00:00Alors pour un ouvrage, admettons, prenons l'exemple de quelqu'un qui a soutenu une thèse.
00:10Les thèses à la française sont très grosses, trop grosses, donc on arrive avec 2 millions de signes,
00:172 millions et demi de signes, on ne sait pas qu'en faire, vous allez voir un éditeur.
00:20Alors, un éditeur commercial, si vous êtes sur une thématique qui peut avoir une chance d'intéresser un public un peu large,
00:26un éditeur plus scientifique dans la plupart des cas.
00:29Et la première chose que l'éditrice ou l'éditeur vous dit, c'est que c'est trop gros.
00:33Donc il va falloir couper et garder un tiers.
00:38Donc, disons, le centre de gravité moyen d'un livre imprimé est entre 500 000 signes et 1 million de signes, disons, pour les gros.
00:47Les thèses, le centre de gravité moyen des thèses est entre 1 million et demi et 2 millions et demi de signes.
00:51Donc ça veut dire que déjà, en fait, vous allez être obligé de penser un livre.
00:55Et penser un livre qui n'est pas ce que vous avez soutenu.
00:59Ça vaut pour les thèses, ça vaut pour les habilitations.
01:01Ça vaut même parfois pour des manuscrits que des collègues écrivent tout seuls chez eux.
01:04Et puis ils arrivent en vous disant, ben voilà.
01:06Or, la question de la taille est une des questions qui est discutée très souvent en amont.
01:11Parce qu'elle paramètre une certaine conception du récit, de l'ouvrage, du plan.
01:16Donc il vaut mieux réfléchir un peu au genre de livre qu'on veut écrire.
01:20Et très souvent, c'est là que la discussion commence.
01:21C'est-à-dire, quel genre de livre voulez-vous écrire ?
01:24Avec qui ? Pour quel public ? De quelle façon ?
01:27Donc après, il y a souvent, disons, si on part d'un instant à un moment donné,
01:33il y a souvent plusieurs mois de travail de réécriture une fois que vous avez eu une première discussion avec un éditeur ou un éditeur.
01:41Il y a un travail de réécriture qui peut être accompagné par les éditeurs.
01:46Ça, ça dépend un peu des pratiques.
01:47Ça dépend aussi des envies de celles et ceux qui écrivent.
01:50Donc vous pouvez des fois, il y a des auteurs et des autrices,
01:53je n'ai pas de nouvelles pendant six mois, un an, deux ans, trois ans.
01:56Il y en a d'autres qui, tous les mois ou tous les mois et demi, m'envoient des pages en me disant,
02:01voilà, j'écris ça, est-ce que ça va dans le sens du projet dont on a parlé ?
02:05Bon.
02:05Arrive à un moment donné le manuscrit complet.
02:07Et dans les maisons d'édition scientifique, ce manuscrit complet,
02:12comme dans les revues scientifiques, il fait l'objet d'une procédure d'expertise.
02:16C'est-à-dire qu'indépendamment de ce qu'on en pense à l'intérieur de la maison d'édition,
02:20le texte va être lu par un, deux, trois spécialistes à l'aveugle.
02:24Alors, un aveugle relatif parce qu'il arrive qu'on puisse reconnaître l'auteur ou l'autrice des travaux.
02:30Mais disons, ils sont lus à l'aveugle, ils font l'objet de rapports.
02:33Ces rapports reviennent à la maison d'édition.
02:35Et dans les maisons d'édition privée, ça existe aussi,
02:39mais on est plutôt dans des procédures d'évaluation de réception.
02:44C'est-à-dire plutôt, il y a des lecteurs, mais les lecteurs essaient plutôt d'imaginer
02:48si le livre va rentrer dans la collection et va trouver son public.
02:52Dans l'édition scientifique publique, l'idée est plutôt une vraie expertise scientifique.
02:57C'est-à-dire qu'on a vraiment des rapports.
02:58Et l'équipe éditoriale se réunit, et le comité de rédaction dans le cas des non-reux,
03:03avec ces rapports.
03:04Nous, on a aussi lu le texte et puis on dit, bon, est-ce que ce texte-là,
03:08qui a connu donc une première, par exemple une soutenance dans le cas d'une thèse,
03:12un travail de réécriture, est-ce que troisième phase, on va le prendre ou pas ?
