- il y a 2 mois
Depuis le 1er octobre 2025, les marques de textiles peuvent décider d’apposer l’affichage environnemental sur leurs produits. Cela permet de montrer l’impact du vêtement en fonction de plusieurs critères comme la composition, le lieu de fabrication, la réparabilité, le transport… De quoi motiver les entreprises du secteur à devenir plus vertueuses.
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00:00Depuis le 1er octobre, les marques de vêtements peuvent afficher l'impact écologique de leurs produits.
00:12C'est le thème de notre débat, j'accueille Caroline Miny, bonjour.
00:15Bonjour.
00:16Bienvenue, vous êtes directrice d'engagement social et environnemental de Picture.
00:20Et Laurent Tronion, bonjour.
00:21Bonjour.
00:21Bienvenue, vous aussi, vous êtes le président fondateur d'Ecolan.
00:25On va commencer par présenter vos entreprises Picture, c'est Picture Organic Clothing, c'est ça ?
00:30Oui, tout à fait.
00:31Alors c'est quoi, vous créez des vêtements ?
00:33C'est ça, des vêtements outdoor.
00:34Donc on est une marque française qui a été créée en 2008, qui est Bicorp, dont le siège est à Clermont-Ferrand,
00:40et donc par trois cofondateurs qui sont des passionnés de sport outdoor.
00:45Et donc l'idée, c'était d'apporter à la communauté des sports outdoor un nouveau design, une nouvelle façon de penser et une nouvelle philosophie.
00:52Donc on conçoit des vêtements pour des passionnés d'outdoor, avec l'idée que tout ce qu'on fait est durable sur le plan environnemental, sinon on ne le fait pas.
01:02D'accord, donc ça suppose des choix de matériaux, etc.
01:05C'est ça, tous nos vêtements ont au minimum 50% de matière recyclée, biologique ou naturelle.
01:10Bon, on rentrera évidemment un peu plus dans le détail, je veux bien Laurent Tronion que vous nous présentiez vos collants, qu'est-ce qu'ils ont de particulier ?
01:16Alors mes collants, tout d'abord j'ai créé une marque de collants, qui s'appelle Divine Paris, je l'ai créée il y a 30 ans, j'étais étudiant à l'époque,
01:24pas du tout dans le monde du textile, je suis issu du monde du rugby, très certainement.
01:28Mais donc j'ai créé ma marque et puis j'ai été très vite confronté aux déchets collants, avec des bennes de déchets qui s'accumulaient,
01:34et dans le même temps la matière première qui ne cessait d'augmenter.
01:37Donc les prix ne cessaient d'augmenter ?
01:39Absolument, le prix de la tonne de polyamine ne cessait d'augmenter, donc j'ai trouvé qu'il y avait là un paradoxe incroyable,
01:45et donc je suis allé voir mes fabricants de matières premières, qui ne m'ont pas pris au sérieux au départ, en disant que le collant ne se recycle pas.
01:53Mon passé de sportif ne pouvait pas me permettre de me résigner à ça.
01:58Ce n'est pas parce que j'ai une mêlée solide en face de moi que je ne peux pas la battre ou la contourner, je vais trouver une solution.
02:04Voilà, donc je suis allé voir les labos, et notamment l'INSA de Lyon, qui est un des spécialistes au monde du polymère,
02:10et très autonomement, ils m'ont tout de suite dit que c'est possible, avec le cahier des charges que je leur imposais,
02:15c'est-à-dire me sortir un produit qui soit à peu près du prix équivalent de la matière neuve,
02:21être capable de le faire dans un cadre propre, environnement parlant,
02:25et avoir une industrie qui puisse monter en volume très rapidement et industrialisable très rapidement.
02:31Et vous en êtes là aujourd'hui ?
02:32Et là, on est en train d'ouvrir notre usine, début 2026,
02:35on a fini nos travaux de laboratoire, et on passe à l'industrie.
02:40Par rapport à l'atmosphère économique qui règne en France, on est à l'opposé,
02:45parce qu'on est en train de recruter, d'acheter des machines.
02:48Parfait, heureusement qu'on n'a pas besoin d'attendre que les politiques prennent des décisions
02:51pour faire avancer et créer du business et de la croissance dans ce pays.
02:57Alors il y a quand même des décisions politiques qui peuvent être intéressantes,
02:59par exemple, cette possibilité, ce n'est pas une obligation pour les marques de vêtements,
03:04d'afficher l'impact écologique de leurs produits.
03:09C'est une sorte de label ou de Nutri-Score écologique, on pourrait dire ça comme ça, pour les vêtements.
03:14Qu'est-ce que ça vous apporte ?
03:16Oui, c'est un éco-score du textile, en fait, c'est un affichage environnemental.
