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  • il y a 2 jours
DB - 08-12-2025

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00:00:00C'est parti !
00:00:301420 à Bourges, dans le jardin de l'auberge Palourde.
00:00:35Jacques !
00:00:35Marcelle !
00:00:36Pourquoi c'est qu'elle se démange tellement ?
00:00:38Pas seulement celle de la cathédrale, mais celle de Sainte-Acrouillette.
00:00:42Quand même, il n'y a pas le feu.
00:00:43Il y a le bœuf, c'est en son honneur.
00:00:45Toute cette chanson pour du bétail, ça peut nous mener loin.
00:00:49Avec les malfaiteurs qui ratissent la province,
00:00:52souhaitons qu'ils finissent par comprendre la musique, le bétail.
00:00:54Ils rentreraient en ville de lui-même sur un coup de trompette.
00:00:56Pourquoi pas faire un air de guitare ?
00:00:58Dis-moi Jacques !
00:01:01Marcelle, qui a-t-il ?
00:01:04Ce jardin où nous sommes ?
00:01:07Ce jardin, je crois que c'est bien de m'avoir amenée ici.
00:01:10Le règlement des jeunes filles prévoit
00:01:11qu'une prude femme les escorte partout.
00:01:15Tu m'as fiancé ?
00:01:16L'acte est prêt.
00:01:18D'ailleurs, ce jardin, mon père va l'acheter.
00:01:21L'acte est prêt sans doute aussi.
00:01:23Ton père et toi, ce qui touche vos yeux, tout de suite, c'est à vous.
00:01:25Ce jardin, surtout, touche notre mur.
00:01:30La confrérie des sonneurs du Berry.
00:01:37Oh, des soufflisants, non !
00:01:40Oh, le bœuf arrive !
00:01:42Le bœuf !
00:01:43J'aperçois les roses qu'il a sur le coup !
00:01:46Oh, mais il y a trop de monde devant moi !
00:01:49Ah, quelle idée !
00:01:51Être venu dans ce jardin !
00:01:52Chéri, tous en famille, à la maison, dans la fenêtre,
00:01:54en nous dévisant la tête pour voir, tu es tout fait.
00:01:56Ton père, mon père, ta mère, la mienne,
00:01:58ils y sont crabes serrées dans la fenêtre.
00:02:00Il faut aller vers tout le monde.
00:02:01Tu as oublié de joindre à la parenté ce mélancolique jeune homme,
00:02:05vêtu de verre, qui campe chez vous depuis hier.
00:02:12Oh, les cornes !
00:02:14Les cornes !
00:02:15Toutes dorées !
00:02:18Qu'on vient de dire ensuite la France, ravagée.
00:02:22On ne peut plus regarder.
00:02:24Mais regarde !
00:02:26En rouge et noir, derrière le bœuf,
00:02:28qui sont-ils ceux-là ?
00:02:30Vous envoyez les bouchers ?
00:02:31Rouge et noir,
00:02:33cruels couleurs.
00:02:36Oh, Jacques le bœuf !
00:02:38Il s'arrête !
00:02:39Il s'arrête devant chez toi !
00:02:40Il se passe combien, d'un croisement ?
00:02:43Faut en faire ce qu'il s'agisse !
00:02:45Il parle à mon père,
00:02:46au jeune homme vert,
00:02:48il ne cesse de se passer !
00:02:51Les enchères vont avoir lieu.
00:02:56Seigneurs, dames et toutes gens,
00:02:57dans ce jeudi d'avant le carême,
00:02:59nous mettons à l'encore public
00:03:00ce bœuf pétant de graisse et puissant guletier.
00:03:03De la tête à la queue tout en pure viande,
00:03:05dehors de la neige,
00:03:06dedans de la framboise.
00:03:08Viande à ses débuts durcie par le labour,
00:03:10et puis nourrie et attendrie
00:03:11à l'herbe de nos pâturages,
00:03:13800 livres bon poids sur le dos de la main.
00:03:15Une affaire à saisir !
00:03:17La paritaire devrait vendre sa langue aussi.
00:03:19Elle marche bien !
00:03:21À présent, comme de juste,
00:03:23vous voulez savoir l'argent où elle ira ?
00:03:25Notre cathédrale de Bourges !
00:03:27Pourquoi changerait-elle des autres cathédrales ?
00:03:29Pour que son clocher se termine !
00:03:31Elle réclame des fonds, elle aussi !
00:03:34Vous l'entendez ?
00:03:35La cathédrale frappe à la po...
00:03:372 francs !
00:03:382 francs !
00:03:38La mise est considérable !
00:03:40On peut refaire une toiture pour 2 francs !
00:03:42Mais un clocher sollicite qu'on n'ait pas peur de grimper !
00:03:46Ardi !
00:03:48Grimper !
00:03:50Il avait pourtant été convenu
00:03:53que les bouchers se retiendraient pour courir !
00:03:56Ah non, messieurs les riches bourgeois !
00:03:58Le meilleur de votre cœur !
00:03:59Faites qu'on le voit !
00:04:01800 livres de chair, je répète !
00:04:03Et j'ajoute que le gagnant sera félicité
00:04:05par notre évêque patriarcal !
00:04:07Nous sommes à 2 francs 15 sous !
00:04:09Une fois, deux fois !
00:04:113 !
00:04:12C'est ton père !
00:04:143 !
00:04:14Ah, celui-là !
00:04:153 francs !
00:04:163 francs viennent de retentir !
00:04:18Sommes merveilleuses et bouleversantes
00:04:20qui flattent à la fois le bœuf et le clocher !
00:04:23Moi, j'en ai le souffle coupé !
00:04:25Regretons néanmoins qu'au trèfle,
00:04:27va se défaut ce quatrième fleuron
00:04:29que serait l'astre de cœur !
00:04:314 !
00:04:334 francs !
00:04:37Mon père m'a devancé d'un rien,
00:04:39j'étais moi-même sur le point d'en chérir !
00:04:40Mais qu'est-ce que vous allez en faire
00:04:41de tout ce pot en feu ?
00:04:434 francs !
00:04:44Bien vu, bien entendu !
00:04:45Ce vaillant bœuf charnu !
00:04:47Nous l'adjugeons à...
00:04:49Pierre Coeur !
00:04:52Marchand de pot doux et de castors,
00:04:53d'armure, de tour de branche,
00:04:54d'autre sainteur et de tout ce qu'il faut
00:04:55pour l'écurier et la maison !
00:04:57Par le causier du pauvre crieur,
00:04:59la cathédrale remercie le plus offrant !
00:05:02À présent, tous à l'ancien marché
00:05:04pour les jeux de souplesse et le tir au canard !
00:05:07Et des vendangeurs, des scarcelles surtout !
00:05:10Méfiez-vous !
00:05:12Que nous allons en faire ?
00:05:14Les malheureux de l'hôpital le nettoieront jusqu'à l'os !
00:05:17Quelle bonté !
00:05:19Pourtant mon petit doigt me dit que dans l'histoire,
00:05:21vous deux, cœur père et cœur fils,
00:05:22vous désirez faire voir que vous avez de quoi !
00:05:24Pour avoir de quoi ?
00:05:25Il faut en gagner !
00:05:26Mais pour en gagner, il faut en avoir !
00:05:28C'est la Bible des Auvergnats !
00:05:30Vous êtes de là-bas ?
00:05:31Pas tout à fait !
00:05:32Voyons, je t'expliquais, de 5% dans le bourbonnet !
00:05:36Quand tu dis 5%, je comprends !
00:05:385% !
00:05:39J'admets néanmoins que de la peau d'un bœuf,
00:05:42on peut tirer 40 paires de brocins !
00:05:44L'armée en consomme beaucoup !
00:05:46Ton opulent chiffonnier de père !
00:05:49Et toi tout autant, ce qui m'enchante chez vous,
00:05:50c'est le nom !
00:05:51S'appeler cœur, quand on devrait s'appeler cuir !
00:05:54Cœur, après tout, n'est peut-être qu'une façon d'écrire cuir,
00:05:56tu préférerais ?
00:05:57Si j'aime que tu m'épouses, c'est beaucoup pour ce son si profond, si plein !
00:06:03Cœur, cuir, cuir, quelle horreur !
00:06:07Ton cœur, mon cœur, j'y taillerais de grosses tranches,
00:06:12je le presserais dans mon évier,
00:06:13je le suspenderais tout cramoisi chez nous,
00:06:16dans le vestibule, au plafond,
00:06:18pour qu'il s'égoutte lentement,
00:06:19et que s'égoutte en tombant.
00:06:21Toc, toc, frappe le temps !
00:06:26Vous, votre père, c'est le prévôt,
00:06:29c'est-à-dire la justice, la police, les impôts.
00:06:31Par-dessus le marché, vous vous appelez Marcel de Léopard.
00:06:35Vous n'êtes rassurante par la généalogie, pas plus que par l'étymologie.
00:06:39Je m'achemine à penser que notre convenu mariage ne fut jamais dans votre esprit
00:06:43qu'un moyen de m'approcher afin de me déchiqueter.
00:06:46Dans le projet de nous unir,
00:06:48si de nous deux quelqu'un soupesa, remacha,
00:06:51ce fût-vous, ton père et toi ?
00:06:53Très enclas à me demander pour la bonne odeur d'argent frais
00:06:56qui flotte autour de ceux qui m'ont donné le jour.
00:06:59Papa les impôts, maman la monnaie.
00:07:02Ma branche maternelle frappe depuis trente ans la monnaie du royaume.
00:07:06Au bout du compte, vous comptez pour compter.
00:07:09Je comprends mal.
00:07:11Vous ajoutez les chiffres, les chiffres et les chiffres
00:07:13dans le dessin d'avoir de l'importance.
00:07:16Je dis bien, vous comptez pour compter.
00:07:20Le jardin, le bœuf, moi, autant de gestes de théâtre
00:07:23pour séduire, pour conquérir.
00:07:25Et qui, selon toi, qui nous aurions à cœur de...
00:07:29Pardon.
00:07:31Nous aurions en tête de séduire, de conquérir.
00:07:34Toi, c'est déjà fait.
00:07:36Alors ?
00:07:37Qui ?
00:07:38Ah, je t'en prie, arrête ta monétaire jonglerie.
00:07:41Ta bourse déborde, on le sait.
00:07:43Qui séduit ?
00:07:45Qui conquérir ?
00:07:47Mais le mélancolique jeune homme, vêtu de verre,
00:07:52qui campe chez vous depuis hier et que nous allons retrouver...
00:07:54De la fenêtre, il nous faut signe, il faut rentrer.
00:07:58Ce jeune homme, qu'est-ce que tu vas chercher ?
00:07:59C'est un de nos représentants.
00:08:02J'espère qu'il ne va pas se mettre à manger mon chapeau, dieu garde.
00:08:06Ou mon jupon.
00:08:07Mais tu délires !
00:08:09Moi, pas du tout.
00:08:10Lui, par contre, avec l'ascendance qu'il a...
00:08:14Si t'es au courant, hein ?
00:08:16J'aime autant, remarque.
00:08:18Vous recevez chez vous l'héritier de la France.
00:08:22Mes compliments.
00:08:24Quand il sera roi, je suppose qu'il s'appellera Charles VII.
00:08:28Étant donné que son père s'appelle Charles VI...
00:08:30L'arithmétique, on peut dire que ça tient.
00:08:33De toute façon, depuis que Charles Magne est mort,
00:08:35il faut être fou pour s'appeler Charles.
00:08:37Fou !
00:08:38Mais il faudrait être fou pour ne pas voir que sous Charles VII.
00:08:41Il y aura grande et féconde éventualité pour nous,
00:08:43les chevaliers d'industrie.
00:08:45Le mot est de toi ?
00:08:47Charmant !
00:08:49Tu as raison.
00:08:50L'industrie va te conduire très loin.
00:08:52J'ai lu ton avenir dans les cartes.
00:08:54Toi, lire dans les cartes ?
00:08:55Tu connais le signe chimérique ?
00:08:56Moi, penses-tu ?
00:08:57C'est simple.
00:08:59J'ai vu les ballots de cartes à jouets
00:09:01que tu reçois de je ne sais où
00:09:02et que tu revends à large profit.
00:09:05La gravure sur bois permet dorénavant des tirages importants.
00:09:09Tirages ?
00:09:10Bon, bien.
00:09:11Enfin, l'essentiel est de visée juste.
00:09:13Tu disais que sous Charles VII...
00:09:15J'aurais de quoi faire.
00:09:16Tu n'as qu'à regarder la France.
00:09:17C'est quoi la France ?
00:09:18Une colonie ?
00:09:19Une colonie anglaise.
00:09:20Qu'est-ce qui te prend ?
00:09:21Une colonie française.
00:09:22J'entends par colonie
00:09:24une terre où tout est à prendre et à reprendre.
00:09:27Une lampe disponible.
00:09:28Une vacante superficie.
00:09:30En France, de toutes parts,
00:09:31la puissance du désert
00:09:32et la hantise du silence
00:09:34pourdonnent sous la peau de la géographie.
00:09:37En Normandie,
00:09:37les pommiers redeviennent des chaînes.
00:09:39Et le blé dans la bosse
00:09:40se convertit chien-dent.
00:09:42L'industrie.
00:09:43L'intelligence industrieuse.
00:09:44C'est le moment rêvé
00:09:45qu'elles surgissent
00:09:46et qu'elles fertilisent
00:09:48cette immense étendue
00:09:49toujours à deux doigts
00:09:50de se laisser glisser
00:09:50dans la sauvagerie rocheuse
00:09:51et forestière
00:09:52que sa nature pour de bonnes.
00:09:54Jacques,
00:09:56je suis à tes côtés ?
00:09:58Toujours ?
00:09:59N'en doute pas.
00:10:01Je vois ta maison.
00:10:03Moi aussi.
00:10:03Tiens, elle est à deux pas.
00:10:04Jacques !
