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  • il y a 4 heures
Il est l'une des figures incontournables du paysage audiovisuel français. De Radio Nova à Europe 1, de Canal + à France télévision, aux côtés de Philippe Gildas, et Jean-François Bizot il a inventé la télévision d'aujourd'hui. La légende dit même de lui qu'il a inventé le mot « zapping ». Fin observateur de nos modes de vie et modes d'expression, comment l'auteur du « dico français-français » (Ed. Kero) voit-il notre langue changer ? Son évolution se fait-elle aux dépends d'une expression juste et claire des idées ? Que pense-t-il de la télévision d'aujourd'hui ? Doit-elle envier l'écran des années 80 ? Cette semaine, Rebecca Fitoussi reçoit Philippe Vandel dans l'émission Un monde, un regard. Année de Production :

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TV
Transcription
00:00Générique
00:02...
00:10Notre invité a marqué le PAF comme peu de journalistes et animateurs l'ont fait.
00:28Et je dis PAF à Estion. Paysage audiovisuel français, expression très années 80, comme l'époque à laquelle il a commencé.
00:35Tout comme zapping, mot qu'il est le premier à avoir utilisé en France.
00:40Le terme zapping qu'on utilise encore aujourd'hui et qu'il n'a pas déposé. Quelle erreur !
00:45Notre invité c'est ça, la télé et la radio un peu rock, un peu provoque.
00:50C'est la grande époque canale, c'est un ton, un rythme, une énergie qui nous secoue sans jamais oublier de nous informer
00:56et de nous rendre moins bêtes. Pertinents et percutants, toujours vigilants à rester connectés à l'ère du temps et à la jeunesse.
01:05Voilà son ADN depuis ces années 80 absolument bénis qui ont révolutionné le monde médiatique et la consommation de contenu.
01:12Comment trouvent-ils les années 2020 de ce point de vue d'ailleurs ?
01:15Sont-elles aussi passionnantes ? Les aimeraient-ils plus remuantes ?
01:18En clair, est-ce qu'il ne s'ennuie pas dans le PAF 2.0 ?
01:22Posons-lui toutes ces questions. Bienvenue dans Un Monde, un Regard.
01:25Bienvenue à vous Philippe Vandel, merci d'avoir accepté notre invitation ici au Sénat.
01:29Vous publiez un nouveau dico, le dico Français-Français, l'ouvrage pour comprendre enfin tout le monde aux éditions Cairo.
01:36On va y venir parce que ça rejoint votre passion des mots et de la communication et que c'est intéressant.
01:39Mais d'abord, un mot de ce que je viens d'évoquer.
01:42Et vous qui avez connu ce qu'il y a de plus innovant et même de plus fou à la télévision et à la radio,
01:47vous qui avez connu l'époque où un concept pouvait se décider sur un coin de table et s'essayer en direct dès le lendemain,
01:52est-ce que c'est encore intéressant ce qui se joue aujourd'hui dans le monde médiatique et ce qui se passe ?
01:57Un, oui.
01:58C'est vrai ?
01:59Deux, il y a une fausse idée qu'on se fait des années 80, c'est que d'accord c'était inventif,
02:04mais tout était tellement corseté qu'il était très facile d'être inventif.
02:09Je vais donner un exemple.
02:10Il y avait trois chaînes, puis il y en a une quatrième qui était Canal+, puis il y en a eu six.
02:14Il y a eu six chaînes pendant très très longtemps.
02:16Maintenant, des chaînes, avec la TNT, il y en a 27 ou 30 ou 34 ou 32,
02:20plus tout ce qui se passe sur YouTube.
02:22C'est beaucoup plus difficile d'être inventif maintenant.
02:24Deuxièmement, par exemple, ce qui a créé Canal+,
02:26ils ont créé plein de choses, ils ont créé une immense liberté de ton
02:29qui avait été empruntée, notamment à Actuel.
02:32Moi, je viens du journal Actuel, créé par Jean-François Bizeau et Radio Nova,
02:36qui était à la fois quelque chose de totalement subversif
02:41et du vrai grand reportage à la Albert Londres.
02:44J'arrive à mon exemple.
02:45Canal+, révolutionne la télé en tutoyant les gens.
02:50Une fois qu'on a tutoyé les gens, qu'est-ce qu'on fait ?
02:52On ne peut plus rien faire d'autre.
02:53C'était très très facile.
02:54Tout était tellement corseté.
02:56Canal a inventé l'idée de...
02:58Avant, il y avait des émissions de divertissement,
02:59et puis il y avait le 20h très sérieux,
03:02puis après, il y avait des variétés.
03:03Et Canal a mélangé tout ça avec nulle part ailleurs.
03:06Donc, on partait de loin, en fait.
03:07Ce n'était pas si difficile que ça d'imaginer autre chose.
03:09Exactement.
03:09C'était très facile.
03:10Maintenant, c'est très très très difficile
03:11parce qu'il y a des milliers et des milliers de concepts.
03:14Tout n'est pas trop verrouillé, quand même, et lissé, aujourd'hui ?
03:18Ah, ça dépend où et qui.
03:21La télévision officielle est totalement verrouillée et lissée.
03:24Le politiquement correct a tout lissé.
03:27Et je me souviens, moi, quand j'étais gamin,
03:29je disais à les inter-out footballeurs,
03:30ils disaient, j'ai rien compris aux consignes de l'entraîneur,
03:32après une défaite 2-0.
03:34Voilà, je disais ça dans le progrès de Lyon,
03:35le Dauphiné libéré.
03:36Ça, c'est terminé.
03:37Maintenant, si un joueur dit ça, il est géré de l'équipe.
03:39Bien sûr.
03:40Et ce n'est pas à vous que je vais apprendre ici sur Public Sénat
03:41combien les hommes politiques ont un langage lissé, polissé,
03:46notamment par leur groupe,
03:48puis également par leur conseiller image.
03:50Il y a des EDL, des éléments de langage.
03:53Tout est lisse comme ça.
03:54Et puis, il y a des choses qu'on ne peut plus dire
03:55parce qu'il y a le politiquement correct.
