00:00Alors, il y a un premier mot, me semble-t-il, qui nous met sur une fausse piste dans le débat public.
00:05C'est le mot radicalisation.
00:07C'est un mot qui, globalement, ne veut rien dire.
00:09Parce que, globalement, moi, je peux me dire que je suis un indépendantiste québécois radicalisé.
00:13Avec les débats sur le budget, je suis un libéral radicalisé.
00:16Mais dans aucun des cas, ça ne me donne envie de buter des gens ou de les exécuter en criant à la Ouagbar.
00:21Comme dit Charlotte Donnella, tout le monde peut être radicalisé. Ça dépend des racines.
00:25Oui, oui, très juste. De quelles racines parlons-nous?
00:27Or, dans les circonstances, il faut parler d'une conversion à l'islam et surtout d'une conversion pas à n'importe quel islam.
00:34Il faut voir comment apparaît l'islam chez ceux qui s'y convertissent en l'espace d'un mois sur le mode de la fanatisation religieuse Internet.
00:43Donc, quel islam désire-t-il lorsqu'il s'y rallie?
00:46Il faut comprendre que dans la tête de ceux qui basculent ainsi, l'islam, ce n'est pas qu'une religion parmi d'autres.
00:51Ce n'est pas le shintoïsme du monde arabe.
00:53L'islam, qui se présente ainsi, c'est une grande masse historique.
00:58C'est une masse puissante.
00:59C'est une masse en progression.
01:01Et c'est aussi le grand autre de notre civilisation.
01:04L'islam, quoi qu'on en dise, n'est pas la religion de l'Occident.
01:07Il se présente à nous aujourd'hui à la manière d'un grand autre qui est un défi.
01:11Pour certains, un ennemi.
01:12Pour d'autres, une altérité qui nous questionne.
01:15Mais dans un cas comme dans l'autre, c'est l'autre auquel nous nous rallions.
01:18Donc, quand on se rallie à l'islam, je reviendrai dans un instant sur les détails, il y a des parcours spirituels, individuels qui existent.
01:24Mais sur le fond des choses, il y a quelque chose comme une forme d'abdication, de basculement, d'adhésion au grand autre historique.
01:33Il nous dit par ailleurs qu'il entendait des voix.
01:35C'est ce qui l'a poussé.
01:36Il a entendu des voix, en effet, celles de Daesh.
01:38Daesh, on lance un message très clair.
01:41« Tuez, tuez, tuez les Français, les Occidentaux. Tuez au hasard, vous tuerez quelqu'un nécessairement. »
01:47Il est bien de les tuer parce qu'ils sont coupables d'appartenance au peuple français.
01:51De ce point de vue, il a entendu des voix qui existaient.
01:52Ce ne sont pas des voix imaginées.
01:54C'est des voix de Daesh qui disent « Si vous vous convertissez à l'islam, vous devez aller jusqu'au bout de la conversion en détruisant la civilisation qui est la vôtre. »
02:03Ensuite, la question qu'on doit se poser, qui me semble importante, c'est sur quel terreau naissent ces conversions aujourd'hui ?
02:09Quand on voit le personnage changer, si j'ai bien compris, quand on voit son personnage, quel est son profil ?
02:15On est dans un cas de déclassement social.
02:17On est dans un cas d'individualisme anomique.
02:20On est dans un cas de pulsions mal canalisées.
02:23On est dans un cas d'effondrement anthropologique.
02:25Autrement dit, on est devant ce que Marx, si ton Marx appelait le lumpen prolétariat en quelque sorte, les déclassés.
02:30D'autres diraient la « lie de la société », c'est la canaille, disait Bachelet.
02:34C'est-à-dire des endroits ou des parts de la population qui sont fondamentalement effondrées.
02:40On ne peut que s'en désoler, on ne peut que pleurer leur sort.
02:43Et qui, dans cet effondrement, sont sensibles à différents appels qui leur disent globalement
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