00:007h45 sur BFM Business et sur RMC Live. L'invité du grand entretien ce matin c'est Cédric Dufour.
00:05Bonjour, vous êtes le PDG de Rakuten France, site de e-commerce. 9,3 millions de visiteurs chaque mois.
00:11Un produit sur deux vendu d'occasion. On va parler ensemble de cette concurrence chinoise.
00:16Vous avez publié une tribune dans les Echos sur nos relations avec la Chine.
00:19Alors ce n'est pas une ode à la Chine, mais vous parlez du pays comme un vrai concurrent technologique, industriel.
00:25Vous voulez sortir du débat autour de la marque Chine.
00:28Vous dites que la Chine ne le copie plus, elle nous innove, elle nous dépasse.
00:32Est-ce qu'en France on se trompe de débat sur la Chine ?
00:35Alors je pense que les plateformes chinoises dont on parle beaucoup en ce moment, c'est l'arbre qui cache la forêt.
00:40On a sur la plateforme Rakuten, on a à peu près 10 000 marchands.
00:44On est une place de marché, donc on ne vend rien nous directement.
00:48On a des marchands qui vendent sur notre plateforme.
00:50Et on a une partie de ces marchands qui sont chinois.
00:51Et trois fois par an, on va en Chine les rencontrer.
00:54Et je suis allé à ce voyage il y a trois mois.
00:57Et j'ai été impressionné par le degré de maturité de ces marchands chinois qui ne veulent plus être simplement l'usine du monde,
01:03mais qui fabriquent des produits de très bonne qualité, sous leurs marques, qui veulent maîtriser la distribution.
01:10Et donc on est très loin du cliché des chinoiseries.
01:13Mais ce qui veut dire que tout produit chinois que je trouve sur la plateforme Rakuten a été vérifié ?
01:18Oui, on a vérifié le marchand, on est allé visiter ses usines, on vérifie la conformité.
01:24Et régulièrement, on a des outils de modération également sur le site, puisqu'on a 50 millions de produits.
01:29Et donc on se doit d'avoir des outils automatiques de modération.
01:31Mais effectivement, on a référencé et validé tous les marchands chez nous.
01:34Mais le sujet autour du sujet Chine, c'est aussi la concurrence déloyale, les produits qui ne sont pas vérifiés, qui arrivent sans taxe.
01:43Aujourd'hui, quand on voit les chiffres de Temu, c'est quand même une plateforme qui n'existait pas avant 2023.
01:47Aujourd'hui, c'est le troisième site de e-commerce le plus visité en France, derrière Amazon et le Boncoin.
01:52Ça vous fait quand même une concurrence sévère.
01:54Alors justement, vous avez dit le mot, ce qui est fondamental là-dedans, c'est le problème de la concurrence déloyale.
01:59Donc nous, on s'insurge contre ces plateformes-là, qui s'affranchissent de toute réglementation environnementale, sociale, fiscale, droit du travail, etc.
02:08Parce que ça crée une concurrence déloyale, et évidemment, on n'est pas sur un pied d'égalité.
02:11Donc on lutte contre ça, et mon sujet, c'était que le problème, c'est plus la concurrence déloyale que l'origine chinoise, évidemment, de ces plateformes.
02:20Mais alors, comment vous essayez de réagir ? Parce que le sujet, ça reste le pouvoir d'achat pour le consommateur.
02:25C'est comme ça qu'il fait son arbitrage. Est-ce que ça suffit de lui dire, chez moi, les produits ont été vérifiés ?
02:29Alors non, on a deux autres réponses qui sont très fortes.
02:32La première, c'est qu'on a un programme de fidélité qui s'appelle le Club Air, qui réunit 12 millions de membres,
02:37et qui consiste à donner du cash-back, en fait, à nos clients.
02:41Donc quand ils achètent, on leur redonne en point entre 5 et 20% de leurs achats, qu'ils peuvent ensuite consommer sur Rakuten.
02:48Et la deuxième réponse, c'est la seconde main.
02:51Parce que la particularité de Rakuten, c'est qu'on vend des produits neufs et des produits de seconde main.
02:54Et donc, si les acheteurs achètent des produits de seconde main, ça leur permet d'acheter moins cher et donc de régler le problème du pouvoir d'achat.
03:01Et qu'est-ce que vous voyez dans le comportement du consommateur ?
03:03Il y a celui qui va sur le neuf, celui qui va sur la seconde main ?
03:06Ou il y a des achats, peu importe le produit, qui désormais sont mélangés ?
03:09Alors, c'est très intéressant.
03:10Nous, on considère qu'on ne sait pas forcément si on veut acheter un produit neuf ou un produit d'occasion au moment où on va visiter notre site.
03:16On commence à avoir le besoin.
03:17C'est la raison pour laquelle, exactement, pour nous, ça fait une vraie différence d'avoir les deux sur le même site.
03:20Contrairement à beaucoup de nos concurrents qui sont soit produits d'occasion, soit produits neufs.
03:24Et on se rend compte que, de plus en plus, certains clients viennent pour des produits d'occasion
03:28et puis, finalement, achètent le produit neuf parce qu'ils se disent que pour le différentiel de prix, ça m'intéresse.
03:32On offre des garanties également, nous, sur les produits d'occasion.
03:34On part du principe que ce n'est pas parce qu'on achète un produit d'occasion que, pour autant, l'expérience d'achat doit être dégradée.
03:39Donc, on offre une garantie satisfaure remboursée également sur les produits d'occasion.
