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Dans son édito du 26/11/2025, Mathieu Bock-Côté revient sur [thématique de l'édito]
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00:00Alors c'est une histoire qui remonte à 2015-2016.
00:03Il faut toujours avoir cela à l'esprit quand on parle du contrôle de l'information aujourd'hui.
00:08Globalement, dans le cycle post-1989, les élections devaient toujours donner le même résultat.
00:13Le centre-gauche ou le centre-droit, les sociolibéraux ou les libéraux sociaux s'échangeaient le pouvoir,
00:19ils avaient la même idéologie, ils avaient quelques désaccords secondaires sur des questions nuancées.
00:25Mais sur le fond des choses, il n'y avait pas véritablement de désaccords.
00:282015-2016, Trump-Brexit.
00:32Ces deux événements sont interprétés comme ce que j'appelle des accidents démocratiques.
00:37La démocratie ne devrait pas donner de tels résultats.
00:40Comment se fait-il que les peuples qui étaient invités à voter se soient permis de voter pour des options interdites?
00:47Et de ce point-là, c'est le point de départ d'une réflexion qui nous conduit aujourd'hui
00:51à cette idée d'un nécessaire resserrement de l'information partout en Occident
00:56pour faire en sorte que les peuples ne votent plus mal.
01:00Alors, qu'est-ce qu'un accident démocratique?
01:01C'est un concept sur lequel je travaille un peu ces temps-ci parce qu'il m'amuse un peu.
01:06La démocratie, finalement, on croyait, parce qu'on était un peu benais,
01:09que ça consistait à choisir entre plusieurs options, entre plusieurs programmes, entre plusieurs projets.
01:13Mais manifestement, ce n'est pas le cas.
01:15La démocratie, telle qu'elle est pensée depuis une trentaine d'années,
01:18ça consiste à toujours aller dans la même direction, ce qu'ils appellent le progrès.
01:23Donc, le progrès qu'on assimile au mondialisme, à l'univers diversitaire,
01:28au néo-féminisme, à l'écologisme autoritaire, souvent.
01:31Donc, la démocratie consiste à aller dans cette direction.
01:34Et si vous n'allez pas dans cette direction, vous n'êtes plus démocrate, vous êtes populiste.
01:38L'enjeu est suivant, le populisme croit de plus en plus dans nos sociétés.
01:42Dès lors, il est nécessaire de restaurer le système d'information
01:45pour qu'il ne permette plus de tels accidents collectifs.
01:50Alors, on se dirait, à cas en France, à partir de quand,
01:54de quels sont les premiers moments où on a cette idée?
01:562018. Gabriel hier parlait avec raison de la loi Avia.
01:59Mais dans le même contexte, Emmanuel Macron avait proposé, la première fois,
02:04une loi sur les fake news.
02:05Je n'ai plus en témoigné, en 2018, j'avais écrit une éditoriale dans le Figaro
02:08pour m'inquiéter, justement, de cette loi sur les fake news.
02:12Pourquoi? Parce que, dès ce moment, on comprenait tout le dérapage,
02:15pour reprendre leurs mots, dont elle était porteuse.
02:18Alors, la thèse d'Emmanuel Macron était la suivante à l'époque.
02:21Il nous disait, dans une démocratie, le relativisme absolu ne peut pas commander.
02:25S'il n'y a pas un minimum d'accord sur les faits,
02:28eh bien, comment pourrions-nous débattre?
02:30Il nous disait aussi, dans le contexte de production de l'information par les réseaux sociaux,
02:33on dirait aujourd'hui l'intelligence artificielle,
02:35eh bien, il faut au moins savoir quelle est la réalité.
02:37Puis, on comprend ses préoccupations.
02:40Mais, elles sont très rapidement détournées,
02:42avec une volonté d'infantiliser une population qu'on croit terriblement manipulable.
02:47Et puis, on se dit, finalement,
02:48on va expliquer aux gens la seule interprétation possible des faits.
02:53Si vous voyez les choses autrement,
02:54vous basculez déjà dans la désinformation.