00:10:05Même ils nous disent de rentrer.
00:10:08Nous arrivons !
00:10:10Je la vois ta maison
00:10:11telle qu'elle sera
00:10:13quand nous l'habiterons.
00:10:14Il lui faudra
00:10:15deux étages de plus.
00:10:18J'entends.
00:10:19J'entends déjà
00:10:19l'acier et le marteau.
00:10:21J'entends
00:10:22nos enfants bien-aimés.
00:10:321429 à Bourges.
00:10:41Jacques,
00:10:42c'est toi.
00:10:43Tu as du nouveau ?
00:10:45Pour l'affaire des marques d'argent,
00:10:46tu as du nouveau ?
00:10:47Je viens de recevoir des lettres
00:10:47de la cour.
00:10:48De la cour ?
00:10:49Compliment.
00:10:50De la cour des comptes.
00:10:51Bon.
00:10:51C'est pareil.
00:10:52J'ai vu Ravan et Godard.
00:10:53Ne t'inquiète pas,
00:10:54tout est arrangé.
00:10:55Pour le moment,
00:10:56laissons les marques d'argent.
00:10:57devine ce qu'il y a dans ce carton.
00:11:02Je ne sais pas.
00:11:03C'est imposant.
00:11:06Notre palais.
00:11:07Qu'est-ce que tu dis ?
00:11:09Dans ce carton,
00:11:10j'ai le palais que nous ormes.
00:11:12Remballe-moi toute cette parcheminerie.
00:11:14J'ai peur.
00:11:15Peur ?
00:11:15D'une façon ou d'une autre,
00:11:17ces monuments extrêmes
00:11:18s'écroulent
00:11:18sur la tête de ceux
00:11:19qui les édifient.
00:11:20À joie sans fin,
00:11:21succède fin sans joie.
00:11:23Oh, tu es bien jeunette encore
00:11:24pour laisser en ton nom
00:11:25les proverbes parler.
00:11:27Je te répondrai toutefois
00:11:28par ma devise.
00:11:29Laquelle ?
00:11:29Tu en trafiques ?
00:11:31Autant se taire
00:11:32que dire et ne point faire.
00:11:33Ma devise numéro un.
00:11:35Donc, tu ne veux pas
00:11:36avant tout le manqueur ?
00:11:37C'est gratuit.
00:11:37Pour le guide,
00:11:39juste un pourboire
00:11:39qui ne te coûtera pas cher.
00:11:41Ces grandes feuilles
00:11:42pleines de géométrie,
00:11:43moi tu sais.
00:11:44D'ailleurs,
00:11:45la maison où nous sommes
00:11:45n'est même pas achevée.
00:11:46Ne te mets pas en souci
00:11:48pour cette cabane de fourmis.
00:11:50Cabane de fourmis ?
00:11:52Tout ce que nous avons déjà dépensé ?
00:11:53Sans négliger ma migraine ?
00:11:55En toi, Comte,
00:11:56un seul coup d'œil,
00:11:57tu n'as qu'à suivre
00:11:57le tracé d'encre noire.
00:11:59Le gros œuvre s'appuie
00:12:00à la muraille romaine
00:12:01que j'achète à la municipalité.
00:12:03Là, je pivote
00:12:05sur les trois vieilles tours.
00:12:06Je les achète également.
00:12:07Et les toitures.
00:12:09Regarde.
00:12:11Tu n'as pas le vertige ?
00:12:13Regarde donc !
00:12:14Haute comme des voiles
00:12:15et pointue comme des épines.
00:12:16Et maintenant, le bouquet.
00:12:18Tout le détail s'y trouve
00:12:19prévu et figuré.
00:12:21Des corniches,
00:12:22des balustrades,
00:12:23des cheminées.
00:12:24N'embrouille pas le classement.
00:12:25Prends garde.
00:12:26Même les voiseries de l'hôtel.
00:12:28Car on dira la messe
00:12:29sous notre toit.
00:12:30Oh !
00:12:30Qu'est-ce qu'il y a par-dessus ?
00:12:32Et ça ?
00:12:33Notre don ?
00:12:34Le dessin d'une statue.
00:12:36Et feront-elle la statue ?
00:12:37Je gage que tu vas me demander qui.
00:12:40Qui quoi ?
00:12:41Qui c'est ?
00:12:42Quelle curiosité.
00:12:44Toujours interrogé.
00:12:45Tu connais pourtant ma devise.
00:12:47Ma devise numéro deux.
00:12:48Enclose, bouche,
00:12:50n'entre mouche.
00:12:51Mais je ne sais pas, moi,
00:12:52comment veux-tu que je sache ?
00:12:54C'est qui tu voudras ?
00:12:54Tu n'as qu'à choisir.
00:12:56La foi,
00:12:56l'espérance,
00:12:57Saint-Astrouillette,
00:12:59la vertu,
00:12:59la bonté,
00:13:00toi-même.
00:13:00Pourquoi pas ?
00:13:02Comme ça,
00:13:02nous emmenons tout le champ de pouille
00:13:03pour une statue
00:13:03qui n'est point encore fondue
00:13:04destinée à parachever
00:13:05la valeur marchande
00:13:06d'un immeuble.
00:13:06Fini, finis donc.
00:13:07C'est elle.
00:13:10Bien, c'est elle.
00:13:11Et puis ?
00:13:12Ces montagnes de pierres
00:13:13et cette forêt de poutres
00:13:15de dix toises de long
00:13:16et ce charté de plâtre
00:13:18et de ciment
00:13:19et ces retombantes nervures
00:13:21et cette pluie d'arc.
00:13:23Nous les tirons de notre poche
00:13:24en l'honneur de Mademoiselle d'Orléans,
00:13:26puis seule,
00:13:27jusque sous les ongles,
00:13:28qui, ces derniers temps,
00:13:29dans la basilique de Reims,
00:13:30fit couronner son propre frère,
00:13:32Charles VII,
00:13:33sec.
00:13:34Tu rêves de cette bâtarde
00:13:36jusqu'à construire
00:13:37un palais merveilleux
00:13:38qui n'aura d'autre utilité
00:13:39que de supporter en l'air
00:13:40sa ressemblance modelée ?
00:13:42Je sais ce que tu vas me dire.
00:13:44Je le sais.
00:13:45La fille t'intéresse
00:13:46en raison de sa valeur
00:13:47dans le jeu politique.
00:13:48En effet.
00:13:48La vérité, c'est qu'elle te pipe
00:13:49avec sa genèse
00:13:50dans la hutte paysanne,
00:13:52là-bas, vers la Lorraine.
00:13:53En cette hutte,
00:13:55tu vénères la réplique
00:13:56de l'épicerie,
00:13:57naquis Jacques Coeur,
00:13:58premier prix d'innocence.
00:14:00Bourgeoise.
00:14:01Orléaniste.
00:14:01Mademoiselle d'Orléans
00:14:02est une coureuse.
00:14:03Pour toi, pour moi,
00:14:03c'est une comète.
00:14:05Ne te retiens pas.
00:14:06Vas-y.
00:14:06Une sainte.
00:14:10N'empêche, il y a deux ans,
00:14:11lorsqu'elle nous rendit visite,
00:14:12elle avait pas mal de poitrine.
00:14:14Et toi, tous les yeux voulus
00:14:15pour la dévorer.
00:14:17Je ne discute pas.
00:14:19Jacques Coeur,
00:14:20Jacques Anneudat,
00:14:22fond un cœur dans un parc.
00:14:25Talalalalalalalalalala.
00:14:27Non !
00:14:28Vous méritez qu'un menestrel
00:14:29vous accoupla.
00:14:34Ordon !
00:14:35Les dames,
00:14:37si c'est afin de les glorifier
00:14:38que tu fais travailler
00:14:40tes architectes culons et tarpents.
00:14:43Culons, tarpents.
00:14:45Moi, je requière...
00:14:47Quoi ?
00:14:48Tu n'as qu'à parler.
00:14:51Je requière d'être enterrée
00:14:53dans une église construite pour moi.
00:14:57Pour moi, Marcel de Léopard.
00:14:59C'est tout naturel.
00:15:00pensons à mon tombeau.
00:15:04Mon tombeau sera recouvert
00:15:07d'une pierre massive et blanche
00:15:11sans pourriture ni cassure.
00:15:14C'est vivant.
00:15:15J'y serai couché,
00:15:18ciselé
00:15:19dans ma naturelle grandeur.
00:15:22Je veillerai que du visage
00:15:23la similitude soit à crier.
00:15:26Pour l'instant,
00:15:26ma petite sépulcrale...
00:15:27J'espère.
00:15:28Je n'ai pas fini.
00:15:31Nue.
00:15:33Pardon ?
00:15:35Nue.
00:15:36Toute nue.
00:15:37Tu me feras faire toute nue.
00:15:39Catastrophe.
00:15:42Démence.
00:15:44Réfléchis.
00:15:45Comment jamais l'évêque
00:15:46en cette église
00:15:46t'accepterait-il nue ?
00:15:48Ton idole.
00:15:49Mène le roi
00:15:50se faire verser
00:15:51sur le crâne de l'huile
00:15:52apportée par un ange
00:15:53à ce que l'on raconte.
00:15:55Et toi,
00:15:55tu ne serais pas capable
00:15:56d'installer ta femme
00:15:57dans une église
00:15:58qui te devrait tout.
00:15:59Impossible.
00:16:00Théologiquement.
00:16:02Toute nue,
00:16:02je n'en démords pas.
00:16:04Marcel,
00:16:04ma petite Marcel,
00:16:05consens la moindre robe
00:16:06collante, épousante
00:16:07tant qu'il te plaira.
00:16:09Du marbre.
00:16:10Les sculpteurs
00:16:10s'appellent du bras.
00:16:11Toute nue.
00:16:12Tu me mets hors de moi.
00:16:15Nous enflons devant
00:16:15tu n'es point morte.
00:16:17Je t'embrasse.
00:16:18Toute nue.
00:16:19Je te tiens.
00:16:20Toute nue.
00:16:21Hé là.
00:16:23Je vous prie
00:16:23de constater
00:16:23que moi je ne vous embrasse
00:16:25et non...
00:16:25C'est ma femme
00:16:26dans la catholique éternité.
00:16:28Jeanne, elle,
00:16:29tu comprends ?
00:16:29Tu l'appelles Jeanne ?
00:16:31À présent ?
00:16:31L'univers est lancé
00:16:32pour l'appeler ainsi.
00:16:33Elle, c'est autre chose
00:16:34que tout.
00:16:35Rien que de l'apercevoir.
00:16:36On démarre de terre.
00:16:37On devient cet ange
00:16:38au cœur d'or
00:16:39qui prend sur lui
00:16:40les notes d'huile sacramentelle
00:16:42et les factures de champagne.
00:16:46À propos...
00:16:50Ces lettres
00:16:51de la Cour des Comptes,
00:16:53qu'est-ce qu'elle raconte ?
00:16:55Les marques d'argent.
00:16:56Je suis au courant.
00:16:58Les marques d'argent
00:16:59ne servent pas
00:16:59au roulement
00:17:00des échanges
00:17:00proprement dit.
00:17:01Mais représentent
00:17:02un poids fixe
00:17:02de métal précieux.
00:17:03à Brèges.
00:17:04Que veux-tu me prouver ?
00:17:05Dans l'entourage
00:17:06de Charles,
00:17:07lequel, en effet,
00:17:08manque d'équilibre,
00:17:09ils se sont avisés
00:17:10que ces fameux
00:17:11300 marques
00:17:11récoltées,
00:17:12coulées,
00:17:13estampillées,
00:17:13expédiées par mes soins
00:17:15en tant que fondeurs
00:17:15de monnaies
00:17:16étaient au-dessous
00:17:17du titre.
00:17:18Mais qu'est-ce que c'est
00:17:18que ces barbants
00:17:19qui se disputeraient
00:17:20la queue d'un cochon
00:17:20et qui pèsent l'argent
00:17:22au lieu de le faire travailler ?
00:17:23Pendant qu'on se bat !
00:17:25Pourquoi ne pas mettre
00:17:25à profit l'état de guerre
00:17:26et tout ce qui en résulte
00:17:27de fâcheux chapitres transports
00:17:28pour établir
00:17:28au besoin de décréter
00:17:29que l'argent n'a pas besoin
00:17:30d'être là pour être là ?
00:17:31Des billets imaginatifs
00:17:32suffiraient à faire croire en lui.
00:17:33Le titre,
00:17:34était-il respecté,
00:17:35oui ou non ?
00:17:37Je sais comment ça se passe.
00:17:40Les ouvriers peuvent avoir
00:17:41la main plus ou moins légère.
00:17:43En tout cas,
00:17:44la marge est petite.
00:17:45Une plaisanterie.
00:17:46Ravant et moi,
00:17:47si nous avons gratté
00:17:48700 ou 800 francs
00:17:49sans parler du boni
00:17:50des frères Godard,
00:17:51c'est le bout du monde.
00:17:52Ça ne valait pas
00:17:53tous la carme.
00:17:54Mais ces lettres !
00:17:56J'y arrive.
00:17:56On nous avise
00:17:59à ce jour
00:17:59que le contrôle général
00:18:01serait disposé
00:18:02à transiger
00:18:02pour mille écus d'or.
00:18:04Mille écus d'or ?
00:18:06Tu vois ce qu'il en résulte
00:18:07de ta poule à cheval ?
00:18:09La malheureuse,
00:18:10la pauvrette.
00:18:12Oh, toi, mon épouse,
00:18:13entends-moi.
00:18:14Je sens qu'ils se préparent
00:18:15dans le rouge nœud de l'azur
00:18:16les lions,
00:18:17les dragons et les loups
00:18:18et qu'ils en sortiront
00:18:19pour que soit remordu
00:18:20et déchiré
00:18:20la tendre peau du cou.
00:18:21Qu'est-ce qui te prend ?
