Michaël Fribourg, PDG de la Compagnie Chargeurs Invest, et Daniel Harari, PDG de Lectra, étaient les invités de Laure Closier dans French Tech, ce mardi 9 décembre. Ils sont revenus sur le "Palmarès Choiseul Conquérants" sur les ETI les plus agiles et solides du pays, dans Good Morning Business. Retrouvez l'émission du lundi au vendredi et réécoutez la en podcast.
00:00Il est 8h22 sur BFM Business et sur RMC Live. On continue ce matin à décortiquer ce palmarès 2025 de l'Institut Choiseul sur les ETI les plus agiles.
00:09On est avec Mickaël Fribourg. Bonjour, PDG de la compagnie Chargeur Investissement.
00:13Vous êtes notamment dans la protection temporaire de surface, l'entoilage pour l'habillement, les textiles techniques.
00:17Mais c'est un groupe assez complet.
00:20Ici les musées et le luxe, donc on a effectivement un éventail assez large.
00:23En face de vous, Daniel Harari, le PDG de Lectra. On est dans la découpe automatique de cuir et de textiles.
00:28J'avais deux optimistes auparavant avec moi qui croient dans la réindustrialisation, qui pensent qu'en France on a des atouts considérables.
00:34Mickaël Fribourg, vous êtes dans une ambiance un petit peu différente.
00:37Nous, nous sommes réalistes. D'abord, on trouve fantastique d'établir ce classement des conquérants qui est l'initiative de Pascal Loh,
00:44qui est une initiative brillante et qui contraste avec finalement une classe politique française qui est assez désolante,
00:50avec une ambiance bureaucratique, notamment bruxelloise, qui est très paralysante,
00:54et qui contraste également avec finalement une ambiance médiatique souvent décroissante.
00:59Mais d'abord, nous, nous sommes, et sur BFM c'est important de le souligner,
01:06on veut d'abord rendre hommage aux conquérants à l'international.
01:08Nous faisons 95% de notre activité hors de France.
01:12Et les conquérants à l'international, on y pense souvent assez peu,
01:15ce sont les près de 2 millions de Français qui sont établis hors de France,
01:18qui nous représentent, qui plantent le drapeau français à l'international,
01:20qui sont souvent insuffisamment considérés aussi.
01:23Nous, chargeurs, nous sommes à l'international depuis 1872,
01:27donc ce n'est pas une novation,
01:29mais ces conquérants qui finalement font la fierté aussi du développement commercial international,
01:34il faut penser à eux, nous en avons beaucoup au sein de notre maison,
01:38et ce sont eux qui font les succès des entreprises comme les nôtres,
01:41qui, nous nous sommes beaucoup engagés dans ce qu'on appelle l'économie émotionnelle,
01:46qui est l'économie de l'intelligence émotionnelle et qui offre un complément à l'intelligence artificielle,
01:53notamment tout ce qu'on fait dans les musées, dans les savoir-faire,
01:55dans le développement d'un certain nombre d'expertises.
01:58Notre métier, c'est de créer des champions mondiaux,
02:00on a 4 champions mondiaux dans notre portefeuille,
02:02mais je le redis, il est important de penser à ces Français qui sont hors de France,
02:06qui se sont levés encore plus tôt que nous,
02:08pour aller vendre nos produits, nos services à l'international.
02:12Daniel Harari, vous êtes un conquérant à l'international aussi,
02:14c'est une nécessité d'être présent à l'international pour faire du chiffre d'affaires,
02:19parce que là-bas, la demande est quand même plus forte que chez nous.
02:22Alors, nous sommes présents à l'international depuis 1981,
02:24la société a 50 ans, avec une présence dans plus de 100 pays.
02:28Notre premier marché, c'est la Chine, le deuxième, c'est l'Italie,
02:31le troisième, c'est les États-Unis,
02:33sachant que nos clients américains fabriquent surtout au Mexique aujourd'hui,
02:38et pas aux États-Unis.
02:39Donc, quand vous dites que votre premier marché, c'est la Chine,
02:42vous avez quand même aujourd'hui là-bas des concurrents aujourd'hui
02:44qui, dans le luxe notamment, commencent à se structurer.
02:46On disait tout à l'heure, la Chine n'est plus le pays de la copie.
02:48C'est clair, là-bas, désormais, on a des groupes qui concurrencent LVMH.
02:52Alors, tout d'abord, nous avons 100% du luxe comme client,
02:54avec des présences très fortes dans tout le luxe français, italien, international,
02:59même chinois maintenant, puisque ça commence.
03:01Nous avons une position de marché dans l'automobile,
03:03notre deuxième marché qui est très forte.
03:05Deux tiers des intérieurs de voitures et deux tiers des airbags dans le monde
03:08sont fabriqués avec nos technologies.
03:10Plus d'un vêtement sur quatre dans le monde est conçu avec nos logiciels,
03:13puisque vous parliez de notre savoir-faire en matière de découpe,
03:16mais en réalité, notre force, c'est le logiciel.
03:19Nous faisons de l'intelligence artificielle depuis maintenant plus de 35 ans,
03:22avec un niveau technologique très fort,
03:25et nous sommes numéro un mondial sur tous nos marchés.
03:27– Bravo, et quand on parle de réindustrialisation,
03:31quand on a tenté, tout à l'heure, nos deux invités y croire,
03:34vous pensez que c'est possible en France ?
03:35C'est quoi votre point de vue à vous ?