02:56Mais là, je vais vous donner quelques exemples
02:57qui nous montrent à quel point tout ça est très dangereux.
02:59Ah, parlons aujourd'hui de ce que certains appellent le retour des peuples.
03:03Donc, aujourd'hui, le retour de la souveraineté nationale,
03:05le retour à l'identité.
03:06Certains disent que c'est un retour des peuples.
03:08D'autres disent que c'est le populisme.
03:10Certains disent que c'est une bonne chose.
03:11D'autres disent que c'est une mauvaise.
03:13Deux interprétations qu'on peut argumenter,
03:16qui sont intellectuellement construites pour un même événement,
03:19mais qui se contredisent.
03:20Certains, aujourd'hui, parlent, rappelons-nous,
03:22des agressions sexuelles à Cologne,
03:24ou plus là, toutes celles qui se sont multipliées depuis.
03:26Certains disent fait divers, fait divers, fait divers.
03:29D'autres disent choc des civilisations.
03:31D'autres disent dérive d'une société
03:34qui n'est plus capable d'assurer la sécurité des siens.
03:36Plusieurs interprétations possibles pour les mêmes faits.
03:40Pensons à la réforme des retraites.
03:41La réforme des retraites, pour les uns,
03:43réforme nécessaire pour sauver un modèle social.
03:45Pour d'autres, saccage d'un modèle social.
03:48Pensons à Emmanuel Macron.
03:50Et à la Macronie.
03:51Eux se présentent comme le camp de la raison.
03:53D'autres, j'en suis, les assimilent à l'extrême-centre.
03:56Deux étiquettes qui témoignent de deux lectures différentes
03:59du même camp politique.
04:01L'ERN ou Éric Zemmour.
04:02Le système les présente comme l'extrême-droite.
04:05Eux se présentent comme les patriotes.
04:07Deux étiquettes qui veulent dire des choses très différentes
04:10pour nommer le même phénomène.
04:12Alors, qu'est-ce qu'on peut retenir de là?
04:13La réalité est polysémique.
04:15Il y a plusieurs angles possibles pour lire un même fait.
04:18À partir de plusieurs préférences, de plusieurs subjectivités,
04:22de plusieurs philosophies.
04:24Ce qu'on nous dit ici, c'est que ça ne doit plus être possible.
04:26Parce que l'interprétation qui est en désaccord avec le dogme,
04:29le dogme lequel, le progrès diversitaire, mondialiste,
04:33tel dont je parlais en début d'édito,
04:35tout ce qui s'en éloigne est inquiétant.
04:37Et, à partir de là, il y a aussi les autres faits.
04:40Ce n'est pas un détail.
04:41Les faits qui surgissent et qui viennent troubler l'ordre public.
04:44Des faits dont on ne devrait pas parler.
04:46Des faits dont on ne parlait pas auparavant.
04:48Et dont on parle souvent sur cette chaîne.
04:50Mais ces faits, le simple fait d'en parler,
04:52c'est un choix éditorial.
04:54Eux décidaient de ne pas en parler.
04:55Ici, on décide d'en parler.
04:57Mais si ces faits sont considérés comme des faits troublant l'ordre public,
05:00pourrions-nous les garder à l'extérieur du débat public?
05:02Donc, globalement, l'extrême-centre, devant ça,
05:04j'utilise ce terme, je me dévoile,
05:06l'extrême-centre se dit,
05:07nous ne nous maintiendrons au pouvoir
05:10que si nous restaurons non seulement un contrôle
05:12sur le récit médiatique légitime,
05:15mais plus encore sur le récit médiatique légal.
05:19Et ça, c'est l'étape qui vient de franchir.
05:20Auparavant, on diabolisait.
05:22Quand la diabolisation ne fonctionne plus,
05:24on dira finalement, juridiquement, voilà le vrai.
05:27Certains peuvent s'inquiéter.
05:28Très intéressant.
05:29Concrètement, Mathieu, qu'est-ce que ça veut dire?