03:44Et donc, c'est un travail de longue haleine pour améliorer l'expérience d'achat.
03:47Et finalement, le client finit par ne plus être intéressé de savoir si c'est neuf ou de seconde main.
03:53Et finalement, exactement.
03:54Et ce qui est important, c'est d'être tout à fait transparent sur les garanties.
03:56Il n'y a évidemment pas les mêmes garanties sur le neuf que sur l'occasion.
04:00La qualité n'est pas la même.
04:02Mais si on est totalement transparent, ça permet au client de prendre sa décision.
04:05Concurrence vis-à-vis du consommateur avec les Chinois ?
04:09Concurrence aussi sur les plateformes de logistique ?
04:10Puisque pour être le troisième site de e-commerce aujourd'hui en France,
04:14évidemment, il y a des concurrences avec les logisticiens.
04:17Est-ce que vous partagez parfois des entrepôts ?
04:19Vous travaillez aussi avec des spécialistes chinois ?
04:22Ça se passe comment dans le back-office ?
04:24Alors aujourd'hui, on a mis en place depuis trois ans une solution logistique
04:27qui s'appelle Rakutel Fulfillment Network,
04:30où on propose à un certain nombre de marchands,
04:32notamment les marchands qui sont asiatiques ou qui sont très éloignés,
04:36une solution logistique, alors qui n'est pas la nôtre,
04:38puisqu'on n'a pas d'entrepôt et on n'a pas de personnel.
04:42En revanche, on a mis en place un réseau de logisticiens
04:47et on propose cette solution totalement intégrée à notre marketplace.
04:50Donc quand une commande est passée,
04:52automatiquement ça déclenche une préparation de commandes dans la plateforme
04:56et on peut livrer également toutes les autres marketplaces de cette plateforme.
04:58Donc effectivement, vous avez raison,
05:00c'était une préoccupation de nos marchands,
05:02parce que quand ils sont loin, ils n'ont pas de solution logistique
05:04et donc on a apporté cette solution à nos marchands.
05:06Arrivés aussi des Chinois sur le plan capitalistique,
05:08avec JD.com qui arrivent au capital de la FNAC
05:10parce qu'ils ont racheté le deuxième actionnaire de FNAC d'Arti.
05:14Comment voyez cette opération ?
05:16Alors, ils sont devenus actionnaires effectivement de ces économies
05:20et donc indirectement de FNAC.
05:22Ils ont également lancé leur propre marketplace récemment.
05:26Donc il y a énormément de mouvements, on suit ça.
05:28Ça fait 25 ans que Rakuten est présent en France.
05:30Ça fait 25 ans que la concurrence évolue beaucoup et on s'adapte.
05:36Donc le maître mot, c'est l'adaptation et la flexibilité.
05:39Et c'est ce qu'on va continuer.
05:40Mais c'est à dire que ça ne vous fait ni chaud ni froid ?
05:41Parce que quand vous me dites adapter, flexibilité, c'est ce que je comprends ?
05:43Oui, ce n'est pas que ça ne nous fait ni chaud ni froid,
05:45c'est qu'on doit s'adapter.
05:46On l'a fait depuis longtemps.
05:48La concurrence évolue considérablement.
05:50Toutes les plateformes chinoises qui sont là,
05:51elles n'existaient pas il y a quelques années.
05:54La seconde main, il n'y avait pas d'acteurs non plus il y a quelques années.
05:56Aujourd'hui, il y en a beaucoup.
05:57Donc il faut qu'on s'adapte.
05:58Il faut qu'on soit transparent vis-à-vis de nos clients.
06:00Il faut qu'ils aient confiance en nous.
06:02Vous étiez uniquement présent en France, en Europe.
06:04C'était votre fer de lance.
06:06Vous avez vous développé en Espagne.
06:07Vous dites que c'est un développement qui ne va pas coûter un euro supplémentaire.
06:10Comment c'est possible ?
06:11Alors, on a utilisé pour ça la puissance de l'intelligence artificielle
06:15pour se développer en Espagne.
06:18Et ce qu'on a fait, c'est que finalement, on a répliqué notre site
06:21et traduit en espagnol.
06:23On le traduit quasiment en direct à mesure que nos clients espagnols...
06:27C'est le même site, mais en espagnol.
06:29Donc en fait, c'est le même site.
06:29Alors, il a fallu beaucoup de travail pour rendre ce site traductible,
06:33j'allais dire, ou traduisible dans différentes langues.
06:36Mais maintenant qu'il est fait, on s'est développé en Espagne.
06:38On va pouvoir se développer dans d'autres pays rapidement.
06:40Et automatiquement, il est traduit.
06:42On le fait pour l'instant sur une sélection de produits.
06:43On n'a pas les 50 millions de références qu'on a en France.
06:47Mais pour l'instant, les résultats...
06:48Mais c'est la même plateforme, en fait.
06:49Donc, vous pouvez faire ça dans n'importe quel pays.
06:50Absolument, absolument.
06:52Sans avoir de bureau sur place ?
06:54On n'a pas de bureau sur place.
06:55On avait déjà, nous, une équipe espagnole dans nos bureaux parisiens
06:59pour sourcer des marchands espagnols.
07:01Donc, on est déjà habitué quand même à cette dimension internationale sur l'offre.
07:05Et puis maintenant, on l'a répliqué également sur la demande
07:07en s'adressant à des clients espagnols.
07:09Merci beaucoup d'être venu dans la matinale de l'économie.
07:11Cédric Dufour, le PDG de Rakuten en France.