00:18:23Jeanne-Dark et Jacques Coeur
00:18:24tiennent ensemble
00:18:25le plus fort que tu crois.
00:18:26Tu dis ?
00:18:26Non pas comme les amants
00:18:28et les maîtresses,
00:18:29ni, ma chérie,
00:18:30à la mode catholique
00:18:31de la mariée
00:18:32et de son mari,
00:18:34mais à la façon
00:18:34de ce qui se reflète
00:18:35avec ce qui reflète
00:18:36l'objet,
00:18:37le miroir,
00:18:38ou tout autant
00:18:39tel un fleuve
00:18:40quant à des lieux
00:18:40et des lieux,
00:18:41ce fleuve reproduit
00:18:41l'authentique courbure
00:18:42d'un fleuve différent.
00:18:43Ce menace judiciaire
00:18:44et cette amende,
00:18:44ce que j'y vois de plus clair,
00:18:45c'est que ça va mal.
00:18:46Pour nous ?
00:18:46Pour elle.
00:18:48Si vraiment sa vie
00:18:49se réfléchit dans ma vie,
00:18:50un désagrément
00:18:51qui m'a dit un signifiquel
00:18:52a des ennuis de son côté
00:18:53et de sa faute aussi.
00:18:55Elle avait dit
00:18:55qu'elle en avait pour un an,
00:18:56le temps de mener le roi
00:18:57jusqu'à Reims.
00:18:58Après le sac,
00:18:58l'échéance tombait.
00:18:59Que ne s'est-elle alors dévoilée,
00:19:00disant son vrai nom ?
00:19:02En barre que le poubleau
00:19:02s'est retourné dans les bois,
00:19:03faire la bergère
00:19:04à n'en plus finir.
00:19:05Mais non,
00:19:06les chemins,
00:19:13femelles,
00:19:13toujours à guéroyer.
00:19:15Tout le monde lui tire dessus,
00:19:16le roi ne la connaît plus.
00:19:18Elle n'a point quitté la chasse,
00:19:19mais dorénavant,
00:19:20elle y court au rang
00:19:21de la bête traquée.
00:19:22Chaque jour,
00:19:22le corps peut sonner la faim.
00:19:26Qu'est-ce que c'est ?
00:19:27Les enfants, voyons,
00:19:28ne t'alarme pas.
00:19:31Alors, Jacques,
00:19:33c'est mis les culs.
00:19:35Bravant les a trouvés ?
00:19:37D'ailleurs,
00:19:38mis les culs qu'on vous prend,
00:19:39c'est autant qu'on vous donne.
00:19:41Mais oui,
00:19:41tenu que je suis de les avoir,
00:19:44quitte à m'en dessaisir
00:19:45aussitôt entre les mains du roi,
00:19:46mes efforts pour me les procurer
00:19:47s'élargiront plus loin
00:19:48que le montant prévu.
00:19:50Et pour commencer,
00:19:51je considère cet argent
00:19:51comme avancé au roi.
00:19:53Donc,
00:19:54productif d'intérêt.
00:19:56Prêté sans intérêt,
00:19:57pas le moindre intérêt.
00:20:00Mais,
00:20:01l'or ne pousse vraiment
00:20:02qu'en Orient.
00:20:03Je suppose
00:20:04que tu t'apprêtes à partir.
00:20:07Tu ne l'ignores pas.
00:20:08Le commerce avec l'Egypte
00:20:09est interdit.
00:20:10Tu ne l'ignores pas.
00:20:12L'autorité n'interdit
00:20:13qu'à fin d'autoriser.
00:20:14Sinon,
00:20:15il n'y aurait plus d'autorité.
00:20:17J'embarque à Montpellier.
00:20:18Depuis quand
00:20:19Montpellier siège-t-il sur la mer ?
00:20:21Montpellier jouit
00:20:22de privilèges spéciaux
00:20:23d'origine pontificale
00:20:25pour le commerce levantin.
00:20:27À Montpellier,
00:20:27toutefois,
00:20:28la mer n'est pas loin.
00:20:29Mais,
00:20:30tout reste à faire
00:20:30dans le Languedoc.
00:20:31Les quais,
00:20:32les ports,
00:20:32les canaux.
00:20:34J'y songe,
00:20:35j'y songe.
00:20:35Nous en étions à l'Egypte.
00:20:37Tu ne connais pas l'hébreu ?
00:20:39La Méditerranée parle l'italien.
00:20:41Je le sais.
00:20:42Denaro,
00:20:43comprare,
00:20:45Genova,
00:20:45Venezia,
00:20:46la dogana,
00:20:47la gondola.
00:20:48Je ne bouffonne pas.
00:20:49Je ne bouffonne pas.
00:20:51Depuis des années,
00:20:52j'entasse les avis
00:20:52et leurs enseignements.
00:20:54La Terre Sainte,
00:20:55tout au moins ses comptoirs
00:20:56et ses bazars
00:20:56clés dans la tête,
00:20:57crois-moi.
00:20:58Le reste,
00:20:58c'est un voyageur
00:20:59sentir toujours
00:21:00pourvu qu'il se cantonne
00:21:00dans les usages de sa partie.
00:21:02Et ma partie,
00:21:03moi,
00:21:03c'est la monnaie.
00:21:04Elle se fait comprendre
00:21:05partout.
00:21:07Les peuples,
00:21:07remarque-le,
00:21:08les peuples ne se distinctent
00:21:09entre eux
00:21:10qu'on regarde
00:21:10ce qu'il aurait commun.
00:21:12La monnaie,
00:21:12par exemple,
00:21:13parce qu'il emporte
00:21:13de beaucoup
00:21:14sur la grammaire,
00:21:15la cuisine,
00:21:16bref,
00:21:16sur ce qui le diversifie.
00:21:17Nous aurons notre grandissime palais
00:21:22juste au centre de la France.
00:21:24La France tournera tout autour
00:21:25quand lui-même
00:21:26ne bougera pas.
00:21:28Joyeuse perspective.
00:21:30Toi, prie dans le mouvement
00:21:31et moi qui passe
00:21:32mes journées
00:21:33à t'attendre.
00:21:34Tu seras sur la mer
00:21:36et je m'efforcerai
00:21:38de saisir
00:21:39le bruit arabe
00:21:40et monotone
00:21:41de la mer.
00:21:471444.
00:21:51Jacques Coeur
00:21:52revient de rendre visite
00:21:53à Agnès Sorel,
00:21:54maîtresse en titre
00:21:55du roi Charles VII.
00:21:56J'attends ma femme
00:21:57qui est dans sa chambre
00:21:58dans notre merveilleux palais.
00:22:01La ville de Bourges
00:22:02déjà tout est branlée
00:22:02de m'avoir donné le jour.
00:22:04Cet ouvrage capital
00:22:05achève de la démolive.
00:22:08Nul Castel,
00:22:09il faut l'avouer,
00:22:10nul Castel
00:22:11n'est en mesure
00:22:11de jouter avec mon logis
00:22:13pour marier
00:22:13si bien
00:22:14splendeur
00:22:15et commodité.
00:22:17Ma femme
00:22:19me fait attendre.
00:22:21Il est vrai
00:22:22qu'elle a désormais
00:22:23des dames
00:22:23pour l'habiller.
00:22:25Elle se crispe
00:22:26sur le raidissement
00:22:27de son corps
00:22:28contre la vieillesse
00:22:29et contre l'échéance,
00:22:30non qu'elle soit
00:22:31coquette,
00:22:31pauvre artichaut,
00:22:33mais pour durer
00:22:34à mes côtés
00:22:34le plus qu'elle pourra.
00:22:37Or,
00:22:38je ne suis pas souvent là.
00:22:41Le ciel
00:22:41m'en soit témoin,
00:22:42je n'aurais pas demandé
00:22:42mieux que de poursuivre
00:22:43ma vie avec pour unique
00:22:44compagne, complice
00:22:45et compère
00:22:46Marcel de Léopard
00:22:47au gré
00:22:48de l'ordre naturel
00:22:49tel que le réfracte
00:22:50le suppose
00:22:51et le réclame
00:22:51le catéchisme.
00:22:53Puis-je me permettre
00:22:54de négliger mes affaires ?
00:22:56N'en soit voulu
00:22:57que plusieurs fois
00:22:58je rencontrasse
00:22:58Madame Sorel.
00:23:00Ah, toi !
00:23:02Jacques !
00:23:03Que tu es jolie
00:23:07en cette robe,
00:23:08que tu es jolie !
00:23:09Plus les années passent
00:23:11mon Jacques,
00:23:11plus mes robes sont belles
00:23:12et moi,
00:23:13moi je le suis.
00:23:15Mademoiselle,
00:23:16vous pouvez nous laisser.
00:23:21J'arrive de loche,
00:23:22pas très loin de tour.
00:23:24Je sais.
00:23:26Supportable le séjour ?
00:23:28Hormis quand les pirates corses
00:23:29n'ont jamais manqué de quoi.
00:23:31Bonne table et bonne litière
00:23:32m'attendent partout, partout.
00:23:34Les inconvénients de la richesse.
00:23:37Et cette dame ?
00:23:39Quelle dame ?
00:23:41Ah oui.
00:23:42Elle te l'a montré ?
00:23:44C'est son usage,
00:23:45que veux-tu ?
00:23:47Tu tiens vraiment
00:23:48que nous revenions là-dessus ?
00:23:49Elle me l'a montré.
00:23:51Le gauche ?
00:23:52Toujours ?
00:23:53Toujours.
00:23:54À croire qu'elle n'en a qu'un.
00:23:56Mais enfin.
00:23:58Pourquoi donne-t-elle
00:23:59à regarder cet organe pommé ?
00:24:01Pour que l'on constate
00:24:02qu'il ne comporte pas
00:24:03le mamelon habituel.
00:24:05Et toi,
00:24:05tu trouves que c'est beau ?
00:24:06Oui, c'est éclatant,
00:24:08sphérique,
00:24:09le saint-gauche d'Agnès,
00:24:10un bol de porcelaine,
00:24:11un bloc de nez.
00:24:12Foutez-le !
00:24:13Qu'est-ce qu'elle doit mettre dessus
00:24:14comme fromage ?
00:24:15Comme vernis ?
00:24:16Hors du corsage
00:24:17dont un côté se rabat tout d'un coup,
00:24:18ce bloc de chair blanc
00:24:19surgit sans prévenir.
00:24:21Aveugle.
00:24:21Il vous aveugle.
00:24:22On est chaque fois pris du cours
00:24:23comme par le soleil
00:24:24au gros de la nuit.
00:24:24Ah, que ne peut-on montrer son cœur ?
00:24:26Assez dégoûtant !
00:24:27Le vice !
00:24:28Moi aussi, moi aussi ?
00:24:30Attends un peu.
00:24:31Que je te le mette sous le nez ?
00:24:32Attends.
00:24:34Oh, misère !
00:24:35Je n'arriverai jamais
00:24:36à me dégraffer.
00:24:38Mais d'ailleurs,
00:24:38tu le connais par cœur.
00:24:39Oh, pauvre Marcel !
00:24:40Tu me fais tant de peine
00:24:41et je te fais tant de bien.
00:24:42Oh, tu ne veux de bien
00:24:43qu'à la gloire !
00:24:44Dans Agnès,
00:24:46tu poursuis
00:24:46ce qu'avec cette fameuse pucelle
00:24:47tu poursuivais.
00:24:49De grands drapeaux
00:24:50flottent devant la porte
00:24:51de l'avenir.
00:24:52Tu sus
00:24:52tout ce que tu sais
00:24:54pour les écarter,
00:24:55pour entrer dans l'avenir
00:24:56aux bras des dames
00:24:57que tu crois les plus illustres.
00:24:59Mais tu te laisses rouler !
00:25:01Ta sorel !
00:25:02On l'appelle
00:25:02la dame de beauté.
00:25:04Beauté, c'est son domaine.
00:25:06Sur la marne,
00:25:06à Nogent,
00:25:07à deux lieux de Paris.
00:25:08Jeanne s'appellerait
00:25:09Crachignard
00:25:10ou Bosse-Lardon.
00:25:12Agnès serait dame
00:25:13de la fouillasserie
00:25:14ou de la manche-croupette.
00:25:16Tu ne palpiterais pas tant !
00:25:18Beauté !
00:25:20Prendre le nom
00:25:20d'un fief
00:25:21qui porte un nom pareil,
00:25:22il faut avoir de la poitrine.
00:25:23Elle en a.
00:25:25Monsieur l'Argentier,
00:25:27quand je respire,
00:25:31vous ne serez donc point surpris,
00:25:33monsieur l'Argentier.
00:25:34si je vous déclare tenait
00:25:35de vous avoir prié
00:25:36de venir sur la foi
00:25:38de votre titre
00:25:38afin de vous en demander
00:25:40de l'argent,
00:25:42naturellement.
00:25:44Vous n'avez rien à craindre
00:25:45pour le remboursement.
00:25:46Je vous nomme
00:25:47mon examen
00:25:47d'ores et déjà.
00:25:49Vous puiserez
00:25:50dans mon cercueil.
00:25:52Mais je pars
00:25:53pour vivre
00:25:54très longtemps.
00:25:56Je vous offre
00:25:57dont la remerciement
00:25:58une inappréciable chance
00:25:59d'éternité.
00:26:00Mais qu'est-ce que tu chantes ?
00:26:01Mais qu'est-ce que tu chantes ?
00:26:03Ses propres paroles.
00:26:04Je peux t'apprendre aussi
00:26:05ce que tu répondis.
00:26:07Voyons.
00:26:08Voyons.
00:26:12Avoir.
00:26:13C'est devoir.
00:26:15Telle est ma devise.
00:26:15Ma devise.
00:26:16Numéro neuf.
00:26:18Chère madame,
00:26:19j'ai.
00:26:20Par conséquent,
00:26:20je dois.
00:26:21Je vous dois
00:26:22ce que vous n'avez pas.
00:26:24Combien ?