03:20Alors nous, on s'y était mis dès 2024, parce qu'en fait, dès le départ, on a cette volonté d'être transparent,
03:25et donc notamment de par notre labellisation Bicorp,
03:28et donc on veut apporter un maximum d'informations à notre consommateur.
03:32Et donc on avait, dès 2024, avec une société qui s'appelle Clear Fashion,
03:36on avait mis un score, ce qu'on appelle un fashion score,
03:39donc sur 100, où on peut voir l'impact environnemental du vêtement.
03:42Donc vous étiez déjà dans cette démarche ?
03:44Voilà, dès 2024, et depuis cette année, on a l'éco-score textile, donc français,
03:49qui donne aussi un coût environnemental du vêtement.
03:52En fait, c'est un chiffre, une valeur absolue,
03:54qui montre l'impact du vêtement sur plusieurs plans environnementaux.
03:58Alors justement, les critères ?
03:59Donc les critères, on rentre la matière, donc la composition, les lieux de fabrication,
04:04le poids aussi, est-ce que le vêtement est réparable ?
04:08Le nombre de références aussi de la marque,
04:10puisque ça permet aussi de distinguer des marques de fast fashion, de marque éthique.
04:15Le transport aussi, et la fin de vie.
04:16Donc on a tout le cycle de vie du vêtement qui est dans cette méthode.
04:20Est-ce que vous l'adoptez, et est-ce que c'est adapté aux produits que vous proposez ?
04:25Alors oui, c'est adapté.
04:27Et je dirais qu'au-delà de la règle et des nouvelles normes,
04:31l'intérêt, c'est que ça fait œuvre de pédagogie auprès du plus grand nombre.
04:34Et aujourd'hui, on a besoin d'entraîner tout le monde.
04:35Comme tout le monde a été entraîné par la bouteille plastique, les piles autrefois,
04:39on doit avoir pour le textile la même sensibilité,
04:43et apprendre à savoir, à voir comment fabriquer le textile,
04:46comment ils peuvent se recycler, quel est le cycle de vie des matières textiles.
04:50C'est hyper important.
04:51Comment vous allez l'afficher ?
04:52Sur la boîte ?
04:54C'est suffisamment visible pour le consommateur ?
04:58Alors, ça peut être sur la boîte, mais l'idéal, c'est d'avoir une contre-étiquette sur le produit en lui-même,
05:03avec les indications, comme le disait Caroline, la provenance, etc.
05:09Tout ce qui fait qu'un produit est plus vertueux qu'un autre.
05:11Alors, ce n'est pas obligatoire.
05:14Ça vous semble logique que ça ne soit pas encore obligatoire ?
05:16Ou alors, vous espérez que ce stade-là, on va l'atteindre assez vite ?
05:20Alors, on l'espère, évidemment.
05:21Maintenant, on est face à des contraintes aussi économiques pour les entreprises.
05:26Il faut modifier aussi l'état d'esprit des entreprises qui fabriquent les produits.
05:31Et je pense que la contrainte, elle est là aujourd'hui.
05:33Imposer, ça paraît un peu compliqué aujourd'hui, même si, en ce qui nous concerne, on le souhaite.
05:38Et des gens comme Piccher l'ont fait volontairement.
05:41Quand on est des entreprises pionnières en la matière, forcément, on se dit, allez-y, on est prêt à subir la comparaison.
05:47Vous dites quoi ? C'est une première bonne étape, belle étape ?
05:50C'est une étape cruciale, c'est une vraie avancée.
05:52Et puis, même, c'est la première prise en compte par un gouvernement de l'impact environnemental de la fast fashion.
05:57Et comme on disait, nous, on s'y met en disant, si on s'y met tout, ça va devenir la norme et un incontournable dans notre quotidien.
06:03Est-ce que vous pensez, pardon, je vous interromps, mais que...
06:06Alors, c'est trop tôt, là, c'est le 1er octobre, mais vous avez un label depuis un certain...
06:10Est-ce que vous pensez que ça a un effet positif sur votre business ?
06:15Est-ce que ça vous aide à vendre des vêtements, tout simplement ?
06:17Alors, dans le cas de l'éco-score, c'est vrai que c'est récent, donc il faut attendre un peu.
06:20En tout cas, nous, c'est une démarche proactive et on répond à une attente des consommateurs, en tout cas, d'avoir plus de transparence.
06:26Ça, c'est clair.
06:26On a régulièrement des questions sur nos produits, etc.
06:29Donc, ça apporte cette transparence, c'est un gage de confiance aussi.
06:33Et ça nous permet aussi de voir très simplement et d'aider le consommateur à faire ses choix.
06:38C'est comme on le disait, on a un vrai rôle pédagogique, en fait.
06:40Et donc, à partir du moment où on met ça en place, ça va aussi nourrir la méthode européenne.