03:57Quelque chose m'a vraiment frappé.
03:59C'était, Emmanuel Macron n'était pas encore président.
04:03Il était ministre du...
04:05Il avait succédé à Montebourg, à l'économie.
04:07Ça s'appelait le redressement productif.
04:09Je ne sais plus comment ça s'appelait.
04:09Bref, peu importe les termes.
04:11Comme s'il y allait y avoir des redressements improductifs.
04:13Bref, peu importe.
04:14Et il y avait une usine en difficulté
04:16qui était en train de couler.
04:18Et il y avait des ouvrières qui travaillaient là-bas.
04:21Je ne sais plus ce que c'était.
04:21C'était dans le centre de la France.
04:22Emmanuel Macron y était allé.
04:24Et il avait dit, je pense avec compassion
04:26à ces personnes,
04:28pour beaucoup des femmes
04:29et dont nombreux sont illettrés.
04:33Il a dû s'excuser.
04:34Or, c'était vrai.
04:35Et je me suis dit, on est rentré dans une sale époque
04:38où maintenant, on doit s'excuser
04:40d'avoir dit quelque chose de vrai.
04:42Alors que quand moi, je démarrais dans le journalisme,
04:44on devait s'excuser d'avoir dit quelque chose de faux.
04:47Et là, tout devient dingue.
04:49Si maintenant, on n'a plus le droit de dire les choses,
04:51c'est qu'il y a un vrai souci.
04:52L'époque n'est plus à la provoque,
04:53mais est-ce qu'il faut le regretter
04:55ou aussi se réjouir de ne plus choquer,
04:57de ne plus heurter les gens ?
04:59Il y a deux manières de voir les choses.
05:01Moi, j'adore les blagues
05:02et je déteste les mauvaises blagues.
05:04Je vais vous donner un exemple.
05:05Oui, mais ça, c'est subjectif.
05:07Non, ce n'est pas subjectif.
05:08J'ai un crible qui est très, très simple.
05:10C'est quand vous jetez quelqu'un dans la piscine,
05:14tout le monde rigole,
05:14même la personne qui s'est fait jeter.
05:16Vous faites la même chose en plein hiver,
05:18la personne ne rigole pas.
05:19Alors, une bonne blague,
05:21c'est quand l'invité rigole aussi.
05:23Je déteste la moquerie.
05:25J'ai horreur des invectifs personnels.
05:27Et j'adore quand l'invité rit.
05:29Et c'est rire avec au lieu de rire contre.
05:32Donc, pour moi, il y a deux sortes de provoques.
05:33Une télévision moins provoque, plus lisse,
05:35des formes de langage plus lisses aussi,
05:37en tout cas dans certains univers,
05:38vous l'avez dit,
05:39dans la politique, dans le journalisme.
05:41C'est notamment ce que vous relevez dans cet ouvrage,
05:42publié chez Cairo,
05:43Le Dicot français-français,
05:45qui fait suite au premier que vous aviez écrit déjà
05:47il y a à peu près 30 ans.
05:48C'était mon tout premier livre,
05:49Le Dicot français-français.
05:50Et évidemment, moi, j'ai picoré dedans,
05:52comme c'est la consigne.
05:53C'est un Dicot.
05:54Exactement.
05:55Un Dicot, personne ne lit le début du début à la fin.
05:57Évidemment, je me suis arrêtée au chapitre
05:59Comment parler comme un journaliste.
06:01Ça m'a intéressée.
06:02Alors, apparemment, selon vous,
06:03un journaliste emploie des expressions
06:05comme double casquette,
06:06force de l'ordre,
06:07must-have, soldat du feu,
06:10expression évidemment imagée et périphrase.
06:13Est-ce que vous avez vraiment l'impression
06:14que le journaliste a un langage différent des autres ?
06:16Vous trouvez qu'on parle différemment des autres ?
06:18Mais tellement.
06:19C'est vrai ?
06:19Mais vous regardez les sujets...
06:21Moi, je ne m'en rends plus compte.
06:22Dans la presse écrite, c'est différent
06:23parce que dans la presse écrite,
06:25on a vraiment le temps de dérouler.
06:26Donc, il y a des périphrases
06:28pour ne pas faire des répétitions.
06:29Mais quand vous voyez un sujet aux 20 heures
06:31ou sur les chaînes d'info,
06:33plein de fois, il manque une info.
06:35Plein, plein de fois.
06:37On ne sait pas, par exemple,
06:39les journalistes ont une manière de dire les choses
06:41pour ne pas avoir à les dire.
06:43Et par exemple, quand on dit, je ne sais pas moi,
06:44l'exécutif.
06:46Oui.
06:46L'exécutif.
06:47Ça veut dire à la fois les ministres...
06:48Président, Premier ministre, en général,
06:50le couple exécutif et sinon le gouvernement.
06:51Voilà.
06:52Mais ça n'existe pas en vrai.
06:52Ce n'est même pas dans la Constitution.
06:55Quand on dit une enveloppe,
06:56ce n'est pas une enveloppe.
06:57On n'imagine pas,
06:57il n'y a pas un mec qui a apporté une enveloppe.
06:59Donc, il faut dire une somme.
07:01Par exemple, les journalistes,
07:02ils font tout le temps le raccourci sur la gratuité.
07:04Par exemple, ils disent,
07:05on réclame plus à l'État,
07:06on voudrait, je ne sais pas moi,
07:09des cartables gratuits.
07:10Mais les cartables ne sont pas gratuits.
07:12Puisqu'ils sont gratuits,
07:13mais ils sont payés par les impôts de l'autre côté.
07:15Et tout ça, c'est passé sous silence.
07:17Et il y a un très joli storytelling.
07:20Sur cet univers, vous écrivez,
07:21en un demi-siècle,
07:22les prostituées, les mongoliens,
07:23les concierges et les nains
07:25ont déserté la presse,
07:26remplacés par des travailleuses du sexe,
07:28les trisomiques,
07:28les gardiennes d'immeubles
07:29et les personnes de petite taille.