00:26:25Combien désirez-vous ?
00:26:27Ma preuve marcelle
00:26:29et oui,
00:26:29c'est ainsi
00:26:30que je parlais.
00:26:31Je continue.
00:26:32Je fais Agnès Sorel.
00:26:34Toi,
00:26:34tu te fais.
00:26:35Tu fais Jacques Coeur.
00:26:38Allons-y.
00:26:43Monsieur Langeantier,
00:26:45je vais faire
00:26:46l'articuler.
00:26:48C'est ça,
00:26:49la réplique.
00:26:50Vous t'amuses vraiment ?
00:26:52Je me régale.
00:26:54Bien.
00:26:55Articulé, madame.
00:26:57Articulé.
00:26:5930 000 francs.
00:27:0230 000 francs ?
00:27:03Vous plaisantez, madame.
00:27:0750 000 francs
00:27:08compenseront à peine
00:27:10l'honneur que vous me faites
00:27:11en me conviant
00:27:12à vous obliger.
00:27:14Vous pouvez garder cet argent
00:27:15tant qu'il vous plaira.
00:27:16Deux mois,
00:27:16trois mois,
00:27:17six mois.
00:27:18Disons, six mois.
00:27:19Et donnez-moi
00:27:21une petite signature.
00:27:23Quant à l'intérêt,
00:27:25je n'en requière d'autre
00:27:26que de vous savoir
00:27:27sans inquiéter.
00:27:2950 000 francs.
00:27:32Et tu les lui donnas.
00:27:34C'est bien les hommes.
00:27:36Mais comment les a-t-elle pris ?
00:27:37Enfin,
00:27:37qu'est-ce qu'elle a dit ?
00:27:39Bon, tu ne joues plus.
00:27:41À l'instant, pourtant,
00:27:42grâce à toi,
00:27:42madame Sorel était là.
00:27:4350 000 francs.
00:27:45Il y a de quoi vous désarçonner,
00:27:46reconnaissez-le.
00:27:47Elle me dit,
00:27:48cher ami,
00:27:49je ne saurais mieux
00:27:50employer ces fonds
00:27:50qu'à me payer des fourrures,
00:27:52qu'en pensez-vous ?
00:27:53Et moi, tout de suite,
00:27:55ces dos de martre
00:27:56qui conviennent
00:27:56à vous vêtir
00:27:57en vous ornant,
00:27:59hormis dans mes boutiques,
00:28:00où les trouveriez-vous ?
00:28:02Je dispose aussi
00:28:03de quelques onces
00:28:03de beaux-muguets turcs,
00:28:04sans rival
00:28:05contre les rides séculaires.
00:28:07Dos de martre,
00:28:08beaux-muguets,
00:28:08je vous en mets
00:28:08pour 50 000 francs ?
00:28:10De la sorte,
00:28:11l'argent que je vous prête,
00:28:12je n'aurai pas à le débourser.
00:28:14Tu me racontes des histoires.
00:28:15Pourquoi n'errions-nous jamais ?
00:28:17Je peux te montrer
00:28:18le billet qu'elle m'a signé.
00:28:19J'en ai d'autres,
00:28:20de sa main,
00:28:21tout d'un tiroir.
00:28:22Chacun te signe des billets.
00:28:23Charles VII, le premier.
00:28:26Ce que j'ai,
00:28:27le roi l'a.
00:28:28Tu es rassuré ?
00:28:29Rassuré ?
00:28:30Il ne reste au roi
00:28:31qu'à te prendre tout.
00:28:33Renverse la proposition,
00:28:34renverse-la,
00:28:34qu'obtiens-tu ?
00:28:35Ce qu'a le roi,
00:28:36je l'ai.
00:28:37Ah, tu ne trembles plus.
00:28:39À force de renverser
00:28:39les propositions,
00:28:41tu vas t'ébouillanter.
00:28:43Et puis d'abord,
00:28:44ton cerveau me fatigue
00:28:44la cervelle.
00:28:46Tes coupons de draps,
00:28:47tes pièces de toile,
00:28:47je les comprends.
00:28:48Je les touche.
00:28:49Je les comprends.
00:28:50Mais je me perds
00:28:51dans ce que tu nommes
00:28:52le crédit.
00:28:52Si du client,
00:28:53tu fais Dieu.
00:28:54Le crédit,
00:28:55c'est le credo.
00:28:56Voilà.
00:28:57Mais sans s'admettre
00:28:58la réalité de tes galères,
00:29:00le bois,
00:29:00les cordages,
00:29:01les hommes.
00:29:02Mais mon esprit
00:29:02trébuche devant le calcul
00:29:04à long terme du change
00:29:05sur la place d'Alexandrie.
00:29:07Et quand tu leur vends
00:29:07de l'argent
00:29:08à ceux de l'Égypte
00:29:09et de l'Arabie.
00:29:10Cet argent est vraiment
00:29:10de l'argent.
00:29:11De quoi te plaint-tu ?
00:29:12Tirer de mes mines d'argent
00:29:13à grands renforts d'ouvriers
00:29:14et d'appareils.
00:29:14Et qu'ils te payent
00:29:15avec de l'or.
00:29:16Et bien cet argent
00:29:17que tu leur vends,
00:29:18tu le marques
00:29:18à la fleur de lys ?
00:29:20Et d'après toi,
00:29:20le gouvernement,
00:29:21Agnès, le roi,
00:29:22tous les autres,
00:29:23le gouvernement te doit trop.
00:29:25Nous en arrivons
00:29:25à tes billets ronds
00:29:26pour se permettre
00:29:26de vérifier
00:29:27si tu n'abuses pas
00:29:28de sa fleur de lys.
00:29:29Si tu ne t'en serres pas
00:29:30pour bercer l'acheteur.
00:29:33Le taux du métal
00:29:34répond-il aux ordonnances.
00:29:37Rappelle-toi
00:29:37les marques d'argent.
00:29:38En Égypte,
00:29:39ils ont des balances.
00:29:40Mais ici même,
00:29:42qui t'empêche
00:29:42à tir l'arigot
00:29:43de frapper toute la monnaie
00:29:44que tu as besoin,
00:29:45tu disposes du métal brut
00:29:46et du poinçon officiel.
00:29:49Nul n'y voit rien
00:29:49tant je perds feutré.
00:29:51Nul n'y voit rien.
00:29:54Elle est trop belle
00:29:54et se gît
00:29:56et se sait
00:29:57partout
00:29:58dans le papier
00:29:59de tes lettres,
00:29:59sur le fer blanc
00:30:00des girouettes,
00:30:01sur les murs
00:30:02de la chapelle,
00:30:03partout.
00:30:03Nous avons les mêmes initiales,
00:30:05Jésus-Christ et moi.
00:30:06Toi au moins,
00:30:07tu ne te prends pas
00:30:08pour n'importe qui.
00:30:09Et toutes ces coquilles
00:30:10et tous ces cœurs.
00:30:11De sable et de gueule,
00:30:12j'ai reçu la noblesse.
00:30:13Sur fond d'argent,
00:30:14il va de soi.
00:30:15Pas moyen de faire
00:30:16un pas dans la maison
00:30:17sans tomber sur ton blason.
00:30:18On trouve des coquilles
00:30:19et des cœurs
00:30:19jusque dans le bain,
00:30:20jusque dans le four.
00:30:22Les coquilles veulent dire
00:30:22que je suis un pèlerin
00:30:23quant au cœur,
00:30:25dans l'engage.
00:30:25Un pèlerin !
00:30:27Tu fais ton chemin,
00:30:28ça oui,
00:30:29mais tu vas trop loin.
00:30:31Trop loin !
00:30:32À quoi riment
00:30:33ces manoirs
00:30:34et ces terrains
00:30:35que tu achètes
00:30:35dans toutes les provinces
00:30:36et jusqu'en pleine Bourgogne !
00:30:39Comme si tu fussais pris
00:30:40d'y supplanter d'avance
00:30:41la bannière du roi !
00:30:42Franchement,
00:30:44tu ne pouvais pas te passer,
00:30:45non,
00:30:45d'être chaque là
00:30:46à Bocaire,
00:30:46à Sancerre,
00:30:47à Béziers,
00:30:48à Lyon,
00:30:49à Boissy !
00:30:49À Boissy, chérie,
00:30:51j'ai trouvé gravé
00:30:52depuis des siècles
00:30:52autour de la poterne
00:30:53celle de mes deux vies
00:30:54qui est le plus à moi désormais.
00:30:56À cœur,
00:30:56baillant !
00:30:57Rien d'impossible,
00:30:58on finira par la connaître.
00:30:59Tu es baron de Torcy,
00:31:01tu es baron de Péreuse,
00:31:02assez, Crézus !
00:31:03Je suis en outre
00:31:04seigneur de la mode.
00:31:06J'ai la moitié de Rohan
00:31:06dans le Florez,
00:31:07l'année prochaine
00:31:08j'aurai l'autre moitié.
00:31:09J'ai Saint-Gérard-le-Vaux,
00:31:10la Palisse, Marmaille...
00:31:11Ça suffit, Crétin !
00:31:12La Coule,
00:31:13Saint-Georges,
00:31:14Barleux,
00:31:14Malranche,
00:31:15Malroie !
00:31:15Charles !
00:31:15À part pitié !
00:31:17Autant de victoires
00:31:17par devant nos terres,
00:31:18je m'avance dans tous les sens.
00:31:20Le roi de Bourges,
00:31:21c'est moi,
00:31:21Rex Bitour !
00:31:22Je finirai par...
00:31:26Viens,
00:31:27vous avez oublié ce gamin.
00:31:29Il flûte bien.
00:31:32Avant le vinet,
00:31:32il vient dans le couloir.
00:31:36Cette musique,
00:31:38on jurerait de l'eau de mer.
00:31:40Eh oui,
00:31:42la mer.
00:31:44Dommage,
00:31:46il faut que je le rende.
00:31:47Le rende ?
00:31:48Que tu rendes quoi ?
00:31:50Il faut que je rende
00:31:50à son propriétaire,
00:31:51ce jeune enfant du Liban.
00:31:53Le rendre ?
00:31:55Mais tu es fou !
00:31:57Il s'est jeté au pied
00:31:58du capitaine
00:31:58d'une de tes galères,
00:31:59là-bas, à Beyrouth,
00:32:00en criant
00:32:01« Paternoster,
00:32:01Ave Maria ! »
00:32:02pour faire voir
00:32:03qu'il était chrétien.
00:32:04Et le capitaine...
00:32:05Le chalif,
00:32:05c'est de mettre des bâtons...
00:32:06Le capitaine se laisse attendrir.
00:32:08Il le prend à son bord.
00:32:09Il l'amène à Montpellier.
00:32:11Et toi, maintenant,
00:32:11tu parles de le rendre
00:32:12à son propriétaire ?
00:32:13On peut s'attendre
00:32:14à tout de toi.
00:32:16Quand je pense
00:32:17que tu as inventé
00:32:19de convertir en titre
00:32:20aux porteurs
00:32:20les prisonniers
00:32:21de guerre anglais
00:32:22quand ils sont
00:32:23eux-mêmes titrés.
00:32:24Quant aux rangers,
00:32:25tu les fais embarquer
00:32:26de force.
00:32:27Restons dans le sujet.
00:32:28Ce jeune homme
00:32:28est un esclave.
00:32:29Mais il est chrétien.
00:32:30Il le dit.
00:32:31C'est au Christ
00:32:32qu'il appartient.
00:32:33C'est au Christ.
00:32:33Bien entendu.
00:32:34Mais restons sur terre,
00:32:35veux-tu ?
00:32:36Son maître ici-bas
00:32:36se nomme Mohamed Farazli,
00:32:37fabricant de courroies
00:32:38et de sandales
00:32:38à Beyrouth.
00:32:39Aujourd'hui même,
00:32:40je lui expédie le colis.
00:32:41Tu vas te mettre
00:32:41à dos toute la chrétienté.
00:32:44Réfléchis donc.
00:32:45Tu ne vois pas
00:32:46ce qui t'attend,
00:32:46toi qui vois tout.
00:32:48Oh, tu m'énerves,
00:32:49tu m'énerves !
00:32:49Calme-toi !
00:32:51Considère.
00:32:54Partout,
00:32:54l'humanité respecte
00:32:56et adore la propriété.
00:32:58Ainsi démontre-t-elle
00:32:58combien elle est unie.
00:33:00Même l'acharnement
00:33:01dont chacun témoigne
00:33:01pour conquérir,
00:33:02pour s'emparer,
00:33:04il n'est jusqu'à cet acharnement
00:33:04qui ne justifie la propriété
00:33:06en la glorifiant.
00:33:09Mais dérobée
00:33:09pour ne rien faire du butin,
00:33:11que ferais-je d'un esclave ?
00:33:12Non,
00:33:13je le restitue.
00:33:14Donne-moi une gifle.
00:33:15Une gifle,
00:33:16à toi,
00:33:16pourquoi ?
00:33:17Après,
00:33:17ta main droite,
00:33:18au moins,
00:33:19sera propre.
00:33:19Une gifle,
00:33:20tu veux le j'aime mieux
00:33:21t'embrasser.
00:33:22Ce n'est pas ma fête.
00:33:23Et puis,
00:33:24tu y tiens si peu.
00:33:25Marcelle,
00:33:26mon amour,
00:33:27le commerce a besoin
00:33:28de garantie mutuelle.
00:33:30Que je garde ici
00:33:30ton protégé,
00:33:31dans tous les ports musulmans
00:33:32et jusqu'au fond des oasis,
00:33:33je suis brûlé,
00:33:34brûlé.
00:33:34Qu'est-ce que ça peut faire ?
00:33:36Des gens d'ici,
00:33:37moi,
00:33:37ce que je redoute,
00:33:38c'est qu'ils te brûlent
00:33:39pour de bon.
00:33:40Et quel motif invoqueriez-vous,
00:33:41monsieur le procureur ?