03:16Et on dit à ce moment-là, oui ou non, mais souvent on dit oui mais,
03:21c'est-à-dire que, et pour les articles c'est la même chose,
03:24je regarde Catherine parce qu'on est aussi dans un comité de rédaction ensemble,
03:27donc on a souvent ce genre de discussion professionnelle,
03:29c'est-à-dire est-ce qu'on prend, est-ce qu'on ne prend pas, est-ce qu'on répond oui ?
03:32Alors on a des avis qui sont parfois contradictoires,
03:35on a des évaluations scientifiques qui nous disent,
03:37ça c'est bien, mais ça c'est pas bien, ça ça pourrait être modifié.
03:41Donc on arrête une position de synthèse, qui est souvent une position
03:44qui doit s'accompagner d'un travail de réécriture ou de modification
03:49qui prenne en compte l'avis de l'ensemble des lecteurs.
03:52Donc ça c'est déjà un boulot très important.
03:55Là encore, on rajoute de l'épaisseur en temps de travail,
03:58en nombre de gens impliqués, en mois,
04:00mais si on dit, on va prendre votre manuscrit,
04:02mais on aimerait que vous changiez un certain nombre de choses,
04:05alors à ce moment-là, l'autrice-auteur reprend son texte, le modifie,
04:09et là on commence à rentrer dans une discussion sur le calendrier,
04:12qui est beaucoup plus pressante, je dirais, dans l'édition commerciale et généraliste,
04:18qui dans l'édition scientifique publique est souvent un peu plus tranquille,
04:25mais disons qu'on commence à imaginer à quel moment on va le publier,
04:27c'est-à-dire à quel moment on va l'inscrire dans un programme pour des monographies,
04:31ou à quel moment on va le mettre dans un sommaire pour un numéro de revue.
04:35Est-ce qu'on va le mettre dans un numéro de baria ?
04:37Est-ce qu'on a un numéro thématique autour d'un sujet qui correspond ?
04:40Enfin, là, disons, le projet commence à se cristalliser,
04:43et donc on demande des délais à tenir pour le travail de réécriture.
04:50Et puis, le texte revient, livre, article, monographie,
04:54et là commence la phase de préparation de copie,
04:57ce qu'on appelle la préparation de copie,
04:59c'est-à-dire qu'il y a des éditrices,
05:01des éditeurs, mais c'est un métier qui est structurellement,
05:04d'un point de vue professionnel, très féminisé,
05:05donc il y a 80 ou 90% d'éditrices,
05:10qui, en particulier dans le public,
05:12qui commencent à travailler ligne à ligne le texte
05:15pour vérifier la correction de la langue,
05:17la cohérence de l'argumentation,
05:20vérifier les notes de bas de page,
05:22faire un certain nombre de suggestions de réécriture,
05:25et donc vous avez une nouvelle phase d'aller-retour,
05:28mais qui porte plutôt sur l'écriture, en fait,
05:31la fluidité, l'argumentation et la correction.
05:34Puis ça avance, ça avance,
05:36quand la version finale est arrêtée,
05:38c'est-à-dire en fait on a une sorte de fichier Word
05:40qui est dans un état très amendé,
05:43si on revient au fichier qui a été soutenu devant un jury,
05:46par exemple, et qu'on en est à ce stade-là,
05:48il y a vraiment eu tout un parcours,
05:50et ce fichier Word, à ce moment-là,
05:52il va faire l'objet d'un travail avec un logiciel de maquettage
05:55pour créer le fichier qui va être le fichier de base pour l'impression.
06:02C'est-à-dire que pour passer du Word au livre imprimé,
06:07il y a un certain nombre de logiciels,
06:10comme InDesign par exemple, qui est un des plus courants,
06:14qui permet de faire ce qu'on appelle la maquette,
06:16c'est-à-dire l'aspect physique du livre qu'on lit matériellement,
06:19ou l'aspect physique de la revue.
06:22On fait ça, on fait ce qu'on appelle des épreuves,
06:25c'est-à-dire en fait une première impression
06:26qui est une sorte de galop d'essai
06:29qui revient chez les éditrices et chez les auteurs et autrices
06:32qui fait l'objet de corrections,
06:34c'est-à-dire que vous pouvez impérer des coquilles,
06:37c'est corrigé,
06:38les corrections sont rentrées dans la maquette,
06:42il y a une deuxième série d'épreuves
06:44qui est normalement là destinée vraiment juste à vérifier
06:46que tout a été bien intégré,
06:48qu'il n'y a pas trop de conneries.
