Avec Daniel Zagury, psychiatre et auteur de "L’énigme publique N°1 Xavier Dupont de Ligonnès" (aux Editions du Seuil)
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NewsTranscription
00:009h10, Sud Radio, La Vérité en Face, Benjamin Glaze.
00:05La Vérité en Face, il est à 9h33, soyez les bienvenus si vous nous rejoignez sur Sud Radio.
00:10C'est sans doute l'un des hommes les plus connus de France, si je vous dis Xavier Dupont-de-Ligonnès.
00:14Forcément, vous vous en souvenez, rappel en quelques dates, 14 avril 2011,
00:19cet homme aurait, je dis bien froidement, tué à l'arme à feu sa femme, trois de ses enfants.
00:23Le lendemain, il dîne avec son aîné, lui aussi assassiné dans la foulée.
00:27Les cinq corps seront retrouvés le 21 avril, enterrés sous la terrasse de leur maison à Nantes,
00:33quelques jours plus tôt, le 15, Xavier Dupont-de-Ligonnès est vu pour la dernière fois,
00:38l'autre bout de la France dans le Var, à Roquebrune, sur Argent, depuis plus rien.
00:43Il a disparu, il n'a donc pas été jugé, il reste, aux yeux de la justice, présumé innocent.
00:47Bonjour à Daniel Zaguri.
00:49Bonjour.
00:49Et merci, un grand merci d'être avec nous ce matin sur Sud Radio, éminent expert, psychiatre.
00:53Vous êtes désormais expert honoraire auprès des tribunaux et vous publiez donc ce livre aux éditions du Seuil,
01:01Xavier Dupont-de-Ligonnès, l'énigme publique numéro 1, ouvrage passionnant dans lequel vous dressez le portrait psychique de cet homme
01:09pour mieux comprendre pourquoi il aurait, encore une fois, j'utilise le conditionnel, basculé dans l'horaire.
01:15La première énigme, c'est la question que tout le monde se pose dans cette affaire,
01:19c'est de savoir s'il est encore vivant ou pas.
01:22Ce n'est pas la question centrale de votre livre, mais vous en parlez, vous avez une intime conviction.
01:26Si je puis parler ainsi, selon vous, il se serait suicidé, c'est cela ? Pourquoi ?
01:29Alors, je n'ai pas d'intime conviction, justement.
01:32C'est-à-dire que, je ne sais pas si vous avez cette expérience, mais dans les familles, on se dispute.
01:39Certains croient qu'il est vivant, certains croient qu'il est mort.
01:42Et alors, c'est très étonnant, je regarde un petit peu les réactions des internautes à une interview ou à un article.
01:53Mais n'importe quoi, ce psychiatre, il est vivant, point barre.
01:59Vous voyez, c'est-à-dire que c'est l'heure de la croyance.
02:00Alors, dites-leur, dites-leur, pourquoi, selon vous, il se serait suicidé ?
02:05Alors, encore une fois, je raisonne, non pas dans la croyance, mais après avoir fait ce que j'ai appelé l'enquête psychique,
02:16il ne faut pas, si vous voulez, conclure sur un élément, deux éléments, trois éléments, une impression, un sentiment,
02:28mais sur l'ensemble de son parcours.
02:30Et l'ensemble de son parcours et sa personnalité vont vers le suicide.
02:39En tout cas, c'est ma conclusion.
02:44Mais encore une fois, comme j'essaie d'être un petit peu sérieux,
02:48et comme il m'arrive de douter de ce que je dis, je ne vous affirme pas qu'il est mort.
02:55Alors, je vous dis que c'est de très loin l'hypothèse la plus probable.
02:59Vous avez déjà expertisé de nombreux criminels, des tueurs en série,
03:02Patrice Allègre, Guy Georges, Michel Fourniré, pour ne citer qu'eux.
03:05La particularité, là, c'est que Xavier Dupont-de-Ligonnais, vous ne l'avez jamais rencontré,
03:09c'est comment on arrive, finalement, à rentrer dans la tête, si je puis dire, d'un homme qu'on n'a jamais vu ?
03:15C'est tout le défi.
03:17Oui et non.
03:19Parce que, ça c'est une question qu'on me pose souvent,
03:23mais vous savez, je fais parfois des expertises, comme n'importe lequel de mes collègues,
03:28des expertises avec des personnes qui me disent peu de choses,
03:33qui sont réticents, qui font des réponses conformistes, plaquées,
03:39et en définitive, je n'ai pas grand-chose à dire sur eux,
03:42si ce n'est d'éliminer une maladie mentale, par exemple.