00:33:43Quel motif ?
00:33:44Tu ne sais fournir,
00:33:45tiens !
00:33:46Tu envoies des armes
00:33:46aux peuples infidèles.
00:33:48Parle-moi plutôt
00:33:48de ces cargaisons d'artillerie
00:33:50que tu fais filer
00:33:50sur Alexandrie.
00:33:51Et tout l'argent
00:33:52que je consacre
00:33:53à l'achèvement
00:33:53de la cathédrale,
00:33:54tu l'oublies ?
00:33:55À la fin,
00:33:56avec qui es-tu ?
00:33:58Avec toi.
00:33:59Avec moi ?
00:34:00Tu n'es jamais là.
00:34:02Je suis avec toi,
00:34:02je suis avec moi,
00:34:03je vais,
00:34:04je marche,
00:34:05je navigue.
00:34:05Ça,
00:34:06tu ne t'en prives pas.
00:34:07Mais où que j'aille
00:34:07et quoi que je trame,
00:34:09le poids du corps,
00:34:09le plomb du sommeil,
00:34:10le penchant du cœur
00:34:11m'enfoncent
00:34:12et me retiennent
00:34:12dans un air
00:34:13et définis
00:34:13de souvenance,
00:34:14de préférence,
00:34:15de répugnance ?
00:34:16Par exemple,
00:34:17rien ne ferait
00:34:17que la viande de boucherie
00:34:18abattue selon le Coran
00:34:19ne me donne envie
00:34:20de vomir.
00:34:21En revanche,
00:34:22ma langue française,
00:34:24ma famille bourgeoise,
00:34:25ma catholique église
00:34:26et mon unique épouse,
00:34:31j'en suis,
00:34:32comment dirais-je,
00:34:33j'en suis l'esclave.
00:34:35À propos,
00:34:36fais-le venir
00:34:36qu'il te dise adieu.
00:34:37Qu'est-ce qu'ils vont
00:34:38lui faire à Beyrouth ?
00:34:39Lui crever les yeux ?
00:34:41Lui casser les doigts ?
00:34:42Quelle horreur !
00:34:43Quelle horreur !
00:34:44Espérons que sa valeur
00:34:45marchande le sauvegardera.
00:34:46J'étais si mignon,
00:34:48si correct,
00:34:49tout le temps
00:34:50des signes de croix
00:34:51et ses grands yeux noirs
00:34:52pleins de tristesse.
00:34:54Il me saluait
00:34:55comme la Sainte Vierge.
00:34:58Et toi,
00:34:59tu as le courage.
00:35:00Oh non,
00:35:00pas ça.
00:35:01Pas ça,
00:35:01je t'en prie,
00:35:01je t'en supplie.
00:35:03Tiens,
00:35:03regarde-le.
00:35:04Tu accepterais
00:35:05qu'on l'assassine ?
00:35:08Toi,
00:35:09Petit,
00:35:10joue.
00:35:12Joue de la flûte.
00:35:13Que lui dis-tu ?
00:35:27Que lui dis-tu ?
00:35:29Je regrette,
00:35:29mais il faut qu'il retourne
00:35:30dans son pays.
00:35:31C'est ce que je lui dis.
00:35:32Ne pleure pas,
00:35:33Marcel,
00:35:33non,
00:35:34ne pleure pas.
00:35:34Je suis épouvantée,
00:35:35tu n'échapperas plus.
00:35:37En rendant cet esclave...
00:35:38En le rendant à Mohamed,
00:35:40je dresse contre moi
00:35:41toute la chrétiennerie.
00:35:42C'est ce que tu redoutes,
00:35:43n'est-ce pas ?
00:35:45Mais tu oublies
00:35:45l'évêque de Luçon,
00:35:46mon frère.
00:35:47Tu oublies l'évêque
00:35:47de Montpellier,
00:35:48mon associé.
00:35:49Tu oublies surtout
00:35:50l'archevêque de Bourges,
00:35:51notre fils aîné.
00:35:53Menteur,
00:35:54il ne l'est pas.
00:35:54Jean n'est pas notre fils.
00:35:56Il n'est pas archevêque.
00:35:57Patience,
00:35:58l'affaire de 3 à 4 ans.
00:35:59Il étudie encore,
00:36:00il n'a que 18 ans.
00:36:01Je fais le nécessaire
00:36:02auprès du Vatican.
00:36:07Ici même,
00:36:08pour fêter la mitre
00:36:09et la crosse
00:36:09de notre petit garçon,
00:36:11le roi viendra.
00:36:13Le roi.
00:36:15Les orques et les cloches
00:36:16s'en donneront
00:36:16à cœur joie.
00:36:18À cœur joie.
00:36:19À cœur joie.
00:36:20À cœur joie.
00:36:20À cœur joie.
00:36:261450.
00:36:30Sire,
00:36:31mon palais
00:36:32c'est de la Saint-Jean
00:36:33à côté des logis
00:36:34de votre majesté.
00:36:37Tout au plus
00:36:37pourrait-on dire
00:36:38de mon palais
00:36:39qu'il est plus logique,
00:36:40mieux compris.
00:36:42C'est ainsi que,
00:36:43chez moi,
00:36:44l'odeur des fourneaux
00:36:45respecte la salle à manger.
00:36:47La raison,
00:36:49je voulais dire,
00:36:50deux cuisines.
00:36:53Dans la première,
00:36:53la plus éloignée des convives,
00:36:54je te fais frire,
00:36:55je te fais bouillir,
00:36:56je te fais rôtir.
00:36:57Dans la seconde,
00:36:59juste avant de passer
00:36:59par le trou dans le mur,
00:37:00les plats sont fleuris
00:37:02et décorés,
00:37:04neige au citron,
00:37:05ficelles de sucre,
00:37:07branches de sapin.
00:37:10Ici,
00:37:11nous sommes dans la chambre
00:37:12de mon bureau.
00:37:15Que mon roi
00:37:16daigne s'asseoir,
00:37:17étendre ses jambes,
00:37:19se reposer.
00:37:21Vous supportez mal,
00:37:22je le sais,
00:37:22les gens à foison
00:37:23tout autour,
00:37:23et depuis ce matin,
00:37:25quel carnaval.
00:37:25Vous regardez
00:37:30ma petite sirène?
00:37:34Jolie comme sculpture.
00:37:37Femme du haut,
00:37:38poisson du bas.
00:37:40Jeanne d'Arc,
00:37:40en somme.
00:37:42Excepté que notre pucelle
00:37:43finissait en queue de cheval.
00:37:47Comment se portait-elle
00:37:48depuis le feu
00:37:49d'artifice de Rouen?
00:37:52L'on ne serait tout de même
00:37:52pas allé jusqu'à la faire flamber
00:37:54personnellement.
00:37:5520 ans déjà.
00:38:00Cette époque me paraît
00:38:01plus lointaine
00:38:02que celle de Semiramis.
00:38:07Cette sirène,
00:38:08je vous dirais bien
00:38:09de l'emmener,
00:38:09mais ce serait
00:38:10de vous outrager.
00:38:11Ici,
00:38:11tout n'est-il pas à vous.
00:38:13Autant demander
00:38:13au frère Bureau
00:38:14d'arracher du sol
00:38:14toute la maison
00:38:15et de la faire voyager
00:38:15par les airs
00:38:16comme celle de la Sainte Vierge
00:38:17avec au lieu de Marie,
00:38:18Mère de Dieu,
00:38:19ma propre femme.
00:38:24Intelligente,
00:38:24une dignité,
00:38:28la perfection.
00:38:29Elle se contracte
00:38:30sur un réticement
00:38:31inflexible
00:38:32nous laissant nulle prise
00:38:33à la dent de la mort.
00:38:35Ce qu'elle veut,
00:38:36se maintenir
00:38:37le plus longtemps possible
00:38:38dans l'état de mariage.
00:38:39Mariée avec le mariage,
00:38:40ma propre femme,
00:38:40bien avantage qu'avec moi,
00:38:41son mari.
00:38:42Vous l'avez vu,
00:38:43ma bonne Marcelle,
00:38:44vous l'avez vu,
00:38:44si droite et si mince
00:38:46sous son gigantesque
00:38:47chapeau de toile blanche.
00:38:49Jacques Coeur pour époux,
00:38:50un fils archevêque
00:38:51et toute cette toile,
00:38:53une toile fine,
00:38:54d'accord,
00:38:54peignée 12 et 14 fois.
00:38:56Mais il y en a bien
00:38:56six sous sept pieds.
00:38:58Je reconnais
00:38:58qu'il y a de quoi
00:38:59perdre la tête.
00:39:01Oui, sir,
00:39:02mes filatures.
00:39:02Non, à Lyon.
00:39:06J'ai transporté
00:39:07toutes mes filatures à Lyon.
00:39:08De là,
00:39:08je débouche à la fois
00:39:09sur Marseille,
00:39:10sur la Bourgogne,
00:39:10sur l'Italie.
00:39:12Il n'a pas fallu six mois
00:39:12pour que les avantages
00:39:13de ce nouvel emplacement
00:39:14amortissent les frais
00:39:15du déménagement.
00:39:16À l'heure qu'il est,
00:39:17le royaume sort du moule
00:39:18rond et carré
00:39:18comme un fromage.
00:39:20Excusez-moi.
00:39:22Or, dans un fromage,
00:39:24le milieu est blanc,
00:39:25il est triste,
00:39:26il est sec.
00:39:28En revanche,
00:39:28les bords,
00:39:30quelle saveur.
00:39:31la montagne,
00:39:33la frontière,
00:39:34la mer.
00:39:38Ah, je plains ma femme,
00:39:39je la plains,
00:39:40pauvre artichaut,
00:39:40de vivre au beau milieu
00:39:41du fromage national.
00:39:43D'autant plus
00:39:44qu'on ne nous veut pas
00:39:45que du bien.
00:39:47Tenez,
00:39:48il n'y a pas un quart d'heure.
00:39:50L'un de mes invités,
00:39:51qui sont aussi les vôtres,
00:39:53qui sont les vôtres d'abord,
00:39:56Castellani,
00:39:57le sinistre Castellani,
00:40:00vous savez ce qu'il a dit?
00:40:02Dieu acceptant pour archevêque
00:40:03le fils d'un marchand
00:40:04de peau de lapin,
00:40:05je ne crois plus en Dieu.
00:40:06Fini.
00:40:09Bien d'autres flèches
00:40:11furent lancées.
00:40:14Je me charge
00:40:15de faire avoir
00:40:16votre fille en mariage
00:40:17au grand seigneur
00:40:18qui me lâchera
00:40:18dix mille écus.
00:40:22Je pactise
00:40:23avec votre fils,
00:40:24Louis,
00:40:24contre vous.
00:40:25J'embarque des hommes
00:40:28de force
00:40:28sur mes galères
00:40:29avec l'appui
00:40:30de l'évêque
00:40:30et du prévôt
00:40:31de Montpellier.
00:40:33Je me sucre
00:40:33avec l'impôt sur le sel
00:40:34que vous m'affirmate
00:40:35pour le Languedoc.
00:40:37En ma qualité
00:40:38d'exécuteur testamentaire,
00:40:40enfin,
00:40:41j'ai liquidé
00:40:42Sorel.
00:40:43Alors que la charmante Agnelle
00:40:45s'est consumée
00:40:45à tirer
00:40:46de votre royale semence
00:40:47quatre bâtards
00:40:49dont le quatrième
00:40:49l'a tué
00:40:50sans lui-même
00:40:51parvenir
00:40:51à voir le jour.
00:40:53Toutes mes condoléances.
00:40:58De bien misérable pointe
00:40:59quand on songe
00:41:00que mon roi
00:41:00se fie à moi tellement
00:41:01que son passif
00:41:02se confond
00:41:03avec mon actif.
00:41:05N'est-ce pas,
00:41:05mon ami ?
00:41:06N'est-ce pas ?
00:41:08Les boulets
00:41:09des frères Bureau
00:41:09n'auraient point suffi
00:41:10à vous avoir la Normandie
00:41:11et à vous donner la France
00:41:12on peut dire que cette fois
00:41:13ça y est,
00:41:14la Normandie
00:41:14et puis la Bourgogne
00:41:15et puis la Provence
00:41:16sans cette trésorerie
00:41:18si saine
00:41:19et si sûre
00:41:20dont vous disposez
00:41:22grâce à moi.
00:41:25Je suis la pucelle
00:41:26banquier.
00:41:29Vous me regardez,
00:41:30vous me regardez.
00:41:32Vous êtes comme Marcel,
00:41:32exactement.
00:41:33Elle ne comprend l'argent
00:41:33que dans l'argent en tri.
00:41:35Et vous, Charles,
00:41:36vous avez beau être
00:41:36au sommet de toute l'affaire,
00:41:37cette idée vous trouble,
00:41:38je dirais même plus,
00:41:39elle vous tourmente
00:41:40que l'argent,
00:41:41l'argent sonore,
00:41:42l'argent d'un temps,
00:41:43il puisse se raffiner
00:41:44jusqu'à la plus mouette
00:41:45impalpabilité
00:41:46sans que pourtant
00:41:47faiblisse sa valeur.
00:41:49Au contraire,
00:41:51cette valeur spectrale
00:41:52enveloppe tout
00:41:52et c'est sur elle
00:41:53que l'on joue.
00:41:55Mieux que personne,
00:41:56je suis en mesure
00:41:56de vous expliquer
00:41:57article par article
00:41:58comment se forment
00:41:59les cours,
00:41:59pourquoi les bilans
00:42:00finissent vaille que vaille
00:42:00par s'équilibrer,
00:42:01la mécanique du négoce
00:42:02international.
00:42:04Mais moi-même,
00:42:05je ne saurais lire
00:42:06ce qui rend possible
00:42:07l'ensemble de cette alchimie.