03:36– Non, je pense que ce n'est pas possible dans la majorité des cas,
03:39parce qu'étant présent dans tous ces pays,
03:40nous sommes des observateurs de ce qui s'y passe,
03:43et par exemple, quand on prend l'automobile,
03:44l'avantage en Chine, ce n'est pas les subventions,
03:47c'est le niveau de technologie et d'industrialisation.
03:51Par exemple, on conçoit une BYD en trois mois,
03:53on conçoit une voiture européenne en trois ans.
03:55À partir de là, on est complètement dépassé,
03:58et il faut qu'on rattrape ce retard technologique.
04:01Et si on regarde les grandes technologies mondiales,
04:04sur les 31 premières technologies,
04:05sur 17 d'entre elles, ce sont les Chinois qui sont numéro un mondial aujourd'hui.
04:10– Mais est-ce qu'on peut rattraper un retard technologique,
04:12à un moment donné, ce n'est pas entier de l'économie qu'il faut lâcher,
04:15peut-être pour se concentrer sur d'autres, mais…
04:17– Alors d'abord, moi je pense qu'il faut l'envie,
04:19je partage tout à fait l'analyse du président de l'Ektra,
04:24qui est un succès fantastique d'ailleurs,
04:26qui fait la fierté française.
04:28Nous, nous pensons, et nous l'avons souvent dit,
04:30que Bruxelles et tous ces bureaucrates
04:33sont devenus une arme de destruction massive
04:35contre l'industrie européenne.
04:35– Pour vous, c'est là le problème ?
04:37– Oui, le problème est là.
04:38Il y a un mépris bruxellois contre l'industrie,
04:41il y a finalement un vrai problème.
04:42La présidente de la Commission européenne,
04:44au lieu de jouer les Winston Churchill obsédés par l'Ukraine,
04:47ferait beaucoup mieux de faire finalement
04:49sa perestroïka bureaucratique,
04:53d'alléger fondamentalement le fonctionnement
04:55des instances bruxelloises.
04:57Vous savez, à Bruxelles, il y a quelque chose qui se passe
04:59qui est absolument formidable,
05:00c'est chaque matin que vous semez un fonctionnaire,
05:02il se produit des normes.
05:03Et ces normes démotivent les investisseurs,
05:05et nous sommes investisseurs en Europe.
05:07Nous avons des sites en France,
05:08mais nous avons des succès des sites en France,
05:11malgré cet empilement fou bureaucratique
05:14qui est, je le redis, une arme de destruction massive
05:17contre notre industrie, contre nos emplois européens.
05:21Quand on voit aujourd'hui finalement
05:22qu'on finit de découvrir qu'il y a une concurrence chinoise,
05:25vous l'avez dit, il y a des technologies chinoises
05:27qui sont extrêmement puissantes.
05:28Nous avons fait des transferts de technologies énormes.
05:31– On attend désormais la même chose des Chinois.
05:33– Mais vous croyez qu'ils vont le faire ?
05:34– Je ne sais pas, on leur demande en tout cas.
05:35– C'est une naïveté française,
05:38les europhiles français n'alimentent pas cette naïveté,
05:42car, je le dis encore,
05:44l'Europe est devenue, pour l'économie française,
05:47un jeu à somme négative.
05:49– Daniel Harari, le problème est à Bruxelles ?
05:51– Alors le problème, il est partout.
05:53Il est à Bruxelles, il est en France aussi.
05:55Quand on se bat pour avoir un budget
05:57qui rattraperait 40 milliards de déficits,
05:59on se trompe de combat,
06:00parce qu'il faudrait rattraper 100 milliards.
06:01les engagements pris à Bruxelles
06:04par Ursula von der Leyen vis-à-vis des États-Unis,
06:08c'est 1000 milliards en plus des droits de douane,
06:10c'est 1000 milliards, il va falloir les sortir.
06:12Ils ne sont nulle part dans les budgets aujourd'hui.
06:14Et on est en train d'avoir des discussions
06:15qui sont purement démagogiques.
06:17Tous les partis politiques n'ont pas de courage
06:19en France aujourd'hui.
06:21Évidemment, la bureaucratie européenne est un vrai problème.
06:24Les Américains et les Chinois ont un plan économique,
06:26nous avons un plan de normes.
06:28Et on discute d'écologie, c'est très bien.
06:32Nous sommes dans les premières entreprises françaises
06:35en matière d'écologie,
06:35classées dans les 4 premiers pourcents.
06:38Mais néanmoins, je crois qu'on se trompe de combat.
06:41– Vous êtes pessimiste ce matin ?
06:43– Non, alors je ne suis pas pessimiste.
06:45Vous avez parlé de relocalisation.
06:47Nous, on fabrique en France.
06:49En France, on a les meilleurs ingénieurs du monde,
06:51on a un très grand savoir-faire.
06:52Je pense qu'aujourd'hui, il y a des entreprises
06:54qui peuvent réussir en France et d'autres non.
06:57Et que de passer le message qu'on peut réindustrialiser
06:59dans ces conditions, c'est une erreur.
07:01Il faut s'appuyer sur les champions
07:02et les métiers qui fonctionnent aujourd'hui.
07:04– Merci beaucoup à tous les deux
07:05d'être venus sur ce plateau ce matin
07:07pour parler de ce palmarès.
07:09Je vois que chacun a les meilleurs ingénieurs du monde.
07:11En France, il y a lui dans son entreprise,
07:13il y a une bagarre sur le recrutement,
07:14notamment des ingénieurs.
07:16Dans un instant, mais oui, je sais bien que c'est vrai.
Écris le tout premier commentaire