00:00Et je passe la parole à Gaïd Pitrou qui est directrice de la Cinémathèque de Bretagne.
00:16Bonjour à toutes et à tous, merci beaucoup Clotilde de m'avoir invitée et puis d'avoir
00:21porté ton regard sur les archives audiovisuelles qui sont un peu loin d'ici puisqu'elles
00:27sont à Brest. Et donc avant de vous parler des liens entre justement les archives audiovisuelles,
00:36les films qui ont été produits dans le cadre des expéditions polaires, je vais juste vous
00:40présenter la Cinémathèque de Bretagne. Je ne sais pas si certains d'entre vous la connaissent.
00:45Elle se situe à Brest. C'est une cinémathèque, ce qu'on appelle une cinémathèque territoriale
00:51qui est née vraiment dans toute la mouvance de l'éducation populaire et qui a eu un rôle
00:58pionnier en tout cas pour la Cinémathèque de Bretagne dans la collecte des films amateurs
01:03mais aussi des films professionnels produits et réalisés en région. Donc c'est une
01:07association qui a des missions d'intérêt général et qui va fêter ses 40 ans en 2026.
01:14C'est une grande dame déjà. L'équipe n'est pas très importante puisqu'on est 12 salariés
01:22et notre mission porte sur la Bretagne historique puisque nous collectons tous les films qui
01:27sont aussi produits et réalisés en Loire-Atlantique au sein justement des archives départementales
01:34de Loire-Atlantique. Donc là aussi, depuis plus de 20 ans, il y a comme une délégation
01:40de service public qui est faite à la Cinémathèque de Bretagne pour pouvoir collecter cette mémoire
01:47filmique du territoire de Loire-Atlantique. Mais le numérique, ça va aussi quand même.
01:56Donc voilà, nos missions, c'est un peu comme des missions de toute institution archivistique,
02:03c'est-à-dire qu'on collecte, on sauvegarde, on conserve et on valorise. Et c'est ces missions
02:10qui sont des missions régionales pour nous puisque nous avons aussi une mission de dépôt
02:15régional. Et voilà. Donc, je veux bien que tu le fasses, excuse-moi. Et voilà, juste pour
02:24vous dire aussi que c'est une collection qui a cette particularité d'être au croisement
02:29des mémoires intimes des familles et d'une mémoire collective puisque tous ces films
02:36qui sont conservés sont aussi des films produits au sein des familles, donc des films de famille
02:41ou des films amateurs qui sont réalisés, qui ont été réalisés ou qui continuent
02:45à être réalisés dans des cinémas clubs. Et aujourd'hui, on a plus de 60 000 supports
02:54qu'on conserve dans nos réserves, ce qui représente près de 40 000 films avec plus
03:00de 2 000 personnes qui ont déposé, institutions ou personnes, ça on l'exposera tout à l'heure.
03:07Et donc, le plus ancien des films que nous conservons date de 1910. Et bien sûr, nous conservons
03:12aussi du nativement numérique dans le cadre notamment du dépôt régional que nous avons
03:16avec la région Bretagne. Donc, tous les films sont représentés. Voilà, je ne vais pas
03:21vous faire le détail, mais tous les films sont représentés, ce qui est assez exceptionnel
03:27et intriguant peut-être. En tout cas, quand je suis arrivée il y a 5 ans à la cinémathèque,
03:31j'ai été tout de suite très étonnée de voir qu'on avait beaucoup de films de chercheurs.