03:45Donc, j'en sais infiniment plus, j'en sais 10 000 fois plus sur Xavier Dupont-de-Ligonnais,
03:50que sur un certain nombre de personnes que j'ai vues, en chair et en os,
03:53et que j'ai examinées.
03:55Pourquoi ? Parce que Xavier Dupont-de-Ligonnais, c'était un grand bavard.
03:59Il se serait donc eu, depuis 14 ans, mais c'était un grand bavard.
04:04Il passait son temps sur la toile, à parler de lui, de sa vie,
04:10il faisait ses comptes, de ses relations avec les autres,
04:14et il allait sur les réseaux religieux.
04:17Les forums catholiques, oui.
04:19Voilà.
04:20Et j'ai aussi rencontré un certain nombre de personnes qui l'ont bien connu.
04:25Donc, tout ça fait, j'ai lu les livres qui lui ont été consacrés,
04:29des enquêtes souvent remarquables, dont celle de Society.
04:32Donc, si vous voulez, j'en sais beaucoup sur lui.
04:35Et alors, vous titrez l'ennemi public numéro 1,
04:39et non pas l'ennemi public numéro 1,
04:41parce que c'est ça qui est quand même assez dingue,
04:43c'est que malgré ce qui lui est reproché,
04:46à savoir d'avoir assassiné toute sa famille,
04:49il n'est pas considéré aujourd'hui en France
04:52comme l'ennemi public numéro 1.
04:54Ça paraît assez dingue quand même, si on l'y réfléchit.
04:56Oui, alors ça, c'est la réaction sociale.
04:58Ce n'est pas moi qui l'ai inventée.
05:01En effet, j'ai appelé mon livre
05:03l'énigme public numéro 1,
05:06parce que je me suis dit, mais pourquoi ?
05:09Alors qu'il est recherché par toutes les polices,
05:10n'est-il pas l'ennemi public numéro 1 ?
05:13Alors, il y a un certain nombre de raisons à cela.
05:17La première, c'est qu'on lui attribue une sorte d'oral,
05:21de toute puissance,
05:22un homme qui a méticuleusement accompli ses crimes,
05:27qui a défié la police, qui a défié la justice.
05:31Il y a cet élément-là.
05:33Mais, je dirais, beaucoup plus profondément,
05:37il n'est pas haï,
05:39parce qu'on ressent bien que les ressorts de ces crimes,
05:44présumés,
05:46ne sont pas,
05:48ne sont ni pervers,
05:52ni la recherche de quelque chose de sanguinaire.
05:58on ressent bien qu'il y a autre chose.
06:02Et cette autre chose,
06:03alors,
06:04et on va aboutir à cette espèce d'interrogation incroyable,
06:09où est-il ?
06:10Cette autre chose,
06:12c'est qu'il a pris,
06:13nous lui avons confié la clé des mystères.
06:17Nous,
06:18il est celui que l'on attend.
06:21Il y a à la fois une dimension religieuse,
06:22bien sûr,
06:23de résurrection,
06:25de réapparition,
06:26mais il y a aussi une dimension profane,
06:28de retour,
06:29du père prodigue.
06:31L'aurait été arrêté,
06:32ce n'aurait pas du tout été la même chose, quoi.
06:34Alors,
06:35s'il avait été arrêté,
06:36s'il avait été arrêté,
06:38nous aurions vu,
06:39et ça,
06:39c'est une expérience que j'ai eue un certain nombre de fois,
06:41nous aurions vu se dégonfler immédiatement la Baudrouche.
06:44Parce que Dupont de Ligonnès,
06:46c'est,
06:47comment dire,
06:49c'est l'auberge espagnole de nos fantasmes,
06:54de notre imaginaire collectif,
06:56nous lui attribuons beaucoup de choses.
06:58Et s'il avait arrêté,
07:00nous aurions vu un pauvre air
07:02qui balbutie
07:03quelques justifications pseudo-religieuses,
07:07et pas du tout
07:08cette espèce d'être mythique et légendaire
07:12que nous imaginons.
07:13Enquête psychique
07:14de Xavier Dupont de Ligonnès,
07:16pour vous,
07:17est-ce qu'il souffrait d'une maladie mentale ?
07:20Est-ce qu'il souffrait de troubles psychiatriques ?