07:31Et vous vous empressez d'ajouter,
07:32et ce n'est pas un mal.
07:33Bien sûr.
07:34Fini l'époque du langage brut et sans chute.
07:37C'est exactement comme je vous disais.
07:38Sur les politiques, c'est pareil.
07:39Et se moquer des gens.
07:40Mais en revanche,
07:41appeler professeur des écoles
07:42un instituteur ou une institutrice,
07:44c'était un très très beau mot.
07:45Maintenant, il y a une périphrase
07:46et on perd la poésie qu'il y avait
07:49avec l'instituteur.
07:50Est-ce que vous n'y voyez pas quand même
07:51un danger à ne plus tout à fait
07:53nommer les choses ou à euphémiser ?
07:55Ah ben évidemment.
07:56Évidemment, il y a un énorme danger.
07:58C'est le cas.
07:58Puisqu'on ne sait pas ce qui se passe.
07:59C'est qu'on ne se met pas d'accord.
08:01Si on n'est pas d'accord sur les mots,
08:03on ne peut pas faire société.
08:05J'ai oublié la citation
08:06qui est d'ailleurs apocryphe de Camus
08:09qui disait
08:10« Ne pas nommer les choses,
08:12c'est ajouter au malheur du monde. »
08:13Oui, c'est ça.
08:13Il faut vraiment dire les choses
08:15pour que les gens puissent se parler.
08:17Mais est-ce que ça peut faire partie
08:19des raisons pour lesquelles
08:20les gens, et les Français en l'occurrence,
08:22on le voit dans les sondages,
08:23ont tendance à se tourner vers
08:25des discours plus radicaux,
08:26plus bruts justement ?
08:27Est-ce que c'est parce qu'ils en ont marre
08:28d'entendre peut-être,
08:30comme vous dites,
08:30les responsables politiques
08:31et les journalistes,
08:32avoir des termes un peu doux
08:33pour dire des vérités,
08:34des choses un peu brutes ?
08:35Il y a deux choses.
08:36C'est que l'information,
08:38c'est poser une très bonne question,
08:39l'information, avec le temps,
08:42Boeve Mairie,
08:43qui était le fondateur du monde,
08:45disait à ses journalistes
08:47« Faites chiant. »
08:48Maintenant, tous les rédac-chefs disent
08:49« Surtout, ne faites pas chiant. »
08:51Ils disent le papier,
08:51ils disent « Ah, c'est long,
08:52ah, c'est chiant. »
08:53Donc, l'info est aussi
08:55devenue un spectacle.
08:56Il y a même de l'infotainment,
08:57il y a plein d'émissions
08:59qui sont en fin d'après-midi,
09:03je ne vais pas les citer,
09:04mais qui font de l'information
09:06un spectacle
09:07et du spectacle une information.
09:08Or, le radical,
09:10je ne vais pas faire mon guide de bord
09:12de sous-préfecture,
09:13mais le radical est plus spectaculaire.
09:16Et vous, vous avez l'impression
09:17de participer à ça ou pas du tout ?
09:18Moi, je fais très attention.
09:19Moi, j'ai travaillé à Ré sur image,
09:21on faisait très attention.
09:23Et dans ce que j'écris
09:24pour la tribune dimanche
09:25et dans ce livre,
09:26je fais justement très attention
09:27de ne pas participer à ça.
09:30Les formules chocs
09:30qui servent juste
09:32à être une formule chocs,
09:33d'abord, c'est un choc pour rien
09:34et c'est juste une formule.
09:36Et ce qui est intéressant,
09:37c'est le contenu.
09:37Et on n'est pas loin de la...
09:38Mais on peut faire...
09:39Pardon, je pense à un truc.
09:40Il y a des formules chocs
09:41qui ont du sens.
09:43Je pense à une.
09:44Dans les années 80,
09:46il y avait d'immenses manifestations
09:48en France.
09:49Ça s'appelait
09:49le Mouvement pour la paix.
09:51Et les Russes
09:52avaient mis des missiles SS-20,
09:55c'était encore l'URSS,
09:56et les Américains
09:57mettaient en face
09:57des fusées Pershing.
09:59Et toute la gauche soutenue
10:00par la CGT,
10:01le Parti communiste
10:02et dans plein de pays,
10:03même si la CGT
10:04n'est pas dans plein de pays,
10:05manifestait,
10:06s'appelait la Manif pour la paix.
10:07On est tous pour la paix.
10:08Je ne connais personne
10:08qui dit
10:09« Moi, je suis pour la guerre. »
10:10Bref.
10:11Et Mitterrand,
10:13le président Mitterrand
10:14avait une formule
10:15absolument géniale.
10:16Il avait dit
10:16« Les missiles sont à l'Est
10:18et les pacifistes
10:19sont à l'Ouest. »
10:20Comme quoi,
10:21on peut faire
10:21une formule choc
10:22qui a du sens.
10:24Et qui marque.
10:24Et pas juste le plaisir
10:25de s'envoyer
10:26des sauts de boue à la figure.
10:27Dans un autre registre,
10:28parfois,
10:29on n'est pas loin de l'arnaque,
10:30vous le dites vous-même,
10:30en entreprise,
10:31on ne vire plus,
10:32mais on initie
10:33un plan de retour à l'emploi.
10:34Dans le monde de la beauté,
10:36on ne peut pas dire
10:36à une cliente
10:37qu'elle a de la graisse
10:37ou de la cellulite.
10:38Donc, on utilise le mot
10:39« capiton »
10:40qui n'existe pas
10:40dans le dictionnaire.
10:41Alors ça,
10:42c'est deux choses différentes.
10:42On est presque
10:43dans l'hypocrisie,
10:44finalement,
10:44voire dans le mensonge.
10:45Oui, mais c'est méchant.
10:46C'est méchant
10:46de dire à une femme
10:47qu'on ne dit pas…
10:48Mais pourquoi,
10:49si c'est dans un univers esthétique
10:50où les choses se disent ?
10:51Pourquoi ?
