiser la situation, loin de moi, cette idée, la situation budgétaire et financière de la France,
01:20objectivement, est-ce qu'elle est vraiment grave ? Est-ce qu'il y a un danger immédiat, imminent, qui pèse sur la France et qui nous menace ?
01:26Je vais essayer d'être un peu circonstancié, si vous le permettez.
01:30D'abord, la situation est effectivement préoccupante parce qu'elle se dégrade fortement.
01:35Nous avons aujourd'hui un déficit qui est le plus élevé de la zone euro, 5,8% du PIB, j'espère.
01:41Je crois que c'est possible qu'il sera ramené à 5,4% à la fin de l'année.
01:44C'est beaucoup plus à la fois que les 3% auxquels nous nous sommes engagés,
01:48beaucoup plus que la moyenne de la zone euro qui est très proche, 3%.
01:50Et c'est beaucoup plus que tout le monde, en fait.
01:52C'est beaucoup plus que l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne, le Portugal, les autres grands pays de la zone euro.
01:59Et même les petits.
02:00Il n'y a qu'un seul pays en Europe qui est dans une situation plus difficile que l'autre,
02:03c'est la Roumanie, qui n'est pas un membre de la zone euro.
02:05Donc, premier point, sur le déficit, nous ne sommes pas bons.
02:07Nous ne sommes pas bons non plus sur la dette.
02:08Quand on se compare aux autres ?
02:10Il faut toujours se comparer aux autres.
02:11Dans une union monétaire, c'est une sorte de règlement de copropriété.
02:16Dans la copropriété, on doit respecter les règles qui sont fixées par les copropriétaires.
02:20Et si on ne le fait pas, on a quand même une espèce de torsion, comme ça,
02:24entre nos engagements et nos capacités.
02:27Deuxième chose, c'est la dette.
02:27Donc, on est un mauvais élève du club.
02:30Je ne suis pas en train de donner des notes, mais j'essaie de décrire la situation.
02:33La dette publique.
02:34La dette publique, elle est de 3 400 milliards d'euros.
02:37Elle file allègrement vers les 3 500.
02:38Elle représente 113% du PIB.
02:42C'est la troisième en termes de PIB.
02:44C'est la première en volume de l'Europe.
02:47Et c'est la troisième en termes de pourcentage du PIB derrière la Grèce.
02:51À peu près 145.
02:52Et l'Italie, 135.
02:53Bon.
02:54Ce n'est pas le podium dont on rêve pour la France.
02:56Troisième chiffre, car je ne veux pas accabler tout le monde de chiffres,
03:00c'est le service de la dette.
03:02C'est-à-dire ce que nous remboursons chaque année.
03:04Et ça, c'est peut-être le principal.
03:05En 2021, c'était un peu moins de 25 milliards d'euros.
03:09L'équivalent du budget du logement.
03:11Cette année, ça va être 63 milliards d'euros.
03:13C'est l'équivalent, et même un peu plus, du budget de la défense.
03:16Il est possible que l'an prochain, et sinon ce sera l'an d'après,
03:19on dépasse les 75 milliards d'euros, c'est-à-dire le budget de l'éducation nationale.
03:23C'est-à-dire que la charge de la dette…
03:24Et ça fait boule de neige.
03:26On ira allègrement vers les 100 milliards d'euros assez rapidement.
03:28Et j'allais vous donner cette projection.
03:30D'après les chiffres de la Cour des comptes,
03:32si rien n'est fait, si on n'est pas sérieux par rapport à notre dette,
03:35on serait à plus de 100 milliards d'euros et plus de 120% du PIB en 2029.
03:40Voilà pourquoi d'ailleurs ce chiffre de 3% en 2029 n'est pas fictif.
03:44C'est le moment où on peut enfin stabiliser la dette.
03:49Ce qui veut dire que de toute façon, la dette va continuer d'augmenter.
03:51Qu'est-ce que j'en déduis ?
03:52Pour ça, je dis préoccupant, parce qu'au fond,
03:55vous êtes déjà un peu étranglé par cette charge de la dette.
03:57Si vous passez votre temps à rembourser, vous ne pouvez pas investir.
04:01Si vous n'avez pas un prêt pour votre logement,
04:03vous n'allez pas acheter une belle bagnole, parce que vous n'avez plus d'argent.
04:06Vous n'allez pas acheter une belle télé, vous n'avez plus d'argent.
04:07Vous n'allez pas payer des belles vacances aux enfants.
04:10Et donc, si vous voulez, c'est un peu ça la comparaison.
04:14Premier point.
04:15Deuxième point, est-ce que nous sommes emmenacés de crise financière ?
04:18Je veux être plus rassurant, là.
04:20Je ne le crois pas.
04:21Et pour quelle raison, objectif ?
04:23Parce que nous sommes un bon pays.
04:25Autrement dit, nous avons un marché de la dette qui est liquide.
04:30Nous avons une signature qui reste convenable.
04:32Nous avons des impôts qui rentrent bien.
04:34une bonne administration fiscale.
04:35Nous gérons bien notre dette avec l'agence France Trésor.
04:38Et globalement, on nous fait confiance.
04:40Notre notation, même si diminuée,
04:44notre notation est supérieure à celle de pays
04:47dont pourtant les taux d'intérêt sont plus faibles,
04:49comme l'Espagne et l'Italie.
04:51Qu'est-ce que j'en déduis ?
04:52C'est que la France est perçue encore comme un bon risque.
04:55Mais un bon risque qui augmente.
04:57C'est ça, le problème.
04:58Et le problème, ce n'est pas d'avoir le FMI à Paris.
05:01Ça n'arrivera pas.
05:02Ce n'est pas d'avoir des sanctions de la Commission européenne.
05:04Elle n'a pas envie.
