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  • il y a 21 heures

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Éducation
Transcription
00:00Alors je vais commencer par répondre parce que je pense que Étienne est partie prenante des deux côtés.
00:05Donc du coup, j'ai eu un rendez-vous avec un éditeur il n'y a pas très longtemps qui à la fin du rendez-vous m'a dit,
00:14enfin nous a dit parce qu'on était plusieurs, voilà je m'excuse par avance parce que vous n'allez pas entendre parler de moi pendant assez longtemps
00:20et puis tout d'un coup tout va devenir urgent et il va falloir rendre les choses immédiatement.
00:24Et en fait c'est souvent l'expérience que j'ai eue du travail dans le monde éditorial,
00:30c'est que les calendriers et les rythmes de travail sont souvent en fait assez différents de la manière dont nous on a l'habitude de fonctionner
00:37dans le milieu de la recherche, dans le sens où il y a des deadlines qui ne sont pas forcément tout à fait bien coordonnés
00:47avec les calendriers universitaires et les choses deviennent très rapidement très urgentes.
00:51Et donc ça nécessite un peu d'adaptation aussi de ce point de vue-là.
00:57Ceci étant pour répondre à la deuxième partie de la question sur la part du travail individuel et du travail collectif,
01:03dans les expériences que j'ai eues qui ne sont pas du tout des expériences de direction de revue ou d'édition,
01:09donc plutôt des directions d'ouvrage,
01:12c'est vraiment l'importance du travail collectif,
01:16et du travail collectif avec les deux niveaux immergés et émergés dont parlait Étienne tout à l'heure,
01:23qui est à la fois le travail sur le fond et le travail sur la forme.
01:28Alors pour prendre un exemple,
01:29j'ai co-dirigé avec deux autres collègues,
01:32Reine-Marie Bérard et Bénédicte Giraud,
01:34un manuel d'introduction aux études historiques.
01:38Et donc ça a été un travail fondamentalement collectif,
01:42déjà parce qu'on était trois à le diriger,
01:43et puis ensuite parce qu'il n'y avait plus d'une quinzaine d'auteurs pour tous les chapitres.
01:46Donc voilà, ça nécessitait évidemment de la coordination.
01:49Mais en fait, surtout,
01:50ce qui a contribué à faire en sorte que le livre, à mon avis, fonctionne,
01:55et que le manuel numérique lui-même fonctionne,
01:57c'est le travail très étroit qu'on a pu faire avec les éditrices qui ont travaillé dessus,
02:02en particulier Aurélie Val et Camille Duobou,
02:06qui en fait, à toutes les étapes de la conception du chapitre,
02:10de l'écriture du chapitre jusqu'à la mise en page,
02:13jusqu'à l'impression papier même du livre,
02:16ont vraiment contribué à façonner ce qu'a été le livre,
02:20et ça aurait été complètement différent si on n'avait pas eu toute cette réflexion collective
02:23sur la mise en forme, sur les fonctionnalités numériques pour la version numérique.
02:30C'est vraiment un travail collectif, au moins un bon travail éditorial,
02:33c'est vraiment un travail collectif, sinon ça ne marche pas.
02:38Je suis entièrement d'accord avec ce que dit Catherine,
02:40y compris de mon point de vue d'éditeur,
02:42puisque je suis un peu des deux côtés, comme tu le disais,
02:46en étant à la fois, dans un certain nombre de cas, un auteur,
02:49et dans d'autres cas, un éditeur.
02:53Ce que je veux dire surtout sur ce plan,
02:56c'est qu'il y a dans la recherche, comme dans un certain nombre d'autres domaines,
03:00par exemple la littérature,
03:03une dimension très individualiste dans l'apparence publique,
03:08c'est-à-dire qu'on écrit des livres, on a notre nom dessus,
03:11il y a des phénomènes de réputation, de notoriété,
03:14il y a des gens qui sont plus visibles que d'autres,
03:16qui dirigent des laboratoires, qui dirigent des programmes,
03:19et donc il y a une sorte de personnalisation de la recherche.
03:23Et en même temps, ce que montre le travail éditorial,
03:27c'est l'inverse de ça,
03:28c'est-à-dire que, de même que le travail de laboratoire,
03:31en fait, le travail éditorial fait apparaître
03:34la dimension profondément collective
03:37qui est nécessaire pour arriver à un résultat,
03:42quand bien même à la fin, le livre est signé par quelqu'un en son nom propre.
03:45C'est un peu un processus comme celui de l'économie du cinéma, par exemple,
03:50où il faut des centaines de gens pour produire un film,
03:53et qu'à la fin, disons, les structures culturelles d'appréhension de ce type d'objet symbolique
03:59vont assigner, on va dire, c'est un Hitchcock.
04:01Mais en fait, un Hitchcock, c'est des centaines de gens
04:04qui ont travaillé à fabriquer ce film.
04:06Alors, lui a joué un rôle, mais beaucoup d'autres,
04:08et on pourrait aussi penser à la métaphore du chef d'orchestre
04:11dans un certain nombre d'autres cas.