10:51Parce que vous ne vous vendez plus.
10:53Parce que la fille
10:53qui va dans l'Institut de beauté,
10:54je dis ça,
10:55je ne suis jamais
10:55elle a de ma vie
10:55dans un institut de beauté.
10:57Mais si on lui dit
10:57« vous avez des capitons… »
10:59Oui, mais on a l'impression
10:59que c'est la fin de la franchise,
11:01qu'on ne peut plus être franc.
11:02Il y a deux choses.
11:04Sur l'Institut de beauté,
11:06je comprends
11:07parce qu'il faut
11:08de la mensuétude
11:08et il faut de la bienveillance.
11:10Dans le cas de l'entreprise,
11:11c'est beaucoup plus grave.
11:12Le plan de retour à l'emploi
11:13qui consiste à virer les gens
11:15ou quand on vire les gens,
11:16on vous jette
11:17et on dit
11:17« il a été remercié »,
11:19je déteste cette hypocrisie.
11:20Dans ce livre,
11:21justement,
11:21je me suis aussi arrêtée
11:22sur le chapitre
11:22qui concerne la langue des ados
11:24et très honnêtement,
11:25je me suis régalée.
11:25Merci.
11:26J'ai aussi pris un coup de vieux.
11:27Moi aussi.
11:28Alors moi, j'ai découvert…
11:29C'était le chapitre
11:29le plus dur à écrire pour moi.
11:30Je le comprends
11:31parce que moi,
11:32j'ai été obligée
11:32de me faire confirmer
11:32les choses par mes ados.
11:34« ASKIP »
11:35qui signifie « as qu'il paraît ».
11:36On le comprend après coup,
11:38mais très honnêtement,
11:39je ne le savais pas.
11:39« TKL, tranquille,
11:40vous le saviez ça. »
11:41Oui.
11:42Ou « TQT, t'inquiète ».
11:43« Bélec »
11:45qui veut dire « attention ».
11:46« Raptat »,
11:47« je suis raptat »
11:48qui veut dire « je suis fatigué ».
11:49« Choc-bar »
11:50qui veut dire « je suis choqué ».
11:51C'est très choqué.
11:52Tout ça, je l'ai découvert.
11:53Et vous écrivez
11:54« Les adolescents se bricolent
11:56leur langage à eux
11:56qui répond à plusieurs besoins
11:58bien connus,
11:59exprimés de nouvelles réalités,
12:00marqués l'appartenance
12:01à un groupe,
12:02s'émanciper
12:03et se rebeller
12:04face à l'autorité. »
12:05Donc, pas de quoi
12:06s'inquiéter finalement.
12:07Ah non, il y a toujours eu ça.
12:08Il y a tout le temps
12:08ou tout le temps eu
12:09un langage des ados
12:10et je raconte
12:11l'expression
12:12« avoir la flemme ».
12:13C'était le langage
12:14des lycéens
12:15à la fin du XIXe siècle.
12:18Quand ils ne voulaient pas bosser,
12:18j'ai la flemme
12:19qui est maintenant
12:20passée dans le langage courant.
12:21Complètement.
12:21Et puis, il y a aussi
12:22le plaisir de ne pas être compris
12:23par les parents.
12:24Et puis, il y a des cycles
12:26quand même,
12:26des retours de termes anciens.
12:28Prenons le mot « daron »
12:29par exemple.
12:30Aujourd'hui,
12:31ce sont les jeunes
12:32qui l'emploient
12:32pour qualifier leurs parents,
12:33dites-vous,
12:33mais quand j'étais petit,
12:35c'était mes grands-parents
12:35qui l'employaient.
12:36C'est finalement
12:37l'argot des années 30
12:38qui est redevenu populaire.
12:40Le problème, c'est que souvent,
12:41les ados ne savent même pas
12:41d'où viennent les mots.
12:43Les ados et tout le monde
12:44ne savent pas d'où viennent les mots.
12:45Ils reviennent et ils ne reviennent pas
12:46parce qu'en même temps,
12:46il y a plein d'emprunts à l'arabe
12:47qui n'existaient pas avant.
12:50Oui, ça, on l'a remarqué
12:50dans votre livre, c'est vrai ?
12:51Ceci dit,
12:52« kif kif », c'est de l'arabe.
12:53Oui, c'est vrai.
12:53Le « toubib »,
12:55le « toubib »,
12:55c'est l'emprunt à l'arabe.
12:57Donc ça, ce n'est pas nouveau en fait.
12:58Non, non, ce n'est pas nouveau.
12:59Mais là, le « somme »,
13:01ça veut dire le « venant » en arabe.
13:03Vous avez peur d'être dépassé parfois,
13:05d'être un peu dépassé
13:07par ces nouveaux langages.
13:08Pourquoi d'ailleurs avoir fait ce livre ?
13:10Est-ce que c'était une manière
13:10de stocker ces mots,
13:12de ne pas les oublier,
13:13de rester…
13:14Je l'ai fait parce que,
13:16à la fois, ça m'intéresse,
13:18ça m'exaspère et ça m'amuse.
13:20D'accord.
13:21Suivant les chapitres.
13:22Et c'est mes trois moteurs intellectuels.
13:26Et pourquoi ça vous exaspère ?
13:27Parce que ça m'exaspère qu'on monte.
13:29J'ai un document à vous proposer.
13:30Oui.
13:31Philippe Bandel, c'est une archive
13:32qui nous vient de nos partenaires,
13:33les archives nationales.
13:34C'est un rituel dans cette émission.
13:36Nous sommes le 24 octobre 1989.
13:38C'est un discours de Michel Rocard,
13:40Premier ministre,
13:40à l'occasion de l'installation
13:41du Conseil supérieur de la langue française,
13:44chargé, je le cite,
13:45de l'usage, de l'aménagement
13:47et de la diffusion de la langue française.
13:49Et je vous lis un extrait.
13:50On parle d'une détérioration d'une langue
13:52et son inévitable évolution.
13:55Notre français classique
13:56apparaîtrait à coup sûr
13:57un latin effroyablement humilié
13:59aux yeux d'un Cicéron ou d'un Horace.