06:45Il faut savoir qu'au niveau européen, il y a aussi des travaux en cours pour mettre un affichage environnemental.
06:50Donc, si on s'y met maintenant, ça nous permet d'anticiper des travaux futurs aussi.
06:54Et je dirais que ça va de pair, en plus, avec le décret qui est sorti le 6 septembre,
06:58que la ministre a fait paraître, qui incite les entreprises à utiliser des matières recyclées.
07:03Donc, si vous voulez, l'accumulation de nouvelles normes, de nouvelles incitations, c'est que positif.
07:08Et ça va à l'encontre des mauvaises nouvelles qu'on entend avec l'arrivée de la fashion en France.
07:12Et le consommateur, à un moment donné, il va avoir des choix à faire.
07:15Et ces choix, il peut les opérer d'une manière transparente en regardant ce qui se passe.
07:19Je suis d'accord avec vous.
07:20Mais pour ça, il faut qu'il y ait un minimum de marques qui décident de l'afficher.
07:26Parce que sinon, vous allez être deux ou trois à vous comparer.
07:29Je pense que c'est quand même un mouvement général.
07:31On est dans cette tendance-là.
07:33Évidemment, on n'est pas aidé par la crise économique.
07:35Parce qu'on pense souvent qu'être vertueux, utiliser des produits plus vertueux que les autres,
07:41ça veut dire forcément plus cher.
07:43Il faut casser un peu ces idées-là.
07:46Et surtout, il faut entraîner le maximum de personnes vers cette voie-là.
07:50Vous pensez que ça influe vraiment ?
07:52Vous allez me dire oui, parce que votre marque est basée sur la logique d'économie circulaire.
07:58Mais ce n'est pas le premier critère.
08:00Vous parliez de crise économique.
08:01On va d'abord regarder le prix d'un produit, son efficacité.
08:05Bien sûr.
08:06C'est la raison pour laquelle, les collants, notre premier principe, c'était de dire qu'il faut que la matière recyclée sorte au même prix que la matière neuve.
08:12Et je pense qu'il faut aller dans ce sens-là.
08:14Il faut arriver à sortir des produits qui soient français voire européens.
08:17Mais en tout cas, avec des matières vertueuses.
08:21Et en restant dans des normes de prix qui soient acceptables pour le plus.
08:24Et alors, je reviens vers vous, mais je reste sur votre produit, sur le collant et sur la récupération.
08:30C'est-à-dire qu'il n'y a pas de filière de récupération des collants pour l'instant.
08:33Enfin, je ne sais pas, moi, j'en pourrais pas, mais je regarde ma femme, mes filles.
08:36Enfin bon, je pense qu'elles les jettent dans la poubelle de base.
08:41Et c'est bien ce qui me gênait.
08:42C'est qu'aujourd'hui, les collecteurs trieurs qui organisent le tri en France,
08:46ils paient 180 euros la tonne pour brûler ce type d'avêtement qui n'était pas recyclable.
08:52Donc nous, on appréhende toute cette matière.
08:54Tous les fabricants de textiles qui ont de la matière avec du polyamide, ça nous intéresse.
08:58On a des circuits de collecte dans un tas d'endroits.
09:02Il y a des conciergeries, dans les hôtels, etc.
09:04Dans des organismes publics dans lesquels il y a beaucoup de personnel féminin.
09:08Et c'est là où vous, vous pouvez nous aider en faisant savoir que dorénavant, le collant se recycle.
09:12Vous savez, en France, c'est 7500 tonnes de collants qui sont jetés tous les ans dans les poubelles.
09:17Pour vous donner une image qui parle, c'est le poids de la Tour Eiffel, 7500 tonnes.
09:21Donc c'est colossal.
09:22Donc si tout le monde s'y met, on va récupérer toutes ces tonnes de collants qui traînent
09:27et puis d'autres textiles et puis d'autres choses à la base de polyamide.
09:30Bon, je fais le job.
09:32Dorénavant, le collant se recycle.
09:34Arrêtons de jeter une Tour Eiffel par an de collants dans les poubelles.
09:38Merci, Thomas.
09:38Merci, je fais bien le job, ça vous va.
09:41Je voudrais qu'on reparle quand même de la fast fashion parce qu'on voit ces efforts,
09:45qui sont des efforts réglementaires, qui sont des efforts d'initiative des entreprises.
09:49Et puis à côté de ça, on a des marques asiatiques, chinoises qui s'implantent de plus en plus sur notre marché.
09:56Et on voit des marques françaises qui disparaissent.
09:58Est-ce que vous vous dites, bon, c'est bien, on se bat, mais de temps en temps, un peu les bras ballants, à quoi ça sert ?
10:05Il y a deux choses.
10:06Donc déjà, cette affichage environnementale, ça nous permet de mettre en valeur nos pratiques vertueuses,
10:11mais aussi d'inciter les autres.