03:35Je ne voudrais pas trop le dire. Mais voilà, il y a beaucoup. Il y a aussi des chercheurs
03:40qui ont des films ethnographiques qui sont déposés chez nous parce que, comme on l'évoquait
03:47tout à l'heure, beaucoup de chercheurs aussi utilisaient leurs propres deniers pour
03:51s'acheter une caméra, pour filmer leur terrain. Et donc, ils ont choisi aussi de déposer
03:57leurs films à la cinémathèque de Bretagne. Alors, pourquoi la cinémathèque de Bretagne
04:04et donc les fonds des EPF se retrouvent ensemble à collaborer ? D'abord, il faut peut-être
04:11rappeler, vous avez peut-être évoqué ça ce matin, c'est que dès le début de la création
04:17des expéditions polaires françaises, dès 1947, la place du cinéma et des photographies
04:23était vraiment intégrée dans le projet puisqu'il y avait même des lignes financières
04:29dédiées pour tourner sur place. Et c'était pour tourner, bien sûr, pour collecter une mémoire,
04:37des témoignages d'une vie quotidienne, des outils qui étaient mis en place, mais
04:46également pour faire participer le grand public à ces expéditions. Il y avait vraiment
04:50cette volonté qui était très importante et Lyotard avait même bien explicité dans
04:57un article qu'il voulait faire participer un large public sentimentalement et esthétiquement.
05:03Et c'est vrai que ces films, je ne sais pas si vous les connaissez certainement, c'est
05:08des films qui sont bien sûr très fascinants et qui provoquent énormément d'émotions
05:13puisque les visages sont là, comme tout film d'archives, et on n'a pas toujours le
05:22son, donc on imagine aussi ce qui se passe sans le son. Et donc il y a une forme vraiment
05:28d'intimité des expéditions qui est transmise auprès du grand public avec, lors de la première
05:34expédition, donc les deux grands films les plus connus qui sont Terre Adélie, donc de
05:39Mario Marrette qui a tourné en 35 mm et Images d'un été aussi de Mario Marrette qui a pu
05:47bénéficier d'une diffusion à grande échelle puisqu'il y avait aussi un contrat avec une
05:54société de production qui s'appelle Amorphilement. Donc il y a une complexité, ça vous la connaissez
06:00bien et vous allez devoir aussi la construire lorsque vous allez recevoir ces archives.
06:08Et donc ces fonds audiovisuels sont bien sûr exceptionnels à deux niveaux, enfin de deux
06:14points de vue, du point de vue aussi de l'histoire du cinéma puisqu'ils représentent un genre,
06:17en tout cas une manière de filmer. On peut parler du genre des expéditions, enfin des films
06:22d'expéditions, mais ils représentent bien sûr aussi des sources précieuses pour
06:27l'histoire, pour l'histoire de l'environnement, pour l'évolution des paysages, pour l'histoire
06:35de la science. Donc on est vraiment sur cette double dimension et ce qui en fait d'autant
06:40plus un fond fascinant. Alors pourquoi les films à la cinémathèque ? Il y a une proximité
06:46aussi géographique avec l'Institut Polaire qui est venue à Plousané à côté de Brest.
06:52Et donc naturellement, l'Institut Polaire a déposé ses films à la cinémathèque.
06:58Alors je vous prie de m'excuser parce qu'il y a beaucoup de lacunes en fait au sein de la
07:00cinémathèque concernant l'histoire des dépôts puisque c'est une histoire qui a beaucoup
07:06été, qui est beaucoup une histoire qui relève de la mémoire orale. On a une documentation
07:12qui est plutôt liée au contrat et donc qui est moins liée à une documentation écrite
07:18par les anciennes équipes qui étaient dans une forme de collecte très foisonnante.
07:25Et pareil, donc je voulais vous citer le premier contrat qu'on a eu qui date de 2013 avec
07:31les expéditions polaires françaises, donc l'association, qui cite en préambule que
07:37les expéditions polaires françaises considérant que le départ de leur siège social historique
07:42ne permet plus de gérer elles-mêmes leur patrimoine, héritées de 60 années d'activité,
07:47ont cherché un partenaire susceptible d'accomplir cette tâche. Donc voilà, la cinémathèque
07:53de Bretagne est là identifiée comme un partenaire qui possède les compétences, la technicité,
08:02les espaces puisque la cinémathèque de Brest est installée depuis 1995 dans des locaux
08:08avec des réserves et puis aussi avec des outils de numérisation et une compétence de
08:13traitement d'archives filmiques un peu complexes qui sont justement les archives amateurs qui
08:18ne sont pas des archives professionnelles, qui sont aussi des archives avec des supports
08:26qui peuvent être de différents types, avec des éléments intermédiaires, avec une archéologie
08:32qu'il faut connaître pour pouvoir reconstituer un film. Et donc c'est aussi pour cette raison.