14:02Oui, mais avec ce latin
14:03de si mauvaise mine,
14:04Racine a écrit Bérénice
14:06et Rousseau, les Confessions.
14:08Ça veut dire qu'il avait une espèce
14:10d'optimisme sur l'évolution de notre langue.
14:12Est-ce que vous partagez cet optimisme ?
14:14Moyennement, parce que je vois tellement
14:16de fautes de français,
14:17de fautes de syntaxe,
14:18même chez les journalistes.
14:21Par exemple, on est sûr.
14:23Ça m'avait exaspéré.
14:24J'avais fait une chronique sur France Inter.
14:26J'ai été le premier à faire là-dessus.
14:27On est sûr.
14:28Par exemple, les cuisiniers qui disent
14:29on va partir sur la framboise
14:30pour le dessert.
14:32On va partir sûr.
14:33On est sûr quelque chose.
14:33On est sûr.
14:34Je ne sais pas, moi,
14:35vous regardez les émissions
14:36d'immobilier
14:39et il dit, je ne sais pas,
14:41bon, là, on est sur du bois de bouleau.
14:46Voilà.
14:47On n'est pas sûr.
14:47C'est collé au mur.
14:48On ne marche pas dessus.
14:49On ne marche pas sur l'anguil.
14:50C'est le propre d'une langue vivante
14:52d'évoluer, de...
14:53Ça ne veut pas dire
14:54qu'elle va se détériorer, si ?
14:56Si, parce que ça...
14:58On peut dire, je ne sais pas moi,
15:00on va partir...
15:02J'allais refaire la phrase.
15:04Vous le dites vous-même.
15:06C'est un dessert à base de framboise.
15:08Ce n'est pas la peine de dire
15:09on part sur la framboise.
15:11Et en fait,
15:12quand plein d'expressions
15:13sont remplacées par une seule,
15:15la langue s'appauvrit.
15:16Par exemple, le mot chelou.
15:18Le mot chelou,
15:19c'est un mot qui remplace,
15:20qui est polysémique.
15:21Ça veut absolument tout dire.
15:22Je peux dire que...
15:23On peut dire que ce décor est chelou,
15:25que vous êtes chelou,
15:25que ce pull est chelou,
15:26que mes chaussures sont chelou,
15:28que les questions sont cheloues.
15:29Ça ne veut strictement rien dire.
15:31Ça veut tout dire et rien dire.
15:32Et le truc exaspérant, pour moi,
15:34c'est le voilà qui termine les phrases.
15:38Je ne sais pas,
15:39une interview d'un politicien
15:41ou d'un syndicaliste.
15:43On ne va pas se laisser faire
15:44par le gouvernement
15:45parce que sinon, enfin, voilà.
15:47Ah oui, d'accord.
15:48Et là, cut.
15:48Mais alors, c'est aux politiques
15:49de veiller au grain,
15:50de veiller à préserver cette langue ?
15:51C'est à tout le monde.
15:52Et parfois, en revanche,
15:54je ne pleure pas
15:57aux anglicismes
15:59qui arrivent dans la langue française.
16:01Podcasté, il n'y a pas d'autre mot.
16:03Podcasté, c'est l'invention d'un seul homme.
16:05Vous savez d'où vient le mot podcasté ?
16:06C'est un truc incroyable.
16:07C'est Steve Jobs,
16:08le patron d'Apple,
16:10le fondateur d'Apple,
16:11qui invente,
16:11qui révolutionne à lui tout seul
16:12le téléphone portable,
16:14l'ordinateur
16:14et l'écoute radio.
16:16Et il invente
16:17l'iPad.
16:19Et après,
16:20il invente l'iPad,
16:21c'est le petit mot ça,
16:21et il invente l'iPod.
16:23C'était, on pouvait entendre des sons
16:24et les réécouter.
16:25Bien sûr, je me souviens très bien.
16:25Et donc, on s'enregistrait
16:27des émissions de radio
16:27et on pouvait les réécouter.
16:29Et donc, le podcast,
16:31c'est la différence
16:31avec le broadcast,
16:32écouter une émission de radio.
16:34Il n'y a pas de mots français.
16:36Et moi, ça ne me gêne pas.
16:38Quand on l'intègre
16:38à notre langue,
16:39ça ne me gêne pas
16:39quand on dit spoiler,
16:40genre, on va divulgacher,
16:42je trouve ça tellement ridicule.
16:43Ce n'est pas très joli, oui.
16:44Les mots,
16:45l'importance des mots
16:46et le goût des mots,
16:47peut-être que ça vous vient
16:47de vos parents.
16:49C'est le moment
16:49où l'on revient un petit peu
16:50sur le parcours
16:51de notre invité.
16:52Vous, ça commence à Grenoble.
16:53Vous êtes fils de prof.
16:54Votre père enseignait
16:55les maths,
16:55votre mère les lettres.
16:57Tous les deux jouaient
16:58au jeu des 1000 francs.
16:59Et en combinant
17:00leur savoir respectif,
17:01ils trouvaient
17:02toutes les bonnes réponses.
17:03En revanche,
17:03c'est votre père
17:04qui gagnait toujours au Scrabble,
17:05ce qui semble a priori
17:06contre-intuitif
17:06puisque lui enseignait les maths.
17:07Mais vous, vous dites
17:08non, non, pas du tout,
17:09ce n'est pas contre-intuitif
17:09parce qu'il savait compter.
17:11Ça ne sert à rien
17:12de mettre coruscant,
17:14mieux vaut mettre zouk.
17:15Mais évidemment,
17:16parce qu'il y a les Z de le K
17:16qui cartonnent.
17:18Ça ne sert à rien d'écrire.
17:18Vous avez cherché
17:19dans le dictionnaire
17:19ce que vous voulez dire coruscant.
17:21Coruscant,
17:21ça veut dire très brillant,
17:22quelque chose comme ça.
17:23Étincelant, exactement.
17:24Bravo, c'est ça.