07:23Non !
07:24Alors,
07:25Xavier Dupont de Ligonnès
07:27a un certain nombre de singularités.
07:30Vous et moi aussi.
07:33Mais,
07:34alors,
07:35quand même,
07:36il a une histoire très particulière
07:38avec une mère prédicatrice
07:40qui lui prédit
07:42un avenir
07:44grandiose
07:46après
07:46l'Apocalypse.
07:49Et
07:49sa singularité psychique principale,
07:54c'est ce qu'on appelle
07:55dans notre jargon
07:56le clivage,
07:58une espèce de compartimentage
08:00qui fait qu'il est à la fois
08:01l'enfant de sa mère
08:03prédicatrice
08:05et qu'il a grandi
08:07avec un destin
08:07la religion
08:09la terreur
08:11des colères divines
08:13des pluies de sang,
08:14etc.
08:14Et à la fois
08:15le fils de son père,
08:17c'est-à-dire aimant
08:18les grands espaces,
08:19la liberté,
08:21la bonne chair.
08:23Et qui les a abandonnés,
08:25son père.
08:26Alors,
08:26voilà,
08:27il n'a jamais réglé
08:28son compte,
08:30si je puis dire,
08:31psychiquement,
08:31à sa mère
08:32qui l'a prédestinée,
08:35il l'a empêchée
08:35d'avoir un destin
08:36et avec son père
08:37qui avait abandonné
08:41sa famille.
08:41Mais ce qu'il faut bien comprendre,
08:42c'est qu'il n'y a pas de conflit.
08:44Il est d'un côté
08:44le fils de sa mère
08:47et de l'autre
08:48le fils de son père.
08:50Mais tout ça
08:50ne fait pas conflit.
08:52Daniel Zaguri,
08:53j'aimerais qu'on écoute
08:54ce fameux message vocal
08:56que Xavier Dupont-de-Ligonnès
08:58a laissé à sa sœur
08:59le soir du drame.
09:00Il lui raconte
09:01qu'il rentre à la maison,
09:02qu'ils étaient au Cinoche
09:03en famille,
09:04je le cite,
09:04et qu'ils ont été
09:05au restaurant ensuite.
09:07Voici comment il termine
09:08son message.
09:09Voilà,
09:09ça s'en reste.
09:11Je suis pas trop tard,
09:12tu me redis.
09:13Tu vois,
09:13mon SMS est quand même
09:15que je vais coucher
09:16une enfant
09:16à tout le monde.
09:17À tout de suite,
09:18peut-être.
09:19Je vais coucher
09:20les enfants,
09:21dire bonsoir
09:22à tout le monde,
09:23à tout de suite,
09:24peut-être.
09:24Et il le dit
09:25d'une manière presque joviale.
09:27C'est glaçant
09:27quand on sait
09:28ce qu'il a potentiellement fait
09:30après.
09:32C'est ce qui sidère
09:33tout le monde,
09:34à juste titre.
09:36C'est l'incroyable contraste
09:39entre le côté guilleré
09:40de quelqu'un
09:42pour qui
09:42tout va toujours très bien
09:44et le désespoir profond.
09:46Il y a quand même
09:47deux choses
09:47dans ce très court message.
09:49Il y a le peut-être,
09:51peut-être,
09:52et il y a aussi
09:53je vais coucher les enfants.
09:54Mais les enfants sont grands.
09:56On ne va pas les coucher
09:57à cet âge-là.
09:57Donc,
09:59dans l'après-coup
10:01et avec ce que nous savons,
10:03c'est un message
10:04qui a une résonance
10:05effectivement
10:06tout à fait particulière.
10:07Comment on peut expliquer
10:08c'est ça
10:08le compartimentage
10:09avec d'un côté
10:11cette jovialité
10:12et de l'autre
10:13ce côté froid
10:14et glaçant ?
10:16Oui,
10:17c'est exactement ça.
10:19Au point
10:20que tout le monde
10:20était berlué.
10:23Xavier Dupont-de-Ligueres...
10:24Personne ne savait
10:24qu'il était déprimé,
10:25qu'il était au fond du trou.
10:27Oui,
10:28au fond du trou
10:28avec les suicides
10:29qui étaient là
10:29à sa porte.
10:30Il se réveillait la nuit,
10:31il avait des cauchemars,
10:33il pensait au suicide
10:34et puis le jour,
10:36il était sourié gypse,
10:38la main dans la main
10:39avec sa femme
10:40alors que son couple
10:41était dans un désastre.