05:32On parle de la mise en place dans les faits,
05:36on le voit en temps réel,
05:37d'un dispositif répressif, en fait,
05:40pour bannir de l'espace public
05:42soit la « mauvaise information »,
05:44soit les mauvais informateurs.
05:46Donc, globalement, les sites ou les journalistes,
05:49on verra, les journalistes, c'est une autre étape.
05:50Mais les sites ou les journaux
05:52qui sont accusés, justement,
05:54de dévier de l'information officielle
05:57que souhaiterait voir relayer le pouvoir.
05:59Alors, le problème,
06:02et ça revient au point juste avant,
06:04on en parle souvent, le débat.
06:06Est-ce que c'est tel fait?
06:07La petite Lola, par exemple.
06:09C'est un fait divers ou un fait de société?
06:11Le simple fait d'en débattre
06:13témoigne du fait
06:14que nous n'avons pas la même grille de lecture.
06:16Alors, moi, ce qui m'inquiète là-dedans,
06:17c'est qu'imaginons l'histoire
06:19de la petite Lola apparaît.
06:20Il y a deux traitements possibles.
06:21Parce que certains diront,
06:22non, c'est un fait de société.
06:23Mais si je dis c'est un fait de société,
06:24est-ce que je désinforme?
06:25C'est ce que croyait un ancien garde des sceaux,
06:27si je ne me trompe pas.
06:28Si je dis que c'est un fait de société,
06:30est-ce que je suis en train d'agiter la haine,
06:32de faire la promotion de la haine?
06:33C'est ce que disaient certains
06:34sur le service public à l'époque.
06:36Donc, comment traiter l'information?
06:38Il y a deux manières possibles.
06:39Soit une forme de traitement a priori de l'information,
06:42auquel je ne crois pas,
06:43une forme de comité central de la censure préalable.
06:46Donc, l'information arrive,
06:48et là, on fixe le sens des événements.
06:50On fixe le sens des informations
06:51pour tous,
06:53et ensuite, libre aux journalistes
06:54de les interpréter comme ils le veulent
06:55à partir d'une interprétation déjà fixée,
06:57une forme de comité général
06:58de l'information autorisée,
06:59très 1984.
07:01Ou alors,
07:02une forme de traitement a posteriori.
07:03Et ça, c'est vers ça
07:04qu'on se dirige, je crois.
07:05Donc, globalement,
07:06on sait qu'il y a une ligne.
07:08Si un média s'en éloigne exagérément,
07:11si un site d'information
07:12s'en éloigne exagérément,
07:13si une revue,
07:14si un mensuel,
07:15si un magazine s'en éloigne exagérément,
07:17eh bien là,
07:17on appellera les spécialistes,
07:20on appellera les collègues,
07:21le nouveau soviet de rédaction,
07:23on appellera,
07:24et Gabriel en parlait hier,
07:25des journalistes autorisés
07:26qui sanctionneront leurs collègues
07:28parce qu'ils se seront autorisés
07:29de la seule,
07:30éloignés, dis-je,
07:31de la seule information légitime autorisée.
07:34Et je donne un exemple là-dedans
07:36pour montrer que je ne suis pas
07:37dans un monde parallèle.
07:38Rappelez-vous le rapport JOS.
07:39Le rapport JOS,
07:40qui avait été au cœur
07:41de Reporteurs sans frontières,
07:43c'est la décision
07:43qui va conduire au Conseil d'État,
07:45la fameuse décision
07:45sur les chaînes d'info.
07:47C'est un rapport qui disait
07:48que s'éloigner de l'objectivité,
07:49c'était s'éloigner de BFM.
07:52BFM, normes,
07:53et puis éloignement de BFM,
07:55pas normes,
07:56pas objectivité.
07:57Mais dans ce cadre-là,
07:58ça consiste dans les faits
07:59sur un contrôle
08:00de l'information purement idéologique.