17:24Je ne m'attendais pas à ça,
17:25le piège.
17:26Si je m'étais planté,
17:27j'étais ridicule.
17:28Non, non, mais vous ne l'êtes pas.
17:29Il vient d'eux,
17:30votre amour des mots.
17:31Vraiment, oui.
17:32Et je me souviens très bien
17:34quand j'étais en troisième,
17:36il y avait encore
17:37les sections A, B, C.
17:41Moi, j'ai fait C.
17:42D'accord.
17:42Donc les maths.
17:42C'est maths au bout de...
17:43Les maths de la physique.
17:44Oui, c'est ça.
17:44Math physique.
17:45C'était 9 heures de maths par semaine,
17:476 heures de physique.
17:47Oui.
17:48Mais je trouvais que les littéraires
17:50manquaient totalement de rigueur
17:52et que les matheux
17:53manquaient totalement de poésie.
17:55Donc vous aviez envie de...
17:56Et j'ai l'impression,
17:57et j'ai analysé ça
17:58beaucoup de temps plus tard,
17:59et en fait, j'ai l'impression
17:59de faire des maths avec les mots.
18:02J'utilise les mots,
18:03mais aussi rigoriste.
18:04Par exemple, mon père me disait
18:06qu'il y a une différence
18:07entre l'inverse,
18:08l'opposé et le contraire.
18:10C'est vrai.
18:10Voilà.
18:11Ce n'est pas synonyme.
18:12Chaque chose est différente.
18:13D'ailleurs, vous êtes très méthodique,
18:14on le sent dans ce livre.
18:15Vous êtes méthodique,
18:16un peu comme un scientifique.
18:17Vous êtes dans une démonstration,
18:18presque scientifique,
18:18avec des mots et sur les mots.
18:20Exactement.
18:21Mais en même temps,
18:21je ne fais pas des démos,
18:22c'est que c'est une parodie dictionnaire.
18:23Et un dictionnaire
18:24est très, très, très méthodique.
18:25Il y a une chose
18:26que je n'ai pas respectée,
18:28c'est l'ordre alphabétique.
18:29Oui, c'est vrai.
18:29Parce qu'en fait,
18:30il faut s'amuser...
18:31Ça, c'est votre côté rock
18:33et provoque.
18:34Non, mais il y a aussi
18:34qu'il faut...
18:35Quand on lit un petit bout de chapitre,
18:36il faut que la ligne 8
18:38éclaire la ligne 2
18:39pour pouvoir se marrer.
18:40Il y a une progression.
18:41Il ne faut pas mettre tout...
18:42Tout comme un espèce de gros...
18:44Ce n'est pas une boîte de frites.
18:4630 ans d'écart quand même.
18:46Ça n'existe plus, les frites.
18:47Mon nom, vous meurs.
18:48Une boîte de smarties.
18:5030 ans d'écart
18:50entre les deux dictionnaires.
18:52Vous trouvez que ça a évolué comment ?
18:53Dans quel sens ?
18:54Très bonne question.
18:55Il y a un chapitre
18:56auquel je n'ai quasiment pas touché.
18:57C'est comment parler
18:58comme ses arrière-grands-parents
18:59qui était comment parler
19:00comme ses grands-parents.
19:01Il y a juste une génération
19:02où le vocabulaire
19:04des personnes très âgées
19:05n'a pas changé.
19:07Le vocabulaire de l'entreprise
19:08a complètement changé
19:09puisque c'est devenu
19:10celui des start-up.
19:10Le showbiz s'est complètement lissé
19:14parce que maintenant
19:16ils n'ont plus rien le droit de dire.
19:17Vous avez remarqué,
19:19avec ce qui s'est passé
19:21le 7 octobre,
19:22vous prenez position
19:23pour un camp ou pour un autre,
19:26vous faites tomber dessus sur Twitter.
19:27Ils ne peuvent plus parler.
19:29Ils ne peuvent plus rien dire.
19:30Là, vraiment,
19:30on ne peut plus rien dire.
19:31Et puis, il y a des choses
19:32qui ont évolué encore.
19:33Et puis, le vocabulaire
19:33de la bouffe.
19:35Moi, j'avais fait
19:35Comment parler
19:36comme un cuisinier moderne
19:37et je dénonçais vraiment
19:39tous les produits surgelés
19:40qui faisaient croire
19:41que c'était du vrai.
19:42Maintenant, tout ça est interdit.
19:43Il y a une législation
19:44vraiment formidable
19:45qui est interdit
19:46à appeler
19:47gratin dauphinois maison
19:48un truc qui est surgelé.
19:50Ça va vous faire rigoler
19:50mais ça existait il y a 30 ans.
19:53Vous étiez trop jeunes,
19:54vous n'avez pas connu.
19:55Mais ça existait.
19:56Mais en revanche,
19:57maintenant,
19:57c'est tout le storytelling
19:58inventé par les émissions
20:01de culinaires.
20:03En même temps,
20:04ça me fait rigoler
20:04mais c'est vraiment ridicule.
20:06D'un mot,
20:06j'en reviens
20:07à votre parcours personnel
20:08parce que c'est le chapitre
20:09et c'est une question rituelle.
20:10À la lueur de celui
20:10que vous êtes aujourd'hui,
20:11quel conseil donneriez-vous
20:12aux petits garçons
20:13que vous étiez ?
20:13Qu'est-ce que vous lui diriez
20:14avant qu'il ne se lance dans la vie ?
20:15Waouh !
20:17C'est dingue
20:18parce que j'ai l'impression
20:18de ne pas avoir fait
20:19beaucoup de bêtises.
20:20Parce que j'ai vraiment...
20:21Je travaillais beaucoup, beaucoup.
20:23Je travaillais beaucoup
20:24et je m'amusais beaucoup.
20:26C'est en même temps...
20:26Vous diriez attention
20:27aux mots que tu veux employer
20:28dans la vie peut-être ?
20:29Ouais, non mais je dirais
20:30non, continue comme ça.
20:31Mais c'est drôle
20:31parce que j'ai deux enfants
20:33et je les ai un peu élevés
20:34comme j'ai été élevés.