05:06Le problème, c'est d'avoir une dette qui coûte de plus en plus cher,
05:09qui augmente de plus en plus cher.
05:10Et c'est ce que vous appelez la boule de neige.
05:12La boule de neige, elle est déjà sur la pente.
05:14Le jour où elle grossit trop,
05:16à ce moment-là, les coûts explosent.
05:19Les spreads, c'est-à-dire les écarts de taux
05:20avec les différents pays, continuent de s'agroître.
05:23Et à ce moment-là, ça provoque,
05:24je poursuis la métaphore de la boule de neige,
05:27une avalanche.
05:28Et sous une avalanche, on peut être écrasé.
05:29On n'y est pas.
05:31On n'en prend pas le chemin.
05:32Mais enfin, quand même...
05:33On en prend la direction sans en prendre le chemin.
05:35Moi, je dirais une autre métaphore,
05:38c'est le nœud coulant.
05:39Petit à petit, nous sommes étranglés par cette...
05:41Ce n'est pas l'asphyxie, mais c'est le nœud coulant qui...
05:44Ça nous empêche, en réalité, d'agir.
05:46Nous sommes un pays qui, comme tous les pays d'Occident,
05:50et en particulier d'Europe,
05:51a des besoins massifs d'investissement.
05:52Dans l'éducation, le numérique, la transition énergétique...
05:56Absolument.
05:56L'écologie, la lutte contre le chauffement climatique qui va avec,
06:01la défense nationale, dans un contexte de menaces.
06:04Et comment voulez-vous investir quand vous êtes très endetté ?
06:07Sur-endetté, je ne sais pas.
06:09Ça veut dire, sur-endettement, c'est une définition précise
06:12dans la législation française.
06:13Difficile de dire, la France est sur-endettée ?
06:15La France est beaucoup trop endettée.
06:17C'est la formule que je disais.
06:19Sur-endetté, vous savez, sur-endettement,
06:21il y a des procédures, on n'en est pas là.
06:23Mais trop endetté, beaucoup trop endetté,
06:26et avec une dynamique qui n'est pas bonne, oui.
06:28Il y a une question, quand même, qui me purlupine.
06:303 400 milliards d'euros,
06:32donc la dette publique française, Pierre Moscovici,
06:35qui sont, pardon, sans pointer du doigt,
06:37mais qui sont les responsables de cette dette
06:39qui n'a jamais cessé d'enfler ?
06:40J'ai regardé, j'ai préparé, j'ai regardé les chiffres.
06:43Sous Nicolas Sarkozy, la dette a gonflé de 600 milliards d'euros.
06:46400 milliards sous François Hollande,
06:47et plus de 1 000 milliards sous Emmanuel Macron.
06:50Qui sont, pardon, les responsables ?
06:51Qui nous a mis dans ce pétrin et à quoi a servi l'argent ?
06:55Alors, l'argent, d'abord...
06:57Il y a eu les crises Covid, c'est vrai.
06:58Les crises Covid, les gilets jaunes.
07:00La guerre en Ukraine, la crise énergétique.
07:01La crise énergétique, bon, tout ça a fait en sorte
07:04que la dette publique gonfle un peu partout en Europe.
07:06À juste titre.
07:07Alors, je vais corriger.
07:10La crise Covid, pas de photo.
07:12Nous avons vécu une période totalement surréaliste de science-fiction,
07:16où nos vies étaient menacées, où nous avons été confinés chez nous,
07:19où le sort des entreprises était précaire,
07:22et où le système de protection sociale était sous tension.
07:25Dans ces cas-là, ce qu'Emmanuel Macron a appelé le quoi qu'il en coûte
07:28est assez justifié.
07:29On commence par agir, et puis après on fait les comptes.
07:32Le bouclier énergétique, le bouclier inflation,
07:35je suis la Cour des Comtés.
07:37Qui a coûté 40 milliards de mémoire, j'ai pu ça en tête.
07:39Voilà, beaucoup plus sceptique.
07:40D'abord, est-ce que c'est vraiment à l'État de prendre en charge l'inflation ?
07:44Et ensuite, où...
07:45Pour tout le monde, en plus.
07:46Oui, où était l'argent ?
07:47Probablement dans les poches des énergéticiens,
07:50beaucoup plus que protégeant les Français.
07:51Et in fine, l'inflation, on l'a eu quand même.
07:53Et puis après, s'est produit une période un peu plus mystérieuse, j'avoue,
07:56où les finances publiques se sont dégradées, sans crise.
08:00Il n'y a pas d'inflation.
08:01Il n'y en a plus.
08:02Il n'y a pas de choc énergétique.
08:04On est plutôt sur des prix relativement bas.
08:06La guerre en Ukraine n'a pas fondamentalement évolué.
08:10Le Covid est derrière nous, heureusement.
08:14Et donc, on a vu nos finances se dégrader,
08:17sans qu'on sache bien ce qui s'est passé.
08:19Comme si tout d'un coup, il y avait eu une sorte de lâcher prise,
08:22à la fois sur les recettes, qui ne sont plus rentrées,
08:24mais aussi sur les dépenses qu'on continuait de filer.
08:27Comme si on avait une espèce de politique du chèque.
08:30Un problème, un chèque.
08:32Et ça, ça fait que les années 2023-2024, je les ai qualifiées d'allées noires,
08:36parce qu'on n'a pas de prétexte, au fond.
08:39Le quoi qu'il en coûte, il est vraiment fini.
08:41Les plans antérieurs, ils ne pèsent plus sur les finances publiques.
08:44Et ça continue de gonfler sans que les Français le voient.
08:46Et puis, enfin, il y a quand même une utilisation de la dette.
08:49C'est les services publics.
08:50Nous sommes un pays qui a, c'est vrai, un niveau de dépense publique dans le pays,
08:53mais très élevé, 57%.