00:42:08perceptible dans ses quantités,
00:42:13mais inintelligible dans sa qualité,
00:42:16la finance,
00:42:18la glorieuse finance,
00:42:21participe à la fois de l'empire des choses,
00:42:24de l'essence de l'homme
00:42:25et une surnaturelle philosophie.
00:42:31En effet,
00:42:32le tournoi,
00:42:34vous l'avez oublié,
00:42:36un tournoi sans douleur
00:42:37avec lance de paille
00:42:39et cuirasse de carton
00:42:40et tous les rôles,
00:42:41tous,
00:42:42chevaliers et chevraux
00:42:43tenus par des jongleurs.
00:42:45Le simulacre,
00:42:46en somme,
00:42:47d'un rustique divertissement.
00:42:48Réveille-toi, Guillaume,
00:42:53Réveille-toi,
00:42:54si tu danses sur le chaume,
00:42:57ta part reçoit.
00:42:59Dis qu'en bille et contre ton cœur,
00:43:01faut que brille,
00:43:02dis qu'en bille et contre ton cœur,
00:43:04faut que brille le cœur.
00:43:09Arnache-toi, conjule,
00:43:11arnache-toi,
00:43:13nouvelle,
00:43:14qu'il recule,
00:43:16et quitte en râle à toi.
00:43:17Dis qu'en bille et contre ton cœur,
00:43:20faut que brille le cœur.
00:43:22Dis qu'en bille et contre ton cœur,
00:43:24faut que brille le cœur.
00:43:29Et que tant que vous faites un tournoi,
00:43:33je choisis dans vos peines,
00:43:35vous l'êtes plus belle pour moi.
00:43:37Dis qu'en bille et contre ton cœur,
00:43:40faut que brille le cœur.
00:43:42Dis qu'en bille et contre ton cœur,
00:43:44faut que brille le cœur.
00:43:47À Taillebourg.
00:43:53Oui, sire, très volontiers.
00:43:55Mon bonheur est de vous servir.
00:43:57Nous reprendrons ses propos financiers à Taillebourg,
00:44:00puisque votre majesté me convie à la grande chasse qui va s'y donner.
00:44:111450 toujours.
00:44:14La chasse !
00:44:17La chasse !
00:44:19Il est court !
00:44:23Cours, mon bonhomme !
00:44:26Dépêche-toi !
00:44:29La chasse a besoin de gibier !
00:44:33C'est toi, le gibier !
00:44:36C'est toi, toi, toi, toi !
00:44:40Je t'avais dit...
00:44:41Cette chasse à Taillebourg, Jacques, n'y va pas !
00:44:47Tu possèdes 33 châteaux.
00:44:51Tu le répètes tout le temps.
00:44:53De Barcelone à Bruxelles, tu as plus de 400 dépositaires.
00:44:57Des comptoirs dans tous les coins.
00:45:00Des sept galères peuvent prendre la mer.
00:45:02Cache-toi !
00:45:04Cache-toi !
00:45:06File !
00:45:08Sauve-toi !
00:45:10Tu ne m'as pas écouté.
00:45:14Je ne suis pas parmi tes voix.
00:45:18Aussi, c'est aujourd'hui que s'ouvre ton procès.
00:45:22Te condamner, c'est tout ce qu'ils auront à faire.
00:45:28Car jour après jour, je t'ai vu fabriquer contre toi-même un réquisitoire écrasant.
00:45:35Les mots et les gestes propres à te perdre,
00:45:38tu n'en négligeais pas un seul.
00:45:41Pas un seul.
00:45:46Pourvu qu'on t'étrangle avant de te brûler !
00:45:52Moi, qu'est-ce que je peux faire ?
00:45:59Je suis malade.
00:46:05Monseigneur de Bourges, viens me voir.
00:46:10Mon archevêque de fils.
00:46:14Prima d'Aquitaine ne vous en déplaise.
00:46:17Avec regard administratif et théologal,
00:46:19non seulement sur Bourges,
00:46:22mais sur Limoges.
00:46:24Toulouse.
00:46:26Rive.
00:46:28Et clairement.
00:46:33Quand je pense que tout ça sort de moi.
00:46:38La mitre l'a transformée, c'est effrayant.
00:46:40Il fait bien 50 ans.
00:46:46Il cherche à me rassurer.
00:46:54Maman, me dit-il.
00:46:56Maman, ne vous inquiétez pas.
00:47:01Ce procès, nous le gagnerons.
00:47:04Le pape interviendra.
00:47:08De mon côté, je m'emploie à rassembler les pièces indispensables.
00:47:12J'ai le meilleur espoir.
00:47:18Votre archevêque n'est pas un méchant garçon.
00:47:23Je veux bien le croire.
00:47:25Tiens.
00:47:27Il a oublié son écharpe.
00:47:29Gertrude.
00:47:31Faites porter cette écharpe.
00:47:33J'ai ce petit couillon d'archevêque.
00:47:35Il a oublié son écharpe.
00:47:39Gertrude.
00:47:42Faites porter cette écharpe.
00:47:44J'ai ce petit couillon d'archevêque.
00:47:53En attendant, Jacques.
00:47:56Faut que tu y passes.
00:48:00Le roi est contre toi.
00:48:01Le roi.
00:48:05Chaban.
00:48:07Castellane.
00:48:09Tous.
00:48:11Mais aussi.
00:48:13Tu voulais manger la terre.
00:48:15Boire la mer.
00:48:17Armateurs.
00:48:19Mineurs.
00:48:21Argentiers.
00:48:23Courtiers.
00:48:25Les étoffes.
00:48:26Les épices.
00:48:27Beyrouth.
00:48:28Montpellier.
00:48:29Douze talons.
00:48:31Treize.
00:48:32Carcans.
00:48:38Tes voies te commandaient.
00:48:40N'est-ce pas?
00:48:44Ces phénomènes avec leur voix.
00:48:46Qu'est-ce que je peux faire?
00:48:54Prier?
00:48:56Prier qui?
00:48:58Jésus-Christ.
00:49:01Ses initiales, quel agacement.
00:49:03sainte vierge.
00:49:04Sainte vierge.
00:49:05Saito que je m'efforce de la voir, celle que je vois, c'est moi.
00:49:14D'ailleurs, je fus baptisée sous le nom de Marie.
00:49:18On m'appelle Marcel, par pure modestie.
00:49:21C'est moi, ténébreuse caverne, où s'entrelacent des branchages d'or.
00:49:32L'épouse de Jésus-Christ et de Jacques Coeur serait à la fois la mère de l'archevêque Ponce Pilate.
00:49:50Ponce Pilate.
00:49:54Ponce Pilate, non.
00:49:57Calife.
00:49:58Le grand-prêtre.
00:50:01On les confond.
00:50:03Ces deux oiseaux.
00:50:04Mais, ma parole, je vais mieux.
00:50:19Toute seule, je me soulève.
00:50:24Je vole, et ce n'est pas un rêve.
00:50:29Je me dilate.
00:50:31Le fond.
00:50:34Mes coussins mangent le plafond.
00:50:38Sur les âges et sur les astres.
00:50:42Je tourne.
00:50:44Je flotte.
00:50:46Je vente.
00:50:49Jacques.
00:50:52Mon vieil.
00:50:54Je te vois.
00:50:57Je te vois.
00:50:58Sans mes brunelles.
00:51:02Je t'entends.
00:51:05Sans mes oreilles.
00:51:09Ta jambe te fait mal.
00:51:10La voix douce qu'il a.
00:51:21Le vieillard qui t'accueille.
00:51:25Il t'embrasse.
00:51:27Dans sa grande barbe.
00:51:29Il te parle.
00:51:30Il te parle.
00:51:33Mon papa.
00:51:36Mon enfant de cœur.
00:51:39Mon beau.
00:51:41Mon tout beau.
00:51:42La sainte sérénité de l'unité par elle-même conçue.
00:51:59Moi, le pape.
00:52:02Je m'en éblouis.
00:52:04Lorsque je vous vois.
00:52:06Pour la grandeur de ma cause.
00:52:09Vous vous êtes dépensé.
00:52:11Comme vous avez dépensé.
00:52:13Sans regarder.
00:52:15Sous le couvert de vos trafics.
00:52:16Vous démontre à tous vos peuples orientaux.
00:52:19Que le sang catholique.
00:52:22Garde toujours.
00:52:24Sa vivace.
00:52:26Vertu.
00:52:30La commission vous a condamné le 29 mai 1453.
00:52:34Ce jour-là, singulière coïncidence.
00:52:38Constantinople, chrétienne, byzantine et latine.
00:52:43Constantinople tombait au pouvoir du sultan turc Mahomet.
00:52:48Constantinople à la Turquie.
00:52:52Invraisemblable.
00:52:54De la folie.
00:52:56C'est à moi de répondre à ce coup furieux.
00:53:00Certains me disent que le temps des croisades appartient au passé.
00:53:07Autant soutenir que la croix n'est plus à la mode.
00:53:13Ils vont voir ces turcs.
00:53:17Ils vont voir.
00:53:19Pour l'air, à la tête de ma flottille,
00:53:23j'ai besoin d'un homme du génie le plus varié.
00:53:26Il me le faut très instruit des lois coutumes et pratiques.
00:53:31Sur quoi enroule l'humanité.
00:53:34Rétablir le christianisme.
00:53:38Dans les lieux même où respira son adorable fondateur.
00:53:43Cette idée doit l'enflammer, le transporter.
00:53:46Sans toutefois lui masquer les avantages profanes attachés à l'heureuse réussite.
00:53:58En effet, si les turcs tiennent Constantinople, le marché asiatique, adieu.
00:54:03Et nos colonies de la mer Noire, bonsoir.
00:54:09Mon amiral, notre sauveur, c'est vous.
00:54:16Oui, vous, Jacques Caire.
00:54:19Tout vous désigne.
00:54:21Côté foi, vous engendratez un archevêque très bien noté.
00:54:30Votre frère est évêque de Luçon.
00:54:34Côté caisse, vous avez fait fortune au point que votre roi se vit contraint de vous réduire à la misère.
00:54:45Ainsi, vous ouvrez-t-il la chance d'infini, la seule, ici-bas, capable de remplacer pour vous la richesse.
00:54:57Car la richesse, petit coquin, vous en aviez épuisé l'étendue.
00:55:03Rassurez-vous, cette misère ne durera pas.
00:55:11Un empire est à vous.
00:55:15Prenez-le !
00:55:17Aux bouches du tibre, l'escadre vous attend, les artilleurs, les marins, les soldats.
00:55:23Vous aurez comme adjoint un homme très sûr, le capitaine Scarampo.
00:55:34Mais qui est-il votre visage ?
00:55:38Exprime une réserve.
00:55:41Allons formuler la condition que vous mettez à votre gloire.
00:55:46Comment ?
00:55:50Le procès.
00:55:52Revoir le procès.
00:55:56Je m'y emploierai de toute mon énergie, bien que...
00:56:00Comment ?
00:56:02Pas votre procès.
00:56:05Le procès du qui ?
00:56:09De Jeanne d'Arc.
00:56:11La demoiselle cuirassier.
00:56:13C'était convenu, je puis vous le dire, c'était convenu depuis le début.
00:56:22Quoi ?
00:56:24Vous désirez qu'on batte l'affaire quand il est encore un peu chaud ?
00:56:29Je tiens beaucoup, moi, que vous exerciez sans délai le commandement que je vous confie.
00:56:38J'ordonne donc tout de suite, aux fins probables de revanche et d'apothéose, l'enquête concernant cette ancienne jeune fille.
00:56:50Voici maître Jacques tout transfiguré.
00:56:57J'appelle mon secrétaire.
00:57:02Gertrude, Gertrude, vous êtes là !
00:57:09Au-dessus du déluge, mon mari parlait avec le Père éternel dans sa grande barbe blanche.
00:57:22Elle s'est mise à noircir.
00:57:27Ce n'était que le Pope.
00:57:31Ce n'était qu'un rêve.
00:57:34Un rêve.
00:57:36Comme seul un cadavre peut en avoir.
00:57:40Il s'est mis en avoir.
00:57:43Attendez, nouvelles de mon mari.
00:57:48Ah, s'il m'avait écoutée.
00:57:51Mais non !
00:57:53La terre, la mer, monsieur voulait tout.
00:57:58Tout.
00:58:00Crésus.
00:58:01Lui-même, il s'est condamné.
00:58:06Crétin.
00:58:10Il comparaît aujourd'hui devant ses ennemis.
00:58:13Jaban.
00:58:15Castellani.
00:58:19Mon Dieu.
00:58:22Jacques.
00:58:25Jacques.
00:58:27Mon pauvre Jaco.
00:58:31Monsieur l'argentier, je vous rappelle que vous êtes accusé d'avoir frappé des monnaies courtes de poids.
00:58:51Fourni des armes au Sarrazin exportées sans licence du cuivre du plomb de l'argent.
00:58:56Rendu un jeune homme crétien à l'esclavage musulman dont il s'était échappé.
00:59:03Usez à votre guise du cachet secret du roi.
00:59:07Monopolisez les foires et les banques du royaume.
00:59:10Et cornez à votre profit les impôts que vous perceviez comme gouverneur du Languedoc.
00:59:15À ce propos, je confirme, une fois de plus, que des libéralités assez gratinées, prélevées, je ne dis pas non, sur les taxes et redevances publiques, me furent votées trois ans de suite par l'Assemblée délibérante de Montpellier.
00:59:31À quelle fin ?
00:59:34Mais pour me dédommager ? Oh, dans une faible mesure, croyez-moi, de ce que me coûtait notre armée en train de conquérir la Normandie et d'achever ainsi l'œuvre de Jeanne d'Arc.
00:59:43Reprenons le réquisitoire chapitre par chapitre.
00:59:52En 1429, à Bourges, vous battiez monnaie pour le gouvernement.
00:59:57Vous avez forgé au-dessous du poids.