20:35C'est-à-dire en leur laissant faire,
20:37en posant une guitare
20:38et si tu as envie
20:38de jouer de la guitare,
20:39tu joues.
20:40Si tu n'as pas envie,
20:40tu ne joues pas.
20:41On pose des livres.
20:41Si tu as envie de les lire,
20:42tu les lis.
20:43Ne jamais les questionner
20:45et quand ils me questionnent,
20:47toujours répondre.
20:48Mes parents,
20:49ils ne m'ont jamais
20:49chauffé le cerveau.
20:51Mais chaque fois
20:51que j'avais une interrogation,
20:52tac, ils m'aidaient.
20:53Ils étaient là.
20:54Voilà.
20:55J'ai des photos
20:55à vous proposer maintenant,
20:57Philippe Vandel.
20:57Là aussi,
20:58ça fait partie
20:58de nos petites habitudes
20:59dans cette émission.
21:03La première,
21:04la voici.
21:04Je vois très bien.
21:05Détache Express,
21:06Gourmax Pro,
21:08Balai,
21:09Rotalib.
21:09Tous ces produits
21:10étaient vendus
21:10à la télévision.
21:11Mais voilà,
21:12après 38 ans d'existence,
21:13l'émission phare de télé
21:15va attirer sa révérence.
21:17Présentée par
21:18Marie-Ange Nardi
21:18et Alexandre Devoix,
21:19ce télé-shopping
21:19ne fait plus recette.
21:20C'est une page de la télé
21:21qui se tourne là ?
21:22Oui et non.
21:22Parce qu'il y a une chose
21:24que vous n'avez pas dite,
21:25ne fait plus recette
21:26sur TF1.
21:27Mais il y a encore
21:28plein de petites chaînes
21:28de la TNT.
21:30TF1, maintenant,
21:30a besoin d'audience.
21:32Et je crois que l'audience,
21:32de mémoire,
21:33c'était 5, 6, 7 %.
21:34Une partie venait
21:36de l'audience,
21:37mais une autre partie
21:38venait des pourcentages
21:38des produits vendus.
21:40Mais sur une petite chaîne
21:41de la TNT,
21:42le télé-shopping
21:42peut être rentable.
21:43En fait,
21:43le miracle,
21:44il est ailleurs.
21:45C'est comment ça a pu
21:46durer aussi longtemps.
21:47Donc, vous n'avez pas regardé
21:48ni rien acheté ?
21:49Non, jamais, jamais.
21:50Si vous n'êtes pas client.
21:51Du tout, du tout.
21:52Mais moi, je suis tellement sceptique,
21:53je suis tellement cartésien.
21:55Un peu nostalgique, quand même,
21:56de l'ancienne télé,
21:57ou pas du tout ?
21:57Non, mais je sais très bien
21:58que quand on monte un produit,
22:00on fait une grosse tâche,
22:01on fait un produit,
22:01le mec, il passe avec un balai,
22:03tout est propre.
22:03Tout le monde sait que c'est faux.
22:04Sinon, pourquoi on se ferait chier
22:05à nettoyer nous-mêmes ?
22:06Enfin, ça n'existe pas.
22:08Certains ont envie d'y croire.
22:09Mais c'est les pubs.
22:10C'est les pubs.
22:12Ils mettent un coup de produit,
22:14ils nettoient,
22:14en un coup d'éponge.
22:15Mais chez qui il y a ça ?
22:16Mais chez personne.
22:18Je n'ai pas fait la pub.
22:19J'avais fait Comment parler
22:20comme dans la pub,
22:20dans la première version.
22:21Et là, je ne l'ai pas fait
22:22parce qu'il y en avait trop, trop, trop.
22:23D'accord.
22:24Il y avait trop de pub
22:24et elle change trop vite.
22:25Donc, quand le livre serait sorti,
22:27les gens n'auraient plus...
22:28C'était déjà dépassé.
22:28Ils n'auraient pas eu la ref.
22:29Dans un prochain livre, peut-être.
22:30Comme disent les ados.
22:31Deuxième photo.
22:32Oh là là, vous la connaissez,
22:34Dorothée O'Lyric,
22:34votre compagne que j'ai reçue
22:36dans cette même émission.
22:37C'était bien.
22:37Et à laquelle j'avais parlé de vous.
22:38C'était merveilleux.
22:39Et d'ailleurs, elle avait dit
22:40beaucoup de choses magnifiques
22:41sur vous aussi.
22:42Grand reporter de guerre
22:43que vous n'avez jamais culpabilisé
22:45de partir souvent de la maison.
22:46En revanche, c'est drôle
22:47d'être avec une journaliste aujourd'hui
22:49et d'être devenu vous-même journaliste
22:50parce que vous les détestiez.
22:51J'ai retrouvé cette phrase.
22:52Je trouvais que c'était des gens
22:53qui racontaient les histoires des autres
22:55au lieu de les vivre.
22:56C'est vrai.
22:57J'imagine que vous avez changé d'avis quand même.
22:59J'ai changé d'avis, ouais.
23:00Bien sûr que j'ai changé d'avis.
23:01Mais au départ, je voulais faire de la musique.
23:04Moi, j'ai fait Jules Baxé,
23:06j'ai fait Vaugirard,
23:07j'étais ingénieur du son
23:08et je voulais être producteur,
23:09je voulais faire de la musique.
23:10Et je me suis rendu compte
23:11que ce qui me fascinait,
23:12ce n'était pas être chanteur,
23:13ce n'était pas être devant la scène,
23:15mais c'est le type qui est en coulisses,
23:16le type qui fait le son.
23:17C'est ça qui est dingue.
23:18Les meilleurs morceaux de Bowie,
23:20c'est ceux qui ont été faits
23:20par Nal Rogers,
23:21qui a fait les meilleurs morceaux de Chic,
23:24mais qui a fait les meilleurs morceaux de Madonna,
23:26mais qui a même fait le seul
23:26très, très bon morceau de Sheila,
23:29qui est Spacer.
