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  • il y a 2 heures

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Éducation
Transcription
00:00Il y a plusieurs éléments dans votre question qui est vraiment très importante.
00:05Il y a la question des formes de renouvellement historiographique et puis la question des formes de renouvellement technologique qui sont en partie liées.
00:14La forme de renouvellement historiographique a toujours été étroitement liée au développement de l'édition je pense.
00:21C'est-à-dire qu'il y a des vagues historiographiques qui s'accompagnent de vagues de création de collections ou de revues à travers le temps.
00:31Et on voit très bien, et ça c'est vrai depuis la création de la revue historique disons, enfin en gros depuis la fin du 19ème siècle,
00:39des projets éditoriaux sont corrélés à des projets intellectuels, c'est vrai des annales et puis c'est vrai plein d'autres choses.
00:45Ça a été à mon avis fortement transformé par quelque chose dont on n'a pas encore beaucoup parlé, dont il faut absolument parler,
00:55qui est le développement de l'édition numérique.
00:58C'est-à-dire qu'une des différences entre disons les 20 dernières années et la période précédente,
01:06c'est que le coût d'entrée technologique pour la production d'une revue a baissé à travers la possibilité de créer des revues nativement numériques.
01:17Et par ailleurs l'objet revue s'est lui-même brouillé, puisque aujourd'hui la question d'évaluer la relation entre un blog, un carnet de recherche, une revue, un périodique annuel, est devenue beaucoup plus floue.
01:30Donc un certain nombre des transformations historiographiques les plus intéressantes de ces dernières années ont été investies sur des revues qui sont des revues nativement numériques.
01:40Et beaucoup des projets les plus originaux qui sont nés, sont nés plutôt dans des environnements nativement numériques,
01:45souvent portés par des gens qui au moment où ils ont défendu leurs projets étaient des doctorantes, des doctorants.
01:52Alors ça a existé dans les années 80 par exemple.
01:55Je parlais de la revue médiévale tout à l'heure, publiée par les presses universitaires de Vincennes.
01:58Elle est née au début des années 80 comme une revue de doctorants et de doctorantes.
02:02Et puis ces gens ont grandi, d'autres sont arrivés, et puis c'est devenu une revue qui aujourd'hui est une des grandes revues d'histoire du Moyen-Âge.
02:10Aux éditions de l'OHSS par exemple, on co-édite avec la Philharmonie de Paris une revue qui s'appelle Transposition,
02:16qui est une revue musique et sciences sociales, qui est une revue nativement numérique,
02:19née comme une revue de doctorants et doctorantes et qui elle aussi s'est progressivement développée.
02:25Donc on pourrait, sur la question du genre que vous posez, sur la question environnement, trouver des exemples un peu comparables.
02:32Donc il y a eu une transformation de l'économie des revues, qui est une transformation qui concerne l'ensemble des revues,
02:38puisque aujourd'hui on lit quand même beaucoup plus les revues en ligne, que ce soit en HTML ou en PDF, qu'on ne les lit en papier.
02:43Et ça a permis d'intégrer un certain nombre de transformations, et d'intégrer aussi une autre manière de concevoir le travail éditorial,
02:52en y agitant par exemple des contenus, en y ajoutant de l'hypertexte, enfin le manuel dont Catherine a assuré la direction et dont elle parlait tout à l'heure,
03:01est un manuel où l'hypertexte joue un rôle très important, donc on peut naviguer à partir du manuel dans tout un espace de texte scientifique,
03:09on peut ajouter des contenus visuels, il y a de nouvelles sonores, donc les transformations historiographiques,
03:18l'interdisciplinarité que vous évoquez, c'est aussi lié à des conditions techniques de production.
03:25Alors cela étant, il y a une sorte d'écosystème des revues, parce que les revues ça coûte quand même de l'argent et du temps,
03:31même quand c'est une équipe de doctorants avec toute son énergie qui s'y met au départ,
03:34à un moment donné on se fatigue, il faut avoir des financements, il faut avoir des gens qui font le travail derrière,
03:41et donc il y a un équilibre difficile parce que là aussi, j'ai lu récemment que dans les dernières années,
03:49on crée dans le monde de l'enseignement supérieur français, toutes disciplines confondues, une revue par semaine au moyen.
03:54Alors ça crée aussi des difficultés, c'est-à-dire que l'augmentation du nombre d'articles publiés est aussi liée à l'augmentation du nombre de revues
04:05et à sa dispersion gigantesque qui a des effets négatifs à un certain point sur la diffusion scientifique,
04:13parce qu'on finit par avoir une sorte d'illisibilité du paysage intellectuel,
04:20donc c'est tout à fait bien et tout à fait sain que des nouvelles revues apparaissent,
04:24parfois il n'est pas nécessaire de créer la 72ème revue sur la même thématique,
04:30et inversement de temps en temps il serait raisonnable que certaines revues meurent,
04:33parce que bon, il y a des revues vivantes, il y a aussi des revues mortes vivantes,
04:38il y a le concept de la revue zombie, donc c'est aussi une question là, non ?
04:44Oui si si, c'est un peu dur de dire ça.
04:46En tant que tu ne cites pas de nom, tout va bien.
04:51Oui non, je ne suis pas sûre d'avoir grand-chose à rajouter de fait,
04:53mais l'expansion des revues, on retombe sur les deux points dont on parlait au tout début de l'entretien,
05:00le but c'est de diffuser et le but c'est aussi d'avoir un certain processus de validité aussi des contenus scientifiques,
05:08et c'est vrai que cette lisibilité de la validation scientifique, elle se perd à partir du moment où on a des revues qui partent parfois un peu dans tous les sens.
05:20Ceci étant, c'est aussi important d'avoir ce dynamisme là, ça permet d'institutionnaliser aussi et de diffuser des nouvelles problématiques.
05:27En lien avec ça, de façon un tout petit peu marginale peut-être,
05:34Étienne parlait tout à l'heure du fait que le monde de l'édition c'est aussi un monde de pouvoir, d'exercice du pouvoir,
05:40et je pense que c'est aussi un peu lié à ces questions là.
05:43Les directeurs de collection ou les responsables de revues, un des grosses parties de leur travail c'est justement d'essayer d'aller trouver des articles,
05:53trouver des personnes qui vont pouvoir être publiées, idéalement en essayant de refléter aussi la diversité du paysage scientifique,
06:01d'essayer de valoriser des problématiques nouvelles, intéressantes qui émergent.
06:06Donc c'est vraiment un effort de tous les instants.
06:09Mais dans cet effort, on n'est pas non plus exempt de biais.
06:13Et ça c'est une des choses sur lesquelles le monde de l'édition est sans doute pas encore hyper au point,
06:20mais pour autant travaille aussi dessus depuis un certain temps, c'est la question des biais de genre.
06:26Alors pour les annales, Étienne avait écrit il y a quelques années justement un article qui expliquait à quel point
06:30la publication des femmes dans la revue des annales était faible pour toute une série de biais
06:37qui sont liés aussi à des structures historiques des pesanteurs depuis la création de la revue.
06:43Mais il y a aussi des biais institutionnels, géographiques.
06:48Est-ce que les grandes revues vont avoir par exemple plutôt tendance à publier des gens qui sont au CNRS
06:53ou des gens qui sont en région parisienne par rapport à d'autres institutions universitaires ?
06:59Voilà, c'est aussi des questions qu'il faut se poser il me semble
07:03et qui approchent l'action pour poser peut-être un peu par la bande.
07:07Merci d'avoir regardé cette vidéo !

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