01:00:00Au lieu de forger 70 écus pour un marque d'argent au titre de 18 carats, vous avez forgé 76, 80 et même 89 écus, 89, au titre de 14 carats seulement.
01:00:101429.
01:00:13Cette histoire remonte à 1429, il y a donc plus de 20 ans.
01:00:17Nous venions juste de nous marier.
01:00:20Si de chacun de ces gestes, si de chacun de ces pas, tout homme était tenu de se souvenir afin d'en répondre un jour devant une commission judiciaire, comment l'humaine société pourrait-elle persister ?
01:00:32Les uns et les autres, nous avons besoin d'un certain lot de coudes et franches.
01:00:35Cette affaire des marques d'argent, tant de jours, tant d'événements depuis se sont écoulés, elles devraient être enterrées dix mille fois.
01:00:43Par bonheur, il se trouve que la sagesse du roi prévint l'impuissance du temps, du sable et de la pluie à promulguer l'oubli.
01:00:55Le 6 décembre 1429, les erreurs de frappe relevées au cours de cette même année
01:00:59faire l'objet d'une lettre de pardon enregistrée en chancellerie qui les efface à jamais.
01:01:04Vous décidez, vous tranchez.
01:01:06Moi, pas du tout.
01:01:08Le roi, mes amis, une fois pour toutes, la faute est remise.
01:01:11Attendez de connaître sur ce point le sentiment de la justice.
01:01:14Qui la justice ?
01:01:15Nous, monsieur.
01:01:16S'il en est ainsi, contre la justice, j'en appelle à la justice.
01:01:19Vous offencez en même temps la commission et la réflexion.
01:01:22La lettre du 6 décembre ?
01:01:23Suspect.
01:01:24Très suspect.
01:01:26La prontitude de votre mémoire à brandir cette date que l'histoire oubliera.
01:01:29Absolument.
01:01:30Légété ? Oui ? Non ?
01:01:31Vous le fûtes.
01:01:32La lettre est au dossier, nous ne contestons pas tout au contraire.
01:01:35Ce pardon, pourquoi l'avez-vous sollicité ?
01:01:39Je vais vous le dire.
01:01:41Il devez vous servir à couvrir par avance toute la fausse monnaie que vous aviez dans la tête des lords.
01:01:46De fait, vous avez récidivé.
01:01:48Les gros sous de 1432.
01:01:51Vous étiez tous au monde il y a 20 ans.
01:01:53S'il s'agit de se rappeler, rappelons-nous ?
01:01:57Rien n'était d'aplomb.
01:01:59Nous avions des soucis écorcheurs.
01:02:01Les besoins de la trésorerie en pièces de monnaie légitimaient certaines entorses qu'on le diable y serait.
01:02:05Votre goût des entorses, c'est poursuivi dans tout ce cuivre, tout cet argent, tout ce fer canonnier que vous exportez frauduleusement.
01:02:13Ce dont il résulte pour le royaume un considérable appauvrissement.
01:02:17Messieurs, au cours des premières séances de ce procès, il me fallut me disculper d'avoir tué Madame Sorel.
01:02:27La femme de chambre de l'infortuné Agnès est venue vous déclarer que sur les minuits, le peine de la serrure vint à grincer.
01:02:36Au courant comme pas un de tout ce qui est couloir et corridor, un fantôme s'introduit dans la chambre de sa maîtresse.
01:02:42À la main, il tient un breuvage obscur. Sa démarche le trahit. Qui donc, ce fantôme ?
01:02:46Mais l'argentier du roi, tout simplement.
01:02:50Vous aimez ensuite ce licencié de la faculté de Madrid qui logea quelque temps chez moi.
01:02:54Il vous déclarait par écrit que les mines d'argent et de cuivre que j'exploite près de Lyon et dans le Beaujolais ne tirent leur prospérité que de la magie noire où je suis très fort.
01:03:04D'après ce picador d'assiette, j'aurais tué la dame de beauté au moyen de l'as de pique. Quoi qu'il en soit, pour la mort de Madame Sorel, la commission a renoncé à m'inculper. Je l'en remercie. Mieux, je l'en félicite.
01:03:18La hanerie aurait dépassé ce qu'on pourrait attendre des hanes eux-mêmes.
01:03:22Éminente, certes. Non moins qu'évidente, votre intelligence et votre volonté. Reconnaissez-vous les avoir employés l'appauvrissement du royaume ? Ne perdez pas de vue, Monsieur Largent.
01:03:34En entier, que le tribunal recherche avant tout la preuve du crime. Et que c'est dans l'aveu émané du coupable que cette preuve réside à son eugé suprême et suffisant.
01:03:42Messieurs, vous n'ignorez rien des conditions dans lesquelles je me trouve. Un gros bonnet des finances publiques poursuivies en haut de cours, les avocats n'y a pas droit. C'est la coutume, paraît-il. Je suis donc tout seul à plaider pour moi.
01:03:54Lorsqu'on m'arrêta au soir d'une partie de chasse à Taillebourg, je ne transportais pas sur moi ma correspondance et ma comptabilité.
01:04:02Vous pensez ?
01:04:04Afin que j'ai entre les mains les pièces que j'estime indispensables pour ma défense, la Commission accepta d'envoyer deux experts à Montpellier.
01:04:11Nous ne les avons jamais revus.
01:04:14Leur incompétence, d'ailleurs, sautait aux yeux.
01:04:16La Commission me traîne de forteresse en forteresse.
01:04:20Dans ma présente résidence, je n'ai rien pour écrire et le luminaire me fait défaut.
01:04:24Sans ces taquineries, j'admets volontiers que je perdrais de vue que je suis prisonnier.
01:04:30Laissez-moi toutefois déplorer qu'on me fasse prendre un souterrain glacé pour me conduire en cette salle.
01:04:35Le mystère, le théâtre, toujours.
01:04:37Et le résultat des points dans le dos.
01:04:39En effet, le trajet par le souterrain ne s'impose pas.
01:04:42Désormais, vous descendrez de votre chambre directement.
01:04:46Vous sentez-vous en état, M. L'Argentier, de poursuivre le dialogue ?
01:04:51Je suis solide. Allons-y.
01:04:53Vous avez la faculté de rester assis.
01:04:55Merci. De vous, je pense mieux.
01:04:58La pratique de dictée, que voulez-vous ?
01:05:00Reconnaissez-vous avoir employé votre intelligence et votre volonté à l'appauvrissement du Royaume ?
01:05:06Appauvrissement, appauvrissement !
01:05:08Vous le chiffrez comment, votre appauvrissement ?
01:05:10Des mots pareils, des gobelets troués, de n'en rien !
01:05:13Bon. Je vais, une fois de plus, m'efforcer de vous éclairer.
01:05:23Prenons une de ces récentes années où davantage s'exerça le cumul de mes rôles officiels et de mes petits métiers.
01:05:29Ce diabolique cumul, qui est au fond le véritable, unique grief.
01:05:32Un homme, il n'est sans doute pas permis qu'il soit tout. Pourtant, je partais pour.
01:05:37Tenez, 1452.
01:05:41Cet année-là, j'expédie en Orient 30 galères complètes de draps, de toiles, de fer manufacturé, de plomb, de cuivre, d'argent.
01:05:47Vous savez ce que pèse la cargaison d'une galère ?
01:05:50Allons, répondez.
01:05:51Répondez, quoi !
01:05:52Que je réponde, admirable. C'est vous l'accusez.
01:05:58Cet admirable est admirable.
01:06:01Une cargaison, donc, pèse 800 000 livres, qui correspondent en volume aux 500 tonneaux prévus pour la marchandise à bord.
01:06:07De ce même Orient, cette même année, je reçois 16 cargaisons.
01:06:12De la soie, pour le coup, de la pourpre, des diamants, de l'or.
01:06:15Les princes arabes troquent en vrac leur dinard d'or sans alliage contre des quantités égales de cuivre et d'argent
01:06:19afin de fabriquer pour leur sujet de la petite monnaie.
01:06:22Je vous fais grâce des divers modes de paiement, partis en frais, partis en liquide.
01:06:25En gros, je donne du gros, j'encaisse du fin.
01:06:30La simple physionomie de ces échanges montre assez de quel côté penche le bénéfice.
01:06:35Vous videz votre pays pour vous enfler d'or mécréant.
01:06:39Une dernière fois, reconnaissez-vous avoir employé votre intelligence et votre volonté à l'appauvrissement du royaume ?
01:06:47Que je m'enrichisse, vous enrichit tous.
01:06:52Un homme est toujours de quelque part.
01:06:54Même Jésus, plus qu'un homme, lui, cependant.
01:06:57Je suis de ce royaume-ci.
01:07:00La fleur de lys marque les lingots que je vends.
01:07:03Ainsi, le royaume français teinte sur les comptoirs d'Alexandrie et de Beyrouth.
01:07:06La fleur de lys marque les canons que je vends.
01:07:08Je reconnais que je perds mon temps.
01:07:12J'ai la France à faire, à finir.
01:07:14Le cheval piétine le labour du bœuf.
01:07:16La commission se retire pour délibérer.
01:07:18Constatant que l'accusé Jacques Coeur refuse de reconnaître avoir employé son intelligence et sa volonté à l'appauvrissement du royaume,
01:07:34la commission décide de soumettre le dit Jacques Coeur à la question.
01:07:41Demain, veille du dimanche, les rameaux.
01:07:44La commission demeure prête à vous entendre si vous désirez parler.
01:07:50Excusez-moi, je n'ai rien compris.
01:07:52La commission demeure prête à vous entendre si vous désirez parler.
01:07:54Oui, mais avant, qu'avez-vous raconté avant ?
01:07:56Vous serez soumis demain à la question.
01:07:59La question ?
01:08:00Quelle question ?
01:08:01La question judiciaire.
01:08:02On débute par le brodequin.
01:08:04Le brodequin ?
01:08:06Le brodequin à moi ?
01:08:11Mais dites-donc...
01:08:13Mais je suis Jacques Coeur !
01:08:15N'est-ce qu'il n'y peut rien !
01:08:16Vous savez ce que c'est le brodequin ?
01:08:18On est du câble d'un treuil, on ne sert le pas de la jambe entre quatre morceaux de bois bordés de fer.
01:08:30En haut de cette pote, on glisse à grande fatigue le biseau d'un coin de bois durci,
01:08:33du chêne en général de sept pouces de long.
01:08:36Ça va le marteau du bourreau.
01:08:38Votre cheville éclate d'un côté.
01:08:40Ça va de nouveau le marteau.
01:08:42Votre cheville éclate de l'autre côté.
01:08:44Au troisième coup, l'os de la jambe est cassé.
01:08:47Ah, messieurs, dans votre belle innocence, vous croyez, je parie,
01:08:49qu'un homme se limite à son apparence vêtue,
01:08:51ou même à la figure visible de sa nudité ?
01:08:53Erreur, erreur !
01:08:55Le corps d'homme est farci de ressorts chatouillants,
01:09:00d'organes qui s'irritent pour un oui, pour un non.
01:09:04Brûlés, torturés.
01:09:05Mais réfléchissez, ça dépasse le droit, ça démonétise le vocabulaire,
01:09:09ça touche du vif, du vivant, qui sent, qui ressent.
01:09:12Tous, même les plus acharnés contre moi,
01:09:15vos chabannes, vos castellanis, vos utin de curier,
01:09:18vous avez tous dîné chez moi, tous !
01:09:20Comment accepteriez-vous cette obscénité ?
01:09:22Qu'on me déshabille devant vous, qu'on m'attache, qu'on me tracasse !
01:09:25Ce supplice vous diminuera !
01:09:26Vous, plutôt !
01:09:28Le bras de cœur !
01:09:29Je vous ai prêté de l'argent à tous !
01:09:31Voulez-vous que j'énumère les créances que je tiens ?
01:09:33Le bras de cœur !
01:09:34C'est insensé !
01:09:36Ma femme est là, qui nous écoute.
01:09:46Ma femme,
01:09:47ou tout au moins son âme,
01:09:49Vous le savez, ma pauvre Marcelle est morte il y a trois jours.
01:09:55Le chagrin l'a tué.
01:10:00Oseriez-vous lui faire davantage de peine ?
01:10:04Mon fils aîné attend tout près d'ici, tout près.
01:10:08De quoi vous auriez l'air si le primat d'Aquitaine me voyait sortir d'entre vos mains
01:10:11avec une patte qui traîne, qui pend ?
01:10:15D'ailleurs, la hiérarchie catholique est pour moi.
01:10:19L'épiscopat français tout entier me réclame pour son bien.
01:10:23Tant par mes parenthèses ecclésiastiques
01:10:24que par les cathédrales bâties de ma poche,
01:10:26j'appartiens au clergé !
01:10:28Vraiment !
01:10:30Il ne dépend que de vous que vienne ici convoquer le barbier qui vous tonsura.
01:10:34Retrouvez-le, ce bon barbier !
01:10:37Mais nous n'en sommes pas encore là.
01:10:39Les appels et les déclinatoires ne seront considérés qu'une fois la cause instruite.
01:10:44Pour l'instant, nous instruisons le code d'instruction s'appuie sur le bras de cœur.
01:10:48Il n'y a pas que ma femme et le pape et mon fils.
01:10:50Il y a le roi !
01:10:51Je vous enjoins de laisser le roi hors du débat !
01:10:54Charles !
01:10:54Charles, vous êtes là derrière la tapisserie.
01:10:57La tapisserie tremble de votre tremblement.
01:10:59Écoutez-moi comme votre meilleur, votre seul conseiller.
01:11:03Un procès de ce genre ne déshonore pas celui qu'il veut déshonorer,
01:11:06mais le monarque invisible qui d'avance à prononcer le verdict !
01:11:10À 6 heures de la matin, l'accusé subira la question par le bras de cœur.
01:11:16À bord de la galère amirale de la flotte pontificale en Méditerranée,
01:11:28dans l'archipel d'Esporade.