23:30C'est ça que je voulais faire.
23:31Sauf qu'un jour, c'est une prof
23:31qui vous dit
23:32tu seras mieux devant le micro que derrière.
23:35C'était Claude Dominique
23:35qui était une prof extraordinaire,
23:36qui était productrice sur France Culture
23:38et sur France Inter
23:38et qui m'a dit
23:39toi, tu es fait pour parler dans un micro.
23:41Et voilà comment j'ai commencé à France Inter.
23:42Mais en tout cas,
23:44à la différence de Dorothée,
23:46même quand j'étais actuelle,
23:48j'ai toujours refusé
23:49de prendre le risque
23:51de mourir pour le travail.
23:52Jamais je ne l'ai fait.
23:54Et elle, elle le fait.
23:55Une dernière photo,
23:56il s'agit de Jane Goodall,
23:57ou Goodall, je ne sais pas comment on dit,
23:59célèbre primatologue,
24:00ethnologue britannique,
24:01décédée le 1er octobre 2025
24:03à l'âge de 91 ans.
24:04Grâce à ses observations
24:05et ses études des animaux
24:06et notamment des chimposés,
24:07elle a transformé
24:08notre rapport à eux.
24:10Est-ce que vous savez
24:10pourquoi je la montre ?
24:11Parce qu'il y a des chimposés
24:12qui maîtrisent plein de mots.
24:15C'est pour ça ?
24:16Non, pas du tout.
24:16Ah bon ?
24:17Parce qu'elle était
24:17prosopagnosique.
24:19Prosopagnosique,
24:20c'est vraiment drôle
24:20que vous disiez ça.
24:22Alors, je vois ça,
24:22ça me fait doublement marrer.
24:23Et vous savez quoi ?
24:25Parce qu'elle arrive là
24:27et je me dis,
24:28dans ma tête,
24:28je me dis,
24:29putain, c'est qui ?
24:29Oui, parce que dans ma tête,
24:30je me parle très mal.
24:31Et je me dis,
24:32putain, c'est qui ?
24:32Et donc, je ne l'ai pas reconnu.
24:34Prosopagnosique,
24:34c'est ne pas reconnaître les visages.
24:36Exactement.
24:37Il y a plein de gens
24:37très célèbres
24:38qui sont prosopagnosiques.
24:38Je vous ai piégé, là, du coup.
24:40Non, mais je ne savais pas
24:40qui c'était.
24:41Mais elle, c'est marrant
24:41parce qu'elle apprenait
24:42aux singes à parler.
24:43Non, mais c'est un enfer
24:44d'être prosopagnosique.
24:46Déjà, c'est difficile à dire.
24:47Il n'y a pas que moi,
24:47il y a Brad Pitt.
24:48Oui, c'est vrai.
24:50Mais c'est handicapant
24:50au quotidien, sérieusement ?
24:51Ah, bien sûr.
24:52Et surtout dans nos métiers
24:53puisque moi,
24:54il faut que j'ai vu les gens
24:5530 ou 40 fois
24:56pour les reconnaître.
24:57Donc, vous m'avez pas reconnu,
24:58il y en a rien.
24:58Si, je vous reconnais
24:59pour deux raisons.
25:00Je vous reconnais
25:00parce que je vous vois à la télé.
25:02Ah, oui, ça aide.
25:03Donc, je vous ai vu
25:04plus d'une trentaine de fois.
25:05Bien sûr.
25:05Et deuxièmement,
25:06je sais que je vous retrouvais.
25:08Mais ce n'est pas la même chose
25:09que si on se croise
25:10au marché d'Aligre.
25:12Ce n'est pas du tout
25:13la même chose.
25:13Mais c'est très handicapant
25:14parce que moi,
25:15je ne le savais pas.
25:17Quand j'étais juste étudiant,
25:18je voyais que mes profs
25:20l'égalent mon équipe de foot
25:21et l'égalent ma classe.
25:22Mais quand on voit,
25:23quand on est journaliste
25:24et qu'on voit nulle part ailleurs,
25:25on voit 220 ou 400 invités par an
25:27plus tous les techniciens,
25:28on a l'impression
25:29qu'on a le melon.
25:30J'ai une dernière question
25:31qui est en lien
25:31avec le décor
25:32dans lequel nous sommes.
25:33Nous sommes entourés
25:33de quatre statues
25:34qui représentent chacune une vertu.
25:36Il y a la sagesse,
25:37la prudence,
25:38la justice et l'éloquence.
25:40Est-ce qu'il y a
25:40une de ces vertus
25:41que vous avez envie de défendre,
25:42qui vous parlent,
25:42qui vous caractérisent peut-être ?
25:44Oh là là,
25:44quelle question !
25:45Toutes !
25:45Toutes ?
25:46Sagesse, prudence,
25:47ça vous caractérise ?
25:49Oui, mais si.
25:51Alors je vous donne un exemple.
25:52Moi, j'aime la Formule 1.
25:54Jamais, jamais,
25:55je roulerai en scooter
25:56sans casque.
25:57Jamais, je roulerai sans gants.
25:59Jamais, je roulerai
26:00sans mettre ma ceinture.
26:00Alors c'est ça,
26:01votre vertu,
26:02la prudence.
26:03Voilà, mais l'éloquence,
26:04ça me plaît beaucoup aussi.
26:05J'aimerais bien être éloquent.
26:06La justice,
26:07je trouve qu'on en manque.
26:09Non, non,
26:09je trouve que c'est
26:10que des vertus vertueuses
26:12et je déteste les pléonasmes.
26:14Merci Philippe Andet
26:15d'avoir été notre invité.
26:16Merci à vous.
26:17Merci à vous d'avoir été avec nous
26:17et merci à vous
26:18de nous avoir suivis
26:19comme chaque semaine.
26:19Émission à retrouver
26:21en replay
26:21sur publicsena.fr
26:22et en podcast.
26:23À très vite.
26:23Merci beaucoup.
26:31Sous-titrage Société Radio-Canada
26:40Sous-titrage Société Radio-Canada
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