08:39Puis il y avait certainement une économie de moyens, je pense, puisque un dépôt à la
08:43cinémathèque, enfin quand on dépose un film à la cinémathèque de Bretagne, en contrepartie,
08:48la cinémathèque numérise les films. Donc forcément, voilà. Et en contrepartie, la
08:54numérisation de la cinémathèque vend des images, un peu comme Lina le fait, pour des documentaires,
09:00pour des œuvres de fiction, pour des expositions. Donc voilà, c'était aussi une économie,
09:05on va dire, de la pauvreté, mais en tout cas une économie qui permettait un peu du troc,
09:11on peut dire ça aussi. Et donc c'est pour cette raison que tout a fonctionné de cette
09:19façon-là depuis plus de 15 ans, avec des dépôts successifs qui ont continué, puisqu'on a eu un
09:24deuxième dépôt en 2018. Avec cette fois-ci, donc c'est l'Institut Polaire qui a signé un
09:29contrat. Et c'est vrai que la complexité aussi de l'évolution administrative des EPF,
09:38de l'Institut Polaire, a fait que ce sont des choses qui n'ont pas été intégrées, on va dire,
09:44dans l'histoire des fonds audiovisuels. En tout cas, ça n'apparaît pas quand on consulte les
09:50dossiers de déposants qu'on a, puisque c'est vraiment des archives qui sont des unités
09:55intellectuelles et administratives propres, on va dire ça comme ça, et qui sont peut-être un peu
10:01à la marge. Et d'ailleurs, c'est ce que disait tout à l'heure notre collègue de Rennes par rapport
10:05aux archives audiovisuelles. Elles ne faisaient pas partie de votre inventaire. Voilà, donc c'était
10:11quelque chose... Parce qu'elles vous semblaient trop volumineuses ou peut-être... Vous n'avez pas eu le temps.
10:16Voilà. Donc voilà, c'est toujours une question de temps aussi. Et puis c'est vrai que traiter des archives
10:20audiovisuelles, on doit forcément aussi passer par un visionnage, donc un visionnage qui est un peu
10:27archaïque, ou par une numérisation pour pouvoir comprendre de quoi les images parlent.
10:35Et puis un troisième dépôt en 2023, donc, et sachez, et Anatole peut-être en parlera tout à l'heure,
10:40qu'il y a des films qui ont été retrouvés tout récemment, donc la semaine dernière, des films qui ont l'air
10:45vraiment très intéressants, puisqu'ils datent de 1954, et qui ont été retrouvés à l'Institut Polaire
10:51dans la bibliothèque. Donc il reste encore, voilà, des films à collecter, en tout cas à identifier.
10:57Ah oui. Ah oui, il reste plus que cinq minutes. Alors donc pour... Je vais vous présenter vraiment
11:02un état des lieux assez sommaire, mais qui vous permet aussi de... qui vous permettra d'identifier
11:08la volumétrie, mais aussi la diversité de ces fonds. Donc il y a le premier... le premier dépôt,
11:15on va dire que c'est le même fond, mais le premier dépôt que nous, on appelle fonds des expéditions
11:19polaires françaises, qui est à numéro 1391, donc possède 187 titres et comprend 242 supports matériels.
11:29Et parmi ces supports matériels, on a 175 pellicules 16 mm et 28 pellicules 35 mm. Il y a aussi du son.
11:37Donc dans la salle, Jean-Baptiste Masson, qui est juste là, qui est chercheur associé
11:41à la Cinémathèque, a numérisé tout le fond sonore et a pu extraire ce qu'on pourrait
11:47appeler un journal sonore aussi de Paul-Émile Victor, qui sont des archives assez rares,
11:52inconnues et exceptionnelles, qu'il faudra certainement mettre en valeur aussi.
11:58On a aussi des éléments vidéo. Alors c'est pareil, les dates me semblent un peu...
12:02En fait, on a eu des dépôts successifs qui ont été inventoriés dans les deux unités d'inventaire
12:14que sont le fonds des expéditions polaires et le fonds de l'Institut polaire français.