08:55Pourquoi ? Parce que, historiquement, nous avons un modèle social qui repose beaucoup sur l'État.
09:01L'État, chez nous, c'est l'assureur en dernier ressort.
09:03Certains diront que nous sommes dirigistes, d'autres que nous sommes un État social.
09:08En toute hypothèse, ce niveau de dépense publique, il est de 8 points supérieur à ce qu'il est.
09:12Et pour autant, il crée des insatisfactions.
09:15C'est vrai.
09:15Et ça, c'est le grand paradoxe.
09:16C'est tout le paradoxe.
09:16Et le paradoxe, j'appellerais le paradoxe de la dépense publique,
09:19je constate que plus on dépense dans nos services publics,
09:22plus l'insatisfaction dans les services publics monte.
09:25Ce qui veut dire qu'il y a un problème double.
09:27Il y a un problème de quantité de la dépense publique.
09:29Honnêtement, on faisait 53,5% avant la crise Covid.
09:33On fait 57% aujourd'hui.
09:34Les Français n'ont pas l'impression qu'on aurait ajouté une couche de services publics efficaces.
09:39Et vous savez, quand on paye et qu'on a l'impression qu'on n'en a pas pour son argent,
09:42on n'est pas content.
09:43Et le deuxième problème, ce n'est pas un problème de quantité de dépense publique,
09:46c'est un problème de qualité de la dépense publique.
09:48Autrement dit, vraisemblablement.
09:50Tout le monde se focalise sur les économies, il y en a à faire, oui.
09:53Est-ce que c'est extrêmement douloureux ?
09:55Pas forcément.
09:56Pourquoi ?
09:57Parce qu'il y a quand même toute une série d'inefficacité, d'inefficience,
10:01d'incohérence dans la dépense publique qu'on peut limiter, je le crois,
10:05sans pour autant que l'assuré social, la sujettie, l'usager du service public soient lui frappés.
10:10On se dit que l'argent a été ou pas bien utilisé ces 20 dernières années,
10:14toute cette dette publique en plus.
10:15C'est difficile, Xavier Jacot, vous êtes un journaliste économique chevronné et de qualité.
10:21On n'est pas la question pour un champion, je ne peux pas dire oui, non.
10:24Disons qu'il n'a pas été entièrement bien utilisé.
10:26Et c'est ça la question de la qualité de la dépense publique.
10:29Il faut aller regarder sur chaque euro, pratiquement, parce qu'il est utile ou pas.
10:33Et je dirais la chose suivante.
10:35Si une dépense publique est insuffisante, parce qu'il faut investir,
10:39il faut l'augmenter.
10:41Si une dépense publique est inutile, il faut la supprimer.
10:44Si une dépense publique est inefficace, il faut transformer la politique publique qu'elle accompagne.
10:50Ce qui est sûr, c'est que la France n'est pas en récession.
10:52Et on se dit quand même que ce n'est pas normal, qu'en période de récession,
10:56on ait 5% en plus de déficit public.
10:58Et en même temps, on se dit, est-ce qu'on peut encore rester quelques années
11:01de plus avec 5% de déficit public ?
11:04La réponse est clairement non.
11:06Parce qu'à un moment donné, quand même, nous avons un, ces engagements pris à l'égard
11:09de l'Union européenne.
11:11Et il nous engage, il nous lie, on nous regarde.
11:16Et deuxièmement, plus nous le faisons, plus notre dette publique augmente.
11:20Plus notre dette publique augmente, plus la charge de la dette augmente,
11:23plus les taux d'intérêt augmentent.
11:24Et le nœud coulant, qu'on évoquait tout à l'heure, il finit quand même par vous étrangler.
11:29On ne peut plus agir, on est dans la puissance publique, on est dans l'incapacité.
11:33On dépend de plus en plus de nos créanciers.
11:35Et là, il y a une caractéristique de la dette publique française qui est ennuyeuse.
11:3955% de la dette publique française est détenue par des créanciers étrangers, internationaux.
11:45Si on se compare avec l'Italie, l'Italie a deux avantages sur nous.
11:49Elle a un inconvénient, cette dette est plus importante.
11:51Elle a deux avantages, même trois maintenant.
11:52Son déficit est plus faible.
11:53Elle a ce qu'on appelle un excédent primaire, c'est-à-dire avant la charge de la dette.
11:58Et troisièmement, justement, sa dette est dénue avant tout par des domestiques à 70%.
12:05Nous, 55% d'étrangers.
12:07Ce qui veut dire que le jour où notre note devient trop faible,
12:12certains n'ont pas le droit de nous prêter.
12:15D'autres disent, ok, c'est encore une bonne dette.
12:17On les fait payer plus cher, donc le papier français.
12:19C'est pour ça que je disais qu'on n'est pas du tout en risque de FMI, on n'est pas en crise.
12:22On trouvera preneur.
12:25Mais plus cher.
12:26Mais plus cher.
12:27Toujours plus cher.
12:27Et plus cher, toujours plus cher.
12:28C'est pour nous, au final, que les taux d'intérêt augmentent.
12:32Et si on se trouve, on est déclassés.
12:34Vous savez, il y a une chose qui me frappe, j'ai été mis des finances de 2012 à 2014,
12:37et le commissaire européen de 2014 à 2019, en charge des finances.
12:40J'ai quitté la Commission européenne pour rejoindre la Cour des comptes en décembre 2019.
12:44C'est vieux.
12:45Et pas tant que ça, quand même.
12:46Ça fait 5 ans, ça fait pas 15 ans.
12:49J'ai géré, pour la Commission européenne, la crise grecque.
12:52L'idée que nous, la France, nous aurions une dette publique qui est la troisième d'Europe.
12:59Que nous aurions plus de dettes que l'Espagne, l'Italie, le Portugal ou la Belgique.