10:12Parce qu'à partir du moment, comme un Nutri-Score, en fait, on voit la note ou le cours environnemental,
10:17on va aussi réfléchir et faire des choix différemment.
10:20Et le deuxième point, c'est la loi anti-fast fashion, qui a été validée au Sénat à l'Assemblée nationale,
10:25qui doit passer en commission mixte paritaire, et qui permet justement d'encadrer la fast fashion,
10:30notamment avec l'interdiction de la publicité de la fast fashion.
10:33Il y a aussi un malus qui va être mis en place sur des vêtements très polluants.
10:37Oui, il y a peut-être aussi une taxe sur les petits colis qui pourra jouer un rôle aussi.
10:41Les choses bougent, les marques s'y mettent, il y a de plus en plus de marques qui s'engagent aussi dans cette démarche.
10:46Je suis d'accord avec vous, mais si on prend en masse,
10:49on prend la masse des produits achetés via la fast fashion ou l'ultra fast fashion en France,
10:54et ce que vous, vous proposez, il y a quand même un sacré décalage.
10:57C'est pour ça qu'on informe énormément, nous on a des articles de blog,
11:01on fait beaucoup d'événements aussi autour du développement durable pour donner le maximum d'informations,
11:06parce qu'aujourd'hui, il y en a tellement qu'il faut être très clair, très simple et pédagogique,
11:10et c'est pour ça qu'on affiche ce score.
11:12Bon, alors entre nous, vous dites que le combat n'est pas encore perdu.
11:14Non, il n'est pas perdu, mais c'est un combat, évidemment.
11:18Si vous voulez, ça nous dépasse largement, nous autres, les personnes qui interviennent dans le textile.
11:24C'est un débat politique, sociologique.
11:26Il faut effectivement que les gens aient un peu plus de pouvoir d'achat,
11:29parce qu'aujourd'hui, c'est certainement le problème,
11:31mais il faut aussi que tout le monde comprenne que quand on fait appel à des entreprises
11:34qui viennent de Chine et qui vendent des prix quelquefois en dessous du prix de production normal,
11:38c'est se tirer une balle dans le pied, c'est supprimer les emplois en France.
11:42Donc tout ça, il faut faire avoir de pédagogie, parler, informer, communiquer.
11:46Et puis, voilà, on a encore de belles entreprises en France qui produisent des belles choses.
11:51Et voilà, moi, je suis résolument optimiste, mais il va falloir du temps, évidemment.
11:56Avec, oui, allez-y.
11:57C'est pour ça aussi qu'on propose, nous, d'autres services.
11:59Donc on a une garantie à vie sur nos vêtements.
12:01Donc quand on achète effectivement un vêtement qui est bio, recyclé,
12:04qui est aussi très durable, avec des performances techniques élevées,
12:07parce qu'on fait pour la haute d'or, et donc on a une garantie de réparation à vie,
12:10et on propose de la location de vêtements aussi.
12:12Parce qu'on sait, quand on va skier, on y va une fois par an,
12:15on peut louer sa combinaison de skis, en fonction de ce qu'on va faire aussi,
12:18de la météo, etc.
12:20Et donc ça nous permet d'avoir un vêtement très performant et durable,
12:24à un prix très raisonnable, en fait.
12:25Donc on essaye aussi de tester ces modèles qui sont plus vertueux, plus durables,
12:30parce qu'on sait aussi que pour éviter le déchet, la première raison, c'est de moins consommer.
12:34Un dernier mot sur l'innovation.
12:36Ça a demandé combien d'années de recherche et développement pour aboutir à ce que votre projet soit réel.
12:43On a créé la start-up en 2019.
12:45J'avais travaillé un peu dans notre société divine sur cet aspect.
12:48Et en fait, il y a eu le Covid entre les deux, mais grosso modo,
12:53les labos ont mis 18 mois, 24 mois, pour créer vraiment quelque chose de solide.
12:58Et comme toute innovation, elle est en permanence en amélioration.
13:03Et là, on a pour ambition de sortir 100 tonnes de polyamides fin 2026.
13:08Il est vraisemblable qu'entre notre brevet initial et la mise en place de l'usine,
13:12et les 100 tonnes, il y aura des améliorations importantes.
13:15On en a encore eu hier, on est en circularité complète.
13:19Ce qu'on veut, c'est utiliser encore moins d'énergie, parce que c'est important.
13:25L'innovation, c'est passionnant aussi.
13:28C'est peut-être là où l'Europe pourra faire la différence.
13:31Merci beaucoup, merci à tous les deux et à bientôt sur Be Smart for Change.
13:36On passe tout de suite au grand entretien de ce Smart Impact.
13:38Je vous emmène au cœur des espaces verts de nos villes.
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