08:02Et en plus, confier,
08:03j'ajoute un truc là-dessus,
08:04à des gens comme Reporteurs sans frontières,
08:05et ainsi de suite,
08:06souvent des groupes privés
08:07qui, en fonction de leur détestation
08:09idéologique personnelle,
08:10voudraient persécuter certains médias.
08:12Est-ce que vous semblez parler
08:15d'un État,
08:15une sorte d'État policier ?
08:16Est-ce que vous n'exagérez pas
08:17peut-être un peu
08:18sur cet aspect-là ?
08:20Non, je ne veux pas assez loin.
08:21La vérité,
08:22c'est que je pense qu'on est ici,
08:24nous nous sommes habitués collectivement
08:25à un dispositif répressif
08:27qui existe déjà
08:28et qui va de plus en plus loin.
08:29Nous nous sommes habitués
08:30aux lois sur la haine.
08:31On a intériorisé l'idée
08:32qu'il était normal
08:33que le politique décide
08:34que certains propos
08:35sont inacceptables,
08:36donc haineux,
08:37donc à bannir de l'espace public,
08:38même quand ils sont factuels.
08:40C'est quand même particulier.
08:41Nous nous sommes habitués
08:42à l'étiquetage politique
08:43des personnalités.
08:44On en a parlé
08:44avec la séance de l'ARCOM aujourd'hui.
08:47Daniel Cohn-Benzit,
08:48panne personnalité politique.
08:50Philippe De Villiers,
08:50personnalité politique.
08:52Allez savoir
08:52quel est le critère distinctif.
08:53J'ai l'impression
08:54que c'est l'orientation idéologique
08:55des uns et des autres.
08:56Éric Dupond-Moretti, panne.
08:57De la même manière,
08:58nous nous sommes habitués
08:59au contrôle politique
09:00des temps de parole.
09:01On trouve que c'est normal
09:02que des gens décident
09:03de distribuer le temps de parole.
09:04Ça n'existe pas vraiment
09:05ailleurs dans le monde,
09:05si je peux me permettre.
09:06C'est le pays au monde
09:06à le faire
09:07avec la Roumanie
09:07qui nous copie.
09:08C'est à ça.
09:09Et la Roumanie, quand même.
09:11Alors, certains se disent,
09:13devant tout cela,
09:13il suffirait,
09:14dans ce système
09:15de règles bizarres,
09:16il suffit d'être subtils
09:17pour ne pas se faire attraper.
09:19Mais c'est une erreur,
09:19les enfants.
09:20Ce n'est pas du tout
09:21la bonne stratégie.
09:22Quand vous êtes subtils,
09:23vous acceptez de plus en plus,
09:24vous intériorisez
09:24de plus en plus d'interdits.
09:26Vous dites de moins en moins
09:27de choses.
09:27Persuadez qu'on ne vous attrapera pas.
09:29Et à la fin,
09:30on fait de nouvelles règles
09:30pour vous coincés,
09:32pour vous persécuter.
09:33Je vais vous donner
09:33la prochaine étape,
09:34selon moi,
09:34et je terminerai sur ça.
09:35La prochaine étape
09:36de cette séquence,
09:37c'est non seulement
09:37le temps de parole
09:38des politiques,
09:39mais ça va être
09:39le fichage des éditorialistes,
09:41le fichage des invités,
09:42le fichage des journalistes.
09:44Il y aura le registre officiel
09:45détenu par l'ARCOM
09:47ou par d'autres,
09:48des gens en fonction
09:48de l'idéologie
09:49qu'on leur prête,
09:50du parti pour lequel
09:51on croit qu'ils peuvent voter.
09:53Et les gens seront ainsi fichés.
09:54Donc, il y aura
09:54le grand fichier national
09:56des contrevenants idéologiques,
09:58des délinquants idéologiques,
09:59de ceux qui pensent mal
10:00et de ceux qui pensent bien.
10:02Ce grand fichage
10:03de l'information,
10:04ça revient de mes vieilles obsessions
10:05dont je témoigne encore ici.
10:06C'est une stasification
10:08portée par l'ARCOM
10:09qui apparemment
10:10devrait nous éclairer.
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