13:04L'idée que nos taux d'intérêt seraient plus élevés que ceux de l'Espagne, du Portugal, de la Belgique,
13:10mais aussi de la Grèce.
13:11Et désormais de l'Italie.
13:12De la Grèce et de l'Italie, où nous sommes à touche-touche.
13:15Alors qu'il y avait 80 points de base, d'écart.
13:19Dans l'autre sens.
13:19Il y a un an, en notre faveur, au moment de la dissolution de l'Assemblée nationale.
13:24Pardon de prononcer ce mot.
13:26C'est un gros mot, mais c'est une réalité aussi.
13:28Ah ben, ça m'aurait paru bizarre, quoi.
13:30Ce qui veut dire qu'il s'est passé quelque chose, une forme de décrochage.
13:34Et on ne peut pas l'accepter, ce décrochage.
13:36Est-ce que c'est le problème numéro un de l'économie française
13:39que de réduire les déficits et de stabiliser la dette ?
13:42Il y a débat là-dessus.
13:43C'est un problème central.
13:44Vous savez, j'ai une longue vie politique.
13:48Vous étiez petit, je suis plus âgé que vous.
13:50Longue vie politique, longue vie de vos fonctionnaires.
13:53Ça me fait mal au cœur de le dire.
13:55Ici, à la Cour des comptes où nous sommes, j'y suis entré il y a 41 ans.
13:58Donc, c'est 41 ans d'expérience publique.
14:00Je n'ai jamais été dans le privé.
14:01J'ai toujours été dans le service public ou dans la politique
14:03qui est une ou une façon de servir le public.
14:06Et en plus, dans des responsabilités ministérielles pendant sept ans,
14:09commissaire européen, maintenant, premier président.
14:11J'ai appris une chose qui me paraît de bon sens, une seule.
14:15Je ne vois pas comment on fait de bonnes politiques publiques.
14:18L'éducation, le développement durable, l'innovation, la recherche,
14:22la solidarité clôture, la défense nationale.
14:25Comment pouvez-vous le faire si vous n'avez pas des finances publiques saines ?
14:27Pierre Menez-France, qui m'a cité François Bayrou, disait
14:31« Les comptes en désordre sont le signe des nations qui s'abandonnent ».
14:35Il a repris cette citation, je crois, dans son discours final.
14:37Moi, je l'utilise depuis longtemps et je le crois.
14:40Donc, est-ce que la dette publique est le principal problème de l'économie française ?
14:44Non.
14:44Pour les Français, non.
14:45Quand on leur pose la question, ils disent d'abord le système de santé,
14:48le pouvoir d'achat et l'inflation.
14:49C'est en étant conscient de la gravité de la situation.
14:52C'est leur vie.
14:54Les problèmes principaux, en vérité, c'est la compétitivité, c'est la productivité,
14:59c'est le vieillissement démographique.
15:01C'est la croissance, in fine.
15:02C'est lié.
15:03Mais c'est lié.
15:04Et tout ça fait que notre potentiel de croissance est faible.
15:08Il est à 1%.
15:08qu'on apprécie d'une certaine façon ou d'une autre la politique dite de l'offre.
15:13Le résultat, c'est que la France n'est pas transformée en tigre asiatique.
15:16Notre activité s'est un peu améliorée.
15:18Mais les fondamentaux ont besoin d'être durcis et renforcés.
15:22Donc ça, c'est des problèmes macroéconomiques et microéconomiques.
15:26Mais si on n'a pas les moyens de politique publique forte
15:30qui permettent justement de traiter toutes ces questions,
15:33qu'il s'agisse du vieillissement de la population,
15:35auquel il faut faire face, par des dépenses d'ailleurs abondantes,
15:37qu'il s'agisse de la productivité et de la compétitivité,
15:41qu'il s'agisse de soutenir notre appareil de défense,
15:45à la fois industriel et puis de défense nationale.
15:48Mais là, il faut des moyens.
15:51Ce que donne le budget, ce qu'indique la dette et le déficit,
15:54c'est une insuffisance de marge de manœuvre.
15:56Quand je dis reprendre le contrôle, ça veut dire quoi ?
16:00Reprendre la barre sur nos finances publiques,
16:03non pas pour imposer l'austérité aux Français,
16:05non pas parce que nous devons obéir à des chiffres,
16:08non pas parce qu'on craint je ne sais quelle mise sous tutelle,
16:11pour retrouver de la souveraineté,
16:14pour retrouver de la capacité d'agir,
16:16de la capacité à investir,
16:18pour être un grand pays, une grande économie.
16:20Sinon, encore une fois, je reprends cette métaphore du coulant,
16:23petit à petit, on s'étrangle,
16:25on n'a plus d'oxygène, on respire mal.
16:27Le jour où on aura une crise,
16:28il faudra bien qu'on ait des marges de manœuvre budgétaires.
16:30Oui, mais avant même la crise, on n'en a pas.
16:34Et la crise, au fond, vous savez,
16:35ce n'est pas la peine d'attendre la crise avec un grand C.
16:38Elle est là, la crise.
16:40Nous vivons dans un monde dangereux,
16:42où la guerre est là,
16:44nous vivons dans un monde compétitif,
16:45où des grandes puissances s'affrontent,
16:47la Chine, les États-Unis,
16:49où l'Europe doit affirmer sa place.
16:50Nous avons notre place dans ce monde.
16:52La crise, elle est démocratique chez nous,
16:54elle est politique, elle est financière.
16:57Économiquement, l'Europe est en train de décrocher.
16:59Donc, ce n'est pas la peine d'attendre la crise,
17:01au sein de la crise de 1929 ou de la crise Covid.
17:03Nous vivons dans un univers de crise, de polycrise.
17:06Et dans ce moment-là,
17:07nous avons besoin de politiques publiques fortes,
17:09surtout en France.