12:19Et pour le second fonds, le 1594, nous avons 203 titres avec 343 supports matériels.
12:28Donc là aussi, essentiellement des films 16 mm et 2 pellicules 35 mm, avec encore une fois
12:36des bandes sons et beaucoup de vidéos qui ont été d'ailleurs numérisées tout récemment.
12:41Donc on a des éléments... C'est la diversité, mais comme un fonds, on va dire papier, on a des diversités de supports
12:50avec des éléments qu'il faut reconstituer entre eux pour former un film, avec des éléments originaux,
12:57des copies positives, des éléments de montage ou encore des chutes.
13:01Donc tout n'est pas forcément numérisé et pour reconstituer un film, quand on n'a pas une copie définitive,
13:09eh bien c'est aussi ce travail de couture entre bobines qu'il faut accomplir.
13:16Alors je vais peut-être... Je vais quand même vous montrer quelques images.
13:21Donc là, c'est un florilège d'images avec justement les différentes typologies de supports argentiques.
13:29Donc là, on est sur un négatif.
13:31Comment ? Oui, il n'y a pas de son.
13:34Pour certains.
14:01Donc là, l'image est de très bonne qualité.
14:17C'est un inversible.
14:18C'est un inversible.
14:21C'est un inversible.
14:22Merci.
14:52Alors voilà différents supports, qui a la numérisation, vous le voyez, la numérisation démontre qu'il y a justement des qualités différentes.
15:19Et puis aussi une conservation qui est plus ou moins, une conservation préventive qui a permis de préserver les images.
15:34Et donc c'est ce qu'on voulait aussi.
15:37Juste pour vous dire, le traitement technique des archives, justement, passe par une numérisation qui est là pour conserver des films
15:48qui souvent, au travers du temps, vont s'abîmer, on va dire ça comme ça, avec, comme vous voyez, un virage magenta.
15:59Vous voyez la différence entre les deux images, qu'on peut certes récupérer grâce à de l'étalonnage, mais qui sont difficilement récupérables dans le temps.
16:09Et j'accélère, parce que, voilà.
16:13Et donc je voulais aussi vous aborder les problématiques liées au traitement documentaire.
16:17Donc ce que je vous expliquais, c'est qu'on a peu d'archives écrites, ou en tout cas de documentations associées aux films,
16:25et pour cause, puisqu'elles sont aux archives nationales.
16:27Et donc c'est là aussi où il y a un enjeu fort aujourd'hui pour nous de transférer les archives audiovisuelles aux archives nationales,
16:39pour permettre justement ces croisements entre tous les rapports des expéditions polaires,
16:44pour essayer de comprendre justement quelles étaient les feuilles de route qui étaient données aux cinéastes,
16:50qu'elles étaient aussi, s'il y avait des scénarios, en tout cas des objectifs qui étaient donnés par rapport aux images qui étaient tournées.
16:59Et enfin, ce que je voulais vous signaler, c'est qu'il y a une thèse qui a été faite par un étudiant qui est assez remarquable,
17:07puisqu'il a réussi justement à croiser les archives administratives des expéditions polaires qui sont conservées aux archives nationales,
17:15et les films conservées à la Cinémathèque de Bretagne, afin justement d'émettre à la fois des hypothèses,
17:23mais aussi de procéder à une analyse cinéphilique de ce que c'est le genre des films d'expédition.
17:33Et voilà, je vous invite à consulter cette thèse.
17:37Et enfin, l'Avenir, c'est ça, c'est un travail autour d'un versement aux archives nationales,
17:44pour aussi respecter l'intégrité d'un fonds, pour faire en sorte que ces archives audiovisuelles retrouvent aussi
17:50un peu leur colonne vertébrale archivistique et leur colonne vertébrale papier,
18:01puisqu'il y a vraiment des liens organiques à faire entre ces deux sources qui sont essentielles
18:07pour bien comprendre le quotidien de ces expéditions polaires.
18:13J'en ai fini, pardon, j'ai été un peu rapide sur la fin.
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