10:42Daniel Zagueri,
10:43l'énigme public
10:44numéro 1,
10:45Xavier Dupont-de-Ligueres.
10:46On continue d'en parler
10:47juste après ça.
10:48A tout de suite.
10:509h10,
10:50Sud Radio,
10:52la vérité en face,
10:53Benjamin Glaze.
10:55L'énigme public
10:56numéro 1,
10:56Xavier Dupont-de-Ligueres
10:58avec Daniel Zagueri
11:00qui est avec nous
11:01jusqu'à 10h
11:03pour parler de cet ouvrage
11:04et cette affaire
11:05complètement incroyable
11:06qui passionne tout le monde.
11:06Tout le monde a un avis
11:07sur cette affaire.
11:08Xavier Dupont-de-Ligueres,
11:10accusé, suspecté
11:12d'avoir tué
11:13toute sa famille,
11:14assassiné toute sa famille
11:15avant de disparaître.
11:17Vous nous disiez,
11:18vous,
11:18votre sentiment,
11:19c'est qu'il se serait
11:20suicidé.
11:22et vous parlez,
11:24c'est un terme
11:25qui est très important
11:26dans cet ouvrage,
11:27vous parlez de la notion
11:28de sacrifice.
11:29Pour lui,
11:30il n'aurait pas assassiné
11:31sa famille,
11:32il l'aurait sacrifié.
11:34Oui,
11:34alors ce n'est pas moi
11:35qui invente cette notion,
11:37c'est lui.
11:38C'est lui.
11:38Et comment on peut le comprendre ?
11:40Il en parle,
11:40exactement.
11:40Il en parle,
11:41il en reparle.
11:42Sur les sites catholiques
11:43et d'ailleurs,
11:45avec de façon,
11:46avec le désaccord
11:47de ses interlocuteurs,
11:50ce qu'il faut comprendre,
11:52c'est que
11:52Xavier Dupont
11:54de Ligonnès
11:54était désespéré.
11:56Et qu'après la mort
11:57de son père,
11:58probablement,
11:59l'idée de suicide
12:00qui était apparue
12:02auparavant,
12:03l'idée de suicide
12:03a été arrêtée.
12:05Mais à partir
12:06du moment où...
12:07Parce que ça a abandonné
12:08sa famille
12:08et ça,
12:10alors c'est très cynique,
12:11mais ça,
12:11il ne voulait pas,
12:12il ne voulait pas
12:13abandonner sa famille,
12:14partir tout seul.
12:15Il ne voulait pas
12:16partir tout seul,
12:16peu de temps auparavant,
12:18un ami de la famille
12:19s'était suicidé
12:20et il avait eu
12:21des mots très durs
12:21à son égard.
12:23C'est un lâche.
12:24Il a abandonné
12:25sa famille.
12:26Et sa sœur aînée
12:27dit que c'est un protecteur.
12:28C'est un point
12:29très important.
12:30Donc,
12:30Xavier Dupont
12:31de Ligonnès
12:32décide de se suicider.
12:34Et il ne faut pas
12:35qu'il se suicide
12:37tout seul,
12:38parce qu'il ne peut pas
12:39abandonner sa famille.
12:40Tout ça ne doit pas
12:41se savoir.
12:42Donc,
12:43aussi bien son suicide
12:44que ses crimes
12:44doivent être cachés
12:45à sa famille,
12:46mais encore faut-il
12:48donner du sens
12:49à une sorte
12:50de bidouillage
12:51théologique
12:52à la sauce
12:53Dupont-de-Ligonnès
12:55autour du sacrifice.
12:57C'est-à-dire
12:57qu'il va
12:58désymboliser
12:59le sacrifice.
13:01Il explique,
13:02par exemple,
13:02que le sacrifice
13:03est au cœur
13:03de la religion catholique,
13:05au cœur des rites,
13:06etc.,
13:06de la messe.
13:07et donc,
13:09ce sacrifice
13:11va devenir
13:11la justification
13:12et il faut bien
13:14réaliser que pour nous,
13:15on est dans
13:16l'abomination absolue,
13:17mais que pour lui,
13:18on est dans le sacrifice
13:20de ce qu'il a
13:21de plus cher,
13:22sacrifice au divin.
13:23Et donc,
13:23le mal devient
13:25le bien.