17:10Nous avons besoin, en plus,
17:12de finances publiques saines.
17:12Quand on pose la question aux Français
17:14qui ont conscience du caractère préoccupant
17:16de l'évolution des comptes publics,
17:17on leur demande s'il faut baisser les dépenses de santé.
17:20C'est non.
17:20S'il faut geler les prestations sociales,
17:22où les retraites, c'est non,
17:23on ne peut pas aller contre les Français.
17:25Mais je n'avais jamais parlé d'aller contre les Français.
17:26D'ailleurs, c'est pour ça que je disais
17:27que la crise est à la fois financière et politique,
17:29celle que nous traversons aujourd'hui.
17:30On le voit.
17:31J'ai parlé de la dissolution tout à l'heure.
17:34Je ne vais pas commenter la dissolution politiquement.
17:36Je vois que c'est un moment aussi
17:37qui était un petit moment de décrochage
17:39au plan financier et économique pour la France.
17:42Il faut faire attention à ça.
17:43Il y a une interaction entre le politique
17:45et l'économique et le financier.
17:46Ne serait-ce que parce que d'ailleurs,
17:47les marchés ou les créanciers s'attachent beaucoup
17:50à la question de l'instabilité politique.
17:52Donc, on est dans ce moment-là.
17:54Il faut arriver à accrocher ensemble
17:55les wagons du politique et les ballons de la finance.
17:5992% des Français estiment que l'État
18:01doit diminuer son train de vie
18:02afin de lutter contre le déficit budgétaire.
18:04Je n'ai pas répondu complètement à votre question.
18:06Parce que derrière ça,
18:07est-ce que les Français sont prêts ?
18:09Je pense que collectivement,
18:10les Français ont réalisé qu'ils étaient trop endettés.
18:12Oui.
18:12Quand je regarde les sondages,
18:13je vois que maintenant,
18:14ce n'est pas le premier, deuxième, troisième.
18:16C'est la quatrième priorité.
18:17C'est énorme.
18:19Il y a deux ans, c'était la 25e ou la 15e.
18:21Donc, il y a une prise de conscience.
18:22Après, ils n'en sont pas encore sur le plan individuel
18:24à se dire, moi, je dois contribuer.
18:27Et ils se demandent aussi que le Parc...
18:28Ils disent que 92% veulent que ce soit
18:30l'État qui diminue son train de vie, son HCSA.
18:33Est-ce qu'ils ont raison ?
18:34Est-ce que ça serait suffisant
18:35au vu de la taille du déficit ?
18:36C'est toujours nécessaire.
18:38Ce sera insuffisant.
18:40Il y a toujours,
18:40je reprends nos métaphores
18:42de la qualité de la dépense publique,
18:43il y a les économies à faire
18:44qui sont tout à fait considérables.
18:45Des dépenses inefficaces
18:47ou inefficiantes
18:48ou incohérentes.
18:50Si vous prenez la somme
18:51des rapports de la Cour des comptes
18:52que nous produisons
18:53pour être 200 chaque année,
18:54vous allez trouver des exemples partout.
18:56Un exemple de dépense publique
18:58qu'il faut,
18:59que l'on doit freiner ou baisser.
19:01Un exemple qui vraiment...
19:03Je ne veux pas donner comme ça,
19:04pointer du doigt sur tel ou tel.
19:05En fait, il y en a plein.
19:07On parle des agences publiques.
19:09On parle des politiques publiques.
19:10Il y a des agences publiques
19:11qui doivent être redimensionnées.
19:13Peut-être certaines supprimées,
19:14mais surtout redimensionnées.
19:14dans le domaine de la sécurité sociale,
19:18de l'assurance maladie, par exemple.
19:19Nous avons fait un rapport passionnant
19:20qui montre comment on peut économiser
19:22une vingtaine de milliards d'euros,
19:23enfin un milliard d'euros,
19:24en quatre ans.
19:25Comment ?
19:25En luttant contre la fraude
19:27à l'assurance maladie.
19:28Et ça, ce n'est pas être de droite,
19:29que de lutter contre la fraude.
19:30Les fraudeurs, en général,
19:31c'est ceux qui prescrivent trop,
19:32ou plutôt,
19:33c'est ceux qui agissent
19:34parce qu'on a trop prescrit.
19:35On peut...
19:36Enfin, les économies
19:36sur les transports médicaux.
19:38Voilà, vous êtes un...
19:40J'aime beaucoup passer mes vacances
19:42en Bretagne.
19:43Vous êtes un...
19:44un dialysé à Quiberon.
19:46Vous avez besoin
19:46d'aller faire votre dialyse quotidienne
19:48ou bi-hebdomadaire à Vannes.
19:51C'est normal que vous preniez un taxi.
19:53Vous vous cassez le bras.
19:55Non.
19:56Ce n'est pas normal.
19:57Donc, si vous voulez,
19:57encore, il y a des problèmes
19:58de prescription.
19:59On utilise en France
19:59à peu près 18%
20:01de médicaments génériques.
20:03Chez nos partenaires,
20:04c'est 58%.
20:05Si vous allez chez le pharmacien,
20:07vous voyez bien la différence de prix
20:08quand même entre un générique
20:09et un originel.
20:11Dans le fonctionnement même
20:12du système de santé,
20:14il y a beaucoup de choses
20:14à améliorer.
20:15Qu'est-ce que je veux dire par là ?
20:16Si je vous pense,
20:16cet exemple-là,
20:17qui pour le coup est massif,
20:19ça nous dit
20:19qu'on peut faire des économies
20:20très importantes
20:21sans qu'il y ait
20:22une quelconque perte
20:24de qualité du service public.
20:26Même, il s'améliore.
20:27Sans qu'il y ait
20:28quoi que ce soit
20:28qui coûte l'assuré sociale.