06:49Quand les choses tournent mal,
06:50il y a une troisième série d'épreuves.
06:52Là, les choses peuvent devenir chaotiques
06:53dans un certain nombre de cas.
06:54Si ça se passe bien,
06:56deuxième série d'épreuves.
06:57Et puis, quand on arrive à la fin,
07:00il y a ce qu'on appelle le bon à tirer.
07:02Et à ce moment-là,
07:03les fichiers partent chez l'imprimeur
07:05et l'imprimeur réalise matériellement le livre.
07:10Là, il faut encore au moins trois semaines environ,
07:12par exemple, entre le moment du BAT
07:14et le moment où le livre va être matériellement fait.
07:17Puis, quand le livre ou la revue sont matériellement faits,
07:19ils sont chez l'imprimeur.
07:20Donc, il faut encore qu'il soit réexpédié
07:22en partie à la maison d'édition,
07:24distribué dans les librairies,
07:26les bibliothèques auprès des abonnés.
07:28Donc, derrière, il y a toute une logistique
07:29qui fait intervenir encore d'autres gens
07:31et en particulier ceux qu'on appelle
07:33les diffuseurs-distributeurs.
07:35Dans le cas des éditions de la HSS,
07:37par exemple, c'est Harmonium Mundi Livres.
07:39C'est des gens dont le métier est d'assurer
07:40à la fois la distribution matérielle
07:43avec les camions qui vont livrer les caisses de livres
07:45et ce qu'on appelle la diffusion,
07:48c'est-à-dire la partie commerciale,
07:49de représentants qui vont dans les librairies,
07:52qui communiquent avec les bibliothèques
07:53et qui disent, dans trois mois,
07:55on va faire paraître ça, ça et ça.
07:57Et les libraires, comme tous les commerçants,
08:00commandent un certain nombre d'ouvrages,
08:02disent, ça, ça ne nous intéresse pas tellement,
08:04ça, ça a l'air chouette,
08:06livrement 3,
08:07ça, je vais tenter livrement 1.
08:10Et puis, à mesure que les libraires
08:12vendent ou pas les livres,
08:14alors ils refont des commandes,
08:15il y a tout un processus derrière.
08:17Et donc, toute une économie
08:18qui va être aussi fonction
08:20du fait d'avoir, par exemple,
08:22de la presse, de passer à la radio,
08:24d'avoir des articles dans les journaux,
08:25et puis, elle bouche à oreille.
08:26Donc, et ça, ça vaut,
08:28évidemment, pour les livres.
08:30Pour les revues,
08:31l'économie est un peu différente
08:32parce que la diffusion est beaucoup électronique,
08:35les abonnements jouent un rôle très important,
08:37mais de temps en temps,
08:38il y a des numéros de revues
08:38quand ils sont thématiques
08:39qui, pour des raisons d'actualité,
08:41par exemple,
08:42ou pour des raisons de sujets,
08:44disons, particulièrement importants
08:48du point de vue sociopolitique,
08:49vont d'un seul coup réussir
08:51à se vendre en librairie,
08:53ce qui est quand même,
08:54aujourd'hui, assez rare
08:55dans le cas des revues.
08:56Donc, vous voyez,
08:56c'est un peu tout ce processus.
08:59Et pour le dire vite,
09:01en gros, dans le cas d'une monographie,
09:02il faut souvent 2-3 ans
09:03pour parcourir l'ensemble de ce parcours.
09:08Un article publié dans les annales,
09:10je dirais que c'est souvent aussi
09:112-3 ans
09:12entre le moment de la première conception
09:15et le moment où c'est imprimé
09:18et où la revue est disponible
09:19à la bibliothèque
09:20de 3 ans et assez courant.
09:22Après, on peut faire beaucoup plus vite.
09:24Dans l'édition scientifique,
09:25ça peut arriver.
09:26Dans l'édition courante
09:28de ce qu'on appelle, par exemple,
09:30les docs ou les enquêtes,
09:31les maisons d'édition qui sont spécialistes
09:33dans les livres d'actualité politique,
09:36dans les livres qui sont liés
09:37à des élections,
09:39à des affaires publiques,
09:42alors là,
09:43on a une économie raccourcie
09:45où il y a des gens
09:45qui sont capables de produire un livre
09:47en 3 mois.
09:48Mais, justement,
09:50ça c'est un autre monde
09:51que celui de l'édition scientifique.
09:52de l'édition scientifique.
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