01:11:29Je sais ce qu'il y a en peau, mon cher capitaine,
01:11:33il est temps pour vous de savoir qui je suis.
01:11:36En gros, je sais, vous le connaissez,
01:11:38mais sur les gens, il s'en dit tant.
01:11:40On commence la broderie.
01:11:43Auparavant, on concitait la pause pour les rameurs,
01:11:44on leur donne du vin,
01:11:46on prenne ce qu'il faut de voile pour pincer le peu de vent qu'il y a,
01:11:48que les artilleurs apportent sur la couverte le pétrole et les boulets,
01:11:51que les grenadiers se placent dans leur cage,
01:11:52que ces messieurs de la musique laissent à leur guitare et reprennent la rame.
01:11:55Donc, le 20 mai 1453, la commission royale me condamne.
01:12:04Elle me condamne à demander pardon, à genoux.
01:12:07La corde au cou, un cierge de deux livres entre les mains.
01:12:10L'ensemble de mon abordeur est confisqué.
01:12:13Vous dites, le brodequin ?
01:12:16Le brodequin me fut épargné.
01:12:18Le brodequin, ils n'osèrent pas.
01:12:20Toutefois, je fus conduit devant les instruments la veille du dimanche des rameaux.
01:12:24Mes juges étaient là, le roi n'était pas loin.
01:12:26J'étais nu, mon cher, nu comme nos braves rameurs.
01:12:30Les instruments, je ne fis que les voir,
01:12:32mais ma jambe droite en fut à ce point émue
01:12:34que d'elle-même elle s'est mise à se ratatiner.
01:12:36Depuis, je boite.
01:12:38Capitaine Scarampo, qu'on s'y fait la fin de la pause.
01:12:46J'étais enfermé à Poitiers.
01:12:48Deux ans.
01:12:49Deux ans que je passais à reconstruire comme un rat, comme un grillon.
01:12:55Avec ma tête, dans la nuit, mes châteaux, j'en avais plus de trente.
01:12:59Les pierres, les croisés, les plantes, les fleurs.
01:13:01Mes tableaux, mes manufactures, mes carrières d'argent.
01:13:04Les pièces de monnaie telles qu'elles sortent du four.
01:13:06Et les signatures des reconnaissances de dettes,
01:13:07traillantes jusque dans les gouttes d'encre crachotées.
01:13:12À certains moments,
01:13:14à force de me souvenir, tout était là.
01:13:16Mais d'abord, mon palais de courge.
01:13:19Qui ne l'a pas vu, n'a rien vu.
01:13:21Tout était là,
01:13:22mais au-dedans de moi,
01:13:25fondu, digéré.
01:13:28J'ai compris en même temps la vanité des biens de ce monde
01:13:31et la vanité de cette formule biblique
01:13:33considérée dans un sens trop général.
01:13:35Eh bien, de ce monde, en effet,
01:13:38ne se révéleront vides et factices
01:13:39qu'à l'homme qui, comme moi,
01:13:41dans leur plénitude, l'écouta.
01:13:44Je me suis évadé
01:13:45en 54,
01:13:47le 27 octobre.
01:13:49A moins que
01:13:50le gouvernement ne se soit attendri.
01:13:54Quoi qu'il en soit,
01:13:55moi, pas plutôt dehors,
01:13:56la pré-beauté s'est mise à me chercher.
01:13:58J'ai mis lieu.
01:14:02Je parvenais mal à démêler
01:14:03si la cavalerie qui me pourchassait
01:14:05ou m'escortait.
01:14:07Non, c'est possible.
01:14:10L'accueil que je reçus à Rome,
01:14:11où j'entrais comme Jules César,
01:14:13devant d'ailleurs les mêmes initiales,
01:14:16cet accueil plus que magnifique
01:14:17et le poste où me voici,
01:14:19l'escadre romaine à moi,
01:14:20cette galère qui jouit de me subir,
01:14:23l'artillerie,
01:14:23les draperies,
01:14:24la mer,
01:14:24les îles grecques,
01:14:25les voiles turques,
01:14:26tout cela, je ne dis pas,
01:14:27tout cela me colore en haut,
01:14:28ce qui ne fut peut-être
01:14:29qu'un ourvari de pencu.
01:14:32De monastère en monastère,
01:14:33j'arrivais chez les cordeliers de Brocaire.
01:14:37L'ultime cité de ces langues d'œufs,
01:14:39j'avais fait la lune de ce lègue.
01:14:42Brocaire sur le Rhône.
01:14:44Je n'étais pas plutôt
01:14:44chez ces poltrons de cordeliers
01:14:46qu'une compagnie entière
01:14:47cerne le couvent.
01:14:48Les gendarmes commandés par Castellani,
01:14:50ce tigre déguisé en chrétien.
01:14:52Les cordeliers n'en mènent pas large.
01:14:54Juste au pied des terres du couvent,
01:14:56une barque armée m'attend,
01:14:57venue de la rive provençale
01:14:58avec des amis.
01:14:59Moi, de ma chambre,
01:14:59j'entends les gendarmes fourgonner.
01:15:01Au cordelier,
01:15:02ils administrent de ces passes-féconds
01:15:03à les défroquer sur le cou.
01:15:05Ils sont dans l'escalier.
01:15:06Ils touchent ma porte.
01:15:07Il va là !
01:15:08C'est vous, Castellani !
01:15:09Vous n'ignorez pas
01:15:10que vous fiolez le droit d'asile.
01:15:11Il me fait
01:15:12le droit d'asile,
01:15:12ne protège pas les turcs !
01:15:14Turc, moi !
01:15:15Ma famille est à cheval
01:15:15sur l'Auvergne et le Bourbonnet !
01:15:17J'ai posé à même ma table
01:15:18une mignonne couloverine
01:15:20du genre boîte à culasse
01:15:21et braqué droit sur la porte.
01:15:23À la main,
01:15:23je tire la mèche allumée.
01:15:25J'ai trouvé de bonnes armes.
01:15:26Je dois dire partout
01:15:26mais on pensait que je séjournerais.
01:15:28Ils étaient toutes une bande
01:15:28à défoncer la porte.
01:15:30Juste quand elle cède,
01:15:31je touche la poudre avec ma flamme.
01:15:33BAM !
01:15:34À travers la fumée
01:15:36dans cette gendarmaille
01:15:37qui hurlait,
01:15:38je me suis éclipsé,
01:15:40envolé.
01:15:41Une royale main du ciel
01:15:42me tenait par mon manteau,
01:15:43me posait dans la barque.
01:15:45Noir était le rhône.
01:15:46Une lumière brillait.
01:15:47Là-bas, là-bas,
01:15:48le Vatican,
01:15:49le paradis.
01:15:51Oh, l'âme !
01:15:52Tous les morts !
01:15:54Capitaine Scarampo
01:15:55et les trois vaisseaux turcs
01:15:56sont à une liée au plus.
01:15:57Ils ont l'air de se donner la main
01:15:58pour nous barrer le chemin.
01:16:00Ils nous regardent venir
01:16:00avec leurs canons
01:16:01et leurs grappins.
01:16:02Nous arriverons sur eux
01:16:03à 42 000 à l'heure.
01:16:0442 000 toises.
01:16:06Tarif moyen
01:16:0615 coups de rame par minute.
01:16:0710 pour commencer.
01:16:09Les fronts droits
01:16:09sur les turcos.
01:16:11Vous dites ?
01:16:12La bataille perdue l'avance.
01:16:14Mais non, mon bon, mais non.
01:16:15D'ailleurs,
01:16:15qui vous parle de bataille ?
01:16:17Regardez leur dispositif.
01:16:18Le navire de droite
01:16:18et le navire de milieu.
01:16:20Nous avons assez de place
01:16:20pour passer.
01:16:21Nous passerons comme une flèche.
01:16:23Le vent tourne.
01:16:24Ils ne pourront pas
01:16:24nous souffler dans les fesses.
01:16:26Pliez les voiles.
01:16:28Vous trouvez que ça manque
01:16:29de chevalerie ?
01:16:30Pas plus chez elles
01:16:31sur la mer
01:16:31la chevalerie
01:16:32qu'un requin
01:16:32dans un champ de blé.
01:16:34Je vous affirme
01:16:34que nous avons
01:16:34la place de passer.
01:16:36Portés par notre lancée,
01:16:37si tôt pousseront
01:16:37à la hauteur des turcs,
01:16:38toutes les rames
01:16:39à la verticale
01:16:39d'un seul coup
01:16:40se dresseront,
01:16:41réduisant la galère
01:16:42à sa stricte largeur
01:16:43de sardines jolies.
01:16:45Mais qu'est-ce qu'ils attendent,
01:16:46les adjudans,
01:16:47pour habiller le porc
01:16:48pour cette racaille pourrie ?
01:16:4912 coups de rame.
01:16:51J'exige 12 coups de rame.
01:16:53Comme 300 fournaises,
01:16:54je veux entendre rugir
01:16:55300 poitrines exaspérées.
01:16:56Capitaine,
01:16:58Jacques Rambarde
01:16:59ne lâchera qu'une salle
01:17:00histoire de dire au revoir.
01:17:02Messieurs les adjudans,
01:17:04vous dormez !
01:17:06J'exige 12 coups par minute.
01:17:09Frappez sur les hommes
01:17:09comme si c'était le Christ.
01:17:11Vous sur la chair,
01:17:12eux sur la mer.
01:17:14En mesure,
01:17:14bon sang de mule,
01:17:15que sa cule,
01:17:16que sa gueule
01:17:17retentisse l'univers
01:17:19de la clameur galérienne
01:17:20de l'assaut.
01:17:22Nos adversaires se demandent
01:17:23comment nous les importerons.
01:17:25Nous leur filerons
01:17:26entre les cuisses.
01:17:30Tiens,
01:17:30ils tirent.
01:17:31Si ça se trouve,
01:17:32Scarampeau,
01:17:32ces poulets viennent de chez moi.
01:17:34Voyez ça,
01:17:34que je dois me moucher
01:17:34par ma propre camelote.
01:17:37Mous les adjudants,
01:17:3816 coups !
01:17:40Cassez-vous le poignet,
01:17:41cassez-leur les reins !
01:17:43Qu'est-ce qu'il vous faut,
01:17:44limaçon,
01:17:44pour vous faire pomber le rat ?
01:17:46Une belle fille ?
01:17:47Je vous en donne deux, moi.
01:17:48Capitaine,
01:17:49envoyez la bannière
01:17:50de la Sainte Vierge
01:17:51et l'étendard de fleurs de lisse
01:17:51que portait Jeanne
01:17:52le jour de Reims.
01:17:53Et mettez partout
01:17:54de l'écarlate et de l'azur,
01:17:55que ça fasse valoir.
01:17:57Quoi ?
01:17:58Les couleurs du pape,
01:17:59le pape qui l'aille
01:18:00se faire bénir.
01:18:01Vive la France,
01:18:02nom de Dieu !
01:18:03Et vous,
01:18:04les bourreaux,
01:18:04frappez secs !
01:18:05Si nous ne passons pas,
01:18:06vous ramerez tous
01:18:07pour Mahomet.
01:18:08Vous les voyez,
01:18:09les turbans ?
01:18:10Essuie les hommes
01:18:11pour que vire le destin !
01:18:13Essuie les hommes
01:18:14pour Jeannette la putain !
01:18:16Et devant l'honneur
01:18:17du Dieu latin !
01:18:18Essuie les hommes
01:18:19pour l'étoile du matin !
01:18:21À cinq brasses d'ici,
01:18:22toutes les rames en l'air !
01:18:24Une rame du frêve,
01:18:27deux grains de poils à faire,
01:18:30trois ni rêve ni trêve,
01:18:33quatre relèves, relèves !
01:18:35Nos passons !
01:18:39Nos passons !
01:18:42Réz hommage au sultan !
01:18:44Si le sultan a besoin
01:18:45de fournitures,
01:18:45quincailleries,
01:18:46per Blancry,
01:18:47qu'il se souvienne
01:18:48de la maison Jacques-Cœur !
01:18:51Jacques-Cœur !
01:18:53Comme les dieux
01:18:57et comme les plus illustres
01:18:58et les plus misérables hommes,
01:19:00Jacques-Cœur n'a pas de tombeau.
01:19:02Blessé à la jambe
01:19:03par la chute d'un mât
01:19:04de son propre navire,
01:19:05au cours de l'engagement naval
01:19:07près de l'île de Lemnos,
01:19:08il fut débarqué,
01:19:09tout malade,
01:19:10deux jours plus tard
01:19:11par son équipage
01:19:12dans l'île de Quillot.
01:19:14Il y trépassa.
01:19:15Où l'enterra-t-on ?
01:19:17Qui le sait ?
01:19:18Dans le vent
01:19:19et dans les lentisques
01:19:19de cette île entre-temps d'îles,
01:19:21dans la neige des vagues,
01:19:23dans le soleil
01:19:23et aussi d'un bout à l'autre
01:19:25de l'humanité,
01:19:26dans la finance
01:19:27où nul au monde
01:19:28ne comprend rien
01:19:28et dans les guerres équivoques
01:19:30et dans les moustaches
01:19:31du gardien des beaux-arts
01:19:32qui fait visiter
01:19:33le palais de Bourges,
01:19:34quiconque aime à la vie
01:19:35de l'argentier
01:19:36peut toujours essayer
01:19:38de saisir
01:19:38ses insaisissables cendres.
01:19:40Nous n'avons pas de passeport
01:19:46Peut-être ce n'est pas la peine
01:19:52On va partout
01:19:57quand on est mort
01:20:00On glisse mieux
01:20:04sans une chaide
01:20:07La rivière conduite
01:20:15Un cadavre n'a jamais tort
01:20:22Mon deu de faire taire de l'or
01:20:28Adieu
01:20:30J'ai fini ma semaine
01:20:37J'ai fini ma semaine
01:20:38Sous-titrage Société Radio-Canada
01:20:43Sous-titrage Société Radio-Canada
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