20:30Rien.
20:31S'il y a tant de rapports
20:31de la Cour des comptes,
20:32pourquoi est-ce qu'ils ne sont
20:33pas mis en oeuvre ?
20:34Il y en a beaucoup
20:34qui sont mis en oeuvre.
20:3575% sont mis en oeuvre.
20:36Mais j'avoue que,
20:37s'agissant des grands débats
20:39de finances publiques,
20:40on est très écoutés
20:41par les Français.
20:42Très écoutés.
20:43Je vois à quel point
20:44ce qu'on dit est entendu.
20:46Par les pouvoirs publics,
20:47un peu moins.
20:47Parce qu'il y a eu
20:48cette espèce d'incapacité
20:49à traiter cette question.
20:51Et pardon,
20:51parler des Français,
20:53pardon,
20:53j'ai ce sentiment, moi,
20:55mais c'est ma culture
20:57de haut fonctionnaire
20:58blanchisse ou arnois
20:59ou de politique responsable.
21:02C'est toujours d'en haut
21:03que l'exemple doit être donné
21:06et que le cap doit être tracé.
21:10Et donc, moi,
21:11je ne reproche jamais
21:12rien aux Français.
21:14Si quelque chose
21:14doit être reproché,
21:16c'est à ceux qui dirigent.
21:17Et j'en fais partie
21:18et j'en ai fait partie
21:18pendant longtemps.
21:19Est-ce qu'on peut dire
21:20qu'en France,
21:21les dépenses publiques dérivent ?
21:22On peut parler de dérive.
21:23Entends souvent ce mot.
21:25Dérives de la dépense publique.
21:27Dérives, non,
21:28mais il faut la contrôler.
21:30Elles ne sont pas maîtrisées,
21:30elles ne sont pas contrôlées.
21:32Ça dépend des années.
21:33Mais globalement,
21:34nous avons un niveau
21:35de dépense publique
21:35de 57% du PIB.
21:37C'était resté à 56.
21:39Alors, on remonte
21:40à 56,5.
21:41On sera à 56,8.
21:43L'an prochain,
21:44là où d'autres diminuent,
21:46on avait un tout petit peu baissé.
21:47Mais ça, vous savez,
21:48c'est ce qui se passe
21:48à chaque crise.
21:49À chaque crise,
21:49on a une sorte
21:50d'effet de cliquet.
21:50Ça augmente fortement.
21:52Ça va aller jusqu'à 59
21:53pour la crise Covid.
21:53Ensuite, ça baisse.
21:55Mais ça baisse
21:55à un niveau qui est toujours supérieur
21:56à ce qui se passait avant.
21:58Avant, la crise Covid,
21:59c'est 54.
22:00Je ne fixe pas de chiffre magique.
22:03Quand on pose la question française...
22:03Je pense qu'on peut faire mieux.
22:05Et par ailleurs,
22:05le vrai problème,
22:06je le redis,
22:07c'est qu'on n'a pas le sentiment
22:08que la dépense publique supplémentaire
22:10est toujours une dépense publique utile.
22:12Les Français,
22:14ils aiment la dépense publique
22:15au sens où ils aiment
22:15l'État protecteur.
22:17Ils aiment le service public.
22:18Je ne le reproche pas.
22:19Je suis moi-même très attaché.
22:21Pour qu'une dépense publique
22:22soit comprise,
22:24acceptée,
22:24acceptable,
22:25il faut qu'elle corresponde
22:26à un plus pour l'usager.
22:29Et le vrai problème aujourd'hui,
22:30c'est ce hiatus
22:30entre une dépense publique
22:32qui ne diminue pas
22:33ou qui augmente
22:34et les services publics
22:36qui ne suivent pas.
22:37Si les Français
22:37étaient en train de venir
22:38regardant le système éducatif
22:40ou bien leur hôpital magique,
22:44on peut dépenser plus.
22:45Mais ce n'est pas ça qui se passe.
22:46On dépense plus
22:47et ils ne sont pas contents.
22:47Les Français veulent aussi
22:48que ce soit les plus riches
22:49qui contribuent à l'effort.
22:50Est-ce que ce serait suffisant
22:51comme on fait
22:51pour ne pas effrayer
22:53les entrepreneurs potentiellement ?
22:55Vous me demandiez tout à l'heure
22:57si le train de vie de l'État suffisait.
22:59Non.
23:00Il faut faire ce qu'il faut
23:01sur le train de vie de l'État
23:02sans pour autant
23:02tomber dans la démagogie
23:03ou les boucs émissaires
23:05parce que c'est assez stupide.
23:07Ce n'est pas...
23:08J'entends dire parfois
23:09les politiques, etc.
23:10Enfin bon,
23:11le président Premier ministre
23:13avait confié une mission
23:14à un ancien député
23:15sur le train de vie de la politique.
23:17Mais les politiques
23:17ne sont pas mieux payées
23:18que les autres
23:19et pas plus payées
23:21qu'elles le sont
23:21dans d'autres pays.
23:22Parfois moins
23:23qu'elles le sont.
23:24Donc ailleurs.
23:26Donc si vous voulez,
23:26il ne faut pas trouver
23:27de boucs émissaires.
23:27il faut rechercher
23:28où sont
23:29les vraies sources d'économie.
23:30De la même façon,
23:31sur la fiscalité,
23:32quand j'étais mis
23:32en finance en 2013,
23:33j'avais prononcé une phrase
23:34que tout le monde
23:35n'avait pas appréciée,
23:36notamment de mes amis politiques
23:37de l'époque,
23:38qui était le ras-le-bol fiscal.
23:39Oui,
23:40j'ai déjà dit
23:41tous les chiffres
23:42sur l'économie française
23:43ou la finance publique.
23:43Il y en a un que je n'ai pas donné,
23:44c'est le taux de prélèvement obligatoire.