13:26Alors,
13:26le mal devient le bien,
13:27alors,
13:28c'est quelqu'un
13:29d'intelligent,
13:30dans ses commentaires,
13:31il explique que
13:33la plupart des crimes
13:34sont commis
13:34au nom du bien,
13:35ça il l'a compris
13:36et il a raison.
13:37Et effectivement,
13:38dans ce que j'appelle
13:39le travail psychique
13:40du crime,
13:41il y a notamment
13:42cette inversion
13:43des valeurs
13:45et ce qui,
13:47pour l'immense majorité
13:49des hommes
13:49et le mal,
13:50pour lui,
13:51va devenir un bien
13:53dans ce dernier moment
13:54de sa vie.
13:55Parce qu'il ne faut pas
13:55oublier
13:56qu'auparavant,
13:57Xavier Dupont-de-Ligonnès
13:58était comme tout le monde,
13:59comme vous,
14:00comme moi.
14:00C'est-à-dire qu'on lui aurait
14:01raconté ça,
14:02il aurait dit
14:02mais quelle horreur !
14:03Oui,
14:04c'est ce que vous dites,
14:05il serait
14:05enfin,
14:06il était à ce moment-là
14:06comme nous,
14:07quoi.
14:08Il était à ce moment-là
14:09comme nous ?
14:09À ce moment-là.
14:10Avant.
14:11Est-ce qu'on peut dire,
14:13vous qui avez mené
14:14cette enquête psychique,
14:15est-ce qu'on peut dire
14:16il y a un moment
14:17où il bascule ?
14:19Il y a un moment
14:20où il se dit
14:20je vais réaliser,
14:22je vais commettre
14:23cet acte odieux ?
14:24Alors,
14:25on peut penser que,
14:26si vous voulez,
14:26il a eu un parcours
14:27de désillusion,
14:28désillusion,
14:29puis après,
14:30il a traversé
14:31une phase dépressive,
14:33mais une phase dépressive
14:34compartimentée,
14:35donc il ne parlait pas
14:37aux autres.
14:38Et puis...
14:39Et il aurait verbalisé,
14:40ça aurait été différent,
14:41il en aurait parlé
14:42avec ses proches,
14:44il aurait dit
14:44je suis au fond du gouffre,
14:46ça aurait pu changer
14:47quelque chose ?
14:47Oui,
14:47alors il l'a dit,
14:49il l'a dit,
14:50il l'a dit à ses amis,
14:52il a même fait part
14:53de ses projets,
14:55et puis,
14:56à la Xavier Dupont
14:57de Ligonnès,
14:58aussitôt après,
14:59il dit
14:59mais ne vous affolez pas,
15:01bon voilà,
15:01donc il se rattrape,
15:03donc on peut penser
15:05que peut-être,
15:06s'il s'était ouvert
15:08de sa détresse,
15:09il aurait pu être aidé,
15:09bien sûr,
15:10bien sûr,
15:10enfin c'est une...
15:12C'est une hypothèse,
15:13voilà.
15:13Une hypothèse après coup.
15:15Sacrifice,
15:15pour ne pas...
15:17Alors,
15:17toujours conditionnel,
15:18puisque la justice
15:19n'est pas passée,
15:21sacrifice en tout cas
15:22pour ne pas abandonner
15:24sa famille,
15:24pour rester auprès
15:25de sa famille.
15:26Pourquoi dès lors,
15:27il prend la fuite ?
15:28Pourquoi il ne se suicide pas
15:29aux côtés de sa femme,
15:33de ses enfants ?
15:34Alors vous avez raison
15:34de poser cette question,
15:35la plupart des crimes familiaux,
15:38c'est unité de lieu
15:39et unité de temps,
15:40et c'est dans la foulée
15:41que le sujet se suicide.
15:43Mais là,
15:45rappelez-vous l'équation
15:46que j'évoquais tout à l'heure,
15:48il faut que personne
15:48ne soit au courant,
15:51et donc,
15:52s'il a le projet
15:53de se suicider
15:54après avoir
15:56possiblement
15:59tué sa famille,
16:01je dis possiblement
16:02parce qu'il y a
16:02des réserves juridiques,
16:03qui sont importantes,
16:04effectivement,
16:05à signaler, répéter.
16:07C'est qu'il veut
16:09maintenir
16:10le secret,
16:12notamment
16:12pour sa famille,
16:14et
16:14cette période
16:17est une période
16:18très particulière.