04:12Donc, ça veut dire quoi ?
04:13Ça veut dire que, non seulement la recherche est profondément collective,
04:17la phase de réflexion, d'élaboration, d'échange, de discussion,
04:21qui peut d'ailleurs être l'écriture ou signature collective,
04:24mais qui peut, même quand vous signez un texte tout seul,
04:26vous l'avez rarement écrit réellement tout seul du côté de la recherche,
04:30et vous l'avez encore moins écrit tout seul du côté de l'édition,
04:32parce que vous avez une ou plusieurs personnes
04:35qui ont été vos interlocuteurs,
04:37déjà dans la conception du livre,
04:39ensuite dans sa mise en œuvre,
04:40et puis dans sa correction,
04:42et puis vous avez, encore au-delà,
04:44une chaîne de production du livre,
04:45alors par exemple, aux éditions de la HSS,
04:47moi, c'est quelque chose qu'on gère quotidiennement,
04:50c'est-à-dire qu'entre le manuscrit ou le synopsis
04:52qui arrive par mail, une idée de livre,
04:55ou quelqu'un qui nous dit,
04:56tiens, je fais une thèse là-dessus,
04:57mais j'aimerais bien faire le livre,
04:59et puis le livre qui arrive en librairie,
05:01il y a un nombre d'opérations,
05:02donc non seulement il y a une épaisseur temporelle,
05:03mais il y a un nombre de gens qui vont lire, discuter,
05:06revenir, dire à l'auteur ou à l'autrice,
05:09non, ce n'est pas comme ça,
05:10vous pourriez faire comme ci, comme ça,
05:11des réunions, des moments d'échange,
05:13le travail sur le texte,
05:14ensuite la correction,
05:16et puis même une fois que le livre est corrigé,
05:17la composition, la maquette,
05:19l'envoi chez l'imprimeur,
05:20la correction des épreuves,
05:21le retour chez l'imprimeur,
05:23la distribution, la diffusion,
05:25la communication autour avec la presse,
05:28les événements,
05:29c'est-à-dire qu'en fait,
05:30c'est une sorte de gamme complète de métiers,
05:34et dans laquelle l'auteur ou l'autrice,
05:37le chercheur, la chercheuse,
05:39sont finalement à la fois le personnage principal de l'histoire
05:44et en même temps sont balottés par tout ce rythme de production,
05:49toutes ces collaborations assez diverses,
05:51et ça, le monde de la recherche,
05:53on n'est pas toujours assez conscient,
05:55c'est-à-dire que beaucoup de gens arrivent dans le monde de l'édition
06:00en étant un peu naïf, un peu ignorant
06:04ou pas toujours très intéressés
06:06par la dimension matérielle du travail,
06:08alors que, par exemple, elle est considérable,
06:10c'est-à-dire qu'il faut du temps pour fabriquer un livre,
06:12il y a des contraintes matérielles,
06:14il y a une histoire matérielle du livre,
06:17et peut-être on aura l'occasion d'en reparler,
06:19qui joue un rôle essentiel dans la manière dont le savoir est produit
06:23et qui est une histoire essentiellement collective.
06:25Donc ça, c'est vraiment quelque chose, je pense, d'intéressant
06:28à partager en termes d'expérience,
06:30dans ces moments un peu frontières
06:32où on passe de l'auteur ou l'autrice individuelle
06:36à l'éditeur, avec ces positions, disons, médianes
06:42que peuvent être les directrices d'ouvrage,
06:45dans le cas d'un manuel,
06:47les responsables de numéros de revue,
06:48quand il y a des revues qui délèguent à des gens hors de la revue
06:52la direction de certains numéros.
06:55Et donc là, on est vraiment sur des mondes de négociation
06:57qui sont à la fois passionnants, mais qui sont un peu subtils
07:00et qui nécessitent d'être compris.
07:02Et je pense que c'est très important
07:03que les chercheuses et les chercheurs aient en tête ce monde-là
07:07pour finalement pouvoir aussi intégrer dans leur travail
07:12ce genre de contraintes et ce genre de dispositifs, disons,
07:16plutôt que de contraintes.
07:17Oui, c'est ça, parce que c'est quelque chose
07:19qui est fondamentalement positif.
07:21Je pense que parfois, on a cette espèce de mythe
07:23de l'auteur ou de l'autrice, y compris dans la recherche.
07:26Et donc les gens, ils arrivent avec leurs manuscrits
07:28en pensant que c'est leur œuvre avec un grand taux
07:30et donc du coup, ça n'a plus bougé.
07:32Alors qu'en fait, ça va l'enrichir d'autant plus
07:36si jamais toutes ces discussions et ces apports ont lieu.
07:41Et plutôt que de se braquer, je pense que justement,
07:42il faut accueillir aussi ces points de vue
07:44qui feront que le livre sera meilleur
07:47ou que l'ouvrage sera meilleur.
07:48Merci d'avoir regardé cette vidéo !

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