23:46On est à plus de 43%.
23:47La zone euro est un peu plus de 39%.
23:49Nous avons aussi le plus élevé.
23:50Ce qui veut dire que
23:50sans arrêt augmenter les impôts,
23:53ce n'est pas la solution.
23:54Je pense que quantitativement,
23:57c'est plutôt vers les économies en dépense
23:58qu'il faut se tourner
23:59que vers la fiscalité.
24:01Et comme président de la Cour des comptes,
24:03comme président du Haut Conseil des Finances publique,
24:05c'est ce que je dis toujours
24:06au gouvernement successif.
24:08Je leur dis attention,
24:09c'est toujours vers les économies
24:10qu'il faut se tourner.
24:11D'ailleurs,
24:11l'Union européenne nous demande
24:12avant tout de faire des économies.
24:14Ça ne veut pas dire
24:14qu'il faut exclure la fiscalité.
24:15Mais dans la proportion,
24:18je mettrai moi plus l'accent
24:19sur les économies en dépense,
24:2080 ans, 70-30.
24:23On n'est pas en train de toper.
24:26Il n'y a pas de ratio idéal.
24:27Non, il n'y a pas de ratio idéal.
24:28En tout cas,
24:29il faut que ce soit beaucoup plus
24:30sur les économies que sur la fiscalité.
24:31Qu'on ne fait pas en général en fait.
24:32Et la deuxième chose,
24:34c'est que oui,
24:35il n'est pas absurde
24:36dans un moment où on demande
24:37à tous les Français
24:38de mettre la main à la poche,
24:39à tous les Français
24:39de faire un effort.
24:40Parce que si on fait des économies
24:41de 40 milliards,
24:43je donne ce chiffre comme ça,
24:44comme une moyenne,
24:44on verra ce qui se passe
24:45au moment du PLF.
24:49Il faut que les plus riches
24:50contribuent aussi.
24:51Ce sentiment d'inégalité croissante,
24:54d'injustice,
24:56ce sentiment que certains
24:56sont préservés
24:57de l'effort qu'on demande à tous.
24:59Vous parlez des questions
24:59de pouvoir d'achat et autres.
25:01Certains n'ont pas de problème
25:01de pouvoir d'achat.
25:03D'autres en ont.
25:04Tout le monde en a plus ou moins,
25:05mais quand même certains
25:06n'en ont pas du tout en réalité.
25:08Et donc, par rapport à ça,
25:10oui, sans doute,
25:10faut-il une part de taxation
25:11de ce qu'on appelle
25:13les plus riches,
25:13les plus prospères,
25:14les plus fortunés de ce pays.
25:15Et j'ajoute une chose,
25:16parce que je me suis toujours
25:17interrogé là-dessus.
25:19Je comprends.
25:20Je ne suis pas, moi,
25:21riche du tout.
25:23Pas du tout.
25:24Mais je comprends
25:25que quelqu'un qui est riche
25:26dise,
25:27bon, attention,
25:28il ne faut pas supprimer mon impôt
25:30ou me taxer trop,
25:32sinon cette fortune sera délocalisée,
25:34l'herbe est plus verte ailleurs,
25:36etc.
25:36Je comprends.
25:38Mais je ne comprends pas,
25:39je me mets dans la peau
25:39de quelqu'un de très riche.
25:41Et tant que je sois immensément riche,
25:43qu'est-ce que ça me coûterait au fond
25:44de me dire
25:45je paye un peu pour mon pays ?
25:48La question, c'est le un peu.
25:51Si c'est la taxe Zuckmann,
25:52c'est plus la même histoire.
25:54Je ne vais pas me prononcer là-dessus.
25:56Un peu, c'est un peu.
25:57Si on vous dit un ou deux pour cent,
25:58c'est un peu, non ?
26:00La Cour des comptes a calculé,
26:02Pierre Moscovici,
26:02que l'effort nécessaire
26:03pour amener le déficit public
26:04sous 3% au niveau
26:06qui stabilise la dette en 2029
26:07est de 105 milliards.
26:11Je me dis,
26:11mais est-ce qu'on sait réduire
26:12d'autant le déficit public
26:14de 105 milliards
26:15sans provoquer une récession au passage ?
26:18Sachant qu'on a à peine 0,5, 0,7
26:20de croissance en France.
26:21C'est pour ça que je parle toujours.
26:22C'est mon axe
26:24de qualité de la dépense publique.
26:26Il faut essayer de faire en sorte
26:28de faire des économies
26:29qui n'affectent pas
26:31les moteurs de la croissance.
26:33C'est ce que propose
26:34de la Cour des comptes.
26:34En même temps,
26:35vous me dites que 75%
26:36de vos préconisations
26:37ont été appliquées.
26:39J'ai encore une fois,
26:41je le redis,
26:41pas sur, malheureusement,
26:42les grosses masses.
26:43Ah oui, d'accord.
26:45Les 25%,
26:45c'est comme la qualité.
26:47Nos 75%,
26:48c'est beaucoup en quantité.
26:50Sur la masse
26:52des dépenses publiques,
26:53malheureusement,
26:53c'est un peu moins.
26:54La meilleure manière
26:55de rembourser une dette,
26:56c'est d'aller chercher
26:56du chiffre d'affaires,
26:57c'est d'aller chercher
26:58de la croissance.
26:58C'est ce que nous dit
26:59Michel-Édouard Leclerc,
27:01qui rejette un peu
27:01d'ailleurs toute cette dramaturgie
27:02autour de la dette.
27:04Qu'est-ce qu'on lui répond ?
27:05Il a quand même raison
27:05dans le fond.
27:07Sauf que ça ne se décrète pas,
27:08la croissance.
27:09La croissance ne se décrète pas,
27:10puis malgré tout,
27:10elle a des fondamentaux.