16:19On le voit
16:20à travers ses messages,
16:21c'est-à-dire qu'il
16:22prend de la distance,
16:23on ne sait pas
16:23s'il est à demi-vivant
16:25ou à demi-mort,
16:26et
16:26il
16:27conseille
16:29à sa mère
16:30et à sa sœur
16:30de se
16:31rabibocher
16:32avec l'aîné,
16:33ou alors,
16:35et son dernier message
16:37qui peut paraître
16:37énigmatique,
16:39c'est sur la généalogie
16:40du Christ,
16:41comme s'il s'interrogeait
16:43sur sa propre généalogie,
16:45celle d'un homme
16:47qui, comme le Christ,
16:47n'aura pas de descendance.
16:50Daniel Zaguri,
16:51si vous étiez face à lui,
16:52face à Xavier Dupont
16:54de Ligonesse,
16:55quelles questions
16:56vous voudriez lui poser ?
16:58Est-ce qu'il y en a une ?
17:00Est-ce que vous y avez
17:01déjà pensé à ça ?
17:02Non,
17:03je n'ai pas pensé à ça
17:04parce que,
17:05d'une part,
17:07je ne vais pas
17:08tricher,
17:10je crois,
17:11la probabilité
17:12de sa survie
17:12très ténue,
17:15et d'autre part,
17:16j'ai été frappé
17:17à plusieurs reprises
17:18par le contraste
17:20entre
17:20des personnages mythiques
17:22créés par les médias,
17:24par la réaction sociale,
17:26et les personnes
17:28que je voyais
17:29en face de moi,
17:30comme si,
17:30effectivement,
17:31la Baudruche
17:31s'était complètement
17:32dégonflée,
17:33et j'imagine
17:35quelqu'un
17:36d'assez pathétique,
17:38suscitant la pitié,
17:39et certainement pas
17:40un criminel hors normes.
17:42Daniel Zaguri,
17:43vous avez expertisé
17:44des tueurs en série,
17:45Patrice Allègre,
17:46Guy Georges,
17:47Michel Fourniret,
17:48et beaucoup d'autres.
17:49Quand on est expert psychiatre
17:50auprès des tribunaux,
17:52qu'on entend,
17:53qu'on parle avec
17:54ce genre de personnes,
17:55est-ce qu'on n'a pas
17:56un peu du mal
17:57à dormir le soir ?
17:59Est-ce que ça provoque
18:00des cauchemars,
18:01des insomnies ?
18:02– Alors,
18:03exceptionnellement,
18:04exceptionnellement,
18:06bien entendu,
18:07les horreurs
18:10qu'on lit
18:11dans les dossiers
18:12et que parfois
18:14les sujets
18:15reconnaissent
18:17avec une certaine
18:18jubilation,
18:19ça produit des effets.
18:21Mais mon métier,
18:23c'est de travailler
18:23sur moi-même
18:24et d'en faire quelque chose,
18:27et pas,
18:27si vous voulez,
18:27de le garder
18:29au fond de moi
18:30comme quelque chose
18:32de traumatique.
18:34– Donc ça,
18:34c'est l'objectif ?
18:35On y arrive ?
18:37– On y arrive
18:39dans l'immense majorité
18:40des cas.
18:40Mais vous savez,
18:41j'ai été frappé
18:41par un de mes maîtres
18:42qui est décédé aujourd'hui
18:45et qui m'a dit
18:46« Cette affaire-là,
18:47je garderai des images
18:49jusqu'à ma mort. »
18:50– Daniel Zaguri,
18:52expert honoraire
18:52auprès des tribunaux français.
18:54Un grand merci
18:54d'avoir été avec nous
18:55ce matin sur Sud Radio.
18:56Je rappelle le titre
18:57de votre livre
18:58« L'énigme publique »
19:00numéro 1,
19:00Xavier Dupont
19:01de Ligonnès.
19:02C'est aux éditions
19:02du Seuil.
19:04Lisez-le,
19:04c'est rapide à lire
19:05et c'est passionnant.
19:07En tout cas,
19:07très bonne journée à vous
19:08Daniel Zaguri.
19:09Encore merci Sud Radio.
19:10Il est 9h56.
19:12Dans un instant,
19:12le meilleur de Sud Radio Média
19:13en compagnie
19:14de Valir Expert
19:15et Gilles Gozman.
19:15Je vous dis à demain.
19:17Passez une très belle journée
19:18avec Sud Radio.