27:11On les a évoqués tout à l'heure.
27:13Si notre économie
27:14est insuffisamment productive,
27:15si notre économie
27:16est insuffisamment compétitive,
27:18si nous avons trop peu d'actifs,
27:21si nous vieillissons,
27:23si par ailleurs,
27:24nous n'avons pas
27:25le quota d'innovation
27:26et de recherche suffisant,
27:28eh bien,
27:28nous ne pouvons pas
27:29produire une croissance
27:29très importante.
27:30Ce que je constate,
27:31moi,
27:31alors pour le coup,
27:32je ne suis pas un macroéconomiste,
27:34ce n'est pas à moi de le dire,
27:35il y en a qui sont meilleurs que moi,
27:36il y a des chefs d'entreprise aussi,
27:37je ne prétends pas
27:38que j'ai leur place,
27:39mais je constate
27:40que depuis des années,
27:41le potentiel de croissance
27:42de la France
27:43est 1% en moyenne.
27:45Un petit pourcent.
27:46Un petit pourcent.
27:46Et que cette année,
27:47vous disiez qu'on n'est pas en récession,
27:48on n'est pas en récession,
27:49mais on a une croissance
27:50qui devrait être,
27:51j'espère,
27:51autour de 0,7%.
27:52C'est le sujet du gouvernement.
27:53Pour l'instant,
27:53il n'y a pas de raison
27:54de le renier.
27:560,7%,
27:57c'est bien,
27:58c'est mieux que d'autres,
27:59c'est mieux que l'Allemagne,
28:00c'est mieux que l'Italie cette année,
28:01c'est beaucoup moins que certains,
28:03c'est trois fois moins que l'Espagne,
28:05c'est moins que le Portugal.
28:07Bon,
28:07et donc,
28:07si vous voulez,
28:08il faut chercher
28:09quels sont les moteurs
28:10d'une croissance
28:11qui nous correspond.
28:12Comment termine
28:13cet entretien,
28:14Pierre Moscovici,
28:14par une note d'espoir,
28:16un peu,
28:17voilà,
28:17peut être un peu positif,
28:19alors qu'on a dit,
28:19comme c'est vrai,
28:20la situation financière
28:21de la France
28:21est préoccupante ?
28:24Écoutez,
28:25d'abord,
28:25un,
28:26il ne faut pas
28:27surestimer cet effort.
28:28Il y a de pourcentage,
28:29ce que vous disiez
28:30sur la dette publique,
28:31ce n'est pas faux.
28:32Deux,
28:33on parle de 30
28:34ou 40 milliards d'euros,
28:36ce n'est pas non plus considérable,
28:37on regarde la masse
28:38de la dépense publique.
28:39On n'est pas en train
28:40d'aller vers une politique
28:41d'austérité,
28:42pas du tout.
28:42Il s'agit d'ajuster
28:44notre train de vie
28:45et de le faire
28:46de manière sérieuse,
28:47mais pas de manière drastique.
28:48Vous savez,
28:49sur ce thème austérité,
28:51si on faisait
28:5140 milliards d'euros
28:52de moins
28:53sur le budget,
28:54la dépense publique
28:55continuerait d'augmenter
28:56parce que c'est toujours
28:57calculé par rapport
28:58à la tendancie allemande.
28:59Il augmenterait de 20 milliards.
29:00Oui,
29:00donc ce n'est pas du tout
29:01de l'austérité.
29:03Sur l'austérité,
29:03je vais terminer
29:04sur cette formule
29:05qui est à la fois optimiste
29:06et puis mobilisatrice.
29:08Il n'y a pas d'austérité
29:09maintenant
29:10et il n'y aura pas d'austérité
29:11si nous faisons les efforts
29:12partagés,
29:14justes,
29:15efficaces.
29:16Maintenant.
29:16Maintenant.
29:17Je dis maintenant
29:18parce que si nous ne le faisons pas,
29:19dans quelques années,
29:21nous subirons l'austérité.
29:21Impossible de dater.
29:23Non,
29:24ce n'est pas pour demain.
29:25Mais l'austérité
29:26nous viendra de l'extérieur.
29:28Le jour où,
29:29pour le coup,
29:29le nez coulant
29:30a fini de nous étrangler,
29:31on devra passer à l'oxygène.
29:33Et c'est ce qui est pour le coup
29:34arrivé à certains pays.
29:36Je n'ai pas envie
29:36que la France
29:37devienne en quoi que ce soit.
29:39la Grèce,
29:41excluons-le,
29:41mais même le Portugal
29:42ou Chypre
29:44ou l'Irlande
29:44qui ont eu des programmes
29:45au début des années 2010.
29:47Évitons ça.
29:48Nous sommes la France.
29:49Nous avons les moyens
29:50de le faire.
29:51Nous sommes un grand pays.
29:52Il y a des réformes à faire.
29:54Ces réformes ne sont pas
29:54des réformes austéritaires,
29:56ce sont des réformes
29:56qui nous aident simplement
29:57à reprendre le bon chemin.
29:59Faisons-les.
29:59Allez,
30:00merci à vous,
30:01Pierre Moscovici,
30:01pour cet entretien exclusif.
30:03Le président de la Cour des comptes,
30:04merci.
30:05Merci à vous.
30:06Allez,
30:07c'est la fin de Proveux que c'est dur.
30:07l'émission qui rend l'éco-responsable
30:09pour Vux que ça dure.
30:10C'est aussi évidemment
30:11du replay sur Public Sénat.
30:13À très bientôt.
30:30Pour Vux que ça dure,
30:31l'émission qui rend l'éco-responsable
30:33avec Arkema,
30:34matériaux innovants
30:35pour un monde plus durable.
30:37Sous-titrage Société Radio-Canada
30:39Sous-titrage Société